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res, sur les splendeurs du marquis, » enfin sur sa dernière campagne, sa mort et la fin des Grignan. Ces détails, parmi lesquels on remarquera ce qui regarde l'éducation d'un enfant de grande famille au milieu du xvn siècle et ce qui regarde l'histoire militaire de la France de 1688 à 1709 (année où, le 10 ou le 12 octobre, le marquis de Grignan mourut de la petite vérole à Thionville), ces détails, dis-je, sont d'une minutieuse exactitude. Le biographe a tiré un aussi bon parti des livres que des manuscrits de nos grands dépôts publics. C'est surtout dans le Dépôt de la guerre qu'il a trouvé d'abondantes ressources. Il y signale particulièrement (p. 155) « la très nombreuse et très intéressante correspon dance échangée entre Grignan et Louvois, et dont il est regrettable à tous les points de vue que l'édition Regnier ne donne point un scul spécimen. » Ces documents, ajoute-t-il, « sont d'un intérêt puissant, tant au point de vue de l'histoire de la Provence qu'au point de vue de l'étude des caractères. » M. F. M. reconnaît, du reste, que les lettres du marquis n'ont rien du délicieux style de sa grand'mère. On les trouvera même bien inférieures à celles de Mme de Grignanet à celles de Mme de Simiane: l'air de famille leur manque entièrement. Quoiqu'il en soit, tous les amis de Mme de Sévigné ( et Dieu sait s'ils sont nombreux!) seront reconnaissants à M. Frédéric Masson du soin qu'il a pris de recueillir tant de renseignements peu connus et de documents inédits qui font revivre le marquis de Grignan, et ils placeront tous dans leur bibliothèque cette consciencieuse monographic à la suite des volumes consacrés à l'incomparable Mme de Sévigné par MM. Monmerqué, Walckenaër, Aubenas, Adolphe Regnier et Capmas. T. DE L.

1. Voir (p. 11, note 1) l'indication des principales sources auxquelles il a puisé. 2. M. F. M. a tant et si bien travaillé, qu'il a réussi à améliorer sur quelques points une édition aussi excellente que celle des lettres de Mme de Sévigné dans la Collection des grands écrivains de la France. Voir les observations des pages 18 (note 1), 31 (note 1), 34 (note 2), 183 (note 1).

3. Voir à l'Appendice une lettre et un billet de Mme de Grignan tirés de la collection de Mme A. Jubinal, ainsi qu'une consultation du Dr Chambon, médecin de la faculté de Paris, et une lettre du chevalier de Grignan. A propos de Mme de Grignan, je ne saurais pardonner à M. F. M. d'avoir douté, sur la foi d'une mauvaise chanson, de la vertu de Me, de Sévigné. Voici ce qu'il n'a pas craint d'écrire (p. 35, note 1): « Je dis l'honnêteté farouche [de Mme de Grignan], parce qu'il convient de se conformer à la tradition : néanmoins, pour être impartial, je dois donner cette chanson inédite, que je trouve dans un recueil manuscrit du xvire siècle qui m'appartient.... » Faut il donc rappeler à M. F. M. qu'une chanson n'a jamais été une preuve: Autre reproche mérité par l'auteur. Pourquoi, toujours à l'occasion de cette pauvre Mme de Grignan, traite-t-il (p. 203) un sujet trop délicat, trop physiologique, dans cette singulière phrase : « Soit que son physique fût bouleversé par cette terrible crise qui, à un certain âge. vient s'abattre sur la femme et à laquelle plusieurs succombent... » De cette phrase réaliste je rapprocherai cette tirade sentimentale et qui semble placée là pour toucher les célibataires les plus endurcis (p. 188) : « Ah! pourtant cela, la race sortie de soi qu'on voit s'étaler sur le monde, se brancher et fleurir, n'est-ce pas ce qu'un être humain peut souhaiter de plus désirable, et est-il un spectacle qui soit mieux fait pour inspirer l'orgueil d'avoir vécu? »

FRANCE.

CHRONIQUE

M. G. SCHLUMBERGER vient de faire tirer à part l'Eloge de M. de Saulcy lu par lui dans la dernière séance générale de la Société de l'Orient Latin et publié dans le tome II de l'Annuaire de cette Société. Cet Eloge est suivi d'une très complète bibliographie des publications de M. de Saulcy, bibliographie comprenant plus de quarante pages de texte et plus de quatre cents numéros. Ajoutons que M. G. Schlumberger a été chargé par la famille de M. de Longpérier de publier une édition des œuvres de cet érudit, éparses dans les diverses Revues d'archéologie et dans les travaux de l'Académie des Inscriptions et des autres Sociétés savantes. Cette publication dont M. Leroux sera l'éditeur, comprendra cinq volumes. Le premier sera consacré à la numismatique et à l'archéologie orientale; le deuxième et le troisième comprendront les travaux sur la numismatique et l'archéologie grecque et romaine; les deux derniers volumes traiteront du moyen-âge et de la Renaissance.

- Nous recevons de notre collaborateur M. P. DECHARME un tirage à part de son Bulletin critique de la religion grecque, publié dans la Revue de l'histoire des religions. Il y apprécie les ouvrages suivants: Gustave d'Eichthal, Théologie et doctrine religieuse de Socrate; Hild, thèse sur Les démons dans la littérature et la religion des Grecs; Bouché-Leclercq, Histoire de la divination dans l'antiquité.

Notre collaborateur M. TAMIZEY DE LARROQUE a reproduit dans un intéressant volume les plus curieux des Vieux papiers du château de Cauzac (Agen, impr. Lenthéric. In-8°, xv et 99 pp. Tiré à cent exemplaires). Le château de Cauzac est situé dans la commune de ce nom, canton de Beauville, arrond. d'Agen. Le plus célèbre de ses chatelains est Balthazar de Thoiras; c'est de lui surtout que nous parlent la plupart des documents publiés par M. T. de L.; il s'y montre d'abord très attaché à la Ligue, puis repentant et heureux de faire sa soumission au roi. Dans les quatre dernières lettres du recueil paraît le fils de Balthazar, François de Thoiras « dont la vie semble avoir été aussi calme et aussi effacée que celle de son père fut orageuse et singulière». Les premières lettres du volume sont écrites par Emmanuel de Savoie, marquis de Villars, lieutenant-général du roi (le cardinal de Bourbon en Guyenne, et renferment de nombreux détails sur les mouvements de la Ligue en Agenais, en Quercy et en Languedoc. Dans les documents suivants on voit intervenir le prudent et politique maréchal de Matignon; c'est devant lui que Balthazar jure d' « estre et demeurer bon et fidel subjet du Roi Henry quatriesme ». On rencontre encore çà et ià diverses particularités sur les Croquants, sur le Château Trompette, la forteresse de Bordeaux, qui fut sauvé d'une entreprise des ligueurs par l'avis que donna Balthazar au gouverneur de la Guyenne. Mais ce qu'on remarquera surtout parmi les pièces que M. Tamizey de Larroque a tirées des archives de Cauzac, ce sont les pièces relatives au château de Montpezat. La défense de ce château, auquel se rattachent des souvenirs de la guerre de cent ans, avait été confiée par le marquis de Villars à Balthazar de Thoiras, qui le rendit peu après à Matignon.

- La Bibliothèque slave elzévirienne qui paraît chez l'éditeur Alfred Leroux, comptait déjà deux volumes (I. Religion et mœurs des Russes, anecdotes de Jos. de Maistre et du P. Grivel, p. p. le P. Gagarin; II. La mort d'Ivan le Terrible, drame du comte Tolstoy, trad. par Courrière et mis en vers par Demény et Izambard; elle vient de s'enrichir d'un troisième volume, La Sorbonne et la Russie (1717-1747), par le P. PIERLING. (In-18°, 178 p. 2 fr. 50.)

ACADEMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES

Séance du 10 mars 1882.

M. le secrétaire perpétuel lit un décret par lequel le président de la République a approuvé l'élection de M. H. Weil, en qualité de membre ordinaire, en remplacement de M. Dulaurier. M. Weil cst introduit et prend place.

M. Bréal est désigné pour faire une lecture au nom de l'Académie à la séance trimestrielle de l'Institut, le 5 avril. 1 lira son étude sur une inscription latine ancienne, communiquée à l'Académie des inscriptions dans sa dernière séance.

M. le secrétaire perpétuel donne lecture des lettres des candidats aux deux places de membre ordinaire laissées vacantes par la mort de MM. de Longpérier et Thurot. Ces candidats sont au nombre de quatre, MM. Albert Dumont, Senart, Siméon Luce et P. Favre. L'Académie se forme en comité secret pour examiner ces candidatures. A la reprise de la séance publique, M. Léon Renier communique le texte d'une inscription latine que vient de mettre au jour M. Cagnat, chargé d'une mission archéologique en Tunisie. Elle a été trouvée à Henchir Chigarnia, à environ un kilomètre au nord-est du Djebel Takvouria. L'existence du monument, alors encore enfoui sous terre, a été signalée à M. Cagnat par M. Mangiavacchi, régisseur de l'Enfida. L'inscription est ainsi conçue:

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IMP CAES FLAVIO
VALERIO

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Imperatori Caesari Flavio Valerio Constantino Pio Felici Invicto Augusto, pontifici maximo, tribunicia potestate, colonia Uppenna devota numini majestatique ejus, decurionum decreto, pecunia publica. » On ignorait entièrement l'existence de la colonia Uppenna. C'est la seconde fois que M. Cagnat découvre en Tunisie une ville antique jusqu'ici inconnue.

M. Clermont-Ganneau continue sa communication sur les résultats de ses recherches archéologiques en Syrie et en Palestine. Il donne quelques détails sur un monument qu'il a trouvé entre Jaffa et Jérusalem et dont M. Renan a déjà brièvement entretenu l'Académie au moment de la découverte. C'est un chapiteau de colonne, qui porte d'un côté les mots grecs EIC OEOC, « un seul dieu, » de l'autre une for mule hébraïque, écrite en lettres archaïques : « Que son nom soit béni dans l'éternité ! » La formule eis 065 était particulièrement répandue parmi les chrétiens de Syrie, au ve et au vr siècle de notre ère, et c'est à eux probablement que les musulmans ont emprunté la formule analogue qui est restée en usage chez eux jusqu'à nos jours. La présence de cette formule ne permet pas d'admettre que le monument puisse être antérieur au ve siècle de notre ère. L'inscription hébraïque, d'après la forme des lettres, semblerait être beaucoup plus ancienne; mais, en examinant l'original avec attention, on reconnaît qu'elle a été gravée de manière à faire pendant à l'inscription grecque et par conséquent à la même époque. Il semble donc qu'il y ait dans l'écriture de cette inscription une recherche voulue d'archaïsme.

M. Oppert doute que la formule « Il n'y a qu'un dieu » ait été empruntée par les musulmans aux chrétiens; c'est par haine du christianisme que les musulmans l'ont adoptée, pour indiquer qu'ils repoussaient le dogme de la Trinité.

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M. Renan dit qu'il peut bien y avoir eu une intention analogue de la part des chrétiens de Syrie, qui, professant un christianisme fortement empreint de judaïsme, ne goûtaient que médiocrement la doctrine trinitaire. Ouvrages présentés : par M. Le Blant : AUBÉ (B.), Un texte inédit d'actes de martyrs du siècle, (extrait de la Revue archéologique); par M. Schefer : FAVRE (l'abbé P.), Dictionnaire français-malais; par M. Delisle : 1o TAMIZEY DE LARROQUE (Ph.), les Vieux Papiers du château de Cauzac; 2o FAUCON (Maurice), le Mariage de Louis d'Orléans et de Valentine Visconti, la Domination française dans le Milanais de 1387 à 1450 (rapport sur deux missions en Italie); — par M. Georges Perrot: WAGNON (Adrien), la Frise de Pergame et le Groupe de Laocoon (Genève, in-8°).

Julien HAVET.

ERRATUM. Quelques amis me demandent avec inquiétude ce que sont les indisants qui paraissent sous ma signature, p. 181, et quelle est cette nouvelle variété de l'espèce orientaliste: prière de lire iranisants. J. DARMESTETER.

Le Propriétaire-Gérant: ERNEST LEROUX.

Le Fuy, typ. et lith. Marchessou fils, boulevard Saint-1 aurent, 23

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M. Henri Weil, ami de Charles Thurot depuis longues années, plus initié que personne à ses travaux et si compétent pour les juger, a bien voulu nous communiquer, sur les écrits de l'éminent collaborateur que nous regrettons, la notice qu'on va lire. Nous voulons y ajouter quelques lignes qui disent ce que Thurot a été pour la Revue critique. Il lui a donné, presque dès l'origine, un concours aussi actif que précieux, et, dans le succès modeste mais honorable qu'elle a obtenu, il peut revendiquer une large part. Aucun de ceux qui fondèrent la Revue, en 1866, n'avait l'honneur de le connaître, et il ne figure pas sur la liste de collaborateurs jointe à notre Prospectus. Quelques mois seulement après la publication de notre premier numéro, nous le vîmes entrer dans le petit bureau sombre que la Revue occupait alors rue de Richelieu. Il se nomma, et son nom suffisait dès lors pour inspirer le respect. « J'ai lu, dit-il, votre journal depuis qu'il paraît; la sincérité et la netteté que j'y ai remarquées me plaisent; je viens vous proposer ma collaboration. » On peut comprendre avec quelle reconnaissance nous l'acceptâmes: nous avions alors grand besoin d'être encouragés, d'autant plus que cette sincérité qui avait conquis Thurot ne nous avait pas fait des amis partout, et qu'il nous était particulièrement précieux, à ce moment, d'avoir l'appui et le concours d'un membre aussi distingué de l'Université. Dès lors il fut des nôtres : il vint tous les huit jours, comme les directeurs de la Revue, prendre part aux séances de lecture, et il donna sur les sujets en discussion des avis toujours écoutés; malgré la supériorité que son âge n'était pas seul à lui assurer, il fut bientôt pour nous un ami, et les liens qui se formèrent alors allèrent toujours en se resserrant jusqu'au jour qui les a si soudainement et si cruellement tranchés. A partir de la première attaque d'hémiplégie qui précéda de près de cinq ans celle qui l'a emporté, Thurot ne vint plus à la Revue, mais il lui continua toujours sa collaboration; il l'avait cependant ralentie vers la fin, absorbé qu'il était par les grands travaux qu'il concevait et exécutait alors sans se laisser abattre par la douloureuse diminution de ses forces et par la claire Nouvelle série, XIII.

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conscience de la menace suspendue sur sa tête. Depuis qu'il avait été nommé membre de l'Académie des Inscriptions (1871), il avait renoncé, par principe, à rendre compte de livres français; il se faisait scrupule d'engager la responsabilité de la compagnie à laquelle il appartenait, et, dans ces conditions, il ne se sentait pas une liberté suffisante. Il ne fit à cette règle que peu d'exceptions, mais il nous donna encore beaucoup d'articles, dont quelques-uns sont fort importants, sur des ouvrages étrangers. La philologie et la philosophie sont les principaux sujets sur lesquels il a écrit ici; le relevé de ces articles, que nous donnerons quelque jour, montrera l'étendue et la variété de ses contributions. Mais la part qu'il a eue à la direction de la Revue est peut être plus importante encore que sa collaboration. Sa présence au milieu de nous était un honneur dont nous sentions le prix, et en même temps elle nous imposait certaines réserves, elle nous interdisait certaines témérités qui auraient pu tenter des jeunes gens un peu enivrés de la science qu'ils étaient en train d'acquérir. Sa haute et lumineuse raison, son éloignement pour tout ce qui ressemblait à une coterie, sa haine de ce qui lui paraissait vague, prétentieux et exagéré, ses excellentes et classiques habitudes d'esprit exerçaient sur la Revue une salutaire influence. Parfaitement au courant du mouvement scientifique le plus récent, aussi bien en Allemagne qu'ailleurs, il ne s'y laissait pas cependant entraîner avec l'ardeur par fois naïve des nouveaux initiés; il résistait plutôt d'instinct à toute inno vation, et, fermement soumis à la méthode, se gardait soigneusement des systèmes. C'était un esprit très français, qui avait beaucoup voyagé hors de France, qui comprenait à merveille l'impossibilité, dans notre siècle, de se cantonner dans son pays et d'ignorer le reste du monde, mais qui était resté fidèle, dans le fond de ses idées comme dans la forme qu'il leur donnait, à la meilleure et à la plus saine tradi ion de l'école française du XVIe siècle. On l'a appelé le dernier des condillaciens; le mot, à plus d'un égard, est loin d'être juste, mais il contient une part de vérité. Son oncle François Thurot, dont il a recueilli et publié les petits écrits, était un habitué de ce salon de Mme Helvétius où se réunissaient à Auteuil, sous l'empire, les fidèles de l'« idéologie »; entre l'esprit de l'oncle et celui du neveu, il y a une incontestable et touchante affinité. Mais le souffle de la philosophie moderne, auquel l'oncle se refusa obstinément d'ouvrir la moindre fenêtre, avait largement pénétré chez le neveu. Sa psychologie, comme on peut le voir en maint article de cette Revue même, avait une tendance spiritualiste; sa conception du monde était moins mécanique que celle de l'école condillacienne. En outre, de profondes études historiques avaient donné à sa pensée un caractère plus souple et moins abstrait. Il avait, du reste, en philosophie comme en toute chose, une érudition merveilleuse; il avait lu et médité les œuvres des penseurs modernes comme des anciens, et ses jugements étaient toujours portés en parfaite connaissance de cause. Aussi tous ceux, dans l'Europe entière, qui s'occupaient de ce qui était le sujet de ces études l'appréciaient

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