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<<< Il les entreprend particulièrement dans <«<l'apologie de Raimond de Sébonde; et, les << trouvant dépouillés volontairement de toute « révélation et abandonnés à leur lumière << naturelle, toute foi mise à part*, il les in« terroge de quelle autorité ils entreprennent << de juger de cet Être souverain, qui est infini << par sa propre définition, eux qui ne con<<< noissent véritablement aucune des moindres «< choses de la nature! Il leur demande sur << quels principes ils s'appuient, et il les presse « de les lui montrer. Il examine tous ceux << qu'ils peuvent produire; et il pénètre si << avant, par le talent où il excelle, qu'il mon<< tre la vanité de tous ceux qui passent pour << les plus éclairés et les plus fermes. Il demande <<< si l'ame connoît quelque chose; si elle se «< connoît elle-même; si elle est substance ou << accident, et s'il n'y a rien qui ne soit de « l'un de ces ordres; si elle connoît son propre <<< corps; si elle sait ce que c'est que matière; <<< comment elle peut raisonner; si elle est ma

* C'est précisément l'état où se placent tous les philosophes.

<< tière; et comment elle peut être unie à un << corps particulier, et en ressentir les passions, « si elle est spirituelle. Quand a-t-elle com« mencé d'être? Avec ou devant le corps? <«<< Finit-elle avec lui, ou non? Ne se trompe<< t-elle jamais? Sait-elle quand elle erre? vu que << l'essence de la méprise consiste à la mécon<<<noître. Il demande encore si les animaux << raisonnent, pensent, parlent; qui peut décider <<< ce que c'est que le temps, l'espace, l'étendue, << le mouvement, l'unité, toutes choses qui << nous environnent, et entièrement inexpli<«< cables; ce que c'est que santé, maladie, « mort, vie, bien, mal, justice, péché, dont « nous parlons à toute heure; si nous avons << en nous des principes du vrai, et si ceux que <«< nous croyons, et qu'on appelle axiomes, «ou notions communes à tous les hommes << sont conformes à la vérité essentielle. Puis«< que nous ne savons que par la seule foi qu'un «< Être tout bon nous les a donnés véritables, <« en nous créant pour connoître la vérité, «< qui saura, sans cette lumière de la foi, si, << étant formés à l'aventure, nos notions ne « sont pås incertaines, ou si, étant formés << par un être faux et méchant, il ne nous les

« a pas données fausses pour nous séduire? << Montrant par là que Dieu et le vrai sont «< inséparables, et que si l'un est ou n'est pas, « s'il est certain ou incertain, l'autre est né«< cessairement de même. Qui sait si le sens «< commun, que nous prenons ordinairement << pour juge du vrai, a été destiné à cette <«< fonction par celui qui l'a créé? Qui sait ce <«< que c'est que vérité? et comment peut-on « s'assurer de l'avoir sans la connoître? Qui << sait même ce que c'est qu'un être, puis<«< qu'il est impossible de le définir, qu'il n'y a a rien de plus général, et qu'il faudrait « pour l'expliquer se servir de l'être même, « en disant, C'est telle ou telle chose? Puis <«<< donc que nous ne savons ce que c'est « qu'ame, corps, temps, espace, mouvement, « vérité, bien, ni même l'être, ni expliquer <«<l'idée que nous nous en formons; comment <«< nous assurerons-nous qu'elle est la même <<< dans tous les hommes *? Nous n'en avons

Pascal fait ailleurs la même observation. « Nous << supposons que tous les hommes conçoivent et sentent « de la même sorte les objets qui se présentent à eux : «< mais nous le supposons bien gratuitement; car nous

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<«< d'autres marques que l'uniformité des con« séquences, qui n'est pas toujours un signe « de celle des principes; car ceux-ci peuvent <«< bien être différens, et conduire néanmoins << aux mêmes conclusions, chacun sachant que « le vrai se conclut souvent du faux.

« Enfin Montaigne examine profondément <«<les sciences; la géométrie, dont il tâche de << montrer l'incertitude dans ses axiomes et <«< dans les termes qu'elle ne définit point, << comme d'étendue, de mouvement, etc.; la << physique et la médecine, qu'il déprime en « une infinité de façons; l'histoire, la politi<< que, la morale, la jurisprudence, etc. De <«< sorte que, sans la révélation, nous pour<< rions croire, selon lui, que la vie est un songe «< dont nous ne nous éveillons qu'à la mort, et

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<< n'en avons aucune preuve. Je vois bien qu'on applique << les mêmes mots dans les mêmes occasions, et que toutes << les fois que deux hommes voient, par exemple, de la neige, ils expriment tous deux la vue de ce même objet par les mêmes mots, en disant l'un et l'autre qu'elle « est blanche; et de cette conformité d'application on « tire une puissante conjecture d'une conformité d'idées: « mais cela n'est pas absolument convaincant, quoiqu'il " y ait bien à parier pour l'affirmative ». Pensées, tom. I, art. VI, pag. 210.

<<< durant lequel nous avons aussi peu les prin«cipes du vrai que durant le sommeil naturel. « C'est ainsi qu'il gourmande si fortement et si <«< cruellement la raison dénuée de la foi, que, <«<< lui faisant douter si elle est raisonnable, et <«<< si les animaux le sont ou non, ou plus ou << moins que l'homme, il la fait descendre de « l'excellence qu'elle s'est attribuée, et la met, « par grâce, en parallèle avec les bêtes, sans « lui permettre de sortir de cet ordre, jus<< qu'à ce qu'elle soit instruite, par son Créa<«<teur même, de son rang qu'elle ignore; la << menaçant, si elle gronde, de la mettre au« dessous de toutes, ce qui lui paroît aussi fa<«< cile que le contraire; et ne lui donnant « pouvoir d'agir cependant, que pour recon<< noître sa foiblesse avec une humilité sincère " <«<< au lieu de s'élever par une sotte vanité. « On ne peut voir sans joie, dans cet auteur, << la superbe raison si invinciblement froissée << par ses propres armes, et cette révolte si « sanglante de l'homme contre l'homme, la<«<< quelle, de la société avec Dieu où il s'élevoit <<< par les maximes de sa foible raison, le préci« pite dans la condition des bêtes; et on ai<<< meroit de tout son coeur le ministre d'une

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