Obrázky na stránke
PDF
ePub

;

les sciences, et je me suis proposé ce problême général : assujettir à des formules rigoureuses toutes les notions de l'esprit humain, si bien que la composition et la décomposition de toutes les idées puisse se réduire, autant que la chose est possible, à des opérations analogues aux opérations algébriques et numériques. C'est alors que j'ai vu clairement que l'arithmétique, l'algèbre et toutes les sciences mathématiques n'étoient plus qu'un cas particulier du problême précité, appliqué à la portion mesurable de nos idées que par conséquent la marche de l'esprit humain devoit être la même pour toutes les sciences; qu'en un mot il ne doit y avoir qu'une méthode analytique, comme il n'y a qu'une Nature, qu'une raison, qu'une vérité, qu'une organisation humaine; et qu'à l'aide de cette analyse universelle, on pouvoit parvenir assez promptement à embrasser d'une seule vue tout le globe des sciences à-peu-près comme l'œil saisit et parcourt une grande salle de spectacle à l'aide d'un seul lustre bien cons

truit et bien placé. Comme j'ai suffisamment insisté sur cet objet dans la première partie de cet ouvrage, j'y renvoie mon lecteur.

Cette grande idée dont le germe appartient à Bacon, à laquelle d'Alembert, Diderot et les autres rédacteurs de l'Encyclopédie ont donné beaucoup d'extension, m'a paru susceptible de recevoir un nouveau jour, un nouveau développement; et je la crois si féconde, que je crains de ne pas vivre assez longtems pour rédiger et publier les idées dues à la fermentation qu'elle a excitée dans ma tête : mon projet est de les réunir toutes dans un seul ouvrage, que je me propose d'intituler: Cours d'études complet ou Encyclopédie élémentaire et analytique, mais pour l'exécution duquel je crains, je le répète, que ma vie ne soit trop courte. Au reste, si la mort me prévient, j'aurai du moins la consolation d'espérer que des hommes plus habiles ou plus heureux que moi achèveront et perfectionneront ce que je n'aurai pu qu'ébaucher.

Mais si je ne puis dire en mourant, comme Horace exegi monumentum ære perennius je pourrai toutefois me rendre ce témoignage consolant, que j'ai employé ce que la nature m'avoit donné de forces, à utiliser ce triste et court voyage que ses lois éternelles m'ont contraint de faire sur le globe, en laissant à mes semblables quelque trace honorable de mon existence.

Voyant bien qu'il m'étoit inutile, que même il m'étoit défendu d'avoir un peu de génie en qualité d'ingénieur de la marine,' et de l'appliquer au perfectionnement de l'architecture navale, j'ai pensé qu'il me seroit du moins permis, en ma qualité d'homme, de travailler à perfectionner ma raison, et peut-être aussi par la suite la raison humaine : j'ai pensé que les mauvais plaisans ne pourroient traiter de songecreux et de métaphysicien nébuleux un homme qui, par état et par goût, étoit géomètre et mécanicien ; et j'ai trouvé, en parcourant les profondeurs de l'entendement, que la bonne construction et la re

fonte des têtes humaines (et par suite l'amélioration du cœur humain) étoit un problême bien plus difficile et tout autrement important que la construction, la refonte et le radoub de nos vaisseaux; qu'enfin si un vaisseau de ligne est sans contredit (en mécanique) le plus bel ouvrage des hommes, l'homme à son tour est (sur notre globe) le plus bel ouvrage de la nature; c'est donc lui sur-tout qu'il importe de bien connoître; the proper study of mankind, is man: et c'est à cela que je destine les restes de ma vie (1).

(1) Ce n'est pas que j'aie perdu de vue l'architecture navale, je l'aime trop pour cela; j'ai même sur cet objet l'ébauche d'un assez grand travail où l'on trouve la solution de ce problême :

Faire des vaisseaux 1°. qui coûtent moins, 2o. qui arquent moins, 3°. qui durent plus, sans nuire à aucunė de leurs qualités fondamentales (la stabilité, la vitesse, la force, la marehe au plus près, la promptitude des évolutions, et une capacité convenable, etc. ).

Mais pour publier un ouvrage aussi dispendieux, les moyens me manquent ; et pour les obtenir, il me faudroit jouer un rôle qui ne me convient nullement. Je ne renonce

La science de l'homme (base éternelle de la raison et de la vraie philosophie) se présente sous deux grands points de vue, ou, si l'on veut contient deux grandes parties: 1o. la description exacte des élémens matériels et sensibles qui composent notre machine; 2°. le tableau des sensations, des sentimens et des idées élémentaires, ainsi que le systême des forces ou facultés intellectuelles et morales qui sont le résultat naturel et nécessaire de notre

pas néanmoins à mon projet, et je pourrai quelque jour le soumettre à celle des puissances maritimes de l'Europe qui voudroit en faire usage, en adoptant mes vues d'après un

mûr examen.

Je n'ai pas besoin de dire que j'offre d'abord à mon gouvernement ce tribut de mes foibles talens; il est vrai qu'un intrigant très-vil et très-lâche, mon persécuteur, j'ai presque dit mon assassin, a su, par une honteuse forfaiture, me dépouiller d'un état que j'avois conquis dans un concours public, que j'ai ( je l'ose dire) honoré pendant douze ans, et que je devois regarder comme une propriété sacrée à mais comme, à son grand regret, il ne m'a pas tué, il n'a pu faire aussi que le fruit des travaux des douze plus belles années de ma vie fut tout-à-fait perdu pour moi, et pour la

« PredošláPokračovať »