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Notables, qui allez vous occuper des plus grands intérêts de la nation, qui devez remplir, sous les yeux de votre roi et à la face de toute l'Europe, le plus saint des ministères, oseriez-vous, voudriez-vous risquer de briser à jamais ces nœuds sacrés, ces liens si chers à tous nos cœurs, qui vont unir de plus en plus les Français à leur roi? Il n'en faut pas douter, vous n'aurez à examiner que des vues de bienfaisance. Un acte aussi paternel, aussi peu provoqué, ne peut avoir pour objet que le bien général et le soulagement public..

La parole de Louis en donne l'assurance; son cœur, qui ne respire que la félicité de ses peuples, en est garant, et ce qu'il fait en ce moment crie anathème contre quiconque oserait élever des doutes sur ses intentions..... Il cherche la vérité; il l'aime : son ministre ne la craint pas. Le concours de toutes les lumières, la réunion de toutes les volontés, mettra le sceau le plus authentique aux opérations les plus salutaires, maîtrisera toutes les intrigues, fera taire toutes les résistances.

Quel avenir s'ouvre à mes yeux mouillés des larmes de l'admiration et de la joie! Je vois la constitution la plus discordante ramenée à l'unité la plus desirable. Je vois l'odieux empire de l'arbitraire anéanti; je vois le fardeau public allégé par une meilleure répartition; je vois les mur

mures cesser avec les exceptions qui les produisaient; je vois l'agriculture ranimée par l'accroissement de valeur de ses productions; le commerce s'étendre par la liberté, qui est son élément; je vois disparaître ces étranges barrières qui séparaient les différentes parties d'un même empire, ces droits eruels qui livraient à une cherté excessive la denrée la plus nécessaire à la vie, et ses consommateurs aux vexations les plus barbares.

Excellente nation, que l'amour pour ses maîtres a toujours distinguée de toutes les autres, quel sera donc le surhaussement de vos sentimens pour le législateur paternel qui, en versant sur vous tant de bienfaits inestimables, vous associe à la gloire d'y coopérer par vos suffrages! Aurezvous assez de voix, assez de moyens de faire retentir vos acclamations pour lui rendre autant de satisfaction qu'il vous procure d'avantages?....

Et vous, rois de la terre, qui voudriez établir l'étendue de votre pouvoir sur le fondement d'une obéissance aveugle, apprenez combien l'autorité acquiert de force et de solidité par une soumission volontaire et éclairée.

Apprenez, etc. etc. etc. etc.

EN VOI.

C'EST ainsi que le Chantre de la Nature, devenu le Chantre de la Patrie, pourra célébrer, par sa noble et touchante poésie, l'époque la plus mémorable de la monarchie. Ses sublimes accords allumeront dans tous les cœurs l'enthousiasme' d'un sentiment profond exprimé par un génie élevé, et son ouvrage immortel durera autant que la gloire d'un roi digne d'un tel poète.

DE CALONNE.

LETTRE XC.

A M. LE COMTE DE VAUDREUIL, A ROME.

Paris, ce 18 janvier 1788.

PUISQUE VOUS le desirez, Monsieur le Comte, je vous envoie cette Ode, que je ne voulais confier à personne; mais je la confie à votre amitié, en vous suppliant de ne la pas laisser sortir de vos

mains.

Elle peut s'appeler mon Exegi monumentum. Si, après l'avoir lue, vous la rapprochez de celle d'Horace, qui est la dernière ode de son troisième livre, vous aurez le plaisir de la comparaison. Peut-être ai-je dans la mienne, par une réunion assez singulière, plus de modestie et plus d'audace; mais c'est ici l'audace justifiée par son excès

même.

Ce qu'il y a de bien certain, c'est que dans notre siècle, qui assurément n'est pas celui d'Auguste, un pareil sujet était presque impossible à traiter. Ce n'est pas au milieu des petites âmes, et sous les yeux de l'envie et de la calomnie, qu'il est facile de parler de soi; et puis, comment parler d'avenir à des gens que le présent dévore?

J'ai fait toute cette ode d'inspiration et d'un seul jet, pendant la nuit du sept au huit novembre. Jamais je n'eusse osé la faire, si je l'eusse méditée un moment; aussi est-elle peut-être la plus lyrique de toutes mes odes, et celle où j'ai le plus dit ce que je n'aurais jamais cru pouvoir exprimer. Elle me paraîtra la meilleure, si, après vous l'être lue de ce ton de voix si touchant et si énergique, elle vous plaisait assez, Monsieur le Comte, pour faire diversion à des chagrins que je partage bien vivement. Ceci n'est point une phrase. Comment sentir d'une autre manière, quand on a joui de votre société et de votre âme ? Je me flatte que vous connaissez assez la mienne, pour savoir qu'elle ne connaîtra de vrai bonheur que lorsqu'elle sera bien sûre du vôtre.

Je suis, Monsieur le Comte, avec l'intérêt le plus respectueux, le plus inviolable et le plus tendre,

Votre très-humble et très-obéissant

serviteur,

LE BRUN.

Je vous supplie, lorsque vous serez de retour à Rome, de présenter mes plus respectueux hommages à M. le cardinal de Bernis, et de lui dire combien je suis flatté et honoré de son suffrage.

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