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fenseurs : « Je souhaiterois pouvoir fournir à <<< votre altesse les armes nécessaires pour << combattre les idéalistes et les égoïstes, et «<< démontrer qu'il existe une liaison réelle entre << nos sensations et les objets mêmes qu'elles << représentent *; mais plus j'y pense, plus je << dois avouer mon insuffisance.... Il est aussi «< difficile de disputer avec les idéalistes, et il « est même impossible de convaincre de l'exis<< tence des corps un homme qui s'obstine à <<< la nier >>.

Il seroit, je crois, superflu de citer d'autres philosophes de l'école cartésienne. On vient d'entendre les chefs. Il ne reste plus qu'à examiner leur doctrine en elle-même pour en montrer l'insuffisance et les graves inconvéniens.

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* Il auroit pu en dire autant de la liaison des idées purement spirituelles avec leurs objets. C'est précisément la même question et la même difficulté.

'Lettres à une princesse d'Allemagne, tom. II, pag. 74, édit. de 1788.

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CHAPITRE IX.

Danger de la philosophie qui place dans la raison de l'homme individuel le principe de certitude.

On vient de voir que les philosophes qui, toute foi mise à part, comme s'exprime Pascal, cherchent, dans leur raison seule, une premiere vérité certaine pour servir de base à l'edifice de leurs connoissances, ne peuvent pas même, de leur aveu, parvenir à la certitude de leur existence; et qu'en ne voulant rien admettre sans preuve rationnelle ils se mettent dans l'impuissance absolue de rien prouver. Ce seroit déjà certes assez, pour abandonner une philosophie tellement sceptique par son essence, que quiconque la suivroit rigoureusement douteroit de son être même *; une

* Parce que, avec cette philosophie, on étoit croyant sous Louis XIV, il ne faut pas s'imaginer qu'elle soit

philosophie si opposée à la nature de l'homme, qu'il lui faudroit, pour être conséquent, renoncer à toute croyance, en sorte que, soit qu'il affirme, soit qu'il nie, soit qu'il parle, soit qu'il agisse, il contredit ouvertement les maximes qui doivent, à ce qu'il prétend, ré

étrangère au scepticisme moderne. On ne tire pas d'abord toutes les conséquences d'un principe, surtout quand il est très général, et que ces conséquences sont opposées à une foi reçue auparavant. C'est ce qui explique comment les protestans conservèrent une partie des croyances chrétiennes, qui néanmoins ont toujours été s'affoiblissant parmi eux. Une personne très respectable, encore vivante, nous a raconté que, dans sa jeunesse, elle avoit eu des liaisons avec Diderot, dont elle admiroit alors la philosophie. Un jour elle lui dit : « Monsieur Diderot, « vous et vos amis vous devez être bien contens du pro« grès que font vos doctrines. Contens, monsieur ! a étonnés, répondit l'encyclopédiste. Quand nous avons « commencé, nous n'avions d'autre dessein que d'argu<< menter comme on argumente dans l'école. On disoit, « cela est prouvé. Nous avons dit, examinons, et cela << est devenu ce que vous voyez ». Que Diderot fût sincère ou non, ses paroles n'en sont pas moins remarquables; car, s'il n'a pas dit ce qu'il vouloit faire, il a dit certainement ce qu'il a fait. Il a cherché, par la méthode` philosophique, la vérité de toutes choses ; et cela est devenu ce que nous voyons.

gler sa raison. Ce n'est pas tout cependant, et l'on n'auroit qu'une idée très imparfaite du danger de cette philosophie, si l'on n'observoit pas qu'elle renferme encore un autre principe d'erreur et de septicisme, plus funeste même que le premier, parce qu'il flatte davantage l'orgueil et l'esprit d'indépendance.

Montrons d'abord en quoi consiste ce principe de scepticisme, nous ferons voir ensuite comment il devient une cause d'erreur.

Supposons que les dogmatistes soient enfin parvenus à trouver cette première vérité certaine qu'ils cherchent, ou que, ne pouvant réussir à s'assurer de sa certitude, ils conviennent d'admettre sans preuves certains axiomes ou certaines notions pour servir de bases à leurs raisonnemens ; ils ne sont guère avancés pour cela car, à moins de soutenir qu'il est impossible que l'homme se trompe dans l'usage qu'il fait de sa raison, ce qui seroit dire que les contradictoires sont également vrais, ou détruire par une autre voie toute vérité et toute certitude, il faut qu'ils donnent à chaque homme une règle infaillible de ses jugemens, ou un moyen certain de reconnoître s'ils ont bien ou mal appliqué le

principe d'où l'on est convenu de partir : autrement l'on ne pourroit encore rien affirmer raisonnablement, puisqu'on n'auroit aucune assurance d'avoir bien raisonné. Voyons donc si les philosophes dont nous parlons donnent cette règle, s'ils la donnent comme infaillible, et s'ils sont d'accord entre eux sur cela.

Pour commencer par Descartes, on a vu qu'après s'être entièrement isolé de tous les autres êtres intelligens, la première chose dont il tâche de s'assurer est son existence, et que sa première proposition est celle-ci : Je pense, donc je suis. On a vu encore que, de son aveu, cette proposition seroit incertaine, si Dieu n'existoit pas, ou s'il pouvoit être trompeur. Sa certitude dépend encore de celle des idées qu'elle renferme, et que Descartes n'essaie pas de prouver. « Lorsque << j'ai dit (ce sont ses paroles) que celte pro<< position, je pense, donc je suis, est la << première et la plus certaine qui se présente « à celui qui conduit ses pensées par ordre; << je n'ai pas pour cela nié qu'il ne fallût savoir << auparavant ce que c'est que pensée, certi<< tude, existence, et que, pour penser, il faut

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