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hors de lui-même. D'autres fois, le volontaire imparfait suffit à peine pour une faute vénielle : ce qui arrive dans les enfants dont la raison commence seulement à se développer, ainsi que dans les adultes qui sont à demi en démence ou dans le sommeil. Celui qui se trouve dans cet état ne peut évidemment agir que d'une manière très-imparfaite. S'il pèche, son péché, de l'aveu de tous, ne peut être que véniel.

8. Le volontaire est direct, quand l'acte est volontaire en luimême ; quand la volonté se porte directement, sans intermédiaire, à cet acte: tel est, par exemple, l'homicide dans un homme qui, voulant la mort de son ennemi, lui a donné lui-même ou lui a fait donner le coup mortel. Le volontaire est indirect, lorsque l'acte n'est volontaire que dans sa cause: ce qui a lieu toutes les fois que l'on prévoit que tel ou tel effet doit résulter de l'acte qu'on se propose de faire, d'une démarche ou d'une omission qu'on se permet volontairement. Cet effet, étant prévu, devient indirectement volontaire pour celui qui agit, ou qui s'abstient lorsqu'il est obligé d'agir. Ainsi, par exemple, les blasphèmes, les injures proférées dans un état d'ivresse, sont volontaires d'un volontaire indirect, dans celui qui s'est enivré volontairement, sans surprise, se rappelant plus ou moins distinctement qu'il est sujet à blasphémer ou à s'emporter quand il est dans le vin.

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9. Pour qu'un effet soit volontaire dans sa cause, et puisse nous être imputé comme tel, il faut trois conditions qui sont également nécessaires. La première condition, c'est qu'on ait prévu, d'une manière au moins confuse, que tel effet devait s'ensuivre de l'acte qui est volontaire en lui-même. « Ut voluntarium indirectum im« putetur ad culpam, dit saint Alphonse de Liguori, requiritur ut prævideatur effectus (1) ; » ou, comme il s'exprime ailleurs, « Ut " agens, ponendo causam, advertat, saltem in confuso, hujusmodi << effectum fore ex illa causa sequuturum (2). » Suivant plusieurs théologiens, pour être coupable d'une mauvaise action, il n'est pas nécessaire qu'on ait réellement prévu ni même soupçonné ce qui est arrivé (3). Nous ne partageons point ce sentiment, et nous ne regardons un acte, un effet comme indirectement volontaire, qu'autant qu'il a été prévu, sallem in confuso, comme le dit saint Alphonse: «< Ut imputentur alicui effectus cujusdam causæ, debet

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(1) Homo apost. de Act. hum. no 6. — (2) Theol. moral. de Act. hum. no 10.

(3) Bailly, Collet, le rédacteur des Conférences d'Angers, etc., etc.

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# necessario præcedere, saltem in principio, advertentia actualis et « expressa malitiæ objecti (1). »

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10. La seconde condition qu'on exige pour qu'un effet soit indirectement volontaire, c'est qu'on ait pu s'abstenir de l'acte qui en est la cause ou l'occasion. Personne n'est tenu à l'impossible. «Quis enim « peccat, dit saint Augustin, in eo quod nullo modo caveri potest (2)? La troisième condition, c'est qu'on soit tenu de s'abstenir de l'acte, ou d'éviter l'omission, de laquelle on prévoit un effet, un résultat contraire à la morale. Ainsi, on ne doit point regarder comme. volontaires dans leur cause ni les pensées ni les tentations contre l'aimable vertu, auxquelles nous sommes sujets dans l'exercice des fonctions les plus saintes, pourvu toutefois qu'on les désavoue aussitôt qu'on s'en aperçoit. Un prêtre n'est point obligé de renoncer à son ministère pour éviter les tentations dont le sacré tribunal est une occasion, lorsque d'ailleurs il fait ce qui dépend de lui pour en prévenir les suites. Ce que nous disons du prêtre est applicable au médecin, au juge, à l'avocat qui se trouve dans la nécessité de traiter les matières délicates concernant le sixième précepte. « Sic, « non imputatur chirurgo pollutio quam prævidet sibi secuturam « ex necessario tactu mulieris in partibus verendis, dummodo eam « non intenderit. Nec imputatur studenti ob propriam et aliorum << utilitatem materiis sexti præcepti, si ipse hujusmodi effectum non « intenderit, dummodo complacentiam repellat in actu, ex quo sequitur pollutio. Ratio quia tunc non tenetur causam illam tollere, << vel non ponere; et qui utitur jure suo non dicitur causa effectus « non intenti, et per accidens sequuti; imo in tali casu videtur magis pati quam agere. A fortiori non imputatur effectus sequens « ex causa alias honesta et licita, ut pollutio quæ oritur ex equitatione, vel cibo et potu moderato; tunc enim effectus non intentus .« est per accidens (3).

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11. Le volontaire est exprès, lorsqu'on manifeste formellement son consentement par la parole, ou par le geste, ou par quelque autre signe extérieur qui est pris pour l'expression réelle de la volonté. Le volontaire tacite a lieu, quand le silence peut être regardé comme preuve ou comme signe du consentement, conformément à cette maxime de droit : « Qui tacet consentire videtur. » Ce qui cependant ne s'applique que dans le cas où celui qui se tait est obligé de parler : « Quoties qui tacet loqui tenetur.» Ainsi, le

(1) Theol. moral. de Peccatis, no 4.. Voyez ci-après le n° 223.—(2) De lib. arb. III, cap. 18. — (3) S. Liguori, Theol. moral. de Act. hum., no 14.

silence est un signe de consentement dans ceux qui, étant chargés d'office de parler ou de s'opposer à ce qui se fait, se taisent et ne montrent aucune opposition. D'après cette règle, celui qui est préposé à la conservation des droits du gouvernement ou d'une ville, à la garde des bois, des vignes, des troupeaux d'autrui, est tenu, à défaut du délinquant, de réparer le dommage qu'il a laissé faire, en fermant les yeux ou en gardant le silence sur les délits dont il a été témoin. Le tort qui en est résulté lui est imputable; il est, relativement à lui, volontaire d'un volontaire tacite. «Non semper ille qui non manifestat latronem, tenetur ad restitutionem, aut qui « non obstat, vel qui non reprehendit; sed solum quando incumbit " alicui ex officio, sicut principibus terræ, quibus ex hoc multum imminet periculi. » Ce sont les expressions de saint Thomas (1). 12. Le silence équivaut encore au consentement exprès, lorsqu'un père promet sa fille en mariage, et que celle-ci présente ne réclame point. Le silence qu'elle garde alors est pris pour un effet de sa modestie, et doit par conséquent être regardé comme une marque de son acquiescement. Cependant, si elle n'avait pas réellement consenti; si une complaisance mal placée pour son père lui avait fermé la bouche, l'engagement qui serait, de droit, présumé valable au for extérieur, serait nul au for de la conscience. Mais elle ne pourrait s'en prévaloir, et, généralement, elle devrait ratifier la promesse qu'elle serait censée avoir faite librement.

13. Mais s'il est des circonstances où le silence fait présumer le consentement, il en est d'autres où il ne signifie rien ni pour ni contre; ce qui arrive quand on n'est point obligé de parler. Par exemple, le silence qu'on garde, en entendant des médisances ou des blasphèmes, ne doit pas toujours être pris pour un signe d'approbation. Souvent, dans le cas dont il s'agit, l'on se tait par prudence, ou pour éviter un plus grand mal; de là cette autre maxime de droit : «< Is qui tacet non fatetur; sed nec utique negare videtur. »

14. Quoique, d'après notre manière ordinaire de parler, le volontaire se confonde avec le libre arbitre, et que, pour faire entendre que nos actions sont libres, on ait coutume de dire simple

(1) Sum. part. 2. 2. quæst. 62. art. 7. Le rédacteur des Conférences d'An gers, sur les Actes humains, conf. 1. quest. 3. art. 3, dit que les prélats qu peuvent empêcher le tort qu'on fait au public ou aux particuliers, et négligent de le faire, sont personnellement obligés de le réparer. Cela n'est point exact. Un évêque, par exemple, n'est certainement point tenu de réparer le dommage porté par un diocésain, pour cela seul qu'il aurait pu l'empêcher; car il n'est pas chargé d'office, ex officio, de veiller aux intérêts temporels de ceux qui sont confiés à sa sollicitude pastorale.

ment qu'elles sont volontaires, on distingue néanmoins le libre arbitre du volontaire. Tout acte libre est volontaire; mais tout acte volontaire n'est pas libre. Par volontaire on entend l'acte qui se fait avec connaissance, en vertu d'un penchant, d'une inclination qui nous y porte plus ou moins fortement. Si ce penchant était irrésistible, l'acte qui en résulterait ne serait pas un acte contraint, puisqu'il ne viendrait point d'une force extérieure, il serait done. volontaire; mais il ne serait pas libre; il serait le résultat de la nécessité, qui est incompatible avec la liberté.

15. L'acte libre est celui qui se fait avec connaissance et avec choix, celui auquel notre volonté se porte avec la faculté de faire le contraire. Ainsi, par exemple, l'amour du bien en général est un sentiment volontaire et nécessaire. Mais l'acte par lequel notre volonté se tourne d'elle-même vers tel ou tel bien en particulier, réel ou apparent, est un acte volontaire et libre, un acte humain par conséquent (1). Ici, l'homme agissant par choix peut s'arrêter à un parti, de préférence au parti contraire. Ce n'est donc pas sans fondement qu'on met de la différence entre le volontaire qui est libre et le volontaire nécessaire. Aussi, l'Église a-t-elle condamné solennellement l'erreur de Baïus et de Jansénius, qui prétendaient que tout mouvement volontaire, quoique nécessaire, était véritablement libre, ne regardant comme contraire à la liberté que la coaction, la contrainte ou la violence, et abusant de quelques expressions de saint Augustin (2).

CHAPITRE III.

Des Causes qui peuvent nuire au volontaire et au libre arbitre.

16. Les causes qui peuvent nuire au volontaire et au libre arbitre sont au nombre de quatre : l'ignorance, la concupiscence, la crainte, et la violence.

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(1) Nous n'excluons point la grâce, sans laquelle, comme la foi nous l'apprend, l'homme ne peut absolument rien dans l'ordre du salut. - (2) Les bulles de S. Pie V, l'an 1567; de Grégoire XIII, de l'an 1579; et d'Urbain VIII, de l'an 1641, ont condamné les propositions suivantes, avancées par Baïus : «Quod « voluntarie fit, etiamsi necessario fiat, libere tamen fit. » — « Sola violentia << repugnat libertati hominis naturali. » Et le pape Innocent X, par une bulle du 31 mai de l'an 1653, a condamné comme hérétique cette autre proposition, tirée des écrits de Jansénius d'Ypres : « Ad merendum et demerendum in statu na<< turæ lapsæ, non requiritur in homine libertas a necessitate, sed sufficit li«bertas a coactione. »

ARTICLE I.

De l'Ignorance.

L'ignorance, en morale, est un défaut de science ou d'instruction en matière d'obligations. L'instruction n'est pas nécessaire à tous au même degré; elle doit varier suivant la position-qu'on occupe dans la société. Un simple citoyen, un simple fidèle n'est pas obligé d'en savoir autant qu'un magistrat, que le prêtre, dont les lèvres sont dépositaires de la science. Mais il est des obligations dont la connaissance est nécessaire à tous. « Omnes, dit saint Tho« mas, communiter scire tenentur ea quæ sunt fidei et universalia juris præcepta; singuli autem quæ ad eorum statum vel officium spectant (1). »

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17. On distingue plusieurs espèces d'ignorances: l'ignorance de droit et l'ignorance de fait; l'ignorance invincible et l'ignorance vincible; l'ignorance crasse et l'ignorance affectée. L'ignorance de droit est celle qui a pour objet la loi ou l'extension de la loi, soit qu'il s'agisse d'une loi divine, naturelle ou positive; soit qu'il s'agisse d'une loi humaine, ecclésiastique ou civile. L'ignorance de fait est ainsi appelée, parce qu'elle tombe sur un fait particulier, ou sur quelques circonstances de ce fait. On ignore si le mariage entre parents est prohibé jusqu'au quatrième degré ; c'est une ignorance de droit. Si au contraire on ignore que telle ou telle personne est parente à une autre à un degré prohibé, c'est une ignorance de fait.

18. L'ignorance invincible est celle qu'on n'a pu surmonter, moralement parlant, par les moyens ordinaires, eu égard à la position du sujet, laquelle n'est certainement pas la même pour tous. On reconnaît que l'ignorance ou l'erreur est invincible de la part de celui qui agit, lorsqu'il ne s'élève dans son esprit aucun doute, aucun soupçon, aucune idée, pas même une idée confuse, touchant la malice de l'action qu'il croit permise. « Invincibilis est " dit saint Alphonse de Liguori, quæ moraliter vinci nequit, cum « nulla cogitatio, nec dubium erroris venit in mentem operantis, . nec etiam in confuso, dum operatur, vel cum actionis causam « ponit (2). »

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L'ignorance invincible, de droit ou de fait, rend nos actions involontaires, et les disculpe aux yeux de Dieu. On ne peut ni mériter

(1) Sum. part. 1. 2. quæst. 76. art. 2. — (2) De Conscientia, no 3.

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