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Q. HORATII FLACCI

CARMINUM

LIBER II.

LES ODES

D'HORACE.

LIVRE II.

ARGUMENT.

« Vous écrivez, ô Pollion, l'histoire de cette guerre dont l'origine date du triumvirat de César, Crassus et Pompée, commencé sous le consulat de Métellus. Rien de plus délicat, de plus épineux qu'un pareil ouvrage. Il vous demande tout entier. Laissez donc pour un moment la Muse tragique; et, lorsque vous aurez terminé ce qui regarde les affaires publiques, vous reprendrez le cothurne des Grecs: vous, le soutien des accusés, la lumière du sénat, le vainqueur des Dalmates. Oui, déjà, dans votre histoire, j'entends les discours des chefs et le bruit des trompettes; je vois César vainqueur du monde et non de Caton. Cet homme inflexible mourut en Afrique, et c'est là que César trouva ses plus redoutables ennemis : il sembleroit que les Dieux protecteurs de cette contrée avoient résolu d'en venger les désastres sur les descendans même de ses vainqueurs. Hélas! tels sont en effet les tristes résultats des guerres civiles! Toutes les parties du monde ont été inondées de notre sang. Mais, en présageant, 6 Pollion, ce que vos écrits vont nous offrir de tableaux terribles, j'oublie que ma Muse n'est propre qu'à chanter les plaisirs et les jeux : il est temps de la rappeler à sa vocation naturelle. >>

Si cette analyse de l'Ode qui nous occupe paroît, comme je l'espère, satisfaisante à mes lecteurs; s'ils ne trouvent rien de forcé dans les transitions que j'ai suppléées dans ma prose, et dont le poète lyrique pouvoit fort bien se passer dans ses vers, j'espère aussi que le dessein et la marche de l'Ode ne leur paroîtront susceptibles d'aucune contestation, et qu'ils reconnoîtront, avec les anciens scholiastes et la plupart des modernes éditeurs, que le seul but d'Horace étoit

d'engager Pollion à suspendre ses compositions tragiques, jusqu'à ce qu'il eût achevé l'histoire dont il s'occupoit. Ce motifétoit d'un assez grand intérêt pour lui inspirer les beautés supérieures dont cette Ode est pleine; et l'on en sera couvaincu si l'on se rappelle que toutes les fois qu'Horace est dans le cas de parler des guerres civiles de sa patrie, on retrouve en lui le grand poète et le bon citoyen.

Dans la confiance que je viens de témoigner, je crois inutile de m'arrêter à réfuter longuement les opinions imaginées par quelques savans pour résoudre les difficultés qu'ils créoient eux-mêmes dans cette Ode: il suffira de les exposer. Lambin le premier, crut qu'Horace exhortoit Pollion, non pas à écrire l'histoire, mais à arranger les affaires de la République, trompé par ces mots, que j'expliquerai dans les notes, ubi publicas res ordinaris. Torrentius a fort bien prouvé que Pollion, qui ne fut jamais l'ami d'Auguste, ne pouvoit être chargé, sous ce prince, d'une pareille commission. Dacier prend ces mots res publicas ordinare daus le même sens que Lambin; il en conclut que Pollion étoit consul lorsqu'Horace lui adressa cette Ode, et ne craint pas de démentir toute la chronologie et jusqu'aux marbres capitolins pour soutenir cette opinion, que Sanadon a très-bien réfutée.

L'abbé Galiani s'est ouvert une route nouvelle. Selon lui, Pollion n'étoit point occupé à faire des tragédies, mais à négocier la paix entre Octavien, Antoine et Sextus Pompée, lorsqu'Horace lui adressa cette Ode; c'est ainsi qu'il explique le res publicas ordinare. Il ne veut pas non plus qu'Horace dise à Pollion d'interrompre, pour cette importante négociation, la composition de ses tragédies, mais le soin des spectacles qu'il devoit donner au peuple à l'occasion de ses triomphes ou en qualité de consul. Les mots grande munus du onzième vers favorisent cette dernière partie d'un système qu'on ne peut s'empêcher de trouver ingénieux; mais il est entièrement ruiné par le reste de l'Ode, à partir du v. 17. On ne peut que rire des efforts que fait l'auteur pour trouver une négociation dans les tableaux effrayans qu'Horace y fait

des guerres civiles. (Voyez Mélanges de littérature, tom. V, p. 270 et suiv., éd. de 1804.)

Je ne sais si je dois ajouter que, selon sa coutume, Poinsinet de Sivry trouve encore moyen de renchérir sur les paradoxes de ceux qui l'ont précédé. Il pense qu'Horace désirant que Pollion se chargeât d'une affaire majeure, d'une cause d'état, le prie de suspendre les préparatifs d'une tragédie qu'il se disposoit à donner..... et dont le sujet étoit la dernière guerre civile! L'heureuse invention! Sans doute Auguste, Antoine et Pollion lui-même devoient y jouer un rôle. Le spectacle eût été vraiment très-curieux pour les Romains.

La date de cette Ode est impossible à déterminer; on verra pourquoi, dans les notes.

Le mètre est l'alcaïque, comme dans la neuvième du Liv. I, Vides ut alta; mais je me suis permis d'employer, pour la traduire, la strophe de quatre alexandrins, comme pour l'Ode 37 du Liv. I, et par les mêmes raisons.

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