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CHAPITRE X.

Exposition sommaire de la doctrine développée dans l'Essai sur l'indifférence en matière de Religion.

Les personnes qui ont combattu les principes exposés dans le deuxième volume de l'Essai sur l'indifférence avoient entièrement oublié le premier, ou l'avoient lu peu attentivement, car il contient la même doctrine; et l'on ne comprend pas qu'approuvant l'un elles aient attaqué l'autre. Si ce que nous disons dans celui-ci est faux, l'ouvrage entier l'est également, et il faut l'effacer jusqu'à la dernière ligne.

En effet, qu'établissons - nous dans le premier volume? Que quiconque se sépare de l'Eglise catholique est nécessairement, ou hérétique, ou déiste, ou athée; que ces trois grands systèmes d'erreur reposent sur la même

base, c'est-à-dire que l'hérétique, le déiste et l'athée, partant d'un principe commun, la souveraineté de la raison humaine *, supposent que chaque homme, toute foi et toute autorité mise à part, doit trouver la vérité par sa raison seule, ou, ce qui est la même chose, à l'aide de l'Ecriture interprétée par la raison seule, et dès lors n'admettre comme vrai que ce qui est clair, évident, démontré à cette même raison; que ce principe conduit nécessairement au déisme l'hérétique qui est conséquent, le déiste à l'athéisme, l'athée au scepticisme absolu. Voilà ce que nous prouvons dans le premier volume de l'Essai.

Que disons-nous dans le second? Que quiconque part du principe de la souveraineté de la raison humaine, c'est-à-dire, quiconque s'imagine que, toute foi et toute autorité mise à part, il doit trouver la vérité par sa raison seule, et dès lors n'admettre comme vrai que ce qui est clair, évident, démontré à

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Voyez entre autres les pages 138, 145, 164, 174, 232 et suiv., 490 et suiv. du tom. I de l'Essai sur l'Indifférence.

cette même raison, tombe, s'il est conséquent, dans un scepticisme universel.

Or cette proposition, identiquement la même que la précédente, ne sauroit être vraie dans notre premier volume, et fausse dans le second. Attaquer celui-ci, c'est donc attaquer l'ouvrage tout entier, ou se contredire manifestement.

nous

En combattant les trois grands systèmes d'indifférence ou d'incrédulité nous sommes attaché surtout à prouver, par l'exemple de tous les incrédules et des hérétiques que l'homme qui prend son jugement privé, sa raison individuelle, pour règle de ses croyances, est forcé, de proche en proche, de nier toutes les vérités. Dans le XIII® chapitre, envisageant ce principe d'erreur d'une manière plus générale, ce n'est ce n'est pas seulement de l'hérétique, du déiste et de l'athée que nous nous occupons, mais des philosophes même religieux, qui prétendent que chaque homme, considéré individuellement et

* Les déistes et les athées sont les hérétiques du genre humain, comme les hérétiques sont les incrédules de l'Eglise.

sans relation avec ses semblables, doit trouver en soi la certitude. Nous montrons que l'homme ainsi isolé ne peut être rationnellement certain d'aucune chose, et que tous les hommes ensemble ne sauroient acquérir la certitude rationnelle, ou rien démontrer pleinement avant d'avoir trouvé Dieu.

Nous devons avouer qu'il manque, dans cette partie de notre ouvrage, une ou deux phrases qui auroient prévenu la plupart des difficultés qu'on a faites. Nous avons négligé d'avertir que la première partie de notre XIII chapitre n'étoit qu'une analyse sommaire des principaux systèmes de philosophie; et il est arrivé de là qu'en croyant nous attaquer on attaque, non pas nous, mais les philosophes que nous avions combattus, en montrant, ce que nous venons encore de prouver, qu'ils ne donnent à l'homme, 1o aucun principe de certitude ; 2o aucune règle de ses jugemens.

En effet, rappelons-nous que tous les systèmes de philosophie, de quelque manière

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qu'on les modifie et qu'on les combine, se réduisent à trois, relatifs chacun à l'un des moyens que nous avons de connoître. En un mot, dès qu'on veut que l'homme individuel trouve en soi la certitude, il faut nécessairement qu'il y parvienne, soit par les sens, soit par le sentiment*, soit par le raisonne

ment.

* Les hommes, comme nous l'avons prouvé, ont le sentiment de Dieu (Essai, tom. II, p. 51 et suiv.), le sentiment de leur propre existence, le sentiment du bien et du mal moral, etc. Il y a donc des vérités de sentiment; et ces vérités on les reconnoît, ainsi que les vérités de sensation et de raisonnement, par le témoignage qui nous apprend que les autres hommes sont affectés des mêmes sentimens que nous et de la même façon que nous. On ne doit pas confondre le sentiment avec le sens intime. Le sens intime est la conscience de ce que nous éprouvons en nous-mêmes. Ainsi nous avons la conscience de nos sensations, de nos sentimens, de nos jugemens, en un mot, de nos perceptions, quelles qu'elles soient. Le sens intime n'est donc que l'impuissance de douter, ou la croyance invincible que nous sommes affectés de telle ou telle manière. Il nous instruit de ce qui se passe en nous; il nous apprend, par exemple, que nous formons tel jugement, que telle proposition nous paroît évidente, etc.; mais il n'est point une preuve certaine que ce jugement soit vrai

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