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<«< de ma raison étant, selon vous-même, la « règle de ce que je dois croire, il seroit dé« raisonnable que je crusse en Dieu, malgré la « répugnance de ma raison. Pour vous, à qui les preuves de l'existence de Dieu semblent << claires et évidentes, croyez-y, vous le devez «< en vertu du même principe qui m'oblige à « en douter. Mais, de même que je serois aussi «< injuste qu'inconséquent, si j'exigeois que << vous prissiez ma raison personnelle pour règle de vos croyances, vous seriez égale<< ment injuste et inconséquent, si vous m'o«bligiez de prendre votre raison pour règle des

<< miennes >>.

Que répondrez-vous à ce discours? Direzvous à l'athée qu'il est fou, que sa raison s'égare, et que c'est vous qui raisonnez bien : d'abord c'est la question même, et votre assertion ne la résout pas; ensuite ni l'athée ni vous ne se croit infaillible, et c'est la raison faillible de chacun qui doit être sa règle, selon vous comme selon l'athée. L'accuserezvous de mauvaise foi ? Une injure n'est pas une réponse, et cette injure seroit une sottise; car ce seroit supposer que deux esprits sont nécessairement toujours frappés de la même manière.

11.

I

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« l'effet à la cause ; la liaison de l'effet avec « sa cause est entièrement arbitraire, non seu«<lement dans sa première notion à priori, mais « encore après que cette notion nous a été sug« gérée par l'expérience. Cet axiome, et les << autres dont vous vous servez, sont, dites<< vous, évidens; dites qu'ils vous paraissent «tels; mais, encore une fois, ce n'est pas << votre évidence personnelle, ce n'est pas votre raison qui est ma règle. Ils paroissent, << ajoutez-vous, également évidens à tous les << hommes. Quand il seroit ainsi, que m'im« porte? Ne convenez-vous pas que c'est ma <<< conviction, mon évidence, et non l'évidence <«< des autres hommes et leur conviction qui << doivent déterminer mes croyances? De plus, << quand j'admettrois les principes que vous «< posez, nous ne serions guère avancés pour «< cela car il s'en faut bien que je tombe « d'accord de la justesse des conséquences <«<< que vous en déduisez. Mon esprit n'est nul«<lement frappé de vos démontrations; il n'y <«<< voit que des paralogismes. Or le jugement

r Hume's philosophical Essays, pag. 62, 63.

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<< de ma raison étant, selon vous-même, la << règle de ce que je dois croire, il seroit dé<< raisonnable que je crusse en Dieu, malgré la « répugnance de ma raison. Pour vous, à qui « les preuves de l'existence de Dieu semblent << claires et évidentes, croyez-y, vous le devez << en vertu du même principe qui m'oblige à << en douter. Mais, de même que je serois aussi <«< injuste qu'inconséquent, si j'exigeois que << vous prissiez ma raison personnelle pour « règle de vos croyances, vous seriez égale<«<ment injuste et inconséquent, si vous m'o<< bligiez de prendre votre raison pour règle des <<< miennes >>.

Que répondrez-vous à ce discours? Direzvous à l'athée qu'il est fou, que sa raison s'égare, et que c'est vous qui raisonnez bien: d'abord c'est la question même, et votre assertion ne la résout pas; ensuite ni l'athée ni vous ne se croit infaillible, et c'est la raison faillible de chacun qui doit être sa règle, selon vous comme selon l'athée. L'accuserezvous de mauvaise foi ? Une injure n'est pas une réponse, et cette injure seroit une sottise; car ce seroit supposer que deux esprits sont nécessairement toujours frappés de la même manière.

que la vie présente, les hommes s'abusent à toute heure sur leurs plus clairs intérêts.

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Il résulte de là qu'on a des preuves excellentes contre les athées et contre les déistes, et que néanmoins ces preuves, il nous en coûte de le dire, deviennent souvent inutiles, par un vice inhérent à la méthode qu'on a trop légèrement empruntée de la philosophie. On commence par concéder aux incrédules le principe fondamental de toute erreur et de toute incrédulité, c'est-à-dire, que la raison individuelle de chaque homme, son jugement privé, est la règle de ce qu'il doit croire. Dès lors on n'a plus aucun moyen de redresser la raison qui s'égare, on ne peut plus exiger d'elle qu'elle se soumette à une autre raison, ni même à la raison de tous. On se place, en un mot, dans la position où sont les hérétiques à l'égard les uns des autres. Ainsi le luthérien prouve très solidement au calviniste que le dogme de la présence réelle se trouve dans l'Écriture avec une extrême clarté; mais la raison du calviniste ne l'y voyant pas, et chacun, de l'aveu du luthérien, étant juge pour soi de ce que l'Écri

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ture enseigne, le luthérien ne peut exiger du calviniste qu'il entende l'Écriture comme il l'entend lui-même.

Le luthérien et le calviniste croient avec raison que les dogmes de la Trinité, de l'Incarnation, de la divinité de Jésus-Christ, sont clairement enseignés dans l'Écriture, et les preuves qu'ils en donnent sont excellentes en elles-mêmes; mais elles ne frappent pas le socinien, et comme il a le même droit qu'eux d'interpréter l'Écriture par sa raison individuelle, le luthérien et le calviniste abandonneroient leur principe fondamental, s'ils prétendoient le contraindre à renoncer à sa propre interprétation pour adopter la leur. Et c'est de la sorte que s'est établi, parmi les protestans, cette tolérance universelle qu'on leur a tant reprochée, et qui n'est en effet que l'indifférence absolue des religions. Chaqua secte prouve très bien les vérités qu'elle a conservées, et que les autres rejettent; mais aucune secte ne peut faire aux autres une obligation de se rendre à ces preuves, quoique très bonnes, parce qu'elle pose d'abord cette maxime, que chacun doit n'admettre comine vrai que ce qui paroît tel à sa raison.

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