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cette même raison, tombe, s'il est conséquent, dans un scepticisme universel.

Or cette proposition, identiquement la même que la précédente, ne saurait être vraie dans notre premier volume, et fausse dans le second. Attaquer celui-ci, c'est donc attaquer l'ouvrage tout entier, ou se contredire manifestement.

En combattant les trois grands systèmes d'indifférence ou d'incrédulité, nous nous sommes attaché surtout à prouver, par l'exemple de tous les incrédules et des hérétiques *, que l'homme qui prend son jugement privé, sa raison individuelle, pour règle de ses croyances, est forcé, de proche en proche, de nier toutes les vérités. Dans le XIII pitre, envisageant ce principe d'erreur d'une manière plus générale, ce n'est pas seulement de l'hérétique, du déiste et de l'athée que nous nous occupons, mais des philosophes même religieux, qui prétendent que chaque homme, considéré individuellement et

cha

* Les déistes et les athées sont les hérétiques du genre humain, comme les hérétiques sont les incrédules de r'Église.

sans relation avec ses semblables, doit trouver en soi la certitude 1. Nous montrons que l'homme ainsi isolé ne peut être rationnellement certain d'aucune chose, et que tous les hommes ensemble ne sauraient acquérir la certitude rationnelle, ou rien démontrer pleinement avant d'avoir trouvé Dieu.

Nous devons avouer qu'il manque, dans cette partie de notre ouvrage, une ou deux phrases qui auroient prévenu la plupart des difficultés qu'on a faites. Nous avons négligé d'avertir que la première partie de notre XIII chapitre n'étoit qu'une analyse sommaire des principaux systèmes de philosophie ; et il est arrivé de là qu'en croyant nous attaquer on attaque, non pas nous, mais les philosophes que nous avions combattus, en montrant, ce que nous venons encore de prouver, qu'ils ne donnent à l'homme, 1° aucun principe de certitude; 2o aucune règle de ses jugemens.

En effet, rappelons-nous que tous les systèmes de philosophie, de quelque manière

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qu'on les modifie et qu'on les combine, se réduisent à trois, relatifs chacun à l'un des moyens que nous avons de connoître. En un mot, dès qu'on veut que l'homme individuel trouve en soi la certitude, il faut nécessairement qu'il y parvienne, soit par les sens, soit par le sentiment *, soit par le raisonne

ment.

* Les hommes, comme nous l'avons prouvé, ont le sentiment de Dieu (Essai, tom. II, p. 51 et suiv.), le sentiment de leur propre existence, le sentiment du bien et du mal moral, etc. Il y a donc des vérités de sentiment; et ces vérités on les reconnoît, ainsi que les vérités de sensation et de raisonnement, par le témoignage qui nous apprend que les autres hommes sont affectés des mêmes sentimens que nous et de la même façon que nous. On ne doit pas confondre le sentiment avec le sens intime. Le sens intime est la conscience de ce que nous éprouvons en nous-mêmes. Ainsi nous avons la conscience de nos sensations, de nos sentimens, de nos jugemens, en un mot, de uos perceptions, quelles qu'elles soient. Le sens intime n'est donc que l'impuissance de douter, ou la croyance invincible que nous sommes affectés de telle ou telle manière. Il nous instruit de ce qui se passe en nous; il nous apprend, par exemple, que nous formons tel jugement, que telle proposition nous paroît évidente, etc.; mais il n'est point une preuve certaine que ce jugement soit vrai

Nous faisons voir comment les philosophes qui mettent le principe de certitude dans les sens et dans le sentiment sont conduits au scepticisme, et ce que nous disons à ce sujet n'est que le résumé de ce qu'ils disent euxmêmes. Assurément, il ne dépend pas de nous d'empêcher que le matérialisme et l'idéalisme soient des systèmes sceptiques; et quand nous avons voulu montrer qu'en effet ils aboutissent au scepticisme absolu, et qu'ils sont par conséquent aussi absurdes que dangereux, il a bien fallu en donner la preuve, et citer les aveux des philosophes qui ont soutenu les systèmes que nous combattious.

Quant à ceux qui placent dans le raisonne-ment le principe de certitude, on vient de voir que nous n'avons rien avancé dont ils ne conviennent, et que, malgré la licence qu'ils se donnent d'affirmer, pour nous servir d'une expression de Bacon, leur système n'est pas moins sceptique que les deux autres. Il est

et que cette proposition soit réellement évidente: autrement il seroit aussi impossible que l'homme se trompât jamais, qu'il est impossible qu'il ne sente pas ce qu'il

sent.

extraordinaire qu'on nous ait nous--mêmes accusés de scepticisme, uniquement parce que nous montrons le danger de leur doctrine, et que nous la rejetons.

Ainsi, quelques personnes ont été choquées d'un passage de notre second volume, où nous disons: « Quand donc Descartes, essayant de « sortir de son doute méthodique, établit cette « proposition, je pense, donc je suis, il fran<«< chit un abîme immense, et pose au milieu « des airs la première pierre de l'édifice qu'il « entreprend d'élever ». Ces personnes, assurément, ne se doutoient guère que Descartes lui-même avoue, en termes formels, tout ce que nous disons dans ce passage; car, sans parler ici de plusieurs autres défauts que nous avons fait remarquer dans sa célèbre proposition, il reconnoît que sa certitude dépend de la certitude de l'existence de Dieu, et de l'impossibilité qu'il nous trompe. Quiconque dit, je suis, avant d'être certain que Dieu est, et qu'il ne peut nous tromper, affirme donc sans aucune raison d'affirmer, ou pose au milieu des airs la première pierre de

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