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c'est que le premier s'irrite, tandis que l'autre prend d'ordinaire une attitude suppliante:

Nocens precatur, innocens irascitur.

(PUBL. SYRUS.)

L'innocent se révolte contre l'inique inculpation dont il est l'objet; car, ainsi que le fait observer le fabuliste Phèdre, quand on a la conviction de son irréprochabilité, on ne supporte pas sans une vive indignation les attaques de la malveillance,

Sed difficulter continetur spiritus,
Integritatis qui sinceræ conscius,
A noxiorum premitur insolentiis;

(III, Epilog.)

et, comme dit Plaute, celui qui n'a rien à se reprocher doit parler haut et ferme, se défendre avec assurance et défier au besoin ses accusateurs :

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Audacem esse, confidenter pro se et proterve loqui.
(Amphitruo.)

Il proteste énergiquement de la pureté de sa conduite et de ses intentions. Voici le langage que prêtent divers poëtes à des personnages injustement inculpés; ce sont des dénégations exprimées avec le calme et la fermeté d'une conscience sûre d'elle-même :

Dii sciunt culpam meam illic non esse ullam.

(PLAUT.)

Ego conscia mihi sum a me culpam esse hanc procul.

Me abs te immerito esse accusatam post modo scies.

Non merui cur ferar ipse nocens.

Arguor immerito.

(TER., Adelph., III, 2.)

(ID., Hecyræ, II, 1.)

(AUL. SABINUS, Heroid., 11.)

(Ov., Trist., II.)

Juro

Non.

Me non admissi criminis esse reum.

(ID., Amor., II, 7.)

Culpa mea est, quanquam dicitur esse mea,

Nec peccatum a me quisquam pote dicere quidquam.

(CATUL., 67.)

Voyez, au contraire, l'attitude dans laquelle ces mêmes poëtes représentent l'accusé dont la conscience n'est pas nette. Pour peu qu'il ait conservé de sens moral, il éprouve le besoin de se justifier et d'implorer son pardon. Il lève les yeux et les mains au ciel; pâle et tremblant, il hasarde timidement des excuses; il a recours aux larmes, aux supplications :

Qui homo culpam admisit in se, nullu' st tam parvi preti,
Quin pudeat, quin purget sese.

Ut qui deliquit, supplex est ultro omnibus!

(PLAUT., Aulul.)

(ID., Bacchides.)

Squalidus ad superos tollit reus ora manusque.

(Ov., Metam., XV, 1.)

Tremit ille, pavetque

Pallidus, et timide verba excusantia dicit.

(ID., Ibid.)

Excusat crimen lacrymis..

(ID., Ibid.)

Stant vincti, sævoque piget sub judice culpæ.

(SIL., XIII.)

Il sollicite enfin l'indulgence de la justice, et par cela même il se condamne; car toute cause qui fait appel à la miséricorde est mauvaise :

Mala causa est quæ requirit misericordiam.

(PUBL. SYR.)

Il y a enfin entre le coupable et l'innocent cette autre différence, toujours facile à discerner, que le premier redoute la loi, et le second la chance seulement d'une injustice,

Legem nocens veretur, fortunam innocens,

(ID.)

et que l'innocent seul conserve quelque confiance, parce que seul il a droit d'espérer le salut dans son malheur : In malis sperare bonum, nisi innocens, nemo potest.

(ID.)

Aussi ne fuit-il pas la justice. C'est le coupable qui cherche à

s'y soustraire; et sa contumace, dit encore Publius Syrus, est un aveu de ses méfaits:

Fatetur facinus is qui judicium fugit.

On peut juger par ces citations que les poëtes attachaient une grande importance à l'examen de la personne même de l'accusé, de sa conduite et de son langage dans l'instruction. Une étude approfondie du cœur humain leur avait fait reconnaître la possibilité de trouver dans ces premiers éléments de conviction, et dans les observations qu'ils suggèrent, de quoi suppléer à l'insuffisance des preuves matérielles.

§ V.

Preuve testimoniale.

La preuve testimoniale occupait nécessairement une grande place dans les informations criminelles de l'époque dont je parle. Celle-là, les poëtes l'appréciaient assez peu; ils avaient sous les yeux trop d'exemples de subornation de témoins et de faux témoignages pour avoir pleine confiance dans ce moyen d'instruction.

Comme il n'y avait pas de partie publique, c'était habituellement le plaignant ou l'accusateur qui choisissait et produisait ses témoins. « J'ai là, disait-il, des témoins qui sont tout prêts à affirmer ce que j'avance : »

Mihi quidem adsunt testes, qui illud quod ego dicam assentiant. (PLAUT., Amphitruo.) Puis il faisait appel à leur témoignage en ces termes :

Vos, vos mihi testes estis me verum loqui.

(ID., Captiv.)

Recrutés de la sorte, ces témoins ne devaient généralement offrir que bien peu de garanties de sincérité.

Il y a dans le Panulus de Plaute une scène qui peut nous donner une idée de la manière dont on s'y prenait pour s'assurer de leur témoignage. L'espèce est celle-ci : des personnages de la pièce s'entendent pour prendre en

MOEURS JURID. ET JUDIC.-T. II.

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délit un léno qui avait vendu une jeune fille à un esclave appartenant à autrui, et qui devait recevoir le prix de cette vente des mains de celui-ci en contravention aux dispositions des lois par lesquelles il était défendu de toucher une somme d'argent par l'intermédiaire d'une personne de condition servile, sans le consentement de son maître. A cet effet, des tiers sont appelés pour être témoins du fait.

Celui qui a monté le coup les informe de ce qui va se passer, et leur recommande d'y prêter attention : « Cet esclave, leur dit-il, est porteur de la somme qui va être payée par lui au leno. » En gens scrupuleux, les témoins demandent à voir cette somme, afin de pouvoir ultérieurement témoigner de la chose :

Ergo nos inspicere oportet istuc aurum . .

Ut sciamus quod dicamus mox pro testimonio.

Il est satisfait à leur désir, et le payement s'opère ensuite en leur présence par les mains de l'esclave, qui verse les deniers dans celles du leno. Après quoi, les paroles suivantes s'échangent entre le meneur de l'affaire et les témoins par lui convoqués :

« Vous avez vu le leno recevant de l'or des mains d'un esclave?

Oui, nous l'avons vu.

Vous savez que cet esclave m'appartient?

Oui, nous le savons.

Vous savez aussi que le fait est prohibé par les lois?
Parfaitement.

Eh bien que chacun de vous garde mémoire de cela; bientôt vous serez appelés à en déposer en justice.

Nous nous en souviendrons. >>

Le texte que je viens de traduire est ainsi conçu :

Vidisti leno cum aurum accepit ? — Vidimus.

Eum vos esse meum servum scitis? - Scimus.

Rem adversus populi leges? - Sæpe scivimus.

- Hem! isthæc volo ego vos commeminisse omnes,

Mox cum ad prætorem usus veniet. Meminerimus.

Le personnage qui parle ainsi à ses témoins leur réitère plus loin ses recommandations de bonne mémoire, et ceux

ci lui renouvellent l'assurance qu'ils n'oublieront rien de ce qu'ils doivent certifier en justice:

Mementote illuc, advocati. Meminimus.

Puis, après les avoir remerciés de leurs bons offices, il leur donne rendez-vous pour le lendemain au tribunal :

Bonam dedistis, advocati, operam mihi;

Cras mane, quæso, in comitio estote obviam.

Il semble que Plaute ait voulu faire voir par cette scène comment on faisait la leçon aux témoins dont on se proposait d'invoquer les dépositions, et comment aussi on les faisait intervenir à l'appui de poursuites souvent fort peu loyales, telles que celles que l'on se proposait de diriger dans l'espèce contre le leno, qui se plaignait à bon droit du procédé dont on usait envers lui:

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A en juger par d'autres passages des comédies de Plaute, ces témoins complaisants, qu'on appelait alors advocati, n'étaient pas difficiles à trouver; ils s'offraient d'eux-mêmes à qui pouvait avoir besoin de leur aide :

Ad eam rem nos esse testeis vis tibi? . . .

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Plaute du reste ne se faisait pas faute de proclamer sur le théâtre que rien n'était plus commun que les procès ou accusations intentés au moyen de faux témoignages: Falsas lites falsis testimoniis

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Petunt.

Litem apisci postulant perjurio

Mali, res falsasque impetrant apud judicem.

Sæpe ætate in sua

Perdidit civem innocentem falso testimonio.'

Dans ses Fastes, Ovide fait dire à Tarquin, menaçant Lucrèce de la dénoncer comme adultère et de se porter lui

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