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ô vous qui aspirez à la connoître ! Hâtez-vous de refaire les philosophies, de refaire la logique, de refaire votre intelligence; car, tant qu'elle restera telle que Dieu l'a faite, elle est incapable de vérité. Si ce n'est pas là le scepticisme, qu'est-ce donc ? Il n'importe que Bacon affirme ou non certaines choses; la question est de savoir s'il a droit, en vertu de ses principes, d'affirmer quoi que ce soit. Nous en laissons le jugement au lecteur.

Observez de plus que le rapport des sens est la base sur laquelle il établit l'édifice entier de ses connoissances. Or, de son aveu, il n'a d'autre preuve que ses sens ne le trompent pas, que sa confiance en la bonté et en la véracité de Dieu. Mais comment sait-il avec certitude que Dieu est bon, qu'il est vrai? comment est-il assuré qu'il existe? Son existence est-elle une notion innée en lui? Dès lors elle lui doit être suspecte, et ne sauroit étre admise sans une nouvelle preuve. Est-ce par le raisonnement qu'il la connoît ? Il doit y croire bien moins encore; car la logique est plus propre à établir l'erreur qu'à conduire à la vérité. Est-ce enfin ses sens qui l'en instruisent? Alors qu'il nous explique comment

ses sens, qui souvent le trompent, et qui, si Dieu n'existoit pas, pourroient le tromper toujours, lui apprennent avec certitude que Dieu est. Hélas! on voit clairement ici la vérité de ce que dit Bacon lui-même de la foiblesse de l'esprit humain abandonné à ses seules forces, sibi permissus. Ou il désespère du vrai et cesse de le chercher, ou il tourne éternellement dans un cercle sans fin; également en contradiction, soit avec la raison, s'il affirme ; soit avec la nature, s'il doute.

CHAPITRE VII.

Pascal.

Se moquer de la philosophie, c'est vraiment philosopher. Ce mot de Pascal nous apprend assez ce qu'il pensoit de cette science, si vaine dans ses principes, si variable dans ses systèmes, si désastreuse par ses effets. Nul homme ne montra jamais une plus amère pitié pour la raison humaine destituée de l'appui que la foi lui prête. Avec quel dédain il se joue de sa ridicule présomption ! comme il la fait rougir d'elle-même ! comme il lui impose silence, si elle a la hardiesse de prononcer un mot avant d'avoir dit je crois ! Ce n'est donc pas pour le combattre que nous parlons ici de Pascal; mais au contraire pour faire voir la parfaite conformité de sa doctrine avec la nôtre, sur

* Pensées de Pascal, tom. I, art. x, pag. 274. Paris, 1812.

les points où celle-ci a été attaquée. On sent bien qu'il nous faut, pour cela, citer d'assez longs passages de ce grand écrivain; mais sûrement personne ne se plaindra de l'étendue de ces citations. Il divise en deux classes tous les philosophes, ceux qui affirment, et ceux qui doutent. Voyons ce qu'il dit des uns et des autres.

«< Rien n'est plus étrange dans la nature de << l'homme que les contrariétés qu'on y dé«couvre à l'égard de toutes choses. Il est fait << pour connoître la vérité; il la desire ardem<«<<ment, il la cherche; et cependant, quand <«il tâche de la saisir, il s'éblouit et se con«< fond de telle sorte, qu'il donne sujet de « lui en disputer la possession. C'est ce qui a <«< fait naître les deux sectes de pyrrhoniens et << de dogmatistes, dont les uns ont voulu ravir <«<< à l'homme toute connoissance de la vérité, <<< et les autres tâchent de la lui assurer; mais «< chacun avec des raisons si peu vraisembla«bles, qu'elles augmentent la confusion et « l'embarras de l'homme, lorsqu'il n'a point << d'autre lumière que celle qu'il trouve dans

<<<< sa nature.

<«<< Les principales raisons des pyrrhoniens

<< sont que nous n'avons aucune certitude de <«< la vérité des principes, hors la foi et la ré<«< vélation, sinon en ce que nous les sentons << naturellement en nous. Or, ce sentiment naturel n'est pas une preuve convaincante « de leur vérité, puisque, n'y ayant point << de certitude, hors la foi, si l'homme est créé << par un Dieu bon ou par un démon mé« chant, s'il a été de tout temps ou s'il s'est << fait par hasard, il est en doute si ces prin«cipes nous sont donnés, ou véritables, ou « faux, ou incertains, selon notre origine; « de plus, que personne n'a d'assurance, hors « la foi, s'il veille ou s'il dort, vu que, du << rant le sommeil, on ne croit pas moins fer<mement veiller qu'en veillant effectivement. « On croit voir les espaces, les figures, les « mouvemens, on sent couler le temps, on « le mesure, et enfin on agit de même qu'é« veillé. De sorte que, la moitié de la vie se « passant en sommeil, de notre propre aveu « où, quoi qu'il nous en paroisse, nous n'a«vons aucune idée du vrai, tous nos senti«mens étant alors des illusions, qui sait si « cette moitié de la vie où nous pensons veil« ler n'est pas un sommeil un peu différent

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