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l'inauthenticité est certaine; Hartung avec le Licymnios. Bref, la question, embrouillée comme à plaisir, en était venue à un tel point d'obscurité que Wagner, dans son édition des fragments d'Euripide, confessait ingénument qu'en l'absence d'une solution vraiment satisfaisante, il aimait mieux s'abstenir de toute explication.

Sur ces entrefaites, en 1837, Millingen publia, dans les Nouvelles Annales de l'Institut archéologique de Rome, un vase d'origine lucanienne, rapporté d'Italie par le peintre Tresham, et appartenant actuellement à une collection particulière à Castle-Howard en Angleterre. La face de ce vase qui nous intéresse représente une scène mythologique dont la lecture est rendue facile par les inscriptions placées au-dessus des figures principales. Sur un bûcher, terminé à la partie supérieure en forme d'entablement dorique, est assise une femme richement vêtue, que la légende appelle Alcmène. Un personnage barbu, Amphitryon, et un jeune homme désigné sous le nom d'Anténor, sont occupés à mettre le feu au bûcher à l'aide de brandons allumés. Mais deux carreaux de foudre viennent de tomber à leurs pieds, et, pendant qu'ils s'arrêtent effrayés, Jupiter apparaît dans les airs, le sceptre à la main et couronné de lauriers. En l'apercevant, Alcmène lève la main droite au ciel, avec une expression de stupeur et de joie. Sur l'ordre du dieu, deux jeunes divinités (les Hyades) versent sur le bûcher l'eau contenue dans deux amphores, tandis qu'un arc-en-ciel, brillant à travers une épaisse tempête, annonce le rétablissement de la paix sur terre et dans l'atmosphère. Enfin, dans l'angle droit du soλoyeïo», la figure de l'Aurore (AQ) fait pendant à celle de Jupiter et complète la composition. Cette peinture, d'une exécution médiocre, mais qui paraît inspirée par un ori ginal de valeur, est signée du nom d'un artiste inconnu, Python.

Rien ne pouvait être plus clair que le sens de la peinture publiée par Millingen. L'attitude des principaux personnages, celle d'Alcmène en particulier, montrait à l'évidence qu'il s'agissait d'une exécution par le feu, et cette exécution, bien qu'aucun poète n'en fit mention, s'expliquait à merveille: Amphitryon, convaincu de l'infidélité de sa femme, exaspéré par ses dénégations, l'a condamnée au dernier supplice, et c'est au moment où, de concert avec quelque parent d'Alcmène, il s'appréte à accomplir la sentence, que Jupiter survient pour lui donner la clé du mystère et lui révéler l'honneur auquel sa maison est appelée.

Le croira-t-on? Ici encore le parti pris et des scrupules érudits ont empêché les savants a'y voir clair, et leur ont fait substituer à une explication qui crevait, pour ainsi dire, les yeux, l'interprétation la plus alam

1. Nouvelles Annales, tome I (1836-1837), pp. 457 sq. La belle reproduction en couleurs forme la planche X des Monuments inédits publiés à la suite de ce recueil. Disons en passant que l'atlas de ces planches manque à la Bibliothèque nationale et dans les autres bibliothèques publiques de Paris. Nous l'avons trouvé à la bibliothèque de l'Institut, relié à la suite des Monumenti inediti des Annali dell' Instituto archeologico.

biquée qui fût possible. Millingen s'est souvenu que, d'après une tradition obscure rapportée par le mythographe Antoninus Liberalis, le corps d'Alemène fut, après sa mort, enlevé au ciel par Jupiter, et remplacé, dans son cercueil, par une grosse pierre. De là à un enlèvement opéré avant la crémation, il n'y avait qu'un pas; Millingen n'hésite pas à le franchir, et voilà comment la peinture de Python se trouve baptisée l'Apothéose d'Alcmène. Millingen accompagnait la description du monument de rapprochements fort érudits où l'archéologie et la mythologie avaient à glaner; mais cet échafaudage de suppositions aurait dû s'écrouler devant deux faits: 1° la posture d'Alcmène dans la peinture n'est pas celle d'une morte; 2° suivant la tradition constante des auteurs anciens, Alcmène survécut à Amphitryon et épousa en secondes noces Rhadamanthe '.

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Il a fallu néanmoins attendre jusqu'en 1872 pour que l'on reconnût la fausseté de l'interprétation de Millingen. A cette époque, M. Engelmann publia dans les Annali dell' Instituto une peinture assez rudimentaire, mais visiblement issue de la même origine que celle de Python. On y voyait un jeune homme l'Anténor du vase de Millingen - s'élançant, un brandon à la main, vers une femme qui s'est réfugiée sur un autel et lève les bras au ciel dans une attitude de terreur. Deux divinités, apparaissant dans un arc-en-ciel, versent des hydries pleines d'eau sur la flamme qui la menace. En présence de ce monument, d'une signification encore plus claire que le précédent, il n'était plus possible de soutenir que la scène commentée par Millingen se rattachât à une cérémonie funéraire. M. Engelmann a eu le mérite de le démontrer le premier, mais il ne s'est pas contenté de ce résultat trop facile. Remontant à la source même de la légende figurée sur nos deux vases, il s'est demandé s'il ne fallait pas reconnaître dans cette variante du mythe d'Alcmène l'influence d'un poète tragique. Ce point de départ admis et rien n'est moins téméraire il n'a pas eu de peine à conclure que l'auteur en question ne pouvait être qu'Euripide, seul assez populaire pour exercer une influence appréciable sur l'art du шr siècle, et que la composition de Python pouvait être regardée comme une illustration d'Alcmène 3. Ainsi disparaissaient du même coup la fantaisie archéologique de Millingen et les fantaisies littéraires de Welcker et de Hartung.

Cette partie de la thèse de M. E. ne va pas sans quelques difficultés. Je n'attache qu'une médiocre importance à celle qu'on pourrait tirer des

1. Voyez notamment les Heraclides d'Euripide. Si, dans l'Hercule furieux du même auteur, Alcmène ne figure pas auprès de son mari, il n'en résulte pas nécessairement qu'elle soit morte, mais seulement qu'elle n'a pas suivi Amphitryon en exil (Engelmann, p. 7, n. 4).

2. Annali, 1872, pp. 5-18 et tav. d'agg. A. L'original est à Londres.

3. Il est juste d'ajouter que Millingen avait déjà émis, d'une façon très dubitative, il est vrai, l'idée d'une relation entre la peinture de Python et notre tragédie (loc. cit., p. 492).

fragments de la tragédie leur insignifiance s'accommode de toutes les interprétations, et, en effet, M. E. éprouve peu d'embarras à les plier aux besoins de sa thèse. Mais on peut s'étonner qu'Euripide, si amateur qu'on le sache de coups de théâtre, de machinerie et de moyens violents, ait osé porter sur la scène un spectacle aussi atroce que celui du supplice d'Alemène, ajoutons: aussi peu conforme à l'indulgence relative des mœurs athéniennes pour la femme adultère. On peut s'étonner aussi de ne rencontrer chez les auteurs aucune allusion, même lointaine, à cette nouveauté: Aristophane aurait dû y trouver, ce semble, une ample matière à satire '.

Ces objections sont sérieuses et M. E., qui s'efforce de les écarter, n'en a pas méconnu la gravité. Sans entrer dans le détail d'une discussion un peu minutieuse, je dirai que toutes les difficultés, si réelles qu'elles soient, ne peuvent contrebalancer, à mon avis, la force de conviction presque irrésistible qui résulte du rapprochement de la peinture de Python avec un passage, jusqu'à présent peu intelligible du Rudens de Plaute :

Proh di immortales! tempestatim quious modi
Neptunus nobis nocte hac misit proxuma!
Detexit ventus villam... Quid verbis opus't?

Non ventus fuit, verum Alcumena Euripidi 2.

Cette tempête épouvantable, assez célèbre pour fournir au comique Romain une allusion comprise de son public, ne saurait être, comme le veut Welcker, un simple trait emprunté à un récit épisodique de la naissance d'Hercule. Il s'agit évidemment d'une tempête qui joue un rôle dans l'action de la pièce, et nous en avons précisément l'image dans la foudre, l'arc-en-ciel, le vent et la grêle (figurés par de gros points) du vase de Millingen.

Maintenant, cette tempête et la scène même du bûcher se passaientelles réellement sous les yeux du spectateur, ou se contentait-on de faire entendre derrière le théâtre le mugissement de la foudre et du vent, et un messager venait-il ensuite raconter les détails de l'intervention miraculeuse du deus ex machina? M. E. penche pour la première hypo

1. Deux passages cités par M. E. (Lysist., 269; Thesmoph., 726) ne sont guère concluants. L'invention du bûcher peut paraître moins choquante quand on la rapproche de la mort d'Evadné dans les Suppliantes et des vers bien connus de l'Hercule furieux (vv. 240 sq.), mais je me refuse à voir autre chose qu'une coïncidence fortuite avec l'histoire de Crésus (Hérodote, I, 87) et l'épisode du siège de Platées (Thuc., II, 77) que rappelle M. Engelmann. De même, la grossesse apparente d'Alcmène dans la peinture de Python, la ressemblance prétendue entre Jupiter et Amphitryon (le dessin du profil dans la chromolithographie est tout à fait différent), la relation entre la couronne de lauriers du dieu et le torulus aureus qu'il porte dans la pièce de Plaute (Amph., v. 144), me paraissent autant de subtilités. En regardant trop longtemps un dessin, on finit par y découvrir toute sorte de finesses qui n'existent que dans l'imagination, comme ces archéologues fatigués qui, voyageant en Grèce, aperçoivent une inscription dans chaque fissure de rocher.

2. Rudens, vv. 1-4.

thèse; la seconde serait peut-être plus conforme au caractère général du théâtre grec et rendrait suffisamment compte du passage du Rudens'. Mais ce n'est là qu'un point secondaire sur l'ensemble de la question, l'argumentation de M. E. me paraît décisive, et son ingénieuse trouvaille est du meilleur augure pour la suite des Etudes sur Euripide qu'il nous promet.

Depuis Bockh, il ne devrait plus être permis de contester l'utilité de l'alliance de la philologie et de l'archéologie figurée; il me semble que des travaux comme celui de M. Engelmann sont de nature à en convaincre les esprits les plus rebelles 2.

Théodore Reinach.

202.— Abrisz der Quellenkunde der Griechischen und Rœmischen Geschichte. Erste Abteilung, Griechische Geschichte bis auf Polybios, von Arnold SCHÆFER. Troisième édition, Leipzig, Teubner. 1882. 11 p. in-8°.

Nous sommes heureux d'annoncer cette troisième édition d'un travail si utile, si commode pour tous ceux qui s'occupent d'histoire grecque; la première édition est de mai 1867, la deuxième de janvier 1873. On voit que le succès a été rapide pour ces simples « feuilles », destinées seulement, dans la pensée de M. Schæfer, à guider les étudiants.

M. S. a classé les auteurs d'après l'ordre chronologique, il établit quatre périodes: 1° depuis les temps les plus reculés jusqu'à Hérodote; 2o de Périclès à Philippe de Macédoine; 30 l'époque de la puissance. macédonienne; 4° les derniers temps des états grecs, les Alexandrins. Chacune de ces divisions comprend des subdivisions dans lesquelles les auteurs sont rangés cette fois d'après le genre de leurs œuvres; ainsi, dans la troisième période, celle de la puissance macédonienne, sont indiqués par ordre les histoires générales d'Ephore, de Théopompe, etc., - les mémoires concernant Alexandre et les Diadoques, les histoires qui forment la suite de celle d'Ephore, Atthides, - l'histoire sicilienne enfin les oeuvres d'auteurs qui, sans être proprement des historiens, n'en forment pas moins une des sources importantes pour l'histoire, les orateurs et les philosophes.

les

1. Nous aurions donc ici une scène entièrement analogue à celle qui termine l'Iphigénie à Aulís. C'est peut-être une preuve à ajouter à celles que Patin et M. Weil ont fait valoir en faveur de l'authenticité tant discutée de ce dernier morceau. Le dénouement d'Alcmène a pu inspirer Python (ou l'original imité par Python) comme les vers 1549-1550 d'Iphigénie ont inspiré Timanthe, sans que cependant la scène du sacrifice se passât sur le théâtre.

2. Voyez un récent exemple des étroites relations de la poésie et de l'art antique au sujet du mythe d'Erichthonius (Ann. dell' Inst. 1879 tav. d'agg. F comparé avec Ion, vv. 25 sq.). La théorie de ces rapports a été exposée par Robert (Phil. Unters., 5. liv.) après Welcker et Jahn.

La notice consacrée à chaque auteur comprend d'abord une bibliographie indiquant les travaux les plus importants des savants modernes, les principales éditions, les travaux spéciaux des anciens sur l'auteur en question. Après cette notice, M. S. donne des extraits empruntés soit à l'auteur lui-même, soit aux autres écrivains; ces extraits constituent nos sources pour connaître la vie de l'auteur, ses ouvrages, sa manière d'écrire et de penser, la valeur qu'on lui attribuait, les jugements qu'on portait sur ses œuvres, etc.

Comme le dit M. Schæfer, la nature du travail interdisait des citations et des indications trop nombreuses, il fallait se borner à donner seulement le plus important; nous croyons que M. S. l'a donné. Nous nous permettrons cependant d'indiquer quelques travaux qui auraient pu très bien figurer dans l'ouvrage de M. Schæfer, même tel qu'il l'entendait : dans la liste des recueils d'inscriptions, celui du British Museum (The collection of ancient Greek inscriptions in the British Museum, pars I, Attica, Oxford, 1874); - article Xénophon, O. Riemann, Qua rei criticæ tractandæ ratione Hellenicon Xenophontis textus constituendus sit, Paris, 1879; - article tragédie, H. Weil De tragædiarum græcarum cum rebus publicis conjunctione, Paris, 1844; -- article Duris de Samos, Horstig, Quæstionum Duridearum pars I, Stolp, 1862; - J. G. Droysen, Zu Duris und Hieronymos, Hermès, XI, p. 458, H. Kallenberg, Die Quellen für die Nachrichten der alten Historiker über die Diadochenkæmpfe bis zum Tode des Eumenes und der Olympias, Philologus, XXXVII, p. 193; - article Phylarchos, Paul Foucart, Mémoire sur un décret inédit de la ligue Arcadienne en l'honneur de l'Athénien Phylarchos dans les Mémoires présentés par divers savants à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, première série, t. VIII, 1874, pp. 93-119; — article Callimaque, on aurait pu mentionner la grande édition de O. Schneider, 2 vol. Leipzig, 1870-73, la question des Ilivaxaç est traitée t. II, p. 297; à l'article Polémon, ajouter E. Egger, Polémon le voyageur archéologue, dans les Mémoires d'histoire ancienne et de philologie, Paris, 1863, pp. 15-57; Paul Foucart, Renseignements nouveaux sur trois écrivains grecs du n° siècle avant notre ère. Polémon le Périégète, Hégésianax d'Alexandrie de Troade, Philippos de Pergame, dans la Revue de Philologie, N. S., t. II, 1878, p. 214.

Albert MARTIN.

203. Leben und Werke der Troubadours; ein Beitrag zur næhera Kenntniss des Mittelalters, von Fr. DIEZ. Zweite vermehrte Auflage von K. BARTSCH. Leipzig, Barth, 1882. In-8°, xvi-506 p. Prix : 12 fr. 50.

Les « Vies et œuvres des Troubadours » sont l'un des premiers ouvra ges de Diez. L'édition originale, et unique jusqu'à la réimpression que

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