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choient à ces divers esprits la vraie notion de la Divinité (1). Qu'on veuille bien y réfléchir : l'unité n'entre-t-elle pas nécessairement dans cette notion? Il faudroit donc dire que les hommes croyoient à la pluralité d'un Dieu unique. A-t-on une véritable idée de ce Dieu, si on ne le conçoit pas comme infini, éternel, souverainement intelligent et indépendant? Cicéron lui-même répond que non (2). Or s'il y a quelque chose d'avéré, c'est que les dieux du pagarisme formoient une vaste hiérarchie de puissances limitées dans leurs attributions, et subordonnées les unes aux autres (3). Comment donc auroit

(1) Presque tous les défenseurs de cette opinion soutiennent en même temps que cette notion, conservée seulement par le peuple juif, étoit perdue dans le reste du monde. Or, comment les païens croyoient-ils à plusieurs dieux, s'ils n'avoient pas la notion de Dieu ?

(2) Deum, nisi sempiternum intelligere qui possumus ? De nat. Deor., lib. I, cap. X. Vid. et. cap. XI et XII. Eschyle met cette invocation dans la bouche d'un de ses choeurs: O! vous qui êtes les plus jeunes dieux! ià Jeni VETEρOL. Eumenid., scen. IX, v. 763. Les païens ne.confondoient donc pas leurs dieux avec le Dieu suprême nécessairement éternel.

(3) I 'auteur des Vers dorés, attribués à Pythagore, et qui paroissent être de Lysis, précepteur d'Épaminondas, divise toutes les divinités en trois classes; les dieux immortels, les héros et les démons.

on conçu chacune d'elles comme indépendante? Qu'est-ce que ces divinités supérieures et inférieures, si elles sont toutes égales, toutes infinies, si elles ne sont toutes qu'une seule et même divinité? Soyons justes envers ceuxmêmes dont nous déplorons le criminel aveuglement jamais ils ne tombèrent dans ces énormes contradictions, et l'on peut justement douter qu'un renversement si prodigieux du sens humain, nous ne disons pas ait existé, mais soit possible.

Les écrivains qui parlent des divinités payen

Αθανάτους μὲν πρῶτα θεοὺς νόμῳ ὡς διάκεινται,

Τίμα.... ἔπειθ ̓ ἦρωας ἀγαθοὺς·

Τούς τε καταχθονίους σέβε δαίμονας ἔννομα ῥέζων.

Suivant Oceilus Lucanus, il doit y avoir dans chaque division du monde une espèce régnante sur les autres, dans le ciel les dieux, l'homme sur la terre, les démons entre deux. ἐπεὶ οὖν καθ ̓ ἑκάστην ἀποτομὴν ὑπερέχον τὶ γένος ἐντέτακται τῶν ἄλλων, ἐν μὲν οὐρανῷ τὸ τῶν θεῶν, ἐν δὲ γῇ ἄνθρωπος, ἐν δὲ τῷ μεταρσίῳ τοπῳ δαίμονες. Cap. III, n. 4. Il parle ensuite d'un dieu unique, ó Oɛòs, qui a formé l'homme et lui a donné des lois : puis il ajoute que si les hommes, recherchant la volupté pour elle-même, violent celles de ces lois qui sont relatives à la propagation du genre humain, leurs enfans livrés au vice seront des démons méchans, nazodaiμoves, et l'objet de la haine des familles, des hommes, des démons, des dieux et des villes. Cap. IV, n. 2 et 4. Timée de Locres, qui recon

nes, nous apprennent quels étoient le rang, les fonctions, la nature particulière de chacune d'elles. Si l'on excepte les fictions poétiques, ils ne disent rien que de conforme à l'idée qu'ils avoient, et que nous avons nous-mêmes d'esprits de différens ordres (1); et lorsqu'ils traitent des dieux, si l'on cherche dans leurs paroles la notion réelle de Dieu, loin de l'y trouver, on verra qu'elles l'excluent formellement.

Catholiques, protestans, philosophes, tous s'accordent sur ce point. « Je vais, dit Beausobre, » poser des principes que je ne prouverai pas à

noît si formellement un Dieu suprême, unique, éternel, appelle la terre le foyer des dieux, sotia Jewv. Cap. III, n. 1.

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Qui cœlum, superi, quique regunt fretum.

Senee., Medea, v. 59, p. 12. Ed. Elzevir.

« Des démons différens agissent sur les hommes, dit Phocylide; il y en a qui éloignent d'eux les maux. »

Αλλ' ἀρὰ δαίμονες εἰσιν ἐπ ̓ ἀνδράσιν ἄλλοτε ἄλλοι,
Οἱ μὲν ἐπερχομένου κακὸν ἀνέρος ἐκλύσασθαι.

Phocyl. ap. Euseb. Præp. Evang., lib. XIII, cap. XIII, pag. 687.

(1) « Les Divi des gentils n'étoient que des démons ou des géans, et des créatures d'une autre espèce que celle des hommes, quoique ceux-ci aient été aussi adoptés parmi leurs dieux. » D'Herbelot, Biblioth. orient. art. Div, tom. I, p. 321. Paris, 1783.

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présent, parce qu'au fond ils sont assez con» nus... Ces principes sont 1° que les païens » n'ont jamais confondu leurs dieux célestes » ou terrestres avec le Dieu suprême, et ne leur » ont jamais attribué l'indépendance et la sou» veraineté. Cette observation est non seule» ment juste, elle est importante. Elle détruit l'objection qu'un philosophe moderne à pous»sée, pour invalider l'argument très-solide de » l'existence de Dieu, que l'on tire du consente» ment des peuples. Le polythéisme, dit-on, a » eu le consentement de tous les peuples. Cela est » faux dans un sens, vrai dans un autre; mais le » sens auquel cela est vrai, n'affoiblit point l'argu>> ment en question. Si par le polytheisme on entend plusieurs dieux souverains indépendans, il est faux que les peuples aient jamais cru plusieurs dieux. Ils se sont accordés dans l'u>> nité d'un Dieu suprême. Mais si par le polythéisme, on entend plusieurs dieux subal» ternes, sous un Dieu suprême et maître de » tout, il est vrai qu'il y a eu un grand consente>> ment des peuples là-dessus. 2° Que les païens » ont bien su que ces dieux n'étoient que des

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intelligences qui tiroient leur origine du Dieu. suprême, et qui en dépendoient comme étant » ses ministres, ou que des hommes illustres par » leurs vertus et par les services qu'ils avoient ren

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» dus au genre humain, ou à leur patrie. 3° Qu'à l'égard de ces derniers, les païens ont cru que » ces grandes âmes, en dépouillant le corps >> mortel dont elles étoient revêtues, n'avoient » pas dépouillé l'affection qu'elles avoient eue pour leur patrie, ou pour le genre humain en général. 4° Que le Dieu suprême avoit permis » à ces âmes généreuses de demeurer sur la terre » pour y veiller au salut des peuples, qui avoient » été les principaux objets de leur affection. 5° Que ces saintes âmes habitoient dans les >> lieux où reposoient leurs cendres, préférable>>ment à tout autre, et qu'il falloit les honorer > surtout dans ces lieux là (1). »

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Voltaire s'explique à cet égard d'une manière non moins formelle. « Les Romains reconnois» sent le Deus optimus maximus; les Grecs ont » leur Zeus, leur Dieu suprême. Toutes les autres » divinités ne sont que des êtres intermédiaires ; » on place des héros et des empereurs au rang > des dieux, c'est-à-dire des bienheureux. Mais

il est sûr que Claude, Octave, Tibère et Caligula, » ne sont pas regardés comme les créateurs du » ciel et de la terre.

» En un mot il paroît prouvé que du temps

(1) Histoire de Manichée et du manichéisme, liv. IX, chap. IV, tom. II, p. 654, 655.

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