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<«< impressions fâcheuses ils mentent, et se <<< trompent à l'envi1 ».

Nous pensons que tout le monde avouera maintenant que nous n'avons rien dit de la foiblesse de notre raison, et de l'impuissance où elle est de prouver quoi que ce soit avant d'avoir trouvé Dieu, que Pascal n'eût également dit, il y a près de deux siècles, sans que personne ait jamais songé à lui en faire un reproche. Il ne faut pas croire cependant que nous ne le suivions en tout, ni qu'il n'y ait aucune différence entre ses idées et les nôtres. Ce puissant esprit ne savoit pas toujours régler sa force. Il est allé trop loin, en plaçant l'homme entre un doute absolu et la foi en la révélation, ce qui nous semble infirmer les preuves de cette révélation même; car rien n'indique que Pascal ait eu l'intention de comprendre dans ce mot la première révélation que Dieu fit de lui-même à l'homme en le créant, et qui est tout ensemble l'origine de nos connoissances et le fondement de leur certitude. Il a bien vu que la raison devoit

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Pensées de Pascal, art. VI, pag. 215 et 216.

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commencer par la foi. L'esprit, dit-il, croit naturellement. Mais il peut croire le vrai et le faux ; il a donc besoin d'une règle de croyance; quelle est cette règle ? Pascal ne la donne pas, ou il ne la donne que pour la religion, et à ceux qui, persuadés de la vérité du christianisme, reconnoissent la nécessité de se soumettre à l'autorité de l'Église, sans laquelle il n'y a point de christianisme. Mais, n'ayant point distingué la foi inhérente à notre nature de la foi chrétienne, la raison individuelle de la raison générale, ou la raison de chaque homme de la raison humaine, il ne lui laisse aucun moyen naturel ou raisonnable de sortir de l'incertitude où il l'a plongée: car, d'un côté, il avoue que Dieu et le vrai sont inséparables; et que, si l'un est ou n'est pas, s'il est certain ou incertain, l'autre est nécessairement de même; et, d'un autre côté, il se reconnoît incapable de prouver l'existence de Dieu par des raisons naturelles. N'est-ce pas énerver toute la force des motifs de crédibilité que Pascal lui-même vouloit

1 Pensées de Pascal, tom. I, art. 10, pag. 267.

établir dans l'ouvrage qu'il préparoit sur la religion chrétienne? Comme lui, nous admettons que la philosophie n'a jamais produit ni pu produire autre chose que le doute; mais, de plus, nous montrons, ce qu'il ne fait pas, que l'homme a dans sa nature un moyen de parvenir à la connoissance certaine de la vérité. C'est ce qui paraîtra bien clairement, lorsque nous exposerons notre propre doctrine, ou plutôt celle du genre humain ; et la nécessité où l'on nous a mis de la défendre, nous oblige à le faire remarquer.

CHAPITRE VIII.

Bossuet, Nicole, Euler.

Bossuet n'a jamais, que nous sachions, traité explicitement la question de la certitude. A cet égard, il suivoit la philosophie reçue de son temps, et rien en effet ne l'obligeoit à entreprendre un examen que les erreurs qu'il combattoit ne rendoient pas nécessaire. Cependant nous pouvons encore nous appuyer de son autorité sur un point important, avoué déjà par Descartes, Leibnitz, et Malebranche; c'est que sans Dieu rien ne seroit vrai, ou, en d'autre termes, que la certitude de toute vérité dépend de la certitude de l'existence de Dieu: d'où il suit que, tant que l'on tient son existence en doute, il est impossible de rien prouver. Voici les paroles de Bossuet:

« Si je cherche maintenant où, en quel su<< jet, elles (les vérités) subsistent éternelles <<< et immuables, je suis obligé d'avouer un

<«< être où la vérité est éternellement subsis<< tante*, et où elle est toujours entendue; « et cet être doit être la vérité même, et doit « être toute vérité, et c'est de lui que la vérité « dérive dans tout ce qui est et ce qui s'étend « hors de lui.

« C'est donc en lui, d'une certaine manière << qui m'est incompréhensible, c'est en lui, « dis-je, que je vois ces vérités éternelles ; << et les voir, c'est me tourner à celui qui est << immuablement toute vérité, et recevoir ses <<< lumières.

« Cet objet éternel, c'est Dieu éternellement «< subsistant, éternellement véritable, éternel«<lement la vérité même1. >>

Et encore: « Ces vérités éternelles que tout << entendement aperçoit toujours les mêmes, << par lesquelles tout entendement est réglé, << sont quelque chose de Dieu, ou plutôt sont

«Dieu même 2. >>

* Il semble qu'on entende Leibnitz lui-même.

Traité de la connoissance de Dieu et de soi-même chap. IV, pag. 303-304. Paris, 1741.

· Ibid., pag. 307. « Il est certain, dit-il encore, qu'en << Dieu est la raison primitive de tout ce qui est, et de << tout ce qui s'entend dans l'univers ».Ibid., ch. IV, n° x.

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