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Ce n'étoit, en aucun pays, le dogme qui étoit vicieux, mais les vains commentaires que la raison y surajoutoit. Le désir de savoir plus que ne leur apprenoit la tradition universelle, égaroit les esprits curieux, en même temps que les passions, fatiguées d'un culte pur et de la loi morale qu'il rappeloit, précipitoient le peuple dans des superstitions sans nombre.

Les philosophes orientaux étoient divisés en plusieurs sectes. « Cependant il faut observer, dit Mosheim, que <«< comme toutes ces sectes partoient d'un principe com<«<mun, leurs divisions n'empêchoient point qu'elles ne << s'accordassent sur certaines opinions touchant la Divinité, l'univers, le genre humain, et plusieurs autres su« jets: elles reconnoissoient toutes l'existence d'une nature «< éternelle, qui possédoit la plénitude de la sagesse, de la <«< bonté et de toutes les perfections, et dont aucun mortel « ne pouvoit se former une idée complète 1. »

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Anquetil du Perron a prouvé que les Perses reconnoissoient l'unité de Dieu 2, créateur de l'univers. C'est aussi

pium de quo scriptor Explanationis brevis dogmatum chaldaicorum : μίαν ἀρχὴν τῶν πάντων δοξάζουσι, etc. Unicum arbitrantur rerum omnium principium, idque profitentur unum esse et bonum. Cleric., Philosoph. oriental., lib. I, sect. 1, cap. 1, Oper. philos., t. II, p. 186. « Ils reconnoissoient un Dieu souverain, auteur de toutes les << choses, lequel avoit établi cette belle harmonie qui lie toutes les << parties de l'univers... L'homme doit sa naissance à Dieu, et le Dieu << suprême s'est servi d'un autre Dieu pour former ce monde. Cette << doctrine n'étoit point particulière aux Chaldéens. C'étoit même une << opinion universellement reçue dans tout l'Orient, qu'il y avoit des « génies, des dieux subalternes, et dépendants de l'Être suprême, qui << étoient distribués et répandus dans toutes les parties de ce vaste << univers. >> Diderot, Philosophie des Chaldéens; OEuvres, t. I. p 456 et 457.

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1 Histoire ecclésiastique ancienne et moderne, siècle premier, part. II, t. I, p. 93 et 94. Yverdun, 1776.

2 Mémoire de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, t. LXI, p. 298, et t. LXIX, p. 101 et suiv.

le sentiment de Hyde . Suivant un auteur persan cité par Malcolm, « la Religion primitive de la Perse fut une ferme << croyance dans un Dieu suprême qui a fait le monde par <«< sa puissance et le gouverne par sa sagesse; une crainte « pieuse de ce Dieu, mêlée d'amour et d'adoration; un « grand respect pour les parents et vieillards, une affection << fraternelle pour tout le genre humain, et même une ten<< dre compassion pour les animaux 2. »

A cette Religion succéda le culte de l'armée du ciel et ensuite le culte du feu, adopté et modifié par Zoroastre. « Dieu, disoit-il, existoit de toute éternité et étoit comme << l'infini du temps et de l'espace. Il y avoit dans l'univers << deux principes, le bon et le mauvais l'un se désignoit « par le nom d'Hormuzd, ce qui dénotoit l'agent principal « de tout ce qui étoit bien; et l'autre Arimane, le sei<< gneur ou chef du mal... Les agents d'Hormuzd cher<< choient à conserver les éléments, les saisons et l'espèce « humaine, que ceux d'Arimane cherchoient à détruire; <«< mais le principe du bien, le grand Hormuzd, étoit seul << éternel, et devoit à la fin des choses prévaloir. La lu

Il cite le témoignage formel de Sharistani, Hist. relig. vet. Pers p. 299. Abulfeda (apud Pocock, p. 143), et Ben-Shounah (ap. Hyd., c. ix, p. 164), confirment ce témoignage, qui est conforme à celui d'Hécatée dans Diogène Laërce. Vid. et. Prideaux, Histoire des Juifs, part. I, lib. IV.

2 Histoire de Perse, par sir John Malcolm, t. I, p. 273. Anciennement les Perses n'avoient, suivant Hérodote, ni temples ni statues de la Divinité. Herodot., lib. I, c. cxxxi.'

5 Mosheim a cru que, selon la doctrine de Zoroastre, Arimane étoit originairement bon. « Alterum (numen) rebus noxiis et perniciosis de<«<lectaretur, non tam Dei maximi quàm suâ ipsius culpâ et vitio, >> System. intellect. Cudw., t. I, p. 331, n. Anquetil du Perron a prouvé d'une manière sans réplique la vérité de l'opinion de Mosheim. Mémoire de l'Académie des inscriptions, t. LXIX, p. 148 et suiv.

Zend-a-Vesta, et Plutarch., De Isid. et Osirid., p. 370, édit.

<«<mière étoit le type du bon esprit, l'obscurité celui du <«< mauvais; et Dieu avoit dit à Zoroastre: Ma lumière est <«< cachée sous tout ce qui brille 1. C'est à cause de cela « que le disciple de ce prophète, lorsqu'il fait ses actes de << dévotion dans les temples, se tourne vers le feu sacré qui est sur l'autel; et, lorsqu'il est en plein air, vers le «< soleil, qui est la plus noble de toutes les lumières, celle « par laquelle Dieu répand sa divine influence sur toute la << terre, et perpétue l'œuvre de sa création 2... >>

Paris, 1764. Il est certain que les Perses admettoient un Dieu supérieur à Hormuzd et à Arimane. Ce dieu est l'Éternel, le grand Dieu, ó péyistos Osòs (Xenoph. de Exped. Cyr., lib. I), l'auteur et le père du monde, tây пávτwv пointǹv xai πaτépa. (Eubul, de antro Nymph.) Théodore de Mopsueste le nomme Zarouam (Phot., Biblioth. cod. 81, p. 199, ed. Rothom. 1693), c'est-à-dire selon Tollius et Gaulmin, sator rerum, sator omnium, du mot hébreu y seminavit. M. de Guignes n'adopte pas cette étymologie: il remarque (Journal des savants, 2e vol. de juin 1754) que plusieurs écrivains orientaux font mention d'Hazarouam comme d'une divinité à laquelle les anciens Perses attribuoient la puissance universelle et le gouvernement de toutes choses. Or, Hazarouam, en persan, signifie non pas sator, mais un espace de plusieurs milliers d'années, ou l'éternité. L'Hazarouam de Zoroastre est donc l'Éternel, c'est l'Ancien des jours de Daniel. Les autres dieux avoient été produits dans le temps: mais le Dieu souverain, le principe de toutes choses, est Hazarouam, c'est-à-dire l'Être nécessaire, subsistant par lui-même de toute éternité. (Mémoire de l'Académie des inscriptions, t. XLVII, p. 13 et 17. M. Silvestre de Sacy, Mémoire sur diverses antiquités de la Perse, p. 46, et d'Herbelot, Biblioth. orient., art. Fars., t. II, p. 446.) Au lieu d'Hazarouam, comme l'écrit M. de Guignes, il faut lire Zerouane Akherene, mot qui, dans la langue zend, signifie le temps sans bornes, l'éternité. En sanskrit, le même mot et la même idée se reproduisent presque littéralement dans Sarvum Akhyaram, omne indivisum ou indivisible. ñàv xai ev. Fred. Schlegel. Annales de la littérature de Vienne, 1819; vol. VIII.

1 Zend-a-Vesta.

2 Histoire de Perse, par sir John Malcolm, t. I, p. 286 et 287. Eusebe confirme le témoignage des écrivains orientaux consultés par

Il subsiste encore aujourd'hui quelques restes du magisme ou de la Religion de Zoroastre parmi les Guèbres. Selon Chardin, dont le témoignage est confirmé par Mandeslo, «ils tiennent qu'il y a un Être suprême qui est au<< dessus des principes et des causes; ils l'appellent Yerd, «mot qu'ils interprètent par celui de Dieu ou d'Ameéter« nelle1. » Rien n'efface de l'esprit des peuples cette grande et consolante idée : elle brille encore au sein même de l'ignorance la plus profonde, et ne s'éteint que dans les ténèbres d'une science orgueilleuse et corrompue.

Fidèles à la tradition qu'ils avoient reçue de leurs pères, les Indiens n'avoient originairement aucun simulacre; ils n'adoroient que Dieu, et reconnoissoient une seule cause intelligente qui avoit formé le monde 2. Brahm est le nom

M. Malcolm. Voici ses paroles : « At verò Zoroastres magus in sacro << rituum commentario hæc totidem verbis habet. Deus autem est... « princeps omnium, expers interitûs, sempiternus, sine ortu, sine « partibus, maximè dissimilis, omnis boni moderator integerrimus, « bonorum optimus, prudentium prudentissimus, legum æquitatis ac « justitiæ parens, se tantùm præceptore doctus, naturalis, perfectus, « sapiens, et sacræ vis physicæ unus inventor. » Eusèbe ajoute que Hostanès s'exprime de la même manière dans un ouvrage divisé en huit livres, è 'xtatsúyy. Præp. evangel., lib. I, cap. x, p. 42. Vid. et. Dio Chrysost., orat. Boryst. XXXVI, p. 448. Ed. Morel, 1604. Hostanès étoit chef des mages, et successeur presque immédiat de Zoroastre. Minutius Félix le loue d'avoir rendu hommage au vrai Dieu. « Eloquio et negotio primus Hostanes et verum Deum meritâ majestate << prosequitur et angelos, id est, ministros et nuntios Dei, sed veri, « ejusque venerationi novit adsistere, ut et nutu ipso et vultu Domini « territi contremiscant. Idem etiam dæmones prodidit terrenos, vagos, « humanitatis inimicos. » Min. Fel., Oct., c. XXVI.

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↑ Voyages de Chardin, t. IX, p. 139. Éd. in-12 d'Amsterdam, 1711.

· Hyde, Hist. relig. vet. Pers., 108.

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2 Strabo, lib. XV, p. 490. Bardes., ap. Euseb., Præp. evang., ib. VI, p. 275. On lit dans ce passage le nom de Brachmanes; mais il est évident, suivant M. de Sainte-Croix, que Bardesanes a voulu parler des anciens Samanéens.

de ce Dieu souverain dans l'antique Religion de Brama. Constamment caché, il est tout, il est l'essence inconnue de toutes choses. Il manifeste sa pensée, sa volonté, par Brama, son fils. Brama prononce la parole de la création, Vach, appelée fille de Brama. Dans ses nombreuses personnifications, cette énergie ou Shakti, cet esprit ou ce souffle du Créateur, porte le nom d'Iva ou de la nature, de Sarasvati, la blanche déesse, la nature vierge, le paradis, et mille autres noms. Elle est le Veda, la parole du savoir primitivement révélé; elle est la Gayatri, la doctrine mystique, fondement de la croyance des Bramanes.

Ces idées, présentées sous d'autres formes, produisirent plus tard les Religions de Vishnou et de Siva. On pourroit comparer Brama au Zerouane Akerene des Perses, Vishnou à Ormouzd, et Siva au malfaisant Ahriman. Dieu et le démon se partagent ainsi l'empire du monde. Siva consumera la terre par le feu, lorsque Vishnou apparoîtra sur la fin des jours, sous la figure pâle de la mort, représentée, comme dans l'Apocalypse, par un cheval blanc. Selon les doctrines indiennes, le monde a subi plusieurs catastrophes, et nous survivons dans l'âge de fer, le CaliYouga, à une grande destruction causée par l'eau, à peu près à la même époque où Moïse place le déluge 1."

L'Être suprême, éternel, est désigné, en sanskrit, par différents noms Swayambou, celui qui est par lui-même ; d'où le nom de l'homme, Swayambouva, le fils de celui qui est par lui-même; Vishva-Karma, le grand ouvrier; Pradshapati, le Seigneur de la création, etc. Dans le Manava Shastra, il est appelé le Dieu irrésistible, existant par

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1 Voyez les Recherches asiatiques, et principalement dans le VIII® volume, les Mémoires de Colebrooke sur les Vedas. Vid. et. Fréd. Schlegel, Sur la langue et la sagesse des Indiens, Heidelberg, 1807, en allemand.

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