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voir que Dieu est. C'est demander trop, ou trop peu.

Si l'on entend parler d'une certitude rationnelle, c'est-à-dire, d'une certitude telle, que la raison n'aperçoive aucune possibilité que ce qui lui paroît vrai soit faux, c'est trop demander; car Descartes lui-même ne demande pas davantage. Je suis, j'existe ; voilà sa première proposition, et il est obligé de convenir qu'il n'en a pas la certitude rationnelle.

Si l'on entend par certitude la nécessité invincible de croire, ou l'impuissance absolue de douter, c'est demander trop peu; car il y a mille choses dont il est aussi impossible à

'Les Méditat. métaphysiques de Réné Descartes; Médit. II, p. 12. Paris, 1673.

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Voyez le chap. IIIe de cette Défense. Il n'y a que Dieu qui puisse dire, en se considérant lui-même, Ego sum, je suis; parce qu'il n'y a que Dieu qui trouve en luimême la cause de son existence, ou qui existe nécessairement et la philosophie, qui veut que l'homme commence par cette parole Ego sum, et qui en fait la base de la certitude, suppose implicitement que l'homme est indépendant d'une cause première, et contient le germe de l'athéisme.

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l'homme de douter, que de sa propre exis

tence.

D'ailleurs, la certitude rationnelle de notre existence isolée supposeroit comme également certaine la rectitude de notre raison, et même son infaillibilité; car affirmer qu'on est, c'est énoncer un jugement, et s'il étoit possible qu'on se trompât en disant J'existe, on ne seroit pas rationnellement certain de son existence.

Soutenir que chaque homme a en soimême la certitude rationnelle de son existence, c'est donc déclarer qu'on adopte la philosophie cartésienne avec toutes ses conséquences; c'est se rejeter dans les inconvéniens, les contradictions, les absurdités, inhérentes à cette philosophie aussi dangereuse qu'elle est niaise.

IV. D'autres personnes, en convenant que la méthode que nous employons pour combattre les incrédules est bonne et sûre, nous ont reproché d'avoir attaqué la méthode philosophique; elles voudroient que toutes deux subsistassent ensemble, et qu'on établit l'une sans ébranler l'autre.

Nous prions ces personnes d'observer, pour

ce qui nous concerne particulièrement, qu'à chaque page du premier volume de l'Essai sur l'Indifférence nous prouvons que la philosophie, qui ne donne à l'homme d'autres règles de ses croyances que sa raison individuelle, le conduit inévitablement d'erreurs en erreurs au scepticisme universel. Si donc nous convenions, même implicitement, dans notre second volume, que le principe fondamental de cette philosophie est vrai, ce seroit très clairement convenir, ou que nous avons déraisonné d'un bout à l'autre de notre premier volume, ou que le scepticisme est un état raisonnable, ou enfin que, deux principes également vrais conduisant l'un au doute et l'autre à la foi, l'un à l'incrédulité et l'autre à la religion, il n'existe pour l'homme ni vérité ni erreur, et que la raison n'est qu'une chimère.

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Et comment deux méthodes opposées, dont l'une n'est au fond que la méthode catholique, et l'autre la méthode hérétique, pourroientelles être également bonnes également vraies? Quel avantage trouveroit-on à dire aux hommes : « Vous avez deux moyens d'ar« river à la vérité; l'un est de consulter votre

Suge de ce qu'il doit croire, et la doctrine qui Foblige à régler ses croyances sur les décisions de Fautorité, en plaçant la certitude dans la raison générale.

V. On a paru craindre que cette doctrine ne portât quelque atteinte aux preuves que l'on a données jusqu'ici de la vérité de la religion chrétienne; mais nous avons déjà fait remarquer que ces preuves reposent toutes sur le témoignage, et sont par conséquent des preuves d'autorité. Oui, dit-on; mais ce témoignage n'est pas universel; le genre humain tout entier n'atteste pas les miracles de Jésus-Christ et des apôtres, etc. Assurément, rien de plus vrai; mais où avons-nous dit que le témoignage du genre humain étoit nécessaire pour qu'un fait quelconque fût certain? En parlant de nos premiers parens, dont le témoignage, conservé par la tradition, atteste l'existence de Dieu, n'avons-nous pas au contraire observé « que le nombre de témoignages « requis pour produire une certitude com« plète, dépendant de mille circonstances va<< riables, étoit déterminé par le consente<<ment commun »? Il s'agit donc unique

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Essai, tom. II, p. 49. Vid. etiam, p. 39.

ment de savoir si les faits évangéliques sont attestés de telle sorte, qu'on ne puisse refuser de les croire sans blesser le sens commun; il s'agit de savoir si partout les hommes n'admettent pas comme certains les faits attestés comme ceux de l'Évangile ; il s'agit, en un mot, de prouver, ce que prouvent parfaitement les apologistes de la religion, qu'il faut admettre ces faits, où renoncer à toute certitude historique.

Au fond, le principe d'autorité une fois econnu, qu'avons-nous à faire? Montrer que le christianisme a pour lui la plus grande autorité. Or, c'est précisément ce que font tous les défenseurs de la religion chrétienne. Quelle autre religion réunit comme elle les trois grands caractères de l'antiquité, de la perpétuité, de l'universalité? Elle ne les perd pas plus, parce qu'il y a eu de fausses religions, que l'Église ne les perd, parce qu'il y a eu de fausses églises; et il n'est pas un noment dans la durée des siècles où la vraie religion n'ait pu être reconnue aux mêmes marques par lesquelles on reconnoît la vraie Eglise, ou la société dépositaire de la vraie religion.

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