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mine est tout-à-fait heureuse : elle repose l'imagination en lui offrant des beautés d'un autre genre, et des images pleines de douceur, de sensibilité et de grâce.

Je voudrais que le poëme dont je m'occupe pût vous intéresser. Je ne sais, ni quand il sera fini, ni s'il le sera jamais. C'est un ouvrage immense et presque aussi difficile à exécuter que le projet de mon héros. On ne fait pas plus aisément un poëme épique, qu'on ne civilise une nation sauvage. Jusqu'à présent, j'ai suivi à la lettre le précepte de Boileau :

Si j'écris quatre mots, j'en effacerai trois.

Je suis donc encore peu avancé, et tout ce que j'ai fait est assez en désordre. C'est surtout à ceux qui cultivent avec autant de succès que vous, Monsieur, cet art difficile, que je serai empressé de demander des conseils.

Agréez, je vous prie, toute ma reconnaissance, et l'attachement avec lequel j'ai l'honneur d'être,

Monsieur,

Votre très-humble et très-obéissant

serviteur,

THOMAS.

J'envoie sur-le-champ à M. Barthe l'exemplaire

que vous avez bien voulu m'adresser pour lui.

LETTRE LXXVIII.

DE D'ALEMBERT.

A Paris, ce 6 mars 1778.

MONSIEUR,

Vous ne vous êtes point trompé, en pensant que je recevrais avec beaucoup de plaisir les vers que vous m'avez fait l'honneur de m'envoyer. Ils m'intéressent à double titre ; et par les sentimens qui m'attachent au grand homme que vous célébrez, et par la connaissance que j'ai de vos talens. J'ai lu ces vers avec le même plaisir et le même intérêt que je les ai reçus; je vous en fais, Monsieur, tous mes remercîmens, et je vous prie d'être bien persuadé de ma sincère reconnaissance, et de la parfaite estime avec laquelle j'ai l'honneur d'être,

Monsieur,

Votre très-humble et très-obéissant

serviteur,

D'ALEMBERT.

LETTRE LXXIX.

A M. PALISSOT.

Ce 9 novembre 1778.

Le hasard, mon cher ami, m'a fait souper deux

fois de suite avec madame de B****. Je l'ai trouvée la meilleure femme du monde, très-élégante; mais sans prétention. Elle m'a très-peu parlé de D***, m'a accablé de prévenances, et j'ai promis d'aller la voir. Dans ces circonstances, je serais très-fâché que l'épigramme sur les Baisers parût avec le nom de Dorat. Le changement est facile. Comme le poète Jean Second, prétendu rival de Catulle, et qui a fait des Baisers, est rempli d'une affectation froide et minutieuse ( ce qui est l'antipode du sentiment et de la passion), je vous prie de vouloir bien mettre au titre sur les Baisers de Jean Second, et suppléer au vers :

Qu'ami Dorat ses Baisers intitule,

celui-ci :

Que Jean Second ses Baisers intitule,

Si pourtant vous aviez une si haute idée de ce

Jean Jean Second, que vous ne voulussiez point l'immoler, on pourrait mettre

Que Lycidas ses Baisers intitule,

et supposer, au titre, que l'épigramme est faite sur un poëme des Baisers; mais je vous prie en grâce d'effacer pour l'instant le nom de Dorat, qui reparaîtra dans mes OEuvres avec toute sa gloire. D'autres temps, d'autres soins.

Je vous supplie encore, dans les vers à madame Palissot*, auxquels je ne tiens que par son éloge, je vous supplie, dis-je, d'en retrancher, comme j'en avais déjà eu envie, tout ce qui regarde le Mercure académique, et de les terminer par la parodie énigmatique et plaisante des fameux vers de Malherbe. Après

Rival d'Aristophane et vengeur du génie, etc.

il y avait la peinture du dieu d'Ennui; j'y attaquais plus les personnes que les genres, ce qui est moins durable et moins essentiel; voici comment je les ai corrigés, j'ose dire avec avantage.

C'était ce dieu si lourd que Pope a su nous peindre,
Qui d'une aile de plomb s'empresse à nous atteindre,
Traîne du froid Garnier la pesante Clio,

Préside à tout in-folio;

Fait tous les vers d'Académie;

Aux greniers des savans, d'une main ennemie,

* C'est l'Épître vir du livre II, tome 11, page 210,

Griffonne des journaux l'ennuyeuse infamie;

Seul avec Baculard lamenta Jérémie ;
Inspira de Berquin l'insipide Érato;

Dans toute la France endormie
Des Éloges glacés souffla l'épidémie;
Au plus bel opéra se glisse incognito,
Et même inventa le loto.

Il y a certainement plus de vérité et d'effet dans cette manière, que dans un monotone entassement de mauvaises pièces, dont la critique est usée, et j'y tombe sur quatre genres les plus ennuyeux, les plus mauvais que je connaisse, et les plus inconnus à la belle antiquité; pièces d'académies, journaux, éloges et opéra. Jugez, d'après cela, mon cher ami, si je desire plus que jamais que vous, qui avez eu l'instinct et le bonheur de ne pas faire un Éloge de Voltaire, vous vouliez bien consentir au titre de Coup-d'œil impartial, qui vous sauve de la foule des ennuyeux, où l'on serait si étonné de vous voir, et qui met votre ouvrage dans son jour le plus favorable.

Oh! si jamais il vous plaît de connaître vos forces et d'ajouter deux actes aux Philosophes et aux Courtisanes, en déployant le fond des caractères qui sont déjà si heureusement tracés, etc. etc. alors, mon cher ami, en dépit du Méchant et de la Métromanie même, je vous regarde comme l'auteur de ce siècle qui aura fait les deux meil

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