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Le voyageur cherchant son chez-lui bien-aimé (1) !
Le bœuf au large front et la vache au poil lisse,
Et le mouton bêlant et la blanche génisse,

Alors gagnent aussi le toit accoutumé.

Sous le poids des épis le lourd char qui chancelle,

(1) J'en demande pardon à l'ombre du graud poëte; mais il m'est impossible de ne pas chercher à retracer ici une scène qui n'est que trop fréquente dans nos montagues, et dans laquelle la cloche joue l'un des plus beaux rôles qui lui soient assignés parmi nous :

S'abattant, par degrés, sur le val et la plaine,

Voyez quel noir brouillard aux flancs des monts se traine!
Entendez-vous au loin la tempête mugir,

Le vent dans les sapins s'engouffrer et rugir?
La neige, en tourbillons avec force poussée,
En travers du chemin s'accumule entassée ;
Elle fouette au visage, elle aveugle, étourdit
L'imprudent voyageur attardé dans la nuit.
La route a disparu! Dans le ciel, sur la terre,
Il cherche, mais en vain, un astre, une lumière...
Tout est noir !... Le vertige arrive et le saisit;
Plus encor que son corps, son cœur se refroidit.
Il veut crier sa voix, qu'arrête l'épouvante,
Comme un råle de mort se perd dans la tourmente.
Il trébuche, il chancelle à chacun de ses pas;
Qui tombe en ces instants ne se relève pas !
Il le sait; il frémit, sentant la mort si proche !
Mais au loin, tout à coup, retentit une cloche...
Il en connaît les sons: c'est celle du saint lieu
Où pendant son enfance il pria souvent Dieu.
Son courage renait! Il croit que Dieu lui-même
Vient lui tendre la main dans cette heure suprême;
Et, concentrant sa force en uu dernier effort,

Tout prêt à succomber, il échappe à la mort.

Trop souvent la cloche d'alarme sonne en vain : la tourmente ne lache sa proie qu'après l'avoir étouffée, et ne rond à la société qu'un cadavre.

(Note du traducteur.)

Rentre au logis, chargé de la moisson nouvelle,
Là, sur les gerbes d'or, belle de cent couleurs,
S'étale à tous les yeux la guirlande de fleurs,
Les jeunes moissonneurs se rendent à la danse;
La place et le marché dorment dans le silence;
Autour de la lumière et d'un foyer joyeux,
La famille s'assemble, et l'on bénit les cieux;
La porte de la ville avec grand bruit est close;
Et dans l'obscurité la terre se repose.
Mais si la nuit retient le méchant éveillé,
Le paisible habitant n'en est point effrayé :
Honnête homme, il comprend que, pendant qu'il sommeille,
L'œil sévère des lois est là qui toujours veille;
Content de sa journée, exempt de tout remord,
Il se couche tranquille, et tranquille s'endort.

Ordre saint! que le ciel, dans sa grâce infinie,
Voulut constituer sur la terre bénie,
Tout ce qui se convient, c'est toi qui sais l'unir:
Bonheur, liberté, joie, oh! c'est là ton ouvrage ;
Nos superbes cités, seul, tu les sus bâtir: :-
Sous ton impulsion le farouche sauvage
Du fond de ses forêts consentit à sortir.
Pénétrant sous le toit où nous passons la vie,
Tu vins nous y former à de plus douces mœurs ;
Et ce lien sacré, l'amour de la patrie,

C'est toi qui le fais naître au fond de tous les cœurs!

Où règne l'ordre, on voit toute main diligente
S'empresser au travail dans un joyeux concours.
Chaque force se montre, et, d'un mutuel secours
S'aidant, devient plus grande et plus intelligente.
Sous ta protection, ò sainte liberté !

Toi qui seule fais l'homme et sa moralité
(Car l'âme de l'esclave, agissant par contrainte,
Jamais du sens moral ne révèle l'empreinte),
Sous ta protection, avec sérénité,

Maîtres et compagnons luttent d'activité ;
Chacun sent qu il est libre, et son indépendance
Du bien comme du mal lui donne conscience;
Et, maître de lui-même, honnête homme par choix,
C'est d'un libre respect qu'il entoure les lois.
Méprisant le dédain, et la haine, et l'envie,
Chacun bénit la place où le sort le couvie.
Le travail est la gloire, enfant de la cité !
Pour prix de ton labeur ton lot s'améliore.
Va, si l'honneur des rois est dans leur dignité,
Par l'œuvre de ses mains le citoyen s'honore.

Sainte paix, doux accord, demeurez parmi nous!
Régnez, et pour jamais, régnez dans cette ville!
Puissent de l'étranger les hordes en courroux
Respecter les abords de ce vallon tranquille!
Que ce ciel, coloré de la pourpre du soir,
Ainsi soit toujours pur et jamais n'ait à voir,
Sous les efforts du feu dévorant nos villages,
D'un lugubre reflet se rougir ses nuages !

<< Compagnons, que le moule à présent disparaisse ! >> Il n'a vécu qu'un jour, mais son but est rempli; >> Et que notre œil joyeux s'enivre et se repaisse >> De l'aspect de notre œuvre à la fin accompli.

>> Jusqu'au moment où l'enveloppe cède,

-

>> Que du marteau chaque coup se succède... » Pour que la cloche enfin apparaisse au grand jour, >> Sachons sacrifier le moule sans retour. »

Le maître doit briser la forme en temps utile :
Sa prudence est plus grande et sa main plus habile.
Mais malheur ! quand l'airain, ruisselant embrasé,
Échappe de lui-même à son moule brisé !

Dans sa fureur aveugle, avec un bruit de foudre,
Le lieu qui le renferme, il le réduit en poudre.
Et, comme s'il sortait des gouffres infernaux,
Sur la terre effrayée il vomit tous les maux.
Force brutale! aux lieux où tu fais ton domaine,
Nul travail sérieux ne peut plus s'accomplir;
Où le peuple lui-même a dû briser sa chaîne,
Le bien-être pour nul ne saurait s'établir.

Malheur ! quand dans le sein des cités, l'étincelle
Qui couvait sous la cendre enfin doit éclater!
Le peuple rompt ses fers; - dans sa force nouvelle
Sans frein, et pour lui seul, terrible, il va lutter!
Pour convoquer les siens aux combats de la rue,
Aux cordes de la cloche, en fureur, il se rue;
Et l'instrment de paix, de bénédiction,
Prête une voix sauvage à la rébellion!

Le citoyen paisible a dû courir aux armes;
La place se remplit d'une foule en alarmes ;
On entend invoquer ton nom, Egalité !
Bien haut l'on te proclame, ô sainte Liberté !
O profanation des mots les plus sublimes!
Par eux l'homme enivré se livre à tous les crimes!
Des bandes d'assassins parcourent la cité,

Et l'on s'égorge au nom de la Fraternité !
Des femmes, se parant du nom de citoyennes,
S'excitent aux excès, se changent en hyènes ;
Et mêlant l'ironie à la férocité,

Plus d'une, on l'a pu voir, de sa dent de panthèr e
Se plaît à déchirer son ennemi par terre.

Rien ne reste sacré ; dans ces jours de terreur,
Se rompent les liens de la saiate pudeur,
Au méchant furieux le bon cède la place,
Le vice en liberté s'étale avec audace !...
Oh! c'est un grand péril d'éveiller le lion;
Le tigre est furieux quand la faim le dévore:
Mais l'homme, quand domine en lui la passion,
Cent fois, dans son délire, est plus terrible encore !
Malheur! quand tombe aux mains de l'Aveugle éternel
Le flambeau des clartés que nous prête le ciel !
Il ne l'éclaire point, mais il brûle, ravage
Et dévaste, en passant, la ville et le village!

«Notre œuvre est achevée; Dieu l'a voulu bénir.
>> Déployant devant nous sa beauté virginale,
>> Hors de son moule enfin notre cloche s'étale;
>> Comme une étoile d'or, voyez-la resplendir !
» Ses flancs, sa base, sa couronne,

>> Tout brille en elle, tout rayonne !

>> Et son noble écusson, bien gravé sur son cœur, » Atteste le savoir d'un habile mouleur. >>

Venez tous, compagnons; en cercle qu'on s'approche,
Et donnons, à l'instant, le baptême à la cloche:
CONCORDE! que ce nom lui reste à tout jamais !
Qu'à l'union des cœurs sa voix toujours appelle
De la communauté la peuplade fidèle!
Que l'art, en la créant, ait fait œuvre de paix!
Bientôt, se balançant au-dessus de la terre,
Sous l'éclat du soleil et dans l'azur des cieux,
Elle s'en va planer, voisine du tonnerre,

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