Obrázky na stránke
PDF
ePub

des fatigues excessives auxquelles elle a dû se vouer sans relâche pour élever sa famille, le jeune Pioche, a noblement compris ses devoirs de fils. Ses études terminées, il s'est mis à l'œuvre avec courage, et en donnant huit à neuf heures de répétitions par jour, il est parvenu non-seulement à se suffire à lui-même, mais encore à alléger sensiblement la position de sa mère. Ce candidat s'est fait estimer de ses maîtres et aimer de ses condisciples; sa conduite est irréprochable, ses manières sont douces et modestes. Il a surtout à un haut degré le sentiment du devoir.

Aux qualités morales qui le distinguent il joint d'heureuses dispositions pour les lettres. L'Académie de Toulouse dans son dernier concours lui a décerné un lis d'argent pour un hymne en l'honneur de la Vierge. Il va recevoir aujourd'hui de l'Académie de Besançon une médaille d'encouragement, seule distinction qu'elle accorde pour le concours de poésie. M. Pioche, se destine à l'enseignement, et songe à se préparer aux épreuves de la licence et de l'agrégation. Mais il lui serait impossible de donner suite à ce projet, s'il n'était affranchi pour quelque temps de la dure nécessité qui l'oblige à se livrer à un travail journalier presque infructueux pour son instruction. Les deux concurrents dont j'ai parlé paraissent avoir un avenir à peu près assuré. Le jeune Pioche est arrêté à l'entrée de sa carrière par des embarras et des obstacles contre lesquels il a lutté péniblement jusqu'à ce jour et qui le condamneraient pour de longues années, si l'Académie ne lui venait en aide, au métier stérile de répétiteur. Appelé à jouir

de la pension dont l'Académie dispose, il pourra suivre en liberté sa vocation, fortifier son talent, étendre ses connaissances et se mettre à même de subir avec succès, au bout de trois années, les sévères épreuves qui ouvrent l'accès de l'enseignement public.

Au moment de faire un choix entre des aspirants tous dignes de sa sympathie, l'Académie a cherché à se pénétrer de l'esprit du testament qui fait sa loi, et elle s'est demandé pour inspirer son vote ce que, selon toute probabilité, Suard lui-même eût prononcé en pareille circonstance. Après un examen attentif et impartial, elle a jugé que le dernier candidat dont je viens d'énumérer les titres réunissait au plus haut degré les conditions prescrites, et c'est sur lui que se sont arrêtés ses suffrages. Je proclame donc en son nom le jeune Louis-Etienne Pioche, comme titulaire de la pension Suard.

:

Si le nouvel élu se trouvait dans cette assemblée, pour me conformer aux touchantes prescriptions de la fondatrice, je lui dirais Vous que l'Académie a choisi pour enfant adoptif et dont le nom va être désormais uni à celui de Suard, approchez et contemplez l'image de l'homme généreux qui a voulu être le bienfaiteur de la jeunesse, et qui a plus compté pour perpétuer sa mémoire sur la puissance d'une bonne action que sur tout le mérite de ses écrits. Ces traits sont ceux d'un critique fin et spirituel, qui fut en même temps un homme aimable et bienveillant, un honnête homme. Lisez ses ouvrages, ils enseignent la sagesse et la modération. Etudiez sa vie, elle

[ocr errors]

vous apprendra comment on peut passer sans se souiller à travers les vices d'une société corrompue, et comment au milieu d'une confuse mêlée de principes dissolvants et de doctrines perverses, on peut conserver la droiture et la candeur native de son âme. Comme lui soyez toujours modeste, laborieux, bienveillant, modéré. Suivez toujours comme lui la route de la sagesse et du devoir, c'est celle qui conduit au bonheur. Le choix dont vous venez d'être l'objet vous impose de sérieuses obligations, mais un moyen vous est offert de vous acquitter; c'est de vous rendre utile à la société; donnez de beaux ouvrages, si vous pouvez, mais donnez surtout de bons exemples. Montrezvous digne de l'honorable patronage que l'Académie vous assure en vous confiant à la sollicitude attentive d'un homme éminent qui est comme les Droz et les Nodier, une des gloires de la Franche-Comté. Que l'image de cette ville où se sont écoulées vos jeunes années et qui a voulu s'associer pour vous au bienfait de Suard, vous soit toujours présente. Faites en sorte qu'elle soit fière d'avoir étendu sur vous sa protection libérale, et qu'elle vous compte un jour au nombre des enfants qui l'honorent par l'union du talent, du savoir et de la vertu.

RAPPORT

SUR

LE CONCOURS DE POÉSIE,

PAR M. VIANCIN.

MESSIEURS,

L'Académie a donné pour sujet de poésie : LA LOUE ET SES BORDS. Ce titre sans commentaire, comme sans restriction, laissait aux concurrents une grande latitude, la plus entière liberté pour le plan et la contexture de leurs compositions. Le sujet prêtait aux descriptions les plus variées et les plus magnifiques. On y pouvait, avec un peu d'imagination, placer quelque épisode qui en aurait accru l'intérêt. Mais, si les excursions dans le domaine des fables étaient permises, elles pouvaient bien aussi paraître superflues à qui devait parcourir un espace si rempli de merveilleuses réalités. Rien de tout cela n'a été compris au point de faire éclore une de ces œuvres complètes qui remportent la palme sans qu'il soit nécessaire de l'effeuiller.

Cinq pièces sont parvenues à M. le secrétaire perpétuel. Une seule a paru suffisamment riche de beautés incontestables pour mériter une récompense. Elle sera la dernière dont nous aurons l'honneur de vous entretenir.

La pièce n° 1 est d'une étendue qui ne nous permet pas de l'analyser brièvement. D'ailleurs sous plus d'un rapport elle mérite d'être sérieusement examinée. Elle renferme tout près de cinq cents vers, en stances régulières de diverses factures. Il y a dans quelques-unes de la cadence, une certaine mélodie ; mais on regrette d'y trouver une surabondance de détails minutieux et peu convenables au cadre proposé. Une nature grandiose comme celle que les concurrents avaient à peindre, ne comporte pas l'abus de la miniature. Dès son début, l'auteur se pose en touriste qui a vu beaucoup de pays, sans jamais perdre le souvenir des frais vallons du Jura. Sachons-lui gré de sa préférence pour une contrée qui sans doute est son berceau. Mais il aborde la Loue d'une façon par trop négligée.

« Elle est petite, oh oui! la rivière que j'aime : >> Presque pas d'eau l'été;

>> Peu de ponts, peu de bacs. -Villageois, enfants même » Vous la passent à gué. »

Toute la partie descriptive qui suit est consacrée à des ornements accessoires. Après le hochequeue qui vole de cailloux en cailloux, le beau martin-pêcheur qui passe comme l'éclair, la jeune villageoise qui remue le râteau et la fourche, le saule qui dénoue sa folle chevelure aux brises de la nuit,

« C'est la claire chanson des lointaines cascades, » Des nymphes les ébats..... >>

A quoi l'auteur ajoute cette réflexion badine :

« PredošláPokračovať »