Obrázky na stránke
PDF
ePub

tions comme la vie, qui s'éteindroit sans elles, transmises comme la pensée, puisqu'elles ne sont que la pensée même reçue primitivement et perpétuée par la parole. Se roidir contre cette grande loi, c'est lutter contre l'existence; il faut, pour s'en affranchir, reculer jusqu'au néant. Créatures superbes qui dites, Nous ne croirons pas, descendez donc. Et nous, guidés par la lumière que repousse votre orgueil, nous nous élèverons jusque dans le sein du souverain Etre, et là encore nous retrouverons la loi qui vous humilie; car la vérité n'est en Dieu même que l'éternelle raison manifestée par le témoignage du Verbe, et la certitude divine n'est qu'une foi infinie en ce témoignage éternellement rendu et éternellement cru; et la religion, qui nous unit à Dieu en nous faisant participer à sa foi et à son amour, n'est encore, dans ses dogmes, que ce témoignage traduit en notre langue par le Verbe lui-même revêtu de notre nature, ou la manifestation sensible de la raison universelle; en sorte que si nous voulons y être attentifs, nous comprendrons que Dieu, avec sa toutepuissance, ne nous pouvoit donner une plus haute certitude des vérités que son fils est venu nous révéler, puisqu'il ne les connoît, ou ne se connoît lui-même que par une semblable révélation.

Mais l'ordre des idées ne nous permet pas en ce

moment d'arrêter nos regards sur ces magnifiques harmonies, qui ravissent de joie l'intelligence. Avant d'admirer par quels moyens la religion a été établie et se conserve, nous devons prouver qu'il en existe nécessairement une véritable. Cette tâche sera facile, maintenant qu'ayant placé la raison humaine sur sa base, nous savons comment on peut reconnoître avec certitude la vérité. Nous ne la demanderons pas à l'esprit de l'homme, mais à la raison de la société. Nous interrogerons les croyances, les traditions du genre humain, nous constaterons ses décisions; et s'il se présente un contradicteur, ouvrant devant lui deux voies, dans l'une desquelles il faut absolument marcher, la voie solitaire et ténébreuse du jugement individuel, qui aboutit au néant, et la voie sociale de l'autorité, qui conduit à la vie ou à Dieu même, pour toute réponse nous lui dirons : Choisissez.

CHAPITRE XVI.

Qu'il existe une vraie Religion, qu'il n'en existe qu'une seule, et qu'elle est absolument nécessaire au salut.

[ocr errors]

ON a, depuis soixante ans, assez plaidé la cause du désespoir et de la mort : j'entreprends de défendre celle de l'espérance. Quelque chose me presse d'élever la voix, et d'appeler mon siècle en jugement. Je suis las d'entendre répéter à l'homme : Tu n'as rien à craindre, rien à attendre, et tu ne dois rien qu'à toi. Il le croiroit peutêtre enfin; peut-être qu'oubliant sa noble origine, il en viendroit jusqu'à se regarder en effet comme une masse organisée qui reçoit l'esprit de tout ce qui l'environne et de ses besoins (*); jusqu'à dire à la pouriture, vous étes ma mère, et aux vers, vous êtes mes frères et mes sœurs (1); peut-être qu'il se persuaderoit réellement être affranchi de

(*) C'est ainsi que Saint-Lambert définit l'homme. (1) Putredini dixi: Pater meus es; mater mea, et sorer mea vernibus. Job. XVII, 14.

tout devoir envers son auteur; peut-être que ses désirs mêmes s'arrêteroient aux portes du tombeau, et que, satisfait d'une frêle supériorité sur les brutes, passant comme elles sans retour, il s'honoreroit de tenir le sceptre du néant. Je veux le briser dans sa main. Qu'il apprenne ce qu'il est, qu'il s'instruise de sa grandeur, aussi-bien que de sa dépendance. On s'est efforcé d'en détruire les titres; vaine tentative, ils subsistent: on les lui montrera. Ils sont écrits dans sa nature même ; tous les siècles les y ont lus. Je les citerai à comparoître, et on les entendra proclamer l'existence d'une vraie Religion. Qui osera les démentir, et opposer à leur témoignage ses pensées d'un jour? Nous verrons qui l'osera, quand tout à l'heure, réveillant les générations éteintes, et convoquant les peuples qui ne sont plus, ils se lèveront de leur poussière pour venir déposer en faveur des droits de Dieu et des immortels destins de l'homme.

Et pourquoi périroit-il? Qui l'a condamné? Sur quoi juge-t-on qu'il finisse d'être? Ce corps qui se décompose, ces ossemens, cette cendre, est-ce donc l'homme? Non, non, et la philosophie se hâte

se hâte trop de sceller la tombe. Qu'elle nous montre des parties distinctes dans la pensée, alors nous comprendrons qu'elle puisse se dissoudre. Elle ne l'a pas fait, elle ne le fera jamais; jamais

elle ne divisera l'idée de justice ni ne la concevra divisée en différentes portions ayant entre elles des rapports de grandeur, de forme et de distance; elle est une, ou elle n'est point. Et le désir, l'amour, la volonté, voit-on clairement que ce soient des propriétés de la matière, des modifications de l'étendue? Voit-on clairement qu'une certaine disposition d'élémens composés, produise le sentiment essentiellement simple, et qu'en mélangeant des substances inertes, il en résulte une substance active, capable de connoître, de vouloir et d'aimer (*)? Merveilleux effet de l'organisation! Cette boue que je foule aux pieds, n'attend qu'un peu de chaleur, un nouvel arrangement de ses parties, pour devenir de l'intelligence, pour embrasser les cieux, en calculer les lois; pour franchir l'espace immense, et chercher par-delà tous les mondes, non-seulement visibles, mais imaginables, un infini qui la satisfasse atome à l'étroit dans l'univers! Certes, je plains les esprits assez foibles pour croupir dans ces basses il

:

(*) L'homme, par son corps, n'existe que dans le présent; il n'existe, par son esprit, que dans le passé et dans l'avenir; car le présent est insaisissable à la pensée. Le mode d'existence du corps et de l'esprit diffère donc essentiellement; l'esprit et le corps sont donc d'une nature essentiellement diverse.

« PredošláPokračovať »