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devint un moraliste sceptique, observateur profond, mais dégoûté, de la nature et de la destinée humaines. Et le royaume ne survécut pas au roi; le peuple s'amollit et se corrompit comme le souverain; Salomon à peine mort, sa monarchie se divisa en deux royaumes rivaux et bientôt ennemis, en proie tantôt à la tyrannie, tantôt à l'anarchie, et presque toujours à la guerre. Ce n'était pas, comme jadis, une mauvaise phase passagère dans l'histoire du peuple hébreu; c'était sa décadence qui commençait, une décadence sans retour.

Que deviendra, dans cette décadence, la loi révélée à Moïse sur le Sinaï? Est-elle destinée à tomber avec la monarchie de Salomon, ou à languir et à dépérir au milieu des luttes et des désastres de Juda et d'Israël? Tout au contraire : la foi et la loi religieuse des Hébreux non-seulement se perpétueront, mais se relèveront dans cette époque de ruine politique. Les desseins de Dieu sont au-dessus du sort des États, et les instru

ments ne leur manquent jamais à travers les violences des rois et les défaillances du peuple, les prophètes d'Israël maintiendront l'ancienne alliance, et prépareront l'avénement de l'alliance nouvelle qui fera, du Dieu d'Israël, le Dieu du genre humain.

4 DIEU ET LES PROPHÈTES.

Un publiciste célèbre, libre penseur, et qui appartient à l'école radicale, un peu même à l'école positiviste, M. John Stuart Mill, a dit tout récemment, dans son ouvrage sur le gouvernement : « La hiérarchie égyptienne et le despotisme paternel de la Chine étaient des instruments très-propres à porter ces nations au degré de civilisation qu'elles ont atteint. Mais une fois arrivées à ce point, elles y ont fait une halte permanente, faute de liberté intellectuelle et de

développement individuel, double condition de progrès interdite à ces peuples par les institutions mêmes qui avaient dominé leur carrière; et comme ces institutions n'ont pas disparu pour faire place à d'autres, tout progrès ultérieur a été arrêté. Un autre peuple. d'Orient, bien petit et bien insignifiant à côté de ces deux-là, les Juifs, offre un exemple tout contraire. Les Juifs aussi avaient une monarchie absolue et une hiérarchie, et leurs institutions étaient d'origine sacerdotale comme celle des Hindous. Et ces institutions firent, pour eux, ce qu'elles firent pour d'autres races en Orient; elles leur donnèrent l'ordre, l'activité industrielle et une vie nationale. Mais ni les rois ni les prêtres des Juifs n'ont exercé sur eux, comme il est arrivé chez les autres peuples d'Orient, une domination exclusive. La religion hébraïque, qui autorisait des hommes de génie et d'un grand caractère religieux à être regardés et à se regarder eux-mêmes comme

inspirés du ciel, a donné naissance à une institution, non pas organisée, mais d'un prix inestimable, à l'ordre des prophètes, si l'on peut l'appeler un ordre. Sous la protection, sinon toujours, du moins en général efficace, de leur caractère sacré, les prophètes étaient, dans la nation juive, un pouvoir souvent supérieur à celui des rois et des prêtres; et ils maintenaient, dans ce petit coin du monde, cette diversité, cette lutte des influences qui est la seule garantie réelle du progrès continu. La religion n'était pas, chez les Hébreux, comme elle l'a été si souvent ailleurs, la simple consécration de tout le régime établi, et un obstacle à tout progrès ultérieur. Un Israélite distingué, M. Salvador, a dit que les prophètes étaient, dans l'Église et l'État juifs, l'équivalent de la liberté de la presse chez les modernes ; c'est là une juste mais insuffisante image du rôle qu'a joué, dans l'histoire nationale et universelle, ce grand

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