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et ne peut la créer qu'en se manifestant à elle. Les vérités premières qu'elle a reçues constituant sa vie, il lui est aussi impossible de ne les pas admettre ou de ne pas les croire, que de ne pas être créée; et si elle pouvoit vaincre cette foi vitale elle pourroit s'anéantir.

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Troisièmement, Dieu étant la vérité essentielle, ou l'Être nécessaire, infini, il n'a pu manifester que la vérité à sa créature; et de plus, l'erreur, qui n'est qu'une privation, un néant * ne sauroit en aucun cas devenir un principe de vie. Donc, les vérités premières, originairement manifestées ou attestées par le créateur, ont une certitude infinie, puisqu'elles sont nécessairement une portion de la vérité ou de l'être infini.

Quatrièmement, comme il n'y a point de vie intellectuelle possible sans la connoissance de ces vérités, on doit les retrouver dans toutes les intelligences, et on les reconnoît à ce caractère d'universalité. Ainsi nous savons certai

* Le vrai, dit Bossnet, c'est ce qui est; le faux, c'est ce qui n'est pas. Traité de la connoissance de Dieu et de lui-même, pag. 76.

nement par le témoignage des hommes qu'elles sont universelles, et par le témoignage de Dieu qu'elles sont vraies.

La raison générale des hommes, ou la raison humaine, est donc la règle de la raison particulière de chaque homme, comme la raison de Dieu, primitivement manifestée, est le principe et la base de la raison humaine; et l'on ne détruit pas plus la raison individuelle en lui donnant une règle hors d'elle-même, qu'on ne détruit la raison générale, en la rappelant à son origine, qui est en Dieu *.

* Qu'on nous permette de faire ici une observation qui ne nous paroît pas sans importance. Les systèmes de philosophie, selon lesquels chaque hoinme doit, en se plaçant d'abord dans un état de doute complet, chercher en lui-même une première vérité certaine d'où il déduise toutes les autres, ces systèmes sont tellement opposés à la nature, qu'on ne sauroit essayer de les réduire en pratique sans tomber aussitôt dans des contradictions sans nombre, comme Descartes, qui, après avoir dit, je doute de tout, parle raisonne, argumente; ce qui suppose nécessairement qu'il croit au langage, aux idées qu'il exprime, et enfin à la raison même. De sorte que, selon lui, pour arriver à la vérité et à la certitude, il faudroit que l'homme fût dans un état où il est impossible qu'aucun homme parvienne jamais à se placer. La doctrine du sens commun au contraire, considère l'homme tel qu'il est, dans son état naturel, c'est-à-dire, croyant mille et mille choses; et, partant de cette forme invincible, elle lui dit : « Seul, tu peux te tromper; mais « compare tes croyances à celles des autres hommes, et, regarde << comme vrai ce qu'ils croient tous; car si la raison universelle, « la raison humaine, pouvoit errer, il n'existeroit pour l'homme « ni vérité ni certitude ». Là, nul embarras, nulle contradiction; et cette règle est tellement vraie, tellement conforme à notre naqu'il est impossible de ne la pas suivre en tout ce qui tient à la vie physique et aux relations sociales ; et la société périroit, si substituoit la règle philosophique.

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CHAPITRE XI.

Éclaircissement de quelques difficultés.

Quelques personnes se sont imaginé que nous prétendions que les sens, le sentiment et le raisonnement nous trompent toujours. Ces personnes nous ont fait beaucoup trop d'honneur, en prenant la peine de nous répondre; car, qu'y auroit-il à dire à celui qui, rejetant toute vérité, soutiendroit qu'il est impossible de rien connoître, ou nieroit l'intelligence humaine?

Depuis qu'il y a des hommes, aucun d'eux n'est jamais tombé, que nous sachions, dans un pareil excès d'extravagance. Les scepti-i ques mêmes ne nient pas, ils doutent. 'Et, dès les premières pages de notre livre, distinguant la faculté de connoître de la faculté de raisonner, nous disons : « La raison, dans « le premier sens, est le fond même de notre << nature intelligente. Être intelligent ou rai

<< sonnable, c'est être capable de percevoir la << vérité; et l'homme a plus ou moins de raison, << ou sa raison est plus ou moins éclairée, plus <<< ou moins étendue, selon qu'elle renferme <<< plus ou moins de vérité ».

Nous remarquons ensuite que chacun de nous trouve en soi trois moyens de connoître, ou de parvenir à la vérité les sens, le sentiment, et le raisonnement. Cependant ces trois moyens, ou pris à part ou réunis, ne sont nullement infaillibles. Les sens, le sentiment et le raisonnement peuvent nous tromper, et nous trompent en effet souvent. C'est un fait dont personne ne doute; et il résulte de ce fait que l'homme isolé ne sauroit être certain de rien.

Mais la nature fournit à l'homme en société une règle, un moyen de certitude qu'il ne trouvoit pas en lui-même. Car il peut comparer le témoignage de ses sens, de son sentiment, de son raisonnement privé, avec le témoignage, des sens, du sentiment et du raisonnement des autres hommes; et, selon que

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ces témoignages différent ou s'accordent, la vérité en est ou plus ou moins certaine, ou plus ou moins douteuse *, sans qu'il soit pos sible de fixer le nombre de témoignages con formes, nécessaire pour produire une certitude parfaite. Comme nous l'observons dans l'Essai, «< cela dépend de mille circonstances, <«<et, en particulier, du poids de chaque té« moignage pris à part1». Le sens commun, en chaque occasion, fait ce discernement, et proclame la certitude, lorsqu'elle existe, en déclarant fou quiconque nie ce qui est attesté par un témoignage suffisant, ou s'obstine à douter encore.

Ainsi, au jugement de tous les hommes, nier l'existence de Dieu, attestée par le té moignage unanime des peuples, est une vraie folie.

Tous nos adversaires ont confondu la vérité des idées considérées en elles-mêmes, avec la certitude que' l'homme peut avoir de cette vérité : comme si c'étoit la même chose de dire: Tel principe, tel fait n'est pas vrai, ou, nous ne sommes pas certains qu'il soit vraj. Pour exprimer qu'une chose étoit certaine, les Romains disoient Elle est attestée, asserta est.

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