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médie du Méchant et par Ver- Vert. On admire encore la versification brillante, harmonieuse et facile de sa Chartreuse.

Nous ne dirons rien de toute une pléiade de poëtes galants, fades et musqués, à la tête desquels on remarque DORAT, BERNARD et le marquis de PEZAY'. On a dit que PARNY et BERTIN avaient donné à la France un Tibulle et un Properce: nous n'en croyons rien, surtout pour Bertin, si inférieur à son rival, qu'on louerait volontiers si l'on n'avait pas à flétrir en lui une monstrueuse et sacrilége débauche du talent poétique. Ce qui est plus vraisemblable, c'est que le bourreau, en faisant tomber la tête d'ANDRÉ CHÉNIER (1762-1794), a arrêté sur le chemin un grand poëte qui nous aurait rendu tout au moins Théocrite et Simonide, sinon Lucrèce. Il y travaillait silencieusement. Les trop rares fragments qui attestent ses efforts montrent aussi la présence de la muse. « Il y avait quelque chose là, » dit-il à l'heure de la mort, en portant la main sur son front. Sans doute, il y avait quelque chose, et ce quelque chose est éternellement regrettable; mais ce que ce beau et pur génie avait déjà produit ne périra pas. Ces essais, pieusement recueillis, font le charme de nos heures solitaires, et l'amertume de nos regrets achève pour la gloire du nom de Chénier ce que la mort a cruellement interrompu.

1. Pezay est protégé contre l'oubli par cette épigramme de Le Brun:

Ce jeune homme a beaucoup acquis,
Beaucoup acquis, je vous assure :
Car, en dépit de la nature,

Il s'est fait poëte et marquis.

II.

Orateurs français.

L'éloquence française compte peu de monuments avant le dix-septième siècle. Cependant nous avons de grands orateurs dans tous les genres, dans la chaire chrétienne, à la tribune politique, au barreau, à l'Académie; le genre académique est particulier à la France, et il a produit des morceaux fort remarquables.

Époques de l'histoire de l'éloquence française.

Nous diviserons cette histoire de l'éloquence française en quatre époques distinctes. La première époque, qui s'étend depuis le douzième siècle jusqu'à la fin du quinzième, présente quelques grands noms, notamment saint Bernard et Gerson, dans l'éloquence chrétienne, et quelques essais remarquables d'éloquence politique dans les assemblées des états généraux. La seconde époque, qui comprend le seizième siècle et la première moitié du dix-septième, est plus féconde : la renaissance et la réforme, par la culture et le mouvement des esprits, élèvent et développent l'éloquence. C'est le temps de Calvin, du cardinal de Lorraine et de tant d'autres orateurs religieux. Les pamphlets politiques abondent, et dans la Menippée P. Pithou porte à une grande hauteur l'éloquence politique. La troisième époque est le véritable avénement de la grande éloquence chrétienne, qui brille du plus vif éclat sous Louis XIV et qui s'affaiblit dans les successeurs des Bossuet, des Bourdaloue, des Fénelon et des Massillon. Le dixhuitième siècle, qui forme une quatrième époque, nous montre la décadence de l'éloquence religieuse;

mais le barreau et l'Académie fournissent des orateurs distingués, et la crise sociale qui éclate dans les dernières années de cette période donne enfin à la France de véritables orateurs politiques.

Première époque. Éloquence naissante.

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Le douzième siècle est illustré par un grand orateur qui a mérité d'être mis au rang des Pères de l'Église c'est saint Bernard; ses discours, prononcés en latin, n'appartiennent pas à la littérature française. Il est vrai qu'on ne tarda pas à les traduire en langue vulgaire ; mais l'imperfection de cet idiome naissant, qui est devenu plus tard le français et qui n'était alors que le roman, a effacé quelques-unes des beautés du texte original'. Saint Bernard avait eu d'éloquents précurseurs, et il y eut parmi ses contemporains et ses successeurs des prédicateurs qui ne sont pas sans mérite. Dans le siècle suivant, la scolastique étouffa l'éloquence religieuse. Les états généraux de 1355 et des années suivantes n'ont guère laissé que des souvenirs de troubles. Les débats entre ces assemblées turbulentes et la royauté n'ont pas enrichi l'éloquence.

Au quinzième siècle, le chancelier de l'université, GERSON, prêta à la parole évangélique l'appui d'un grand talent et l'autorité d'un caractère honorable. Šes contemporains PIERRE D'AILLY et CLÉMENGIS méritent une place à côté de lui pour leur éloquence et leur zèle à défendre la morale et la religion. Pendant la seconde moitié de ce siècle, sous Louis XI,

1. On peut voir sur saint Bernard un passage de l'Éloge de Suger, par Garat, et une notice de Daunou dans le douzième volume de l'Histoire littéraire de la France. Une partie des sermons de saint Bernard, en langue romane, a été publiée récemment, à la suite de la version des quatre livres des Rois, par M. Leroux de Lincy.

Charles VIII et Louis XII, on vit paraître quelques orateurs sacrés dont les noms nous sont parvenus. MAILLARD, MENOT et RAULIN méritent d'être connus. On les a trop dépréciés; toutefois il n'y a pas lieu à une complète réhabilitation. Ces prédicateurs populaires ne manquent pas de talent, mais ils manquent de goût; et ce n'est pas sans peine qu'on est parvenu à tirer de leurs sermons un petit nombre de passages éloquents et quelques traits ingénieux.

La Chronique de MONSTRELET, l'Histoire du religieux de Saint-Denis, écrite en latin', et celle de JUVÉNAL DES URSINS offrent beaucoup d'essais oratoires dans le genre politique et le genre judiciaire, qu'on ne doit ni admirer ni dédaigner. Les remontrances des états et de l'université, les manifestes des princes, ont l'avantage de faire connaître sous une forme oratoire la situation des esprits. Dans le genre judiciaire, le plus curieux monument de cette époque est l'Apologie du duc de Bourgogne par JEAN PETIT, plaidoyer vraiment monstrueux au fond et dans la forme. La réplique à ce manifeste, faite au nom de la duchesse d'Orléans par l'abbé DE CERISY, renferme quelques beaux mouvements d'éloquence. Le Quadriloge invectif d'ALAIN CHARTIER peut être considéré comme un monument oratoire d'un véritable intérêt littéraire et historique; le Traité de l'Espérance, par le même écrivain, renferme aussi de belles pages. Les contemporains d'Alain Chartier l'ont surnommé le Père de l'éloquence. L'étude des anciens fut pour lui, comme pour Christine de Pisan, une école de nobles sentiments et de beau langage.

Les états généraux tenus à Tours en 1484, sous la minorité de Charles VIII, nous montrent quelques

1. Elle a été traduite récemment avec exactitude et talent par M. Bellaguet.

essais heureux d'éloquence politique. Déjà, sous le roi Jean (1357), Marcel, Charles le Mauvais, Robert Lecoq, évêque de Laon, s'étaient distingués par leur éloquence à la tribune politique. Les discussions de l'assemblée de 1484 ont été recueillies par un de ses membres, JEAN MASSELIN, qui a traduit en latin les discours que les orateurs avaient prononcés en français. On y remarque surtout une harangue de Philippe Pot, sieur de la Roche, député bourguignon. Le texte primitif de deux de ces discours a été conservé.

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Deuxième époque. Éloquence politique et religieuse. (1484-1650. 16° siècle.)

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Au seizième siècle, la réforme, en agitant l'Église et l'État, réveilla l'éloquence. Parmi les orateurs religieux, il faut citer, dans le camp des protestants, CALVIN, génie redoutable et vraiment supérieur, dont la vie fut une longue prédication. On admire surtout, parmi ses ouvrages écrits en français, la préface de son Institution chrétienne, discours adressé au roi François Ier, dans lequel la prose française commence à prendre son véritable caractère. L'apologie des protestants, que le réformateur adressa à la diète de Spire, écrite en latin, est pleine d'éloquence. THÉODORE DE BÈZE se distingua à côté de Calvin et fut, au colloque de Poissy, le champion des religionnaires. Parmi les catholiques, on nomme SIMON VIGOR, dont on a quelques sermons, et le cardinal de LORRAINE, qui répondit au discours de Théodore de Bèze par une harangue fort étendue.

La défense d'ANNE DUBOURG, conseiller au parlement de Paris, accusé d'hérésie et condamné à mort, est un morceau vraiment pathétique. On

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