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Voudroit-on que le christianisme eût été, dès l'origine, ce qu'il est aujourd'hui, qu'il n'eût point éprouvé de développemens? Alors ce ne seroit plus le christianisme, ce seroit un ordre de choses entièrement différent, ou plutôt une contradiction manifeste; car il est clairement contradictoire que la rédemption de l'homme ait concouru avec sa chute, puisqu'il auroit fallu que le Sauveur fût né d'une mère coupable, qu'il eût êté mis à mort par son père, que le premier crime eût été lavé par un crime plus énorme, qu'Adam se fût racheté par le déicide!

Voudroit-on que jamais aucun dogme n'eût été obscurci, aucune loi violée; que l'ignorance l'erreur et le crime n'eussent jamais paru sur la terre? Est-ce là ce qu'on demande pour croire? Mais le christianisme suppose nécessairement que le monde est abandonné en partie au crime à l'erreur, à l'ignorance. Si rien de tout cela n'existoit, le christianisme non seulement seroit faux; il seroit de plus impossible d'en concevoir l'existence. Pour croire au christianisme on voudroit donc que le christianisme n'existât point, et qu'il ne pût pas même exister.

Mais prenez l'homme tel qu'il est, tel qu'il fut toujours, vous reconnoîtrez que la religion chrétienne le représente précisément en cet état

de foiblesse et de corruption; et que cet état étant donné, on ne sauroit imaginer un accord plus parfait, plus constant, plus merveilleux de tous les peuples, dans tous les âges, pour attester ce qu'enseigne cette religion aussi ancienne que le genre humain; de sorte qu'elle seroit moins croyable si la tradition répandoit une lumière plus pure et plus vive, puisque le dogme fondamental de la dégradation originelle de l'homme s'obscurciroit en proportion.

Considérez le monde entier durant tous les siècles; que voyez-vous? un effroyable débordement de vices et de crimes divers multipliés à l'infini, une continuelle violation des devoirs les plus saints; et, en même temps, l'immuable distinction du bien et du mal perpétuellement reconnue et proclamée par la conscience universelle.

Que voyez-vous encore? des erreurs innombrables qui, se succédant sans relâche, varient selon les lieux, les époques, les passions; et, en même temps, un fond commun de vérités inaltérables, perpétuellement reconnues et proclamées par la raison universelle.

Qui contestera ces deux faits? Qui osera nier la raison, ou la conscience du genre humain? Quelqu'un descendra-t-il jusqu'à cet excès de folie? Non jamais personne ne s'y résoudra. Eh

bien! qu'on sache donc que la conscience et la raison universelle, en ce qu'elle a de fondamental, ne sont que la religion.

Remarquez, en effet, que la raison humaine est comme la religion, une, universelle, perpétuelle, sainte. Elle est une, puisqu'il est impossible qu'elle varie, ou qu'elle soit jamais opposée à elle-même. Et le langage seul ne suppose-t-il pas une raison commune, immuable, à laquelle tous les hommes participent plus ou moins, et qui est la même dans tous les hommes? Elle est universelle, puisqu'elle existe partout, et que partout elle est une ; perpétuelle, puisqu'elle a commencé avec l'homme, et qu'elle durera autant que l'homme; et, si on la considère dans son objet, qui est la vérité, et dans son principe, qui est Dieu, elle est éternelle. Enfin elle est sainte, puisque condamnant tous les désordres et toutes les erreurs, il n'y a de conforme à la raison une, universelle, perpétuelle, que ce qui est saint, c'est-à-dire, les préceptes de la loi morale et les dogmes qui en sont le fondement. Dieu l'a créée par la première révélation; il l'a perfectionnée par la seconde, qui n'en est que le développement. Otez les vérités et les devoirs qu'elles seules nous font connoître, et que la tradition seule conserve, il ne restera plus dans l'homme, dans son cœur et son entende

ment, qu'un vide immense et des ténèbres profondes (1).

Comme donc la véritable raison humaine, image de la raison divine, d'où elle émane, est une et universelle, ainsi le christianisme est un et universel, parcequ'il n'est dans ses dogmes, que cette raison même, ou l'ensemble des vérités nécessaires que Dieu nous a manifestées; et dans ses préceptes, que l'ensemble des devoirs qui découlent de ces vérités, ou la loi une et universelle, non seulement de tous les hommes, mais encore, en ce qui en fait l'essence, de tous les êtres intelligens. Car il ne faut pas s'imaginer que la religion ne s'étende qu'à l'homme; elle unit dans la même société, en les soumettant à des devoirs semblables, toutes les créatures pensantes; elle embrasse, dans son unité, tous les ordres des

(1) Le premier article du symbole et de la foi universelle, Je crois en Dieu, père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, renferme les élémens de toute pensée. Qui n'auroit pas l'idée de Dieu, n'auroit ni l'idée de l'être, ni celle de cause; et sans ces deux idées mères, il est impossible de concevoir l'intelligence. La religion seule encore nous donne l'idée de pouvoir et de devoir, l'idée de loi, inséparablement liée à celle d'un suprême législateur. Ainsi, sous ce nouveau rapport, point de société sans religion, et par conséquent point de langage, point de pensée; et la pensée, le langage, la société, la religion, sont également nécessaires, également universels.

esprits célestes, qui participent, mais plus abondamment, à la même raison que nous, vivent de la même foi, adorent le même Dieu, et lui rendent le même culte, par le même médiateur, Jésus-Christ (1).

Quiconque rejette le christianisme, au degré où il le peut connoître, rejette donc la loi et la raison universelle, et renonce par cela même à toute vérité, toute raison, toute loi ; ce qui renferme une opposition absolue à Dieu, à sa volonté, qui est la loi, et à sa raison qui est la vérité par excellence.

Et ce monstrueux désordre n'auroit aucune suite funeste! Et ce crime seroit impuni! Le croyez-vous? Avez-vous conçu cette stupide espérance? Insensés, vous connoissez donc un lieu où Dieu n'est pas? Partout ailleurs, partout où règne celui qui commande au néant même, sa justice vous saisira. Il l'a dit à tous les peuples, et tous les peuples le répètent :

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« Malheur à vous qui abandonnez la loi du Seigneur (2)! Malheur à vous qui êtes sages à

(1) Et cùm iterùm introducit Primogenitum in orbem dicit: Et adorent eum angeli Dei. Ep. ad Hebræ.,

terræ,

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(2) Væ. vobis viri impii, qui dereliquistis legem Domini altissimi! Ecclesiast. XLI, 11.

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