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On dit qu'il a paru des réfutations. Je ne les connois point; mais, je l'avoue, votre théorie me paroît si évidente, que je cherche vainement à deviner de quelles armes vos adversaires auront fait usage contre vous. Je suis convaincu que tous les coups qu'ils croient vous porter tombent à faux.

Faites, je vous prie, de cette lettre tel usage qu'il vous plaira, et veuillez agréer, etc.

Cl.-Ign. BUSSON, prétre.

DE LA

DOCTRINE PHILOSOPHIQUE

DÉVELOPPÉE

DANS L'ESSAI SUR L'INDIfférence.

Il y auroit lieu d'être étonné peut-être de toutes les erreurs que beaucoup de personnes ont cru trouver dans le treizième chapitre de l'Essai sur l'Indifférence, si l'on ne savoit combien il est facile de se méprendre sur le sens d'un livre, lorsque, perdant de vue l'ensemble des idées, on s'arrête à quelques passages isolés. Avant d'analyser la doctrine développée par M. l'abbé de la Mennais, il nous paroît donc nécessaire de montrer la liaison qui existe entre les deux parties de son ouvrage, et de rappeler le plan général de l'Essai.

En réfutant, dans son premier volume, les trois systèmes généraux d'indifférence ou d'incrédulité, M. de la Mennais a montré que le principe fondamental de l'hérésie, du déisme, et de l'athéisme, est la souveraineté de la raison individuelle.

L'hérétique, qui ne reconnoît d'autre règle de sa foi que l'Écriture expliquée par lui-même, qui rejette les

définitions de l'Église, ou ne les admet que lorsqu'il juge lui-même comme l'Église, déclare la raison de l'Église faillible, et sa raison souveraine.

Le déiste, en rejetant la règle même de l'Écriture, refuse de faire fléchir sa raison devant la raison de JésusChrist. I suppose que la raison de Jésus-Christ, qui a dicté l'Évangile, a pu se tromper, et que sa raison individuelle, qui lui dicte seule ce qu'il doit croire, est infaillible.

L'athée cite au tribunal de sa raison Dieu même, et la raison sociale, qui atteste que Dieu existe. En niant l'autorité de la raison divine et de la raison sociale, il brise la dernière règle qui puisse diriger la raison individuelle, et renverse le fondement de toute certitude.

Ces trois systèmes d'incrédulité, envisagés dans leur principe, ne sont donc qu'une seule erreur, qui change de nom, suivant qu'elle est plus ou moins développée, et dont le dernier terme est le scepticisme universel. L'hérétique nie moins de vérités que le déiste, le déiste n'en nie pas autant que l'athée ; l'athée; leur symbole diffère en appa

rence,

il est le même dans la réalité. Il est tout contenu dans ces courtes paroles, Je crois à ce que dit ma raison; comme tout le symbole du fidèle est renfermé dans cellesci, Je crois à ce que dit l'Eglise.

Ainsi donc, si la raison de chaque homme est le fondement et la règle de ses croyances, si vous admettez que l'on n'est obligé de croire aucune vérité qui ne soit clairę et démontrée; l'hérétique, le déiste, l'athée, ne sont pas coupables de rejeter des vérités que leur raison ne leur démontre pas clairement. C'est vous qui en les condamnant

commettez une injustice, un attentat contre les droits de leur raison souveraine. Mais si l'homme doit chercher hors de lui le fondement de sa propre raison, la seule règle qui puisse fixer ses incertitudes; s'il n'est pas d'égarement où ne tombe un esprit foible et vain, lorsqu'il s'isole de toute autorité pour chercher la vérité au dedans de lui-même; les apologistes de la religion, comme les véritables philosophes, ne doivent-ils pas essayer, avant tout, de couper, en retranchant un principe funeste, la racine commune du scepticisme et de toutes les erreurs?

Tel a été le dessein de M. de la Mennais, dans son second volume. Heureux, si dans cette partie de son ouvrage il n'avoit dû entrer en lice que contre les ennemis du christianisme! Mais ce n'est pas sa faute, si des philosophes chrétiens, après s'être laissé séduire par un principe dont ils n'ont pas prévu les conséquences, ont assigné à l'homme, comme le seul chemin de la vérité, des méthodes qui ne peuvent le mener qu'au doute.

Il y a long-temps que la philosophie s'est isolée de la religion et de l'autorité, pour chercher dans la raison individuelle le fondement de la certitude; et dès lors elle a dû proclamer le principe des sectaires, ne rien croire qui ne soit clair et démontré. Elle a appris à l'homme que, pour arriver à quelque vérité certaine, il devoit d'abord rejeter toutes celles dont il ne trouveroit pas la raison au dedans de lui-même, et, loin de Dieu et de ses semblables, se considérer seul avec sa raison isolée, instrument unique avec lequel il pourra essayer de refaire l'édifice de ses connoissances.

Il a paru à M. de la Mennais que cet homme de la phi

losophie, qui n'a, pour sortir d'un doute universel, que sa raison seule, est un être condamné à y rester toujours, et qu'il n'existe de certitude que pour l'homme de la société qui trouve dans une raison supérieure le fondement et la règle de sa propre raison.

Suivons les développemens de ces deux doctrines, en les opposant l'une à l'autre, pour nous faire de chacune une idée plus distincte.

Les philosophes définissent leur art: La recherche de la vérité. A un chercheur de vérité il faut deux choses, un premier principe dont il soit assuré, et une règle qui lui serve à déduire de ce premier principe des conséquences certaines. Les philosophes peuvent-ils trouver dans leur raison isolée le premier principe de leurs connoissances et une règle infaillible de leurs jugemens? Quelle est dans la doctrine de M. de la Mennais, ou plutôt, dans l'ordre social, dont M. de la Mennais ne prétend qu'exposer les lois, le fondement sur lequel reposent les connoissances de l'homme? Quelle est la règle qui assure la certitude de ses jugemens?

Du principe des connoissances de l'homme.

On dit d'une vérité qu'elle est le principe d'une autre vérité, lorsque la première peut servir à établir la seconde. L'esprit de l'homme ne voit pas, comme Dieu, la raison des choses en elles-mêmes; pour se démontrer une vérité il lui faut toujours une autre vérité qui serve de preuve; il ne peut que déduire des conséquences, qui ne sont certaines pour lui que par leur liaison avec un premier principe déjà connu avec certitude. L'homme donc qui

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