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chez Cornutus avec deux grands philosophes, Claudius Agaternus, médecin de Lacédémone, et Pétronius Aristocrates de Magnésie. Ces deux personnages, aussi vertueux que savants, étaient de même âge que Perse. Ce fut sur leur exemple qu'il régla sa conduite. Perse fut lié très intimement, et voyagea souvent pendant les dix dernières années de sa vie, avec Pætus Thraseas, époux de la célèbre Arrie, cousine de notre poëte. Il n'est point étonnant que Perse ait eu des amis aussi illustres, et qu'il les ait conservés. Outre ses talents pour la poésie, il avait les mœurs douces, était d'une modestie rare, beau de figure, sobre et chaste, plein de tendresse pour sa mère, sa tante et ses sœurs. Lorsque Perse eut fini ses études, la lecture du poëte Lucilius lui inspira un desir vif d'écrire dans son genre, et de composer des satires. Il commença par se satiriser lui-même dans son prologue, pour avoir droit de fronder les autres dans le cours de son ouvrage.

Perse, par son testament, institua ses sœurs pour héritières, et leur laissa, dit-on, environ deux millions de sesterces, c'est-à-dire plus de cent vingt mille écus de notre monnaie. Il légua en même temps cent mille sesterces à Cornutus, ainsi que sa bibliothèque, composée de sept cents volumes. Après la mort de Perse, arrivée le 24 novembre, sous le consulat de Rubrius Marius et d'Asinius Galba, on fit à Cornutus la délivrance de son legs. Il accepta les livres, et refusa l'argent. Ce philosophe engagea la mère du poëte à supprimer les ouvrages qu'il avait composés dans sa première jeunesse, tels qu'une comédie, un itinéraire, et des vers à la louange (d'autres disent, sans apparence, contre la conduite) de la mère d'Arrie, et le commencement d'une satire nouvelle. Cæsius Bassus fut l'éditeur des satires de Perse, sur le refus de Cornutus, qui ne voulut pas s'en charger. Perse, de son vivant, avait consulté Cornutus sur ses ouvrages. Entre autres corrections que le philosophe y avait faites, il avait engagé le jeune

poëte à substituer Auriculas asini quis non habet, au lieu de Auriculas asini Mida rex habet, qu'il avait mis dans la première satire. Cornutus exigea ce changement, afin que Néron ne pût imaginer que le poëte l'avait en vue. Dès que les satires de Perse parurent, elles furent généralement admirées, et promptement répandues.

En comparant, les consulats de la naissance et de la mort de Perse, Bayle prouve qu'il n'a vécu que vingthuit ans, et réfute l'opinion de saint Jérôme, qui le fait vivre jusqu'à trente.

Avant Bayle, le commentateur Farnaby avait fixé à vingt-huit ans la durée de la vie de Perse, et l'époque de sa mort à la huitième année de l'empire de Néron.

PRÉFACE DE M. SÉLIS.

Cette préface est divisée en deux parties. La première contient des détails sur la vie de Perse: nous tâchons, dans la seconde, de caractériser la manière de ce poëte, ce qui nous conduit naturellement à discuter les reproches que la critique lui a faits.

PREMIÈRE PARTIE.

Aulus Persius Flaccus (1) naquit à Volterre (2), ville de Toscane, l'an 34 de Jésus-Christ (3), sous l'empire de Tibère. Il était chevalier romain, et allié à des personnes du premier rang. Il perdit de bonne heure son père: sa mère se remaria, puis redevint veuve quelques années après. A l'âge de douze ans, il quitta Volterre, où il avait appris les premiers éléments des lettres, pour aller continuer ses études à Rome, sous des maîtres habiles. Il avait pris la robe virile, c'est-à-dire qu'il avait atteint sa seizième année, lorsqu'il s'attacha à Cornutus, célèbre stoïcien de ce temps-là, qui enseignait les principes de sa secte à la jeune noblesse. Le maître et le disciple conçurent la plus tendre affection l'un pour l'autre. Rien de plus touchant que le tableau de leur bonheur mutuel, tel

que Perse l'a tracé (4): ils vivaient sous le même toit; ils méditaient aux mêmes heures; ils lisaient ensemble; le soir ils se retrouvaient encore à une table frugale, d'où la gaieté n'était point bannie. Plus d'une fois la nuit avancée les surprit au milieu d'une conversation savante, qu'il fallait interrompre pour prendre quelques heures de repos. Instruit par un ami, Perse fit des progrès rapides. Il a immortalisé son précepteur pour prix de ses soins : et, non content de ce tribut d'éloges, que sa reconnaissance et sa modestie concouraient à lui faire regarder comme insuffisant, il légua à Cornutus, qui lui survécut, cent mille sesterces, soixante-quinze mille francs de notre monnaie, avec sa bibliothèque. Le philosophe accepta les livres.

Perse et Lucain furent condisciples. Ils s'aimèrent dès le commencement, et ne cessèrent point de s'aimer par la suite, quoique poëtes l'un et l'autre. On dit même que lorsque notre satirique récitait de ses vers, l'auteur de la Pharsale, transporté d'admiration, avait peine à retenir ses applaudissements. Perse se lia aussi avec Sénèque, mais plus tard, et jamais il ne goûta son esprit. La conformité de leurs opinions philosophiques ne s'étendait pas jusqu'aux règles du goût. On verra combien Perse fut plus fidèle que Sénèque au style mâle et sévère du Portique. Les vrais stoïciens se montraient aussi ennemis de l'affectation dans leur diction que dans leurs manières. C'étaient les quakers de l'antiquité.

Perse eut encore pour amis Cæsins Bassus, poëte lyrique, à qui il adressa une de ses satires; et Pætus Thraseas, le même qui joua un si grand rôle dans le sénat, sous Néron, et que Tacite appelle le modèle de l'honneur. Notre poëte fut toujours exact à remplir les devoirs de l'amitié ceux de la nature lui furent sacrés.

Aux graces de la figure, Perse joignait la plus douce aménité de mœurs; et, ce qui pouvait passer pour un

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