les crimes, & ne tomboit qu'en difcernant les coupables. S'ils échappent aux fureurs d'un orage, ils craignent de perir par un autre, croyant que le beau temps ne differe leur punition que de quelques jours. Mais s'ils fouffrent un mal de cofté, & que la fievre les empefche de repofer, ils fe perfuadent auffi toft que les Deux leur ont envoyé cette maladie pour les punir, & que ce font les pierres, & les fleches, dont ils fe fervent, pour les accabler. Ils n'ofent promettre le Sacrifice d'un agneau, ny prefenter un cocq à leurs Dieux domeftiques. Car quelle efperance peuvent avoir les méchans, & quelles victimes peuvent-ils offrir, qui ne foient plus dignes de la vie, qu'euxmefmes? Apprens enfin, qu'ils ont de l'inconstance & de la varieté dans toute leur conduite. Ils ont de la hardieffe, lors qu'ils entre prennent une injuftice; mais à peine eft-elle commife, qu'ils en ont du repentir, & que la beauté de la vertu, & la laideur du vice fe prefentent à leur efprit. Toutesfois après avoir condamné le mal, ils y retournent; leur penchant les entraifne aux mefmes defordres, dont ils ont eu honte. Car enfin, qui eft-ce, qui a fini jamais les déreglemens, aufquels il s'eft accoûtumé? Qui eft ce, qui eft devenu honnefte, aprés avoir violé les loix de l'hon Proxima tempeftas, velut hoc dilata fereno. Conceffum ? vel que non dignior hoftia vita? Mobilis & varia eft ferme natura malorum: Cum fcelus admittunt, fupereft constantia, quid fas Atque nefas. tandem incipiunt fentire peractis Criminibus. tamen ad mores natura recurrit Damnatos, fixa, & mutari nescia. Nam quis Peccandi finem pofuit fibi, quando recepit Eiectum femel attrita de fronte ruborem? Quifquam hominum eft, quem tu contentum vi deris uno Flagitio? dabit in laqueum veftigia nofter Perfidus, & nigri patietur carceris uncum, Nominis invifi, tandemque fatebere lætus Deorum. Finis Satyra decima tertia. neftcté. nefteté. Avés-vous jamais veu un homme, qui aprés avoir commis un grand crime, en foit demeuré-là? Noftre perfide tombera dans quelque nouveau crime: Ilfera lié dans un cachot obfcur; il fera banni fur un rocher de la mer Ægée, ou fur ces éceüils celebres par tant d'exils. Vous apprendrés avec plaifir la jufte punition de vostre ennemi, & vous reconnoiftrés enfin avec joye, qué les Dieux ne font ny fourds, ny aveugles. Fin de la treiziéme Satyre. Tome 11, E I QUATORZIE'ME SATYRE DE JUVENAL. De l'Education des Enfans. Ly a beaucoup de chofes, mon cher Fuf cin, qui meritent d'eftre condamnées publiquement, & qui font de mauvaises impreffions fur les cœurs, dont les peres donnent Pexemple à leurs enfans mefmes. S'ils ayment les jeux, leurs heritiers l'ayment auffi, & remuënt les dés & le cornet dés le ber ceau. Quelle efperance peut-on avoir d'un jeune homme, qui a appris de fon pere, comment il faut affaifonner des truffes, & des moufferons, & plonger des becaffines dans la mefme fauffe. C'eft fur la delicateffe qu'il luy a veuë, qu'il s'eft formé un goust fin, & difficile. On luy aura donné dés l'âge de fept ans un Sage Gouuverneur: Mais quand il en auroit eu mille, il aymera toûjours la bonne |