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on a dit satur color, d'une étoffe bien teinte, c'està-dire pleine de couleur, et on dit satura lex, loi complète, loi embrassant tout ce qui appartient au sujet qu'elle traite.

Les premiers vers satiriques furent nommés saturniens. La joie les inspira, dans les premières fêtes du peuple romain, qui furent dédiées à Saturne. Les railleries qu'ils renfermaient devinrent si amères que les législateurs se crurent forcés de les défendre expressément. La loi des Douze Tables ordonna, en l'an 302 de Rome, que si un citoyen avait composé ou récité des chants qui pussent en déshonorer un autre, il serait condamné à mort; mais en l'an de Rome 390, sous le consulat de Sulpitius Peticus et de Licinius Stolo, la peste ravagea Rome, et les consuls s'efforcèrent de distraire le peuple de ses maux. Ils firent venir de Toscane des histrions, ainsi nommés du mot hister, qui signifiait acteur en public.

Ces acteurs dansaient et gesticulaient de diverses manières au son de la flûte. La jeunesse romaine les applaudit et les imita.

Elle joignit alors les danses et les mimes de ces Toscans aux chants satiriques qu'elle récitait dans les fêtes, et accorda les mouvements des pieds avec les sons de la voix. Ce divertissement plut généralement et fut cultivé et applaudi en conservant les mêmes formes jusqu'en 514.

Ce fut en cette année, sous le consulat de Claudius et de Tuditanus, qu'Andronicus fit jouer sa

première pièce; et la poésie dramatique qu'il imita des Grecs, qui la cultivaient avec succès depuis plusieurs siècles, s'établit alors sur le théâtre des Romains.

Ennius eut une autre pensée, il ne voulut pas dépendre de la foule turbulente qui se portait à ces premiers spectacles.

Il essaya de recueillir dans un discours suivi, adressé à des lecteurs ou à des auditeurs froids et tranquilles, toutes les plaisanteries et les censures que les pièces de théâtre contenaient, et telle fut l'origine de la véritable satire.

Ennius a été regardé comme un poëte plein de force et d'énergie, toujours élevé dans son style trop peu travaillé, et quelquefois sublime avec une expression vieillie.

Ovide l'a bien jugé ingenio maximus, arte rudis, excellent par l'invention, barbare dans l'exécution, et Properce lui a offert la couronne qu'il a méritée.

Quintilien, développant cette pensée dans une comparaison ingénieuse, a dit avec justesse: «Nous révérons Ennius comme ces anciens bois sacrés dont les hauts chênes antiques semblent moins superbes par leur grandeur que par la religion qui les a consacrés. >>

Il nous reste d'Ennius des fragments pleins d'esprit et de mordant, qui justifient l'estime de son siècle : il a quelquefois des pensées dignes d'Horace, mais il faut convenir qu'il n'a jamais son

style. Je citerai seulement le portrait de la coquette :

Comme on voit un ballon, commun à vingt joueurs,
Passer de main en main aux yeux des spectateurs,
La coquette est à l'un et déjà court aux autres;
Elle vante mes vers en répétant les vôtres,

Et lui promet l'anneau qu'elle accepte de moi;

Elle dit qu'elle m'aime, et lui donne sa foi;

Puis, serrant votre main, c'est mon pied qu'elle presse;
Elle sourit à tous; tout en elle est caresse ;

Oui, tout, son pied, sa main, son souris et ses yeux
Servent en même temps à faire quatre heureux.

On reproche à ce poëte, comme à plusieurs autres, d'avoir eu de lui-même une trop haute opinion car il assurait dans le premier livre de ses Annales que par la métempsycose l'âme et l'esprit d'Homère étaient passés dans son corps.

Pacuvius, fils de la sœur d'Ennius, imita le genre de poëmes inventé par son oncle, mais il polit plus ses vers, travailla sa diction avec soin, et s'appliqua surtout à s'instruire profondément. Son style y gagna, car il sut placer dans ses poëmes des imitations d'Homère, entre autres lorsqu'il voulut se moquer des devins déjà ridiculisés par Ennius.

Lucilius naquit lorsque Pacuvius brillait; à son tour, il brilla lorsque Pacuvius fut devenu vieux; mais il éclipsa ses prédécesseurs, et on le crut inventeur du poëme qu'il a cultivé; il n'adopta qu'un mètre nouveau. Jusqu'alors on avait écrit la satire

en vers iambiques; il employa le vers hexamètre. Perse, Horace et Juvénal l'imitèrent, et c'est sous ce rapport qu'Horace l'appelle inventeur du genre, tandis qu'il cite Ennius comme en étant le premier

auteur.

Cependant, quoique supérieur à ses prédécesseurs, Lucilius était plein de défauts; admirateur des Grecs, il faisait un mélange continuel d'expressions grecques et latines. Était-il savant? Quintilien l'assure et Cicéron le nie. En outre, son style n'était ni pur ni élégant, et il était diffus et redondant. Ses plaisanteries n'étaient point gaies et rarement naturelles, mais souvent mordantes et spirituelles en même temps.

Horace vint ensuite; il nomma Lucilius son maître tout en le critiquant sévèrement; mais en réalité il l'a bien surpassé. Cependant Juvénal, qui vint après lui, obtint de nouveaux succès. Il a plus d'énergie, moins de grâce et d'éloquence.

Perse naquit au moins vingt ans après Juvénal et quarante ans après la mort d'Horace; il n'a pas vécu dans le beau temps de la littérature latine; mais il s'est distingué par la piquante originalité de ses comparaisons ingénieuses et mordantes, et par sa gaieté satirique, inspirée par la philosophie qui l'anime et le guide toujours. Horace semble un convive du monde qui se moque de son amphitryon en prenant part au festin; Juvénal semble un ennemi du genre humain qui va, comme Diogène, la lanterne à la main, non pour chercher un homme

vertueux, mais pour découvrir, au contraire, aux yeux du public, les méchants et les hypocrites qui se cachent dans l'obscurité. Perse semble n'avoir qu'un homme en vue et le faire tourner sans cesse devant les autres pour mettre tour à tour en évidence toutes ses difformités. On peut dire qu'Horace est le poëte des hommes du monde, Juvénal celui des hommes d'État, et Perse est réellement celui des philosophes.

Aulus-Persius Flaccus naquit le 4 décembre de l'an 34 de J. C., la vingtième année du règne de Tibère, sous le consulat de Fabius Persicus et de Lucius Vitellius. Son père se nommait Flaccus, et sa mère Fulvia Sisenna. On lui a fait le même honneur qu'à Homère. Les Étruriens et les Liguriens se sont disputé la gloire de l'avoir eu pour compatriote; mais je crois avec Eusèbe, contre l'opinion de Bayle, qu'il naquit à Volterre en Étrurie. Il était d'une noble origine et chevalier romain. Il perdit son père à l'âge de six ans. Sa mère se remaria à un chevalier romain, nommé Fusius, qui mourut peu d'années après. Perse à douze ans fut envoyé à Rome, où il étudia sous le grammairien Palémon, sous le rhéteur Virginius Flaccus et sous Annæus Cornutus, qui de son instituteur devint son ami.

La secte des stoïciens avait passé d'Athènes à Rome, et Cornutus en avait adopté les principes; il les inspira en même temps à Lucain et à Perse, ses disciples. On dit que Perse était d'un caractère doux et timide, et rougissait comme une jeune

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