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S XII.

LE SAGE HONORE SES PARENS.

Celui qui n'honore point les auteurs de ses jours est indigne de vivre, par la même raison que l'impie qui outrage la Divinité ne mérite pas de porter le nom d'homme. Qui pourrons-nous aimer si ce n'est ceux à qui nous devons tout ? qui voudrait nous aimer nous-mêmes si nous n'avons ni amour, ni respect pour eux ? quelle hideuse ingratitude que celle de les abandonner!.... Dans leurs erreurs nous devons les plaindre ou les éclairer; dans leurs travers et dans leurs fautes ce n'est point à nous à les juger : nous devons nous attacher à eux tels qu'ils sont et ne les quitter qu'à la mort, comme la feuille ne se détache de l'arbre que lorsqu'elle est desséchée ou que la main du temps a brisé ses rameaux. Honorer ses parens est le premier, le plus saint de tous les devoirs de l'homme; il est le principe de tous les autres ; et le sage les remplit tous,

S XIII.

LE SAGE PRENDRA UNE FEMME.

Le sage seul peut goûter la paix et le bonheur dans les chaînes de l'hymenée le célibat serait même pour lui un

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isolement insupportable, parce qu'il ne peut se procurer toutes les distractions de l'homme du monde, ni tous les dédommagemens que celui-ci peut tirer de la société des femmes en général. Sous ces rapports, le célibat pourrait devenir pour le sage une source de gênes, de tourmens et d'erreurs; parce que, conséquemment avec sa morale, il ne peut céder au sentiment du véritable amour et suivre les lois de la nature, s'il n'est en même temps bon époux et bon père.

S XIV.

LE SAGE N'OPINE POINT.

Si parfois le sage émet son opinion dans un conseil ou dans uue délibération quelconque, il se garde bien de la donner comme une décision irrévocable; aussi est-il toujours infaillible, et c'est la seule manière dont il soit permis à l'homme de le devenir. Le sage n'opine point parce qu'il sait combien l'intelligence humaine est faible, variable, bornée et sujette à erreurs; parce qu'il se méfie de ses propres forces autant que de la justice des hommes. Lorsque l'intérêt de l'ordre général, concilié avec le sentiment qu'il peut avoir de ses capacités ou de son expérience, l'engage à hasarder son opinion, il le fait sans suffisance, sans ostentation, sans pédantisme, et surtout, sans but d'intérêt personnel : il propose quelquefois, mais ne décide jamais. D'un autre côté les ridicules propositions du fat, les fausses insinuations du méchant, les travers de l'ignorance, les folies de l'orgueil ne l'indi

gnent point; il les plaint ou les méprise. Lui qui connaît et sait apprécier à leur juste valeur toutes les vanités de la terre; lui qui s'est lui-même égaré tant de fois dans ses recherches avant d'arriver à son but et pour acquérir quelques lumières incertaines dont il a tant de peine encore à n'être pas ébloui, et qui le sait; lui qui n'ignore point que les causes de tous les événemens de la vie dépendent beaucoup plus des circonstances que de leurs principes; que ce qui offrait d'abord les plus belles apparences de réussite mène souvent à de fâcheux résultats, comme les affaires et les actions dont on a redouté l'issue, sont plus souvent encore celles qui font triompher leurs auteurs; lui, enfin, qui, à son idée, n'est jamais assez clairvoyant dans sa propre cause et qui marche pas à pas dans le chemin glissant de la vie ; comment se prononcerait-il pour ou contre dans les incertitudes des autres ? il évite le mal, il cherche partout le bien, et attend de pied ferme l'arrêt du sort.

S XV.

LE SAGE SEUL EST LIBRE.

Qu'est-ce que la liberté? d'un côté, c'est moins, ainsi que Perse nous l'a fort bien prouvé, le pouvoir de faire tout ce que l'on veut, que la force de ne point faire ce que la justice ou la raison nous défendent : c'est le triomphe de la vertu sur les passions. D'un autre côté, ce n'est point cette faculté abusive et usurpatrice que l'homme mal intentionné sait tirer de l'anarchie ou des guerres civiles, laquelle ne se nourrit

que de sang et de larmes, et ne place sa gloire que dans le désordre et le crime; c'est ce droit divin et inné que la nature a donné à tous les peuples, c'est cette garantié de leur dignité qui met un frein aux abus et fait trembler les tyrans : c'est le bouclier de l'homme. Dans l'un et l'autre cas, ces deux libertes ne se ressemblent pas plus entr'elles que le faux et le vrai, l'artifice et la bonne foi, le désordre et la justice, le vice et la vertu, etc. etc. Elles présentent même des caractères contradictoires auxquels l'abus des langues et la dégénération des principes ont pu seuls donner le même sens. Pour la première, le sage la connaît, il l'aime, il l'admire et la met en pratique, parce qu'il en retire les fruits les plus doux ; à l'égard de la seconde, il se contente de n'être point esclave, parce qu'il sait que ses moindres écarts mènent à la licence, et que la licence mène à l'anarchie. Le sage ne doit rien de son bonheur qu'à lui-même et à sa morale : le sage seul est libre.

S XVI.

LE SAGE SEUL EST ROI.

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Le véritable roi n'est pas uniquement celui qui sait gou verner ses sujets; il faut qu'il sache aussi se gouverner luimême c'est-à-dire que, pour mériter parmi les hommes le titre de souverain, il faut, avant tout, avoir appris à bien diriger ses propres actions; et que, pour pouvoir se placer dignement au-dessus de ses semblables, il faut savoir exercer son empire sur ses passions. Quelles que soient les

injustices de ses tyrans, le sage demeure ferme et inébranlable au poste où il a été placé par le sort. Les condamnations, l'exil, les fers, la mort même, rien ne l'effraie: il est audessus de tout. Il connaît profondément la nature des choses, et ne compte pas plus sur la justice des hommes qu'il ne tient à une vie éphémère, semée d'angoisses et de persécutions que la vertu seule peut adoucir, et dont il voit sans peur le terme s'approcher. Un roi n'est que l'instrument de la nécessité ou de la force, pour diriger et administrer les affaires d'une société d'hommes dont il brave ou endure les caprices. Un sage est le flambeau qui les éclaire, lequel flambeau n'allume jamais les brandons de la discorde, et ne s'éteint qu'au souffle de Dieu.

S XVII.

LE SAGE SEUL EST APTE A EXERCER LA MAGISTRATURE.

La balance de la justicè ne saurait trouver son parfait équilibre en d'autres mains que celles du sage. Qui, en effet, pour la tenir pourrait-on mettre dignement à sa place? le sot, l'insensé, le fourbe et le méchant doivent être exclus; et ils forment entr'eux l'immense majorité de la population de la terre. Où irons-nous donc chercher nos magistrats? parmi les grands? ils aiment trop la flatterie; ils seraient corrompus par elle. Serait-ce parmi les riches? ils tiennent trop à l'or et aux plaisirs pour avoir une conscience pure et franche; de plus, ils ne sont, en général, pas assez versés dans les sciences, ni assez accoutumés aux méditations pour bien approfondir les lois. Serait-ce parmi les savans? ils sont trop

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