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Tel était apparemmeut le style de réquisitoire chez les anciens. On peut voir en effet, par les Verrines, qu'en prose il n'était guère moins énergique qu'en poésie. Les avocats qui se chargeaient d'accuser ménageaient peu d'ordinaire ceux qu'ils entreprenaient de faire condamner. Ovide, s'adressant à l'un deux, lui disait :

Cum tibi suscepta est legis vindicta severæ,

Verba velut tinctum singula virus habent.
Hostibus eveniat, quam sis violentus in armis
Sentire, et linguæ tela subire tuæ.

(Ex Ponto, IV, 6.)

Ainsi il lui faisait un mérite d'avoir un trait empoisonné dans chacune de ses paroles, alors que dans l'intérêt des lois et de la vindicte publique il s'attaquait à un coupable, et il souhaitait à ses ennemis de subir les coups de langue de ce rude joûteur. Et cependant, cet avocat était de mœurs si douces, ajoute Ovide, et d'une humeur si bienveillante, que ceux qui ne l'avaient point vu lutter au

barreau et y faire preuve de sa force n'auraient jamais pu croire qu'il fût capable de malmener des accusés :

Ut qui, quid valeas ignoret marte forensi,

Posse tuo peragi vix putet ore reos.

(Ibid.)

C'est encore du même accusateur qu'il disait que si, dans le combat, il se montrait de facile composition pour l'accusé repentant, il était impitoyable pour le coupable audacieux :

Scilicet ejusdem est, quamvis pugnare videtur,
Supplicibus facilem, sontibus esse trucem.

(Ibid.)

On juge par là que l'accusation ne manquait pas dans le barreau d'organes sévères, et quelquefois même sévères jusqu'à la rigueur.

Dans l'Enéide, Turnus reproche à Drancès, qui se porte accusateur contre lui devant l'assemblée des chefs latins, de faire appel à la peur pour donner plus de poids à ses griefs et pour surexciter le courroux des juges du débat :

Artificis scelus, et formidine crimen acerbat.

(Ened., XI.)

De pareils moyens d'audience étaient sans doute employés à Rome par les accusateurs, et par ceux-là surtout qui voulaient à tout prix obtenir une condamnation. C'est ce que Tibère reprochait aux accusateurs de Pison. << Ils font beaucoup de bruit de cette accusation sans fondement, disait-il; ils l'exagèrent, et je me plains à bon droit de l'excès d'ardeur qu'ils y apportent « An falsa hæc in << majus vulgaverint accusatores, quorum nimiis studiis jure << succenseo. » (TAC., Annal., 3.)

Pline le jeune se flattait de n'avoir pas ce défaut-là. Parlant d'une accusation qu'il était chargé de soutenir, et qui ne lui paraissait pas fondée, j'ai pensé, écrivait-il à l'un de ses correspondants, qu'il était de toute honnêteté de ne point charger un accusé qui ne le méritait pas, et je m'en suis expliqué très-librement : « Honestissimum credidi non pre« mere immerentem, idque ipsum dixi libere. »>

On voit que ce n'est pas chose nouvelle que l'abandon d'une accusation à l'audience.

Passons aux remarques et aux appréciations des poëtes, sur le rôle et l'attitude de la défense, sur les moyens de justification qu'elle comportait et sur les droits qui lui appartenaient.

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Il fut un temps où les coupables se purgeaient de leurs crimes par un moyen très-commode. Ce moyen était celui de la lustration, ou de la purification par aspersion d'eau lustrale.

Ovide rapporte dans ses Fastes que cette coutume prit naissance en Grèce, dans les siècles héroïques; qu'Actor fut ainsi lavé de certains méfaits par Pélée, qui lui administra l'eau lustrale, et Pélée lui-même, auteur de la mort de son frère Phocus, par Acaste, qui accomplit à son égard la même cérémonie d'expiation; qu'Alcméon, fils d'Amphiaraus, fut absous pareillement du meurtre de sa mère par le dieu Achélous, qui, en sa qualité de fleuve, avait tous les moyens possibles de le laver complétement:

Græcia principium moris fuit. Illa nocentes

Impia lustratos ponere facta putat.

Actoridem Peleus, ipsum quoque Pelca Phoci
Cæde per Hæmonias solvit Acastus aquas.

Amphiaraides Naupacteo Acheloo,

Solve nefas, dixit; solvit et ille nefas.

(Fast., II.)

« Nos ancêtres, ajoutait Ovide, croyaient aussi, comme les Grecs, que ce mode de purgation pouvait effacer toute tache causée par le crime :

Omne nefas omnemque mali purgamina causam

Credebant nostri tollere posse senes.

(Ibid.)

Sur quoi le poëte faisait cette réflexion fort sensée :

Ah! nimium faciles, qui tristia crimina cædis

Fluminea tolli posse putetis aqua!

(Ibid.)

Cette façon de se disculper, cette absolution opérée par simple ablution, à laquelle s'appliquait la locution latine eluere crimen, était en effet par trop facile; et il est à croire que si, comme le dit Ovide, elle fut admise par le peuple romain dans son enfance, elle ne tarda pas à tomber en désuétude.

Les Romains avaient d'ailleurs d'autres cérémonies d'expiation qui leur étaient particulières, et qui différaient de celles des Grecs. Quand, par exemple, il s'agissait d'expier un homicide auquel la volonté n'avait pas eu de part, les pontifes élevaient aux génies du pays un autel sur lequel ils faisaient plusieurs sacrifices; ensuite de quoi l'auteur de cet homicide devait passer sous le joug. Il paraît même qu'on expiait quelquefois de cette manière les homicides volontaires; car Denys d'Halicarnasse et Tite-Live racontent qu'il fut ainsi procédé pour l'expiation par l'un des trois Horaces du meurtre qu'il avait commis sur sa sœur, bien qu'il eût été absous par le peuple. Après avoir été condamné à mort par les duumvirs que Tullus Hostilius avait chargés de le juger, ce roi exigea qu'il se soumit à l'expiation avec le concours de son père, et qu'après des sacrifices, il passât sous le joug, la tête couverte : « Ut cædes, dit Tite-Live, ali<< quo tamen piaculo lueretur, imperatum patri, ut filium ex« piaret... Is, quibusdam peculiaribus sacrificiis factis... << transmisso per viam tigillo, capite adoperto, velut sub « jugum misit juvenem. » (I, 36) (1).

On conçoit que si les idées religieuses du temps pouvaient admettre de tels modes d'absolution, les lois humaines, dès qu'elles commencèrent à se substituer aux lois

(1) Dans le commencement du christianisme, les Romains avaient inventé un autre genre d'expiation, appelé Taurobolium. On immolait un taureau, dont le sang était censé opérer la purification.

divines pour le règlement des choses de ce monde, ne durent pas tarder à les rejeter comme inopérants. Aussi disparurent-ils, lors de la naissance du droit pénal; mais ils furent remplacés par d'autres qui ne valaient guère mieux.

Un moyen plus facile encore de purger une inculpation vint à s'introduire dans les usages du peuple romain. C'est celui de l'amende honorable, solemnis mos satisfactionis, laquelle se bornait à ces quelques paroles, accompagnées d'un serment, muto factum et nolo factum. Il paraît qu'il était encore fort usité du temps de Plaute et de Térence, car nous le voyons plusieurs fois mis en pratique dans leurs pièces de théâtre.

« Je ne souffrirai pas, dit un personnage féminin de l'Amphilruo de Plaute, que l'on m'accuse ainsi à faux d'un acte déshonorant. Ou je dénoncerai et poursuivrai le calomniateur, ou il me fera réparation d'honneur en déclarant sous serment qu'il rétracte ce qu'il a dit contre moi, et qu'il m'en reconnaît incapable: »

Neque me perpetiar probri

Falsam insimulatam. Quin ego illum aut deferam,

Aut satisfaciat mihi, atque adjuret insuper

Nolle esse dicta, quæ in me insontem protulit.

L'offenseur, dans l'espèce, fait sa soumission et déclare qu'il est prêt à jurer que l'épouse qu'il a injustement accusée est une femme parfaitement honnête, et que les propos qu'il a tenus sur elle n'étaient que pure plaisanterie ; par là le délit est purgé et la paix faite :

Arbitratu tuo jusjurandum dabo,
Me meam pudicam esse uxorem arbitrarier.

Habui expurgationem : facta pax est.

(III, 4.)

(III, 2.)

Dans l'Hecyra de Térence, un personnage, inculpé de fautes graves, demande qu'on lui précise nettement l'accusation, afin qu'il puisse ou la réfuter, si elle est fausse, ou s'en purger selon la coutume, si elle est vraie :

Si quid est peccatum a nobis, profer:

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