Obrázky na stránke
PDF
ePub

CHAPITRE VIII

SUITE DU MÊME SUJET.

L'universalité de la Religion primitive est un fait si incontestable, que tous les anciens Pères, en annonçant l'Evangile aux Païens, s'appuyoient, pour établir l'unité de Dieu, et le devoir de lui rendre un culte, l'immortalité de l'âme, les peines et les récompenses futures, l'existence des bons et des mauvais anges, sur le consentement unanime des hommes, des poëtes, des philosophes, des législateurs; sur les pratiques, les croyances, les oracles même du paganisme et le crime des idolâtres, dit Tertullien,

1 S. Justin., Apolog. I, n. 18-21. Id. Apolog. II, Cohort. ad Græc., et lib. de Monarch. Athenag. Orat. pro Christ., n. 4 et seq. Theoph. Antioch., lib. II ad Autolyc, n. 33 et seq. Clem. Alex. in Protr. et lib. VII Strom. Euseb., Præp. evang., lib. II. - Origen. contr. Cels., lib. I et IV. · Arnob. advers. Gentes, lib. II et IV. Tertullian., De Carne Christ., lib. I, contr. Marcion. De testimon. anim. Apologetic. adv. gentes, cap. xvIII, XXI, XXII. S. Cypr. De idolor. vanit. Lact., Divin. Instit.,

Minut. Felic. Octav., n. 18 et 19.

lib. I, cap. II, IV, V.

S. Cyril., adv. Julian., lib I.

-

Greg. Nazian.

ESSAI SUR L'INDIFFÉRENCE EN MATIÈRE DE RELIGION 159 est de ne vouloir pas reconnoître celui qu'ils ne peuvent ignorer1

Clément d'Alexandrie, dans le Ve livre des Stromates, compare la doctrine des lettres anciennes avec celle de la révélation; et Eusèbe entreprit de prouver que, par cette doctrine des lettres, Dieu avoit eu dessein de préparer les Gentils à son Évangile, comme les Juifs par la loi qu'il leur avoit donnée. La Préparation Évangélique n'est quan tissu de passages qui se rapportent aux dogmes chrétiens. L'auteur de l'Apologétique aux Gentils déclare même expressément que les inventeurs des fables païennes savoient que le Christ devoit venir. Saint Justin, si instruit des doctrines des Grecs, assure qu'il leur étoit annoncé par d'antiques oracles répandus dans tout l'univers; et c'est par cette foi, qui devoit être un jour révélée plus clairement, que les anciens justes étoient sauvės, dit saint Augustin".

Ce que tous les peuples ont toujours cru est nécessairement vrai; voilà le principe qu'opposent les Pères aux

Greg. Nyssen. Orat. 5, de beatitud.

Orat. 24. S. August. tract. 106 in Joan. S. Joan. Damasc. Exposit. accur, fid. Orthod., lib. I, cap. I et in. L'auteur de l'ouvrage imparfait sur S. Matthieu, après avoir observé que tous les hommes connoissent Dieu, ajoute : Non autem videntur verè cognoscere, quia non dignè colunt. On en pourroit dire autant de beaucoup de chrétiens.

1 Et hæc est summa delicti nolentium recognoscere, quem ignorare non possunt. Apologetic., c. xvII.

Sciebant qui penes vos fabulas ad destructionem veritatis istius æmulas præministraverunt; sciebant et Judæi venturum esse Christum. Tertullian., Apolog., c. xxi.

3 S. Justin. ad Græc. cohortat. II, Oper., p. 36, 37. Lutet. Paris, 1615.

4 Sacramentum porrò regenerationis nostræ manifestum esse voluit, manifestatus Mediator. Erat autem antiquis justis aliquod occultum, cùm tamen et illi eâdem fide salvi fierint, quæ fuerat suo tempore revelanda. S. August., lib. ad Dardanum, c. x1, t. II, Oper., col. 689.

impies et aux idolâtres1. L'auteur d'une homélie sur le psaume XIII parle ainsi: «Il n'y a point de Dieu 2! « Et comment le nom de Dieu se trouve-t-il dans toutes « les langues humaines? Tant de millions d'hommes qui << attestent que Dieu est, s'abusent donc, et l'insensé qui «ment à l'écart, croit posséder seul la vérité. Il veut ren« verser lui seul le témoignage du monde entier; tandis <«< qu'en vertu du consentement, un juge équitable le con« damneroit, s'il attaquoit un testament appuyé de la « déposition de sept témoins. Ne dites donc pas dans « votre cœur : Il n'y a point de Dieu; mais plutôt tour«nez-vous vers le Seigneur votre Dieu avec toute la « terre *. >>

Lactance, remarquant la multiplicité des sectes philosophiques opposées les unes aux autres: « Dans laquelle, <«< dit-il, trouverons-nous la vérité? Elle ne peut certaine<«<ment être dans toutes. Chaque secte condamne les au

Et c'est le principe que Bourdaloue opposoit aussi aux impies de son temps. « Cette idée générale de religion, gravée dans l'esprit de << tous les peuples, et répandue par toute la terre, est trop univer– « selle pour être une idée chimérique : que si c'étoit une pure imagi<< nation, tous les hommes, d'un consentement si unanime, ne seroient << pas convenus à se la former: de même qu'ils ne se sont, par exem«ple, jamais imaginé qu'ils ne doivent point mourir. » Pensées, t. I, p266. Éd. de Paris, 1802.

2 Dixit insipiens in corde suo: Non est Deus. Psalmus xìï, 1.

5 Non est Deus. Et quomodo omnis lingua hominis Deum nominat? Falluntur ergo omnes hominum myriades quæ Deum esse dicunt, et solus insipiens se putat verum dicere, qui solus ità mentitur. Et qu¡ quinque vel septem testimonia vult in testamentis evertere, per consensum rejicitur, quando veritas judicat; publicam autem totius orbis linguam solus vult insipiens evertere? Int. Chrysost. Homil., Oper., t. V, p. 558.

4 Ne dicas in corde tuo, Non est Deus, sed potiùs reminiscens, convertere ad Dominum Deum tuum cum omni fini terræ. Ælred. Specul. charit., lib. I, cap. vi.

<< tres, et est condamnée par elles. Quelle que soit celle « que vous regardiez comme vraie, des philosophes la dé«clarent fausse. Croirons-nous donc à un seul qui se loue <«<lui-même et sa doctrine, ou à tous les autres qui s'ac« cordent pour l'accuser d'ignorance? Il est nécessaire « que le jugement de plusieurs soit plus droit que le juge« ment d'un seul. Tout étant donc incertain, il faut croire a à tous, ou ne croire à personne1. »

On ne peut établir plus clairement le consentement commun ou l'autorité générale, comme règle de vérité. Mais les païens admettoient-ils cette règle, la connoissoientils? Ceux qui feroient cette question assurément ne s'entendroient pas; car, ce seroit demander si les païens participoient à la raison humaine, ou aux vérités transmises par la tradition. Les croyances universelles prouvent l'universalité de la règle qui les perpétuoit. Quand donc on ne la trouveroit nulle part formellement énoncée dans les anciens, nous n'en serions pas moins sûrs qu'ils ne pouvoient l'ignorer. Mais la Providence a voulu que des témoignages exprès, et qui se succèdent pour ainsi dire de siècle en siècle depuis la plus haute antiquité, confirmassent d'une manière éclatante la preuve que nous venons d'indiquer.

Ouvrez les poëmes d'Hésiode, contemporain d'Homère;

* In multas sectas philosophia divisa est, et omnes varia sentiunt. In quâ ponimus veritatem? In omnibus certè non potest. Designemus quamlibet, nempè in cæteris omnibus sapientia non erit. Transeamus ad singulas. Eodem modo quicquid uni dabimus, cæteris auferemus. Unaquæque enim secta omnes alias evertit, ut se, suaque confirmet, nec ulli alteri sapere concedit, ne se decipere fateatur: sed sicut alias tollit, sic ipsa quoque ab aliis tollitur omnibus... Quamcumque laudaveris, veramque dixeris, à philosophis vituperatur, ut falsa. Credemus ne igitur uni se, suamque doctrinam laudanti, an multis unius alterius ignorantiam culpantibus? Rectiùs sit necesse est, quod plurimi sentiunt, ́ quàm quod unus... Cùm igitur omnia incerta sint, aut omnibus credendum est, aut nemini. Lactant., Divin. Inst.. lib. III, cap. iv, p. 60.

vous y verrez cette maxime qui est tout ensemble et le principe de la sagesse, et le fondement de la tradition: Ce que plusieurs peuples attestent ne sauroit être faux1.

Plein d'une vaine confiance en vous-même, oserez-vous opposer au jugement unanime des hommes votre jugement particulier; Sophocle vous dira, que celui qui croit avoir raison seul est vide de sens 2. Il y a en effet dans le nombre même, comme le remarque Pline, une raison supérieure qui résulte de l'union. Mais personne n'a mieux vu qu'Héraclite toute l'étendue de ce principe, et n'a mieux établi le vrai fondement de nos connoissances. « La raison <«< commune et divine, dont la participation constitue la <«< raison individuelle, est, selon lui, le criterium de la vė«rité. Ce qui est cru universellement, est certain; car « cette croyance est empruntée de la raison commune et <«< divine; et, par le motif contraire, toute opinion indivi<< duelle est dépourvue de certitude. » C'est ainsi que

1

Φήμη δ' οὔτις πάμπαν ἀπόλλυται, ἥν τινα πολλοὶ
Λαρὶ φημίζουσι.

Non et enim penitùs vana est sententia, multi*

Quàm populi celebrant.

Hesiod., lib. Oper. et dier., sub fin.

Όστις γὰρ αὐτὸς ἤ φρονεῖν μόνος δοκεῖ,

ἤ ψυχὴν ἔχειν,

Οὗτοί διαπτυχθέντες, ὤφθησαν κενοί.

Soph., Antigon., v. 707-709, t. I, p. 191. Ed. Brunck.

5 In numero ipso quoddam magnum collatumque consilium. Plin. Epist. xvn, lib. VII.

4 Τοῦτον δὴ τὸν κοινὸν λόγον καὶ θεῖον, καὶ οὗ κατὰ μέτοχὴν γενόμεθα λογικοί, κριτήριον ἀληθείας φησίν ὁ Ηράκλειτος· ὅθεν τὸ μὲν κοινῇ πᾶσι φαινόμενον, τοῦτ ̓ εἶναι πιστον· τῷ κοινῷ γὰρ καὶ θείῳ λόγῳ λαμβάνεται· τὸ δὲ τινι μόνῳ προσπίπτον, ἄπιστον ὑπαρχειν διὰ τὴν ἐναν Tíav airíav, Sextus Empiric., adv. Logic., lib. VII, § 151, Ed. Jo., Alb. Fabr. Lips. 1718.

« PredošláPokračovať »