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« cui restituitur: omnia enim quæ possidentur sub ratione utilis cadunt. Nec tamen debet ille qui detinet rem alienam sibi appro<< priare, sed vel rem servare ut congruo tempore restituat, vel « etiam alii tradere tutius conservandam (1). » D'après ce principe, il n'est pas même permis de restituer dans le cas dont il s'agit, à moins qu'on ne puisse différer la restitution sans de trop graves inconvénients. Ainsi, on ne doit point rendre une épée à la personne qui veut s'en servir pour tuer son ennemi. Si on le faisait, on pécherait évidemment contre la charité. Mais pécherait-on contre la justice, en la rendant sans y être forcé? Suivant la plupart des docteurs, on pécherait contre la justice: c'est aussi le sentiment de saint Alphonse de Liguori (2). Cependant, l'opinion contraire nous paraît assez probable, soit parce que le détenteur d'une épée qui ne lui appartient point fait une chose bonne de sa nature, en la rendant à celui à qui elle appartient; soit parce qu'il n'est pas tenu, d'office ou par justice, d'empêcher le crime que celui-ci veut commettre : n'ayant pas droit de garder cette épée comme sienne, le débiteur ne peut, ce nous semble, être assimilé à celui qui, étant propriétaire d'une arme, la prêterait, sachant très-bien que l'emprunteur doit s'en servir pour tuer quelqu'un.

1039. La troisième cause qui suspend l'obligation de payer la totalité de ses dettes, est la cession qu'un débiteur fait de ses biens en faveur de ses créanciers. Si ses biens ne sont pas suffisants, il peut attendre, sans pouvoir être inquiété, qu'il ait d'autres biens pour achever ses payements (3).

La quatrième cause est la difficulté de découvrir celui à qui l'on doit restituer.

ARTICLE II.

Des Causes qui font cesser obligation de restituer.

1040. Les mêmes causes qui éteignent une obligation conventionnelle, éteignent également l'obligation de restituer. Ces causes sont le payement, la novation, la remise volontaire, la compensation, la confusion, la perte de la chose due, et la prescription (4). Comme nous avons parlé ailleurs de ces différentes causes, nous nous bornerons aux observations suivantes :

(1) Sum. part. 2. 2. quæst. 62. art. 5. n° 772.-(4) Voyez le n° 770, etc.

(2) Lib. I. n° 697.

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(3) Voyez le

Premièrement, on est entièrement dispensé de restituer, quand on a restitué au créancier de son créancier, en le faisant toutefois de manière à ce que celui-ci n'en souffre point. Exemple: Je dois cent francs à Pierre; Pierre doit la même somme à Paul; si je paye les cent francs à Paul, je me trouve évidemment libéré à l'égard de Pierre, comme celui-ci l'est à l'égard de Paul.

1041. Secondement, suivant le sentiment le plus commun, le débiteur qui a fait un don à son créancier, oubliant la dette qu'il a contractée envers lui, n'est point affranchi de l'obligation de restituer. La raison qu'on en donne, c'est qu'une donation pure et simple n'est point un payement. Cependant, l'opinion contraire est assez fondée, quand il est d'ailleurs certain que le débiteur n'aurait pas donné s'il se fût souvenu de sa dette. On présume toujours, dit saint Alphonse, qu'une personne qui donne a plutôt l'intention générale implicite de remplir une obligation de justice, que celle de faire une donation gratuite. Il ajoute que la donation étant faite par suite de l'oubli de la dette fondée sur l'erreur, elle peut, par conséquent, être rescindée par le donateur lui-même : d'où il conclut que, si la somme que le débiteur a donnée n'est point inférieure à celle qu'il doit, la dette se trouve compensée par la donation (1). 1042. Troisièmement, l'obligation de restituer à l'Église cesse par la dispense du Souverain Pontife, comme celle de restituer à l'État peut cesser par la dispense du Gouvernement.

(1) Lib. I. n° 701.

HUITIÈME PARTIE.

Du huitième précepte du Décalogue.

1043. Le huitième précepte est ainsi conçu: Vous ne porterez point de faux témoignage contre votre prochain; «Non loqueris « contra proximum tuum falsum testimonium (1). » Par ce commandement, Dieu nous défend non-seulement le faux témoignage, mais encore le mensonge, la détraction, et toute parole ou action qui peut blesser l'honneur ou la réputation du prochain.

CHAPITRE PREMIER.

Du Mensonge.

1044. Mentir, c'est parler contre sa pensée avec l'intention de tromper; c'est affirmer comme vrai ce que l'on croit faux, ou comme faux ce qu'on croit vrai, dans le dessein d'induire en erreur : «Nemo dubitat, dit saint Augustin, mentiri eum qui volens « falsum enuntiat causa fallendi (2). » On ment par parole, par écrit, par geste ou par action; mais, pour qu'il y ait mensonge, il faut que celui qui exprime une fausseté ait l'intention de tromper. Il est des circonstances qui indiquent assez que celui qui ne parle pas suivant sa pensée, n'a point cette intention; alors il n'y a plus de mensonge, bien qu'on ne dise pas des choses vraies (3). Ce n'est point non plus un mensonge de dire ou de raconter une chose de La manière qu'elle nous est connue, quoiqu'elle ne soit pas véritablement telle que nous la présentons : « Quisque hoc enuntiat quod « vel creditum animo vel opinatum tenet, etiamsi falsum sit,

(1) Exod. c. 20. v. 16. - (2) De Mendacio, c. 4. - (3) S. Augustin, ibid. c. 2.

<< non mentitur (1). » On distingue le mensonge joyeux, le mensonge officieux et le mensonge pernicieux. Le mensonge joyeux est celui qui se dit par manière de jeu, par divertissement, par récréation. Le mensonge officieux est celui qui tend à être utile au prochain, soit en lui procurant quelque avantage, soit en empêchant qu'il ne lui arrive du mal. Enfin, le mensonge est pernicieux, lorsqu'on ment pour nuire à quelqu'un. Tout mensonge étant opposé à la vérité, est mauvais de sa nature, il n'est jamais permis. Aussi l'Écriture sainte condamne absolument toute espèce de mensonge : « Noli velle mentiri omne mendacium (2). Non mentiemini, « nec decipiet unusquisque proximum suum (3). » De là nous concluons, d'après saint Augustin et saint Thomas, que l'on ne doit jamais mentir, ni dans l'intérêt de la religion, dont la première base est la vérité; ni sous prétexte de procurer la gloire de Dieu, qui ne peut être glorifié que par le triomphe de la vérité; ni pour détourner le pécheur du crime; ni pour sauver la vie à un innocent, ou procurer le salut à une âme qui est en danger : « Non est licitum << mendacium dicere ad hoc quod aliquis alium a quocumque peri<«< culo liberet (4). ›

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1045. Mais tous les mensonges n'ont pas le même degré de malice: le mensonge joyeux et le mensonge officieux ne sont que véniels de leur nature; cependant ils peuvent devenir mortels à raison des circonstances ou du scandale qu'ils occasionnent, eu égard au caractère des personnes qui se permettent de mentir, surtout si elles le font habituellement : « Mendacium officiosum vel jocosum, << dit saint Thomas, non est peccatum mortale (nec etiam) in viris « perfectis, nisi forte per accidens ratione scandali (5). » Quant au mensonge pernicieux, il est véniel en matière légère, et mortel en matière grave. Dans le premier cas, on est obligé sub levi, dans le second, sub gravi, de réparer le tort qu'on a fait au prochain, soit dans sa réputation, soit dans ses biens.

1046. Il n'est pas permis d'user d'une dissimulation proprement dite, qui, par elle-même, tend directement à tromper; c'est un mensonge en action qui n'est pas moins condamnable que le mensonge en parole: « Simulatio proprie, dit saint Thomas, est men« dacium quoddam in exterioribus signis factorum consistens : non « refert autem utrum aliquis mentiatur verbo vel quocumque alio « facto (6). » Mais autre chose est de chercher à induire en erreur,

(1) S. Aug. de Mendacio. c 3.—(2) Eccli. c. 8. v. 14.-(3) Levit. c. 19. v. 11. -(4) S. Thomas, Sum. part. 2. 2. quæst. 110.- (5) Ibid. quæst. 110. art. 4. (6) Ibid. quæst. 111. art. 1.

M. I.

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autre chose de tatre ce qu'on sait, quand on n'est point d'ailleurs obligé de le faire connaître : « Sicut aliquis verbo mentitur, quando significat quod non est, non autem quando tacet quod est ; quod aliquando licet: ita etiam simulatio est, quando aliquis per exte« riora signa factorum vel rerum significat aliquid quod non est ; non « autem si aliquis prætermittat significare quod est; unde aliquis " potest peccatum suum occultaré absque simulatione (1). »

1047. Il en est des restrictions mentales comme de la dissimulation proprement dite; on ne peut se les permettre sans se rendre coupable de mensonge. La restriction mentale est une parole fausse qui ne peut devenir vraie que par l'addition d'un mot caché, qu'on retient intérieurément, et qui ne peut, par aucune circonstance extérieure, être compris par ceux à qui l'on parle. Exemple : On vous demande si vous avez mangé de la viande un vendredi ; vous répondez que non, voulant dire seulement que vous n'avez pas mangé de viande crue : c'est évidemment un mensonge. On demande à quelqu'un s'il a dîné ; il répond que oui, quoiqu'il n'ait pas dîné ce jour-là, entendant en soi-même qu'il l'a fait la veille : c'est encore un mensonge. Que deviendrait la société, s'il était permis d'abuser ainsi de la parole? Aussi le pape Innocent XI a-t-il condamné les trois propositions suivantes : « Si quis, vel solus, vel co« ram aliis, sive interrogatus, sive proprio sponte, sive recreationis « causa, sive quocumque alio fine juret se non fecisse aliquid quod re«< vera fecit, intelligendo intra se aliquid aliud quod non fecit vel aliam << viam ab ea in qua fecit, vel quodvis aliud additum verum, revera « non mentitur, nec est perjurus. - Causa justa utendi his amphibologiis est, quoties id necessarium aut utile est ad salutem cor« poris, honorem, res familiares tuendas, vel ad quemlibet alium «< virtutis actum, ita ut veritatis occultatio censeatur tunc expe<< diens et studiosa. — Qui, mediante commendatione vel munere, « ad magistratum vel officium publicum promotus est, poterit cum << restrictione mentali præstare juramentum, quod de mandato regis a similibus solet exigi, non habito respectu ad intentionem exigentis, quia non tenetur fateri crimen occultum (2). » Voilà pour les restrictions mentales.

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1048. Il ne faut pas confondre les restrictions que rien ne peut justifier, avec certaines manières de parler reçues dans la société, certaines expressions qui, sans être littéralement vraies, ne sont point des mensonges; parce que le sens de ces expressions peut être

(1) S. Thomas, Sum. part. 2. 2. quæst. 111. art. 1 (2) Décret de l'an 1679.

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