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Vous regretter. Bientôt s'est réunie à votre belle âme celle de votre excellent doyen, membre distingué de cette compagnie, M. Vertel, dont vous avez suivi les traces dans le chemin de la science et dans celui des vertus philanthropiques. Rien ne manque non plus à ce que vous devait la religion du souvenir. Votre vie laborieuse et bienfaisante, toutes les précieuses qualités qui vous caractérisaient sont dignement retracées dans les pages si remarquables de simplicité et de sensibilité, que M. Perron vous a consacrées, portrait fidèle que pouvait seule revêtir d'une si parfaite ressemblance la main d'un véritable ami.

Et vous, poëte gracieux et fécond, non moins zélé conservateur des préceptes du goût, que religieux gardien des lois de la justice, vous, Trémolières, qui avez honoré les lettres comme la magistrature; vous qui n'étiez plus jeune, mais qui nous paraissiez ne devoir jamais vieillir, pourquoi n'êtes-vous plus là? Pourquoi déjà manquiez-vous à nos dernières fêtes, vous qui veniez si souvent parmi nous, accompagné de votre muse toujours aimable et si sagement badine, dérider les fronts les plus austères, les plus chargés d'ennuis et de regrets; vous dont ma jeunesse ambitionna de pouvoir suivre la course légère dans les sentiers pour vous déjà semés de fleurs, mais où je ne rencontrais encore que des épines; vous dont les récits charmants de bonhomie et de gaité spirituelle, les épîtres familières, les moindres opuscules, toujours composés sur une donnée d'amélioration sociale, resteront surtout comme des tableaux de moraliste, des enseignements de bon

citoyen? Longtemps se fera sentir le vide que vous avez laissé dans cette Académie. Instruire en badinant, c'était votre apanage, et les esprits capables comme le vôtre de badiner avec grâce, deviennent de plus en plus rares. Je ne ferai que saluer de nouveau, Messieurs, dans cette revue nécrologique, des cercueils qui, depuis peu de temps, ont passé sous vos yeux; je mentionnerai de la manière la plus sommaire des titres qui n'ont rien perdu de leur récente évidence. Ainsi vous sont présents, comme s'ils venaient de se manifester, ceux de M. Clerc, qui fut longtemps si haut placé parmi les émules du barreau et du ministère public, et qui, dans les dernières années de sa vie semée d'utiles travaux et de bons exemples, semblait puiser dans l'assiduité de ses relations avec vous, de nouvelles forces pour apporter à vos séances le tribut de ses veilles sur les matières les plus sérieuses, ou pour vous entretenir de son illustre ami, le maréchal Moncey, qui fut aussi l'une de nos gloires les plus pures et les plus éclatantes; ceux de M. le président Monnot, également doué des qualités les plus estimables, et qui, pour n'avoir laissé que peu de traces publiques de sa présence dans les rangs de l'Académie, n'en fut pas moins un des collaborateurs les plus habituels et les plus éclairés dans vos délibérations, regrettant sans cesse que ses fonctions ne lui permissent pas de prendre une part plus active à vos solennités; ceux de M. Maurice, qui, par des causes semblables, fut empêché d'animer vos séances de son abondante et lumineuse élocution; ceux de M. le conseiller Navand, à qui il n'a manqué que

du temps et de la santé, pour achever l'histoire importante dont il vous avait offert les premières pages; ceux de M. Guillaume, ce bibliophile distingué, qui, pour varier l'intérêt de vos lectures, mettait souvent à profit ses richesses en raretés manuscrites; ceux de MM. Ordinaire, ces deux frères si dignes l'un de l'autre, bien que si différents d'humeur, d'esprit et de manières, qui tous deux ont rempli les plus hautes fonctions dans l'enseignement et dans l'administration de l'Université, qui tous deux ont publié des ouvrages dont vous avez droit de vous enorgueillir, et qui tous deux enfin vous ont donné de leur zèle académique les gages les plus pré

cieux.

En remontant dans un passé plus éloigné de nous, je ne dirai que très-peu de mots de ceux que leur spécialité, et quelquefois des causes d'une autre nature, condamnaient au silence dans vos exercices publics, mais qui savaient nous en dédommager par de précieuses compensations.

Tel fut M. George, secrétaire-chef du rectorat de cette ville, homme d'une bonté rare, savant et laborieux mathématicien, qui vous a fait hommage d'une foule de traités élémentaires mis à la portée pratique des classes ouvrières dont il s'était constitué le professeur gratuit à Nancy, se distinguant dans la même voie que suivait alors à Besançon, avec non moins de succès, un autre de nos confrères, aujourd'hui à la tête de notre administration municipale.

Tel fut aussi M. le docteur Marchant, religieux conservaleur des enseignements d'Hippocrate, compilateur éru

dit, dont les travaux utiles vous sont connus, et de qui l'humeur enjouée, les intarissables plaisanteries, l'usage extrême mais toujours inoffensif des jeux de mots, n'excluaient pas les labeurs de patience, les plus sérieuses investigations.

Tel fut encore un ancien élève de l'illustre mathé maticien Antide Janvier, M. Perron, qui, de simple ouvrier qu'il était, parvint au rang d'ingénieur mécanicien, et qui nous a laissé, outre plusieurs machines inventées ou perfectionnées par lui, une histoire abrégée et curieuse de l'horlogerie.

Nous comptions aussi parmi les académiciens les plus laborieux, bien qu'il ne mit jamais d'éclat dans les preuves qu'il en savait donner, M. Laurens, qui tous les ans, par ses nombreux articles d'histoire locale, d'archéologie, de nécrologie et de statistique, apportait dans la publication de l'Annuaire du département de nouvelles sources d'intérêt et de curiosité.

La même année qui nous l'enleva, nous avait aussi privés de l'un des professeurs de notre école de dessin, M. Flajoulot, dont les connaissances théoriques dans les beaux-arts, et certaines œuvres bien inspirées, formaient un assez digne apanage, et qui pourtant, essaya plus d'une fois de vous prouver, par son propre fait, la fraternité classique de la poésie et de la peinture. Mais ce qui mérite surtout d'être rappelé en son honneur, c'est son zèle et son obligeance pour ses élèves; ce sont les dons qu'il a faits à la ville de Besançon, dans l'intérêt des jeunes artistes francs-comtois.

Je n'épuise point, Messieurs, par cette énumération,

que je m'efforce en vain de rendre rapide, la série des pertes dont je me suis proposé de vous entretenir. Il en est même quelques-unes qu'il m'est impossible de signaler aussi brièvement.

Comment ne rendre hommage que d'une manière fugitive à cette rare intelligence, à ce savant jurisconsulte, auteur de plusieurs ouvrages qui journellement font autorité devant les tribunaux, M. Curasson, non moins versé dans l'histoire que dans la science du droit, et qui en donna une preuve éclatante devant cette Académie dans son discours de réception? Il y démontra que, sous l'empire de la féodalité, les libertés municipales étaient déjà comprises et même entendues dans un sens extrêmement large. Sans rien dissimuler des abus de ce régime, il fit voir aussi quels en avaient été les effets salutaires sur la civilisation, les causes qui en amenèrent le déclin, et dans quel état de caducité se trouvait cette institution quand elle fut si solennellement et si complétement abolie par l'Assemblée nationale, dans sa mémorable séance du 4 août 1789, où tant de sacrifices furent accomplis sous les inspirations unanimes d'un patriotisme dont n'approchent guère aujourd'hui beaucoup de prétendus amis du peuple et de la liberté. Comment passer sous silence le second et dernier tribut académique de ce nouveau membre trop peu de temps uni à notre corporation, l'éloge de M. Proudhon, son maître célèbre, qui fut aussi l'une des gloires de cette compagnie?

Comment ne pas regretter spécialement ce laborieux professeur d'histoire, dont les utiles publications sont si

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