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mettre au jugement des hommes compétents quelques observations qui m'ont été suggérées par la lecture de l'itinéraire de Théodose.

Je ne vois pas pourquoi le savant professeur de Bonn veut reconnaitre sous le nom de Ramusa (p. 30) la ville de Dagusa, Dacusa ou Dascusa (v. p. 29); bien loin d'être inconnue, la ville de Ramusa se trouvait dans le district d'Alep, à peu de distance de Kinesryn, suivant le témoignage du géographe arabe Yakut, et l'on peut trouver quelques renseignements à ce sujet dans la Chr. ar. de Sacy III, p. 11, 56, 57,

M. Molinier a déjà émis son opinion sur le peu de valeur que présente l'hypothèse de M. G., touchant la patrie de notre Théodose: la désignation de l'arianisme par « religio Wandalorum » lui semble, à bon droit, une raison peu concluante pour faire de Théodose un Africain (cf. De situ, p. 23). S'il m'était permis de hasarder une conjecture, je serais plutôt incliné à attribuer à notre auteur une origine arménienne. En effet, il est assez curieux que, dans les quelques pages de son petit traité, il ait trouvé moyen de citer par trois fois l'Arménie : p. 22, « inde jam est Armenia »; p. 23, « de monte Armeniae exeunt flumina duo »; p. 27, ‹ in sinistra Armenia prima et secunda Armenia et Persarmenia, quae Armeniae sub imperatore sunt ». On voit qu'il s'en occupe spécialement. De plus, à la p. 30, nous rencontrons encore l'Arménien Abgar, dont l'histoire a été conservée par Eusèbe et amplifiée d'après les sources arméniennes par Moïse de Khorène.

A la p. 22, M. G. suppose que Théodose a mis Cherson en Asie-Mineure. Est-ce parce qu'il parle tout de suite après de Sinope (de Chersona usque in Sinope)? Mais le patriarche des chroniqueurs russes qui, lui, connaissait bien la position de Korsun (transcription russe du nom de Cherson), n'en agit pas autrement : « André, qui enseignait à Sinope, étant arrivé à Korsun, apprit que l'embouchure du Dniepr n'en était pas éloignée, etc. >> (Lietopis' po Lawrentiewskiemu spisku, Saint-Pétersbourg, 1872, p. 7).

M. G. renvoie, à ce propos, le lecteur aux Actes apocryphes des Apôtres, édités par Tischendorff (Leipzig, 1851). Mais dans les Actes des saints André et Mathieu il n'est question que d'anthropophages sans indication de lieu; plus loin, dans les Actes de Mathieu, la ville des anthropophages où ce dernier reçut le martyr s'appelle Myrne (Acta ap. Ap., pp. 173 et 189). En comparant ce qui est dit à la p. 151 avec le récit de la p. 166, on est amené à croire que l'auteur ou le rédacteur de ces Actes apocryphes identifiait dans sa pensée l'endroit où Mathieu avait été délivré par André et l'endroit où il confessa plus tard la foi. Quant à Théodose, il ne songe pas à Myrne : « De Chersona usque in Sinope, ubi dominus Andreas liberavit dominum Matthaeum evangelistam de car cere. » Il sait seulement que les habitants de cette Sinope étaient jadis anthropophages et avaient dans la suite changé de mœurs, si bien que << ut ad stratas sedeant peregrinis suscipiendis ».

Or, Strabon savait par ouï-dire que les Scythes se nourrissaient de

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chair humaine (Géogr., 1. IV, ch. vi, éd. Didot, p. 167; 1. VII, ch. 1, p. 248), du moins, ceux qui habitaient le littoral du Pont-Euxin (cf. la légende d'Iphigénie). Quoiqu'il en soit, Théodose avait en vue une ville de la Crimée ou du Caucase occidental, où l'existence de l'anthropophagie est attestée par le témoignage des annales géorgiennes, des chroniques arméniennes, et des auteurs qui ont fourni à Wakhoucht les matériaux de son travail'. Saint André a visité le Caucase, à en croire les traditions indigènes, qui le font voyager à Atsqour et Pitzounda". En outre, Théodose prétend que Sinope se nommait autrefois Myrmiciona, qu'il est difficile de ne pas rapprocher de Myrmikion (prononciation byzantine), de Strabon et des autres géographes grecs, qui s'avançait sur le Bosphore Cimmérien, et dont les ruines ont été reconnues par Dubois de Montpéreux, lors de son voyage autour du Caucase (t. V, pp. 36, 105, 137, 145, 231; t. VI, p. 166). Du reste, Théodose n'a pas l'air de faire erreur et semble plutôt indiquer une autre Sinope que la colonie de Milet: « Quae Sinope illo tempore Myrmiciona dicebatur >> ; par conséquent, c'est une ville qui peut tout au plus être cherchée en Crimée, près de Kercz, ou sur le littoral opposé.

Il n'y a rien qui doive nous effaroucher dans les mots : « inde jam est Armenia », ou, selon une autre leçon : « via decurrit in Armeniam. » Strabon mettait en Arménie les sources du Kour et les défilés de l'Aragwa (1. XI, ch. 1, p. 429). Dimichqi place même Tiflis dans la deuxième Arménie (Cosmographie, éd. Mehren, Saint-Pétersbourg, p. 189). D'ailleurs les nations caucasiennes reconnaissent entre elles une certaine communauté d'origine et se prétendent issues des frères cadets de Haïc, père des Arméniens; les nations kartweliennes n'hésitent pas à affirmer que leur langue maternelle a été l'arménien jusqu'au temps où la fusion d'idiomes divers produisit la langue géorgienne (Hist. de la Géorgie, par Brosset). Il n'y a donc pas lieu de s'étonner si Théodose recule aussi loin les frontières de l'Arménie, surtout si, comme je le crois, il était de ce pays dont les natifs se distinguent par un patriotisme excessif. Dans ce cas, la réputation d'hospitalité qu'il fait aux arrière-neveux des anthropophages n'est pas déplacée, car il n'y a certes pas de peuple qui puisse se vanter d'être plus hospitalier que les habitants du Caucase. David GüNZBurg.

1. Voy. Histoire de la Géorgie, par Brosset, t. I de la 1 partie, et la chron. armén. placée en tête des Addit. et Eclairc. Voy. encore Géogr. de la Géorgie, par le Tsarévitch Wakhoucht, éd. par Brosset, p. 9.

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2. Hist. de la Géogr., 1" partie, t. 1, pp. 57 et 60; Dubois de Montpéreux, Voy. autour du Caucase, t. II, p. 335.

CHRONIQUE

FRANCE. M. le comte de CHARENCEY va publier à la librairie Ern. Leroux des Mélanges de philologie et de paléographie américaines; ce volume se compose de mémoires détachés et ayant paru à des époques diverses, mais se rapportant tous à un seul et même sujet, la linguistique américaine et spécialement celle de la Nouvelle Espagne. Plusieurs des ouvrages consultés par M. de Charencey sont restés manuscrits et lui ont été communiqués par l'abbé Brasseur, de Bourbourg. Le livre se terminera par un exposé des recherches de l'auteur sur le déchiffrement des écritures dites calculiformes et propres au Yucatan et aux contrées avoisinantes.

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L'auteur de la Ville et du Village sous l'ancien régime, M. Albert BABEAU, PUbliera, avant la fin de l'année, un ouvrage sur la Vie rurale dans l'ancienne France, Dans une brochure de 50 pages (Lons-le-Saulnier, Declume. In-8°), notre collaborateur M. Ulysse ROBERT publie l'Etat des monastères franc-comtois de l'ordre de Cluny aux xii-xv* siècles ; les textes latins qu'il nous donne sont des procès-verbaux de visites, tirés d'un volume de la Bibliothèque nationale (coll. de Bourgogne, tome LXXXII); ils ne témoignent guère en faveur des mœurs des clunistes dans les monastères de la Franche-Comté. M. U. Robert souhaite de voir prochainement réunir et publier tous les procès-verbaux de même sorte qui sont relatifs aux prieurés français de l'ordre de Cluny. Nous nous associons à ce souhait.

Les éditeurs Féchoz et Letouzey, de Paris (5, rue des Saints-Pères) préparent pour le «< Dictionnaire des anonymes, » de Barbier et les « Supercheries littéraires dévoilées » de Quérard : I. Des additions et corrections qu'on pourra ajouter à la fin de chaque tome; II. Un Supplément en deux volumes; III. une Table générale. Ils font appel au concours de tous les bibliophiles et les prient de les aider par leurs informations dans la tâche qu'ils ont entreprise et que nous leur souhaitons de mener à bonne fin.

Une nouvelle édition du Glossarium de Du Cange, reproduisant la dernière édition donnée par la maison Didot avec les notes de Henschel, paraîtra chez l'éditeur de Niort, L. Favre; elle comprendra dix volumes qui seront publiés en cent fascicules.

- La livraison du tome premier de l'Histoire générale de la province de Quercy de G. Lacoste, publiée par les soins de MM. L. COMBARIEU et F. CANGARDEL, archiviste bibliothécaire, a paru à Cahors, chez Girma (In-8°, p. 1 à 40.) L'ouvrage formera huit volumes de 500 pages chacun, paraissant en livraisons mensuelles pendant les années 1882, 1883, 1884. Son prix sera de 18 francs, payables : 6 fr. par an. Les exemplaires de souscription sont tirés sur papier vergé teinté.

Deux volumes nouveaux des Mémoires-journaux de Pierre de l'Estoile, le volume IX et le volume X, ont paru récemment à la Librairie des bibliophiles (In-8', 438 et 427 pp.); ils comprennent la fin du Journal de Henri IV, de 1607 à 1610; le tome X est consacré presque entièrement à l'assassinat du Béarnais.

Dans la notice intitulée Quelques sculptures de la collection du cardinal de Richelieu, aujourd'hui au musée du Louvre (Champion, in-8, 16 p.), et qui a été présentée à l'Académie des Inscriptions par M. L. Delisle (séance du 28 juillet), M. L. COURAJOD détermine l'origine et examine la valeur critique de quatre des bustes les plus importants de nos collections: Jean de Bologne, Henri II, Charles IX et Henri III, qui ont fait partie de la galerie du cardinal. M. Courajod considère comme moderne la tête de Charles IX, qui a néanmoins depuis longtemps les préférences du public.

- Le 3 fascicule de la Revue d'histoire nobiliaire et d'archéologie héraldique renferme des lettres inédites de Henri IV à son gentilhomme ordinaire Julien de Beaurepaire, sieur de Pierrefitte et gouverneur de Saint-Maixent; ces lettres, qui vont de 1588 à 1590, sont publiées par le directeur du recueil, M. L. SANDRET.

- Le second volume des Mémoires sur la vie publique et privée de Claude Pellot, conseiller maître des requétes, intendant et premier président du Parlement de Normandie (1619-1683), publiés par M. E. O'REILLY, conseiller à la cour d'appel de Rouen (Rouen, Cagniard; Paris, Champion. In-8°, 753 pp.) a paru; comme nous l'avions constaté, en parlant ici même du premier volume, ce livre donne de très instructifs renseignements sur l'administration et la justice en France au xvir siècle; Claude Pellot fut l'ami et le confident de Colbert, son parent par alliance, et c'est des lettres inédites de Pellot au grand ministre et au chancelier Séguier que M. O'Reilly a tiré les matériaux de sa publication.

- Dans le cahier de juin du Journal des savants (pp. 363-370), M. Gaston BoisSIER parle du volume récemment publié par M. Aug. Louis Ménard, sous le titre d'Euvres inédites de Bossuet. Le cours royal complet sur Juvenal. M. Boissier pense qu'« il suffit de parcourir le manuscrit de M. Ménard à certains endroits, pour qu'il soit impossible de croire qu'il puisse être la reproduction exacte des paroles de Bossuet à son élève. Ce n'est pas ainsi que Bossuet formait le cœur et l'esprit du Dauphin ». Il y a d'ailleurs dans le manuscrit des contre-sens « qu'il est bien difficile et très peu respectueux d'attribuer à Bossuet », et quant aux vers de la dixième satire sur Annibal, dont la traduction paraît à M. Ménard le morceau le plus parfait de la langue française, « est-il possible d'attribuer à Bossuet de pareilles platitudes? » (Cp. Revue critique, no 7, art. 43).

Le premier volume d'une Bibliographie des œuvres de Voltaire vient d'être publié par M. Georges BENGESCO.

- M. Léon SÉCHÉ prépare un ouvrage où il se propose de raconter l'Histoire du jansénisme depuis la Révolution jusqu'à nos jours. L'introduction de cet ouvrage a paru dans la Paix (n° des 18 et 19 août) sous le titre « Les derniers jansénistes »; cette étude montre, dit l'auteur, par des exemples tirés de nos jours, combien les grandes idées sont lentes à mourir une fois qu'elles sont entrées dans le cœur des femmes.

Parmi les nouvelles éditions de classiques français qu'ont fait éclore les nouveaux programmes, nous signalons volontiers la bonne édition du Cinna de Corneille, récemment publiée chez Delagrave par M. Félix HÉMON, professeur au lycée de Brest, lauréat de l'Académie française. Le texte est éclairé par d'utiles et solides réflexions soit littéraires, soit grammaticales; M. Hémon a « puisé à pleines mains » dans le Lexique de M. Marty-Laveaux et surtout dans le dictionnaire de Littré; l'introduction, d'un style élégant et aisé, renferme une histoire de la pièce, une étude des caractères, quelques pages fort intéressantes sur la façon dont Corneille a modifié les données de l'histoire, une notice sur la trop fameuse épître à Montoron. On ne peut que souhaiter de voir se multiplier des éditions de ce genre, qui, sans tomber dans le détail superflu, sont destinées par de savantes et ingénieuses notices, par un commentaire explicatif nourri, à donner à la jeunesse de nos écoles la véritable intelligence de nos grands écrivains.

M. le comte Th. de PUYMAIGRE a commencé dans le Contemporain la publication des Souvenirs de son père, le comte Alexandre de Puymaigre (1789-1833); nous comptons que ces souvenirs paraîtront réunis en un volume.

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- L'ouvrage, couronné par la Société archéologique de l'Orléanais, de Mlle A. de Foulques de VILLARET, sur l'Instruction primaire avant 1789 à Orléans et dans

les communes de l'arrondissement, d'après des documents inédits, comprend deux parties I. l'étude des établissements d'instruction qui existaient dans les vingt paroisses de la ville d'Orléans et les cinq paroisses de sa banlieue (avec une reproduction d'un plan de la cité, datant de 1704). II. l'étude des écoles rurales (avec une carte scolaire de l'arrondissement d'Orléans). Le travail de Me de Villaret est accompagné de vingt pièces justificatives.

Le combat du cap Ortegal, livré un mois après la bataille de Trafalgar (4 novembre 1805) par la flotte hispano-française à la flotte anglaise, fut à la fois funeste et glorieux pour nos armes; le commodore sir John Stracham écrivait aux lords de l'Amirauté que les Français avaient combattu d'une manière admirable et ne s'étaient rendus que lorsqu'il était absolument impossible de manoeuvrer leurs vaisseaux. M. GEMÆHLING a trouvé dans ses papiers de famille le récit détaillé de ce combat naval; c'est une lettre écrite par son père le 1er décembre, de la cale d'un ponton anglais, à Plymouth; le père de M. Gemahling, embarqué sur le DuguayTrouin et qui avait déjà pris part à la bataille de Trafalgar, fut un des héros de la malheureuse quoique honorable affaire du cap Ortegal. M. Gemahling fils a reproduit le récit de son père, après en avoir contrôlé l'exactitude par une comparaison avec les rapports officiels déposés aux Archives du ministère de la marine (Combat du cap Ortegal, 13 brumaire an xiv [4 novembre 1805], épilogue de la bataille de Trafalgar. Chaix. In-8°, 25 p. et 10 planches).

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La librairie Hachette vient de publier sous le titre De Paris au Tibet les notes de voyage de Francis GARNIER, le jeune explorateur et conquérant qui prit Hanoi et s'empara, dans une expédition presque fabuleuse, de tout le bas Tonkin en moins d'un mois. Ces notes avaient paru, sous le même titre, dans le journal le Temps, du 30 juillet 1873 au 13 mars 1874; elles comprennent quatre parties: De Paris à Shang-Hai (pp. 1-57); De Shang-Haï à Hankéou (pp. 59-83); De Shang-Hai à Pékin (pp. 85-155); Une excursion de trois mois au centre de la Chine (pp. 157-286). On a joint à ces notes un mémoire adressé par Francis Garnier à la société de géographie de Paris sur un Voyage dans la Chine centrale (vallée du Yang-Tzu), pp. 289-361, et une étude, publiée pour la première fois dans le n° du 9 octobre 1875 de la « Revue scientifique » sur Le rôle de la France dans l'extrême Orient en Chine et en Indo-Chine (pp. 365-416). Le volume est précédé d'une notice sur Francis Garnier (pp. 1-xxxv); cette notice est due à M. Léon Garnier qui annonce l'intention de faire paraître prochainement une étude complète et très développée sur la vie et les travaux du regretté lieutenant de vaisseau; telle qu'elle est, on la lira avec intérêt, aussi bien que les impressions de voyage de Garnier dans ce monde oriental, dont — disait-il dans une lettre à M. Hébrard, nous avons tenu jadis les destinées entre nos mains et où il dépend de nous de reprendre, Dieu aidant, une situation digne de la France. Garnier voudrait remplacer, s'il était possible, l'écriture hieroglyphique des Chinois par les caractères latins; le temps que les Célestes emploient à n'apprendre qu'à lire imparfaitement serait gagné pour une foule de notions qui leur feraient voir le monde sous un jour tout nouveau et leur montreraient l'importance des relations avec les autres peuples; aucune révolution, sauf celle que l'imprimerie a opérée au xvie siècle, ne serait comparable à celle-là. Garnier reconnaît le bien considérable que font les missions catholiques; mais il ne croit pas à la conversion des Chinois, parce que le Chinois n'a pas le sentiment religieux et n'est accessible qu'aux considérations d'intérêt matériel; il pense que les missionnaires ne domineront les populations chinoises que par leur supériorité scientifique. Les missionnaires, dit-il (p. 397), arrivent, armés d'un grand savoir théologique, mais ignorant l'histoire et les mœurs des peuples qu'ils vont évangéliser; ils sont à peine

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