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SATIRE

V I.

Contre les Avares, & leurs Héritiers.

Au pays des Sabins, dėja du capricorne

U

Bravez-vous près du feu le regard froid et morne
Votre lyre à la main, et sur des tons nerveux,
Faites-vous retentir vos vers majestueux ?
La force et l'agrément de vos chansons divines.
Feront toujours l'honneur de nos muses latines.
De l'univers naissant peignez les premiers jours;
Célébrez des héros la gloire ou les amours,
Tout plaît dans vos écrits, tout charme en votre stile.
Je suis en Ligurie; et ce séjour tranquile
Me présente un rempart aux assauts de l'hiver.
La chaîne des rochers qui couvrent cette mer
L'arc formé par son port, rendent l'air agréable.
Ah! que le port de Lune est un port admirable!
Quand Ennius le dit, libre d'illusion,

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Il ne se croyoit plus le chantre d'Ilion.
Dans cet heureux séjour, muni d'indifference,
Je jouïs d'un bonheur qu'aucun trouble n'offense,
Satisfait de mon sort, sans soins, sans embarras,
Ce qu'on pense de moi ne m'inquiéte pas.
Je me mets au-dessus du vulgaire stupide,
La raison me conduit; le préjugé le guide.

Hic ago (1) securus vulgi, et quid præparet Auster, Infelix pecori, securus et angulus ille

Vicini, nostro quia pinguior; et si adeo omnes

Ditescant orti pejoribus, usque recusem

Curvus ob id minui senio, aut cœnare sine uncto;
Et signum in vapidâ naso tetigisse lagenâ.
Discrepet his alius. Geminos, horoscope, varo (2)
Producis genio. Solis natalibus est qui

Tingat olus siccum, muriâ vafer in calice emptâ,
Ipse sacrum irrorans patinæ piper. Hic bona dente
Grandia magnanimus peragit puer. Utar, ego utar;
Nec Rhombos ideo libertis ponere lautus;

Nec tenuem solers Turdorum nosse salivam.

Messe tenus propriâ vive, et granaria, fas est

(1) Pro ago, legunt alii, ego. Nec malè.

(2) Geminos, horoscope, VARO producis genio.] Varo; non tantùm sonat hîc vario, sed oppósito. Vox metaphorica ducta à cruribus varis, id est distortis, quorum hoc dex trorsum, illud tendit sinistrorsum.

Que l'air sur les troupeaux répande son venin
Que mon champ soit stérile au prix du champ voisin;
Qu'un faquin à mes yeux prospère et s'enrichisse,
Son heureux embonpoint n'a rien qui m'amaigrisse.
D'un chagrin déplacé victime sans raison,
Un sot épargnera son vin dans la saison.
Laissons-le se livrer à sa triste manie,
Et cherchons à jouïr des douceurs de la vie:
Je n'examine pas si mon vin éventé

Par un valet fripon n'est pas décacheté.

IL en est, cher ami, d'un autre caractère: En deux jumeaux souvent la nature diffère. Ennemi de soi-même, esclave-né du gain, Pour grossir son trésor, prêt à mourir de faim, L'un ne connoît dans l'an aucun jour de dépense, S'il ose en excepter celui de sa naissance. A quelques fades mets, pour ce jour préparés, Il touche avec respect, comme à des mets sacrés. Epuisant un trésor, qu'il croit inépuisable, L'autre se livre au jeu, fait le Seigneur, tient table. Excès dans tous les deux économe prudent, Je n'irai pas jeter mon bien à tout venant. On ne me verra point follement magnifique, De sole et d'esturgeon nourrir mon domestique; Distinguer dans les mets l'exquis d'avec le bon ¿ Au fumet d'une grive en nommer le canton.

Emole. Quid metuas occa: en seges altera in herba est.

AVARU S.

Ast vocat officium: trabe ruptâ, Brutia saxa

Prendit amicus inops: remque omnem, surdaque vota
Condidit Ionio; jacet ipse in littore, et unà
Ingentes de puppe Dei; jamque obvia mergis

Costa ratis lacera.

PERSIUS.

Nunc et de cespite vivo

Frange aliquid; largire inopi, ne pictus (1) oberret

Cæruleâ in tabulâ.

AVARU S.

Sed cœnam funeris heres

Negliget, iratus quod rem curtaverim (2); et urnæ
Ossa inodora dabit, seu spirent cinnama surdùm,
Seu ceraso peccent casiæ, nescire paratus.

Tunc bona ir.columis minuas? Sed Bestius urget

(1) Si fractis enatat exspes navibus, are dato qui pingitur. HORAT. de Arte Poët.

(2) Alii, amoto dialogo, scribunt, curtaveris. Quamquam ab avaro prolatam et hanc vocem CURTAVERIS, COgitari potest, ad perfectiorem sensum scribo, curtaverim, et urna, &c.

1

Vos grains sont moissonnés, et votre grange est pleine;

Videz-la.

L'AVARE.

Mais je crains....

PERSE.

Quoi ? votre crainte est vaine.

Déja vos blés en vert répondent à vos soins.

L'AVAR E.

Mais il vient un ami m'exposer ses besoins....
Son vaisseau s'est brisé... Par un triste naufrage,
Il perd tout, et se sauve à grand' peine à la nage.
La mer engloutissant sa fortune et ses vœux,
L'a jeté sur ses bords en un état affreux.

PERSE.

Il faut toucher au fond: démembrez votre terre, Pour tirer cet ami du sein de la misère;

Et ne le souffrez pas, en proie à son destin, aller de porte en porte, et mendier son pain.

L'AVAR E.

Oui : ... mais d'un héritier c'est tromper l'espérance.
De ma pompe funèbre épargnant la dépense,
Il me regrettera jusqu'aux moindres honneurs.
Point de choix aux parfums, nul festin, pas de fleurs.
C'est la faute du mort, dira-t-il, en colère;
Que n'a-t-il épargné, comme il devoit le faire?
Bestius, ennemi de nos nouveaux Docteurs,

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