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ont préparé, facilité, provoqué, ou déterminé la maladie. Ne sait-on pas, en effet, qu'il suffit souvent de cette seule connaissance pour prévenir, pour faire avorter, ou pour guérir l'affection morbide par l'ablation de cette cause? Sublata causa, tollitur effectus.

Nous considérons ensuite, nous l'avons dit aussi, comme une des plus importantes études médicales, celle de la séméiologie ou des symptômes communs et particuliers à chaque maladie, attendu que par les indications qu'elle nous donne, nous pouvons nonseulement arriver, comme le veut M. Trousseau, à connaître la marche des maladies, mais encore à en déterminer la nature, le siége et les complications, faits indispensables à constater au lit du malade. Oui, indispensables, même en nous renfermant dans le texte du professeur de Paris, puisque si l'on n'est à peu près ou entièrement fixé sur tout ce qui se rattache à ces déterminations, nul ne pourra décider rigoureusement en aucun cas si, dans son cours, l'affection reste stationnaire, s'aggrave ou décroit, et par conséquent, si l'expectation (médecine expectante) sera favorable ou préjudiciable à l'individu que l'on veut guérir. Dès lors, sur quelles données basera-t-il sa thérapeutique ?

Ainsi, qu'on ne s'y trompe point, quelque partisan que nous soyons de la méthode naturelle dont nous avons cherché, il y a déjà longtemps, à apprécier les avantages et les inconvénients (Voy. Essai de thérapeutique basé sur la méthode analytique, etc., in-8°, 1832); de cette méthode qui consiste à observer attentivement la nature médicatrice, pour la laisser faire quand elle suit une marche régulièré et salutaire, ou pour la contrárier lursqu'elle manifeste de mauvaises et funestes tendances, nous ne voudrions pas qu'on oubliat qu'il est des circonstances où cette observation nous conduit à agir avec énergie et parfois même empiriquement. Donc le devoir du médecin ne se borne pas absolument à connaître la marche des maladies.

Toutefois, si, quoique d'accord avec M. Trousseau sur le fait principal, la séparation de la partie scientifique de la médecine d'avec la partie artistique, nous différons ensemble quant à l'importance qu'on doit attribuer à la connaissance de la marche de la maladie, cela provient de ce que je fais jouer à la médecine une part bien plus grande que celle qu'il paraît lui accorder; c'est-à-dire que, tandis qu'il déclare que la médecine est l'art de guérir, qu'elle n'est que cela, guérir est le but; moi, réservant cette définition pour la médecine clinique sculement, je professe que le but de la médecine, en général, est d'agir sur l'homme vivant, de manière à le conserver, à le perfectionner, à le soulager et à le guérir; nous pourrions ajouter, et à le consoler, car le médecin probe et instruit, honnête et religieux, guérit quelquefois, soulage souvent, et console toujours ses malades. J'étends donc le cercle de ses attributions.

Et quand même toute la science du praticien devrait consister à connaître la marche des maladies, n'est-ce pas qu'il faut la connaître d'abord elle-même, la maladie, pour en suivre sciemment le cours ? Et que, pour la connaître ou en former le DIAGNOSTIC (Voy. ce mot), il faut recourir à l'étiologie, étude des causes; à la séméiologie, étude des symptômes; et à la thérapeutique, étude des effets pathologiques des médicaments comparés à leurs effets physiologiques? Oui, il faut recourir à tout cela, car, sans des points de comparaison à établir, nous ne pourrions jamais décider si le phénomène inaccoutumé que l'individu présente à notre observation, ne dépend pas de la simple exagération d'une ou de plusieurs fonctions, sans altération organique, ou, en d'autres termes, si les troubles fonctionnels observés tiennent à une influence dynamique, ou, au contraire, proviennent d'une influence matérielle; s'ils sont, en un mot, physiologiques ou pathologiques, ce que des notions exactes en séméiologie peuvent seules nous apprendre. Donc il faut avoir des connaissances positives en PHYSIOLOGIE et en HYGIÈNE (Voy. ces mots), ces connaissances étant les fondements des études séméiotiques.

Et comment le sont-elles? En ce que les modificateurs hygiéniques ne pouvant affecter l'organisme vivant, sans produire un trouble plus ou moins prononcé dans les fonctions, il faut avoir déja envisagé ces troubles sous leurs aspects divers, pour distinguer s'ils résultent d'une réaction simplement physiologique ou d'une altération réellement pathologique. De même, pour que la thérapeutique devienne à son tour une source de diagnostic, il faut de

toute nécessité que, si on tire du sang à un malade pour connaître quelles sont les altérations que ce liquide a subies, et s'il en a subi, savoir déjà quels sont les états physique, chimique et organique physiologiques du sang; tout comme quand on traite un malade par la méthode a juvantibus et lædentibus, on doit avoir appris quelle est l'action physiologique du médicament administré, pour ne pas confondre la diminution ou l'exagération des symptômes produits pas les forces médicatrices de la nature, avec celles qui doivent être attribuées à l'action du remède. Ainsi, connaissance de l'organisme vivant et des lois qui le régissent; connaissance des modifications hygiéniques et de celle des médicaments sur l'homme sain et sur l'homme malade; connaissance des limites dans lesquelles les troubles fonctionnels doi vent rester pour ne pas devenir troubles pathologiques, et conserver, conséquemment, le caractère physiologique, etc., voilà les seules et véritables bases fondamentales de l'art de guérir, voilà les phares lumineux qui indiquent au praticien la voie qu'il doit suivre pour éviter les écueils.

Et qu'on ne croie pas que nous exagérions l'utilité de ces connaissances; car, si nous exami nons quelles sont les divisions dont la médecine proprement dite est susceptible, nous verrons qu'elle se divise naturellement en deux branches qui ne diffèrent que par l'objet qu'on se propose : l'une qui s'attache à donner la théorie des états naturels, normaux, de l'homme vivant (physiologie); l'autre qui s'occupe à séparer, par l'analyse et la synthèse, les états morbides divers (éléments de maladie), dont l'ensemble constitue l'affection, la maladie (pathologie). De la comparaison attentive de ces deux états doit nécessairement ressortir la caractéristique spéciale ou la différence des conditions individuelles appelées SANTÉ et maLADIE, et, par suite, le choix des moyens à mettre en usage pour conserver l'une et combattre l'autre.

On peut déjà comprendre, par ce simple rapprochement, l'union intime qui lie entre elles chacune de ces sciences; elle ressort évidemment de ce qui précède, et des propositions suivantes que nous croyons incontestables, savoir :

1. Il est, en physiologie, une foule de théories hypothétiques qui régneraient encore, bien des controverses que des intérêts rivaux ont soulevées qui se perpétueraient, si les faits pathologiques, qu'une exacte et consciencieuse nécroscopie a complétés, n'avaient fait peser tout le poids de leur autorité en faveur de tel ou tel système ou ne les avait tous renversés.

2. Les connaissances physiologiques, hygiéniques, séméiologiques, etc., sont les fondements de la pathologie.

3 Enfin, en thérapeutique, on ne saurait rien de l'action curative d'un remède si, par anticipation, on ne l'avait expérimenté sur l'homme sain et comparé l'état des fonctions organiques et vitales, avant, pendant et après l'administration de l'agent médicateur, tout en tenant compte des influences physiques et morales. De même le chirurgien n'oserait lier une artère importante, ni sacrifier un organe, s'il ignorait les ressources de la nature dans les anastomoses, et la valeur de l'organe à sacrifier. Donc anatomie, physiologie, patho-logie, hygiène et thérapeutique, tout se tient, tout se lie, tout s'enchaine, tout s'éclaire réciproquement, et l'on ne sera jamais praticien habile, si l'on n'est suffisamment pourvu des enseignements qu'elles fournissent.

Ces propositions seront justifiées, nous l'espérons du moins, par les considérations importantes auxquelles nous allons nous livrer pour établir la nature des secours mutuels que se prêtent la physiologie, la pathologie et la thérapeutique générales, rien ne pouvant mieux servit, ce nous semble, que ces considérations, pour introduction à un Dictionnaire de médecine pratique (1).

(1) Chargé, en 1840, par M. le Doyen de la Faculté de médecine de Montpellier, d'improviser le cours de pathologie et de thérapeutique générales que M. d'Amador ne pouvait faire, je pris pour texte de mon discours d'ouverture: Des secours mutuels que se prêtent la physiologie, la pathologie et la thérapeutique

générales, et je traitai sommairement non sujet. Mais comme il était susceptible de plus grands développements, et que l'intérêt qu'il m'avait offert d'abord allait toujours croissant à mesure que je l'étudiais davantage, je me décidai à le revoir, le corriger et l'augmenter, ce qui en définitive a formé un

ART I

Comment la pathologie éclaire-t-elle la physiologie?

:

On aurait tort de croire, qu'embrassant dans tout son ensemble le vaste champ de la physiologie humaine, nous allons discuter une à une les opinions que l'on a émises touchant le jeu des organes, la force contractile de la plupart d'entre eux, l'influence que le système nerveux exerce sur les fonctions qu'ils remplissent, etc., pour dire ensuite comment la pathologie a démontré que la plupart de ces opinions sont erronées. On conçoit qu'une discussion pareille nous entraînerait si loin que les bornes que nous nous sommes posées en seraient dépassées. C'est pourquoi nous nous sommes borné à choisir dans une des fonctions les plus importantes, la circulation, un des points qui nous ont paru offrir le plus d'intérêt. Et d'abord, nous nous demanderons en vertu de quelle puissance le sang parcourt-il les vaisseaux qui le contiennent? Dirons-nous avec Harvey, Bordeu et tant d'autres, que l'action du cœur se transmet même à travers des capillaires et détermine la progression du sang jusque dans les veines ? ou, en d'autres termes, avec M. Magendie et son école, que le ventricule gauche du cœur, organe central, que l'on peut comparer à une pompe hydraulique, a assez d'énergie, non-seulement pour lancer le liquide dans le système artériel, mais encore dans le système capillaire sur lequel son action retentit, tout comme elle retentit sur tout le sytème veineux ? Admettrons-nous avec Bichat, Richeraud, M. Gerdy, etc., que le système capillaire brisant l'effort du cœur et des artères sur le sang, ils ne peuvent plus rien sur lui, et qu'il faut de toute nécessité que les capillaires soient aux veines ce que le cœur est aux artères pour que la circulation ne soit pas interrompue ? ou bien, avec certains, que l'action des capillaires n'est pas plus nécessaire à la marche du sang veineux, que l'action du cœur l'est au cours du sang artériel, tout le système circulatoire jouissant d'une activité qui lui est propre et qui facilite la progression du liquide? Adopterons-nous enfin l'opinion de Tiedeman dejà professée par Harvey, Glisson, Bohn, etc., soutenue par Albinus, Wilson, Rose, J. Hunter, Gallini, etc., que, outre les mouvements communiqués au sang par les contractions et les expansions alternatives du cœur irritable qui agit en cela comme une pempe aspirante et refoulante, indépendamment de ceux qui lui sont communiqués par les parois élastiques et contractiles des artères, il tire encore de lui-même la propriété de ses mouvements? Chacune de ces opinions, nous devons le dire, s'étaye de l'autorité de grands noms, qui la défendent à l'aide de raisonnements plus ou moins spécieux; mais pourraient-elles soutenir un examen approfondi ? Nous ne le pensons pas, et pour justifier cette négation, nous allons étudier successivement les mouvements du sang, soit quant aux différents systèmes circulatoires qu'il parcourt et qui lui communiquent en partie l'impulsion à l'aide de laquelle il circule; soit en tant qu'il est vivant.

§ 1. Circulation artérielle. — La marche du sang dans ies artères a-t-elle lieu par la scule force d'impulsion qui lui est communiquée par le cœur? Résoudre cette question par l'affirmative ce serait répudier, premièrement les faits d'organogénésie anomale; secondement, les faits d'anatomie comparée; troisièmement, enfin, les faits pathologiques, qui tous semblent établir une sorte de contraction spontanée ou vitale du système artériel. Et par exemple, nous avons dit :

Premièrement, les faits d'organogénésie anomale, attendu que, 1o Camper conservait dans son cabinet anatomique un veau monstrueux dépourvu de cœur ; 2° Breschet, Blandin, Brodie, ont rapporté des faits d'acéphalie avec absence du cœur, qui prouvent que le sang peut circuler et la nutrition s'opérer malgré que le foetus soit privé de cet organe. On peut voir du reste, dans le musée Dupuytren, section des Monstruosités, no 869, le squelette d'un fœtus acéphale, né jumeau, en qui le cœur, le foie et l'estomac manquaient; et au rayon inférieur, marque BZ, un fœtus acéphale privé des organes thoraciques et abdomi3 enfin, s'il faut en croire le récit de Suétone, une des victimes immolées à Rome

mémoire que j'adressai à l'Académie royale de médecine de Paris en 1843; M. J. Guérin fut chargé d'en faire le rapport. Il en a été empêché à cause des discussions longues, passionnées, interminables, que ses traitements orthopédiques ont occasionnées au sein même de l'Académie, et par la détermination qu'il prit de s'en éloigner, jusqu'à ce que justice lui

ait été rendue, ce qui n'a eu lieu que cinq ans après. Depuis lors plusieurs autres années se sont écoulées, et mon travail, resté dans les mains de M. Guérin, n'ayant pas eu le retentissement que je voulais lui donner, on ne doit pas être étonné que je supplée, puisque je le puis, au silence de mon rapporteur.

pendant la dictature de Jules César, aurait été privée de cœur : eoque arrogantiæ progressus est, dit l'historien romain en parlant de César, ut aruspice tristia et sine CORDE exta sacro quodam nuntiante, futura diceret lætiora cum vellet nec pro ostento ducendum si pecudi cor defuisset. Or, comme le développement de ces monstres n'a pu s'opérer sans que la circulation du sang ait fourni à l'organisme l'élément nécessaire à sa formation, il doit suffire de la simple énonciation de ces faits pour établir que le coeur n'est pas absolument nécessaire.

:

Secondement, les faits d'anatomie comparée; car, c'est aussi un fait généralement adopté, que chez les néréides, les aphrodites, plusieurs radiaires, les holoturies, etc., animaux sans coeur, la circulation sanguine s'exerce avec la plus parfaite harmonie. C'est pourquoi Wedemeyer, après avoir adopté que le cœur était l'unique moteur du sang, a été obligé de signaler comme une loi, que tous les vaisseaux de ces animaux, de même que les vaisseaux de ceux qui ont un cœur faible et imparfait, et jusqu'aux grosses artères de l'embryon, sont doués d'une contractilité vitale manifeste. Il ajoute Il est vrai qu'à mesure que le cœur se développe et qu'il acquiert plus d'énergie, on voit disparaître cette contractilité, et la membrane moyenne des artères acquérir la consistance et tous les caractères des tissus fibreux. Mais s'il en est ainsi, pourquoi cette contractilité vitale qui existe pendant la vie embryonnaire du fœtus humain, et durant toute l'existence des animaux des classes inférieures que nous avons nommées, pourquoi, dis-je, cette contractilité n'existerait-elle pas dans l'homme? De ce qu'elle n'est pas visible, s'ensuit-il qu'il· faille la nier? C'est au troisième ordre de faits, ordre sur lequel nous insisterons d'autant plus que les exemples qu'il fournit font ressortir la part d'influence que la pathologie peut exercer sur l'adoption ou le rejet de ce point essentiel des théories pathologiques, que nous demanderons la solution de cette dernière question : nous les exposerons d'abord, et les discuterons ensuite, pour mieux en apprécier l'impor

tance.

Troisièmement, les faits pathologiques. On trouve dans Corvisart qu'un individu avait les quatre cavités du cœur dans un état d'induration et de roideur tel, qu'il était impossible de croire qu'elles avaient pu se dilater et se contracter; néanmoins la circulation avait eu lieu régulièrement pendant quelques mois. Ou je me trompe fort, ou voilà un fait d'anatomie pathologique bien contraire à la théorie de Harvey et de ses sectateurs. Mais, dira-t-on, peut-être la roideur n'était pas telle pendant la vie que le cœur n'ait pu exécuter de très-légers mouvements de contraction et de dilatation, et ces légers mouvements ont sufli pour l'entretien de la circulation. Comme nous n'avons pas eu la pièce pathologique sous les yeux, nous voulons bien par condescendance ne pas repousser cette conclusion; mais voudra-t-on admettre avec nous qu'à moins d'une disposition anatomique particulière qui rend naturellement le système artériel plus développé d'un côté que de l'autre (Morgagni, Stoll, etc.): à moins d'une anomalie de la radiale qui, par une rare exception, se divise en deux branches d'un seul côté, ou se détourne de sa direction habituelle à la base de l'apophyse styloïde du radius, etc., ce qui rend le pouls différent des. deux côtés dans le premier cas, plus faible ou nul dans le second (Tulpius) : si le cœur était le seul mobile du sang, les battements des artères seraient toujours isochrones à ceux du cœur, les artères correspondantes battraient toujours avec une égale force, donneraient toujours un nombre égal de pulsations dans un temps donné, et le sang enfin cesserait de circuler quand le cœur a suspendu ses mouvements? Eh bien, loin que les choses se passent ainsi, on remarque parfois dans les battements du cœur et du pouls, et dans le pouls lui-même, en divers points, une différence qui dépend quelquefois d'une disposition purement vitale, c'est-à-dire d'une modification étrangère à l'organisme et propre à l'individu, soit quecette disposition reste constante, soit qu'elle ne se montre que momentanément à certaines époques fixes ou irrégulières. Aussi voit-on souvent le pouls d'un côté différent du pouls de l'autre côté, le sujet se trouvant d'ailleurs dans un état de santé parfaite, ou du moins sans qu'il y ait lésion organique, et sans qu'on puisse soupçonner autre chose qu'une altération non matérielle mais vitale du système nerveux, comme Morgagni, Double et Albert de Bohu oat cu plusieurs fois occasion de s'en convaincre. Nous devons croire encore que

c'est à une modification vitale du système nerveux qu'on a dû d'observer: 1° que le pouls d'un côté n'avait pas le même rhythme que celui du côté opposé, soit dans certaines fiòvres de la moitié du corps (Albinus, Fouquet); soit dans certaines fièvres ataxiques, etc.; 2o l'artère radiale ne présenter aucune pulsation pendant trois ou quatre minutes, et, après ce laps de temps, le pouls redevenir sensible, quoiqu'il restât habituellement faible, ce que Loyer-Villerimé a vu chez un hypocondriaque, et ce que nous avons vu nousmême chez un phthisique qui, habituellement, avait le pouls presque insensible à la radiale gauche, tandis qu'il était développé dans la radiale droite; 3° enfin, le cœur, au milieu des violentes et continuelles douleurs dont il est le siége, offrir en même temps cela de particulier qu'il donnait, ainsi que les deux carotides, cent vingt pulsations par minute, lorsqu'on n'en comptait, dans le même espace de temps, que soixante et dix à la radiale (Reid). Dans ces cas, ce n'était certainement pas le cœur qui projetait seul la masse totale du sang; car, on ne peut point supposer une influence organique agissant de telle sorte que son action ait retenti sur tel point et non sur tel autre, lors surtout qu'avec M. Magendie, on considérerait les vaisseaux sanguins comme des tuyaux élastiques cédant à des forces mécaniques. Voici du reste une observation qui prouve l'indépendance des artères par rapport au cœur.

John Bell, chirurgien anglais, raconte que, faisant l'ouverture d'un anevrisme situé dans la région de la fesse, il avait compté sur le courage de son malade qui, en effet, ne se démentit pas pendant quelque temps; il ne poussa pas un seul cri: mais enfin, vaincu par la douleur, il tomba en syncope. Dans ce moment Bell avait ouvert le sac et était prêt à le lier lorsqu'il se fit ce raisonnement: le cœur ne se contracte plus, il n'exécute pas de mouvements, l'artère seule bat, notons qu'elle battait, pourquoi ne l'abandonnerai-je pas ? Il lâcha en effet, il fut couvert de sang. Par quoi ce sang fut-il lancé ? Assurément ce n'était point par le cœur : il ne se contractait pas.... De même ce n'était pas non plus cet organe qui communiquait au sang son impulsion, dans le cas où l'auscultation a montré à Laennec des pulsations artérielles offrant une énergie remarquable, pendant que les battements du cœur étaient faibles et sans impulsion; ce qui, soit dit en passant, avait amené ce grand observateur à conclure que les artères ont aussi une activité spéciale, une contraction propre. D'ailleurs, s'il en était autrement, M. Magendie, dans une expérience faite pour constater la force avec laquelle le sang tend à obéir à une action rétrograde, aurait-il remarqué qu'on trouve, dans le bout inférieur de l'artère divisée, à peu près le même degré de pression que dans le bout supérieur; d'où la nécessité d'appliquer deux ligatures pour éviter que le sang jaillisse également et avec la même impulsion de l'un et de l'autre orifice?

Cette remarque est si concluante, qu'on trouvera naturel que nous disions à M. le professeur du Collège de France: Comment! vous constatez que le sang est lancé avec la même force d'impulsion par le bout inférieur et par le bout supérieur, et vous attribuez ce phénomène à la seule élasticité de l'artère ? Mais si elle ne fait que revenir sur elle-même, en vertu de cette élasticité, elle ne se videra qu'en partie, le restant du liquide se coagulera bientôt, et l'on n'aura pas à craindre une hémorragie consécutive. Pourtant elle a eu lieu, dites-vous; elle peut être mortelle il faut nécessairement deux ligatures : qu'en conclurons-nous ?

Et maintenant, qu'on ne dise pas, avec Dugès, que l'opinion d'Harvey, qui attribuait tous les mouvements progressifs du sang à la seule impulsion du cœur, a été vainement attaquéc de nos jours par quelques physiologistes qui se fondent sur cette observation de Spallanzani, que la circulation continue chez les reptiles batraciens après l'ablation du cœur ; car nous leur répondrions, que ce fait n'est pas le seul qu'on puisse raisonnablement opposer à cette hypothèse, et que ce qui nous fait croire que ce savant professeur connaissait des arguments et des faits d'une plus haute portée en faveur de l'activité des vaisseaux, c'est qu'il avait modifié ses idées et formulé sa proposition en ces termes : « Disons, une fois pour toutes, que cette continuation de la circulation du sang dans les capillaires ne saurait étre équivalente à la circulation générale dont le cœur est évidemment le régulateur et le mo teur sinon unique, du moins principal. » Je dis plus: si les antagonistes de la doctrine que

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