Obrázky na stránke
PDF
ePub

tracé le tableau de la naissance et des premiers progrès de la religion. chrétienne et ensuite celui des persécutions qui en frappèrent les adhé rents, sans réussir à en arrêter la propagation, M. C. fait connaître. quelle fut l'organisation des églises dans le principe indépendantes les unes des autres; comment, pour opposer une résistance plus solide aux sectes rivales, elles se liguèrent entre elles, et en vinrent bientôt à une fédération universelle qui forma ce qu'on appela la grande Eglise, l'Eglise catholique (ch. 1). Il est parlé dans le chapitre suivant du culte qui était d'une grande simplicité, et dans le ive de la discipline ecclésiastique. Le chap. ve est consacré à l'histoire des écrivains chrétiens des trois premiers siècles. Le vie enfin traite de la doctrine et occupe à peu près le tiers du volume. Ce qui s'explique par l'importance extrême du sujet.

On ne saurait lire ce volume sans éprouver quelque étonnement de la rapidité avec laquelle les enseignements du maître furent altérés. Jésus avait constamment réprouvé quiconque s'érige en directeur des consciences; ce qui n'empêcha pas cependant un clergé de se mettre à la tête des églises déjà au milieu du second siècle, et de former une hiérarchie sacerdotale qui se rendit de jour en jour plus puissante. Les chrétiens s'habituèrent de bonne heure à attribuer aux cérémonies les effets et les vertus qui n'appartiennent qu'au changement intérieur, dont les sacrements ne sont que des symboles (T. I, pp. 141, 142, 157, 158). L'ascétisme prima bientôt le travail moral (t. I, pp. 185-192). Un sentiment respectable sans doute, mais de dangereuse conséquence, fit établir des fêtes en l'honneur des martyrs. Tertullien et Cyprien en parlent comme de coutumes généralement reçues de leur temps. Cet usage eut pour effet de faire considérer les martyrs comme des demi-dieux, et d'introduire dans le culte chrétien des rites empruntés au paganisme (t. 1, p. 177).

Ces altérations et bien d'autres du même genre furent provoquées, en grande partie, par les besoins du moment; ainsi les luttes dans lesquelles la religion chrétienne se trouva engagée, en se propageant, mirent en vue ceux qui en prirent la défense et leur assignèrent une place à part au-dessus du commun des fidèles; mais elles furent dues principalement aux habitudes d'esprit des populations gréco-latines, parmi lesquelles le christianisme, à partir du second siècle, se fit exclusivement de nouveaux partisans. Il était impossible que la religion nouvelle se propageât dans ce milieu, sans en subir une réaction plus ou moins profonde.

En même temps, ce qui n'avait été qu'une foi simple et naïve pour les premières générations chrétiennes devint un thème de spéculations métaphysiques, dès que le christianisme eut trouvé des disciples parmi les hommes qui avaient fréquenté les écoles philosophiques de cette époque. Le tableau que les récits évangéliques tracent des destinées de Jésus, fit place à des conceptions abstraites, on pourrait peut-être même dire mythologiques, sur la nature et la vie du fondateur de la nouvelle

religion (t. I, pp. 379-391). Il n'est une seule des croyances et des espérances chrétiennes, dans laquelle des hommes amenés au christianisme d'ordinaire par le platonisme tel qu'on le concevait à cette époque, ne trouvent matière à des discussions philosophiques. Ils veulent savoir quelle est l'origine du péché, quels sont le pourquoi et le comment de la rédemption, quel était le séjour où les âmes se rendent immédiatement après la mort, quelle serait la nature des rétributions qui devaient suivre le jugement dernier.

Ces altérations du christianisme qui se produisirent pendant les trois premiers siècles, s'étendirent, s'accentuèrent depuis la conversion de Constantin, et c'est en raison de ce fait que M. C. considère comme une période du premier âge de l'Eglise chrétienne l'époque qui s'étend de cette date jusqu'à la fin du vre siècle ou au commencement du vii. Ce n'est pas que de nouvelles altérations ne se soient encore produites depuis; mais, en un certain sens, elles dérivent pour la plupart des précédentes, et, en somme, l'Eglise était à ce moment assise sur des principes qu'elle n'aura plus qu'à développer jusqu'à leurs dernières conséquences.

A peine échappée aux persécutions, pressée avant tout d'en prévenir le retour, elle cherche à se rendre importante par le nombre. Le pouvoir qui l'opprimait, maintenant la protège; elle profite avec ardeur d'un privilège qui pourrait n'être que passager. Les souverains eux-mêmes, non-seulement l'y encouragent, mais en quelque sorte l'y obligent. Pour mieux retenir, pour s'incorporer plus solidement les multitudes hâtivement enrôlées, elle s'attribue, elle revendique de l'Etat de nouveaux pouvoirs. Hors d'elle, point de salut; dans cette vie, punitions sévères, dans l'autre, éternelle condamnation pour quiconque lui échappe par la rébellion, par l'hérésie ou par le schisme. Pour rendre son autorité plus active et plus forte, elle la concentre tout entière dans les mains du clergé, qu'elle revêt d'un caractère divin et unit par les liens d'une puissante hiérarchie.

Elle s'empresse en même temps d'en finir avec les discussions de doctrines qui avaient joui d'une certaine liberté dans le re et le me siècle. Elle fixe la doctrine de la Trinité; elle met fin aux controverses christologiques, soulevées par suite de la doctrine de la Trinité; elle impose silence à la controverse pélagienne et à la controverse semi-pélagienne; elle fixe la doctrine sur la vie future. La partie de l'ouvrage de M. Chastel qui se rapporte à la dogmatique ecclésiastique (t. II, pp. 424-612), présente un puissant intérêt et est écrite avec une clarté rare en ces matières abstraites.

M. N.

216.

Histoire de France sous le ministère de Mazarin (1651-1661), par A. CHÉRUEL, recteur honoraire et inspecteur général honoraire de l'Université, membre du comité des travaux historiques et des sociétés savantes. Tome I. Paris, librairie Hachette, 1882. In-8° de XII-447 p. Prix: 7 fr. 50.

« L'histoire de France pendant les dernières années du ministère de Mazarin, » dit M. Chéruel (Avertissement, p. 1), « est le complément nécessaire de l'ouvrage que j'ai publié sur la minorité de Louis XIV. L'Académie française, qui a accueilli mon travail historique avec tant de bienveillance et lui a accordé deux fois une récompense si honorable', m'a encouragé à le continuer jusqu'à l'époque où commence réellement le gouvernement personnel du jeune roi. C'est surtout pour répondre à cet appel que j'entreprends de compléter l'histoire du ministère de Mazarin. » La Revue critique, qui plusieurs fois a signalé le grand mérite de l'Histoire de France pendant la minorité de Louis XIV, et qui a instamment demandé à l'auteur la suite de ce beau travail, est heureuse de voir le lauréat de l'Institut continuer à marcher dans une voie où l'attendent de nouveaux succès.

M. C. n'a plus, pour se guider pendant la période de 1651 à 1661, les carnets du cardinal, lesquels s'arrêtent en février 1650, mais, fait-il remarquer (p. 11), « sa correspondance, conservée dans les divers dépôts des Affaires étrangères, de la Bibliothèque nationale, des Archives nationales, de la Bibliothèque mazarine, etc., est une source féconde pour les dernières années de son ministère. Elle sert à rectifier et à compléter les mémoires du temps ». M. C. examine tour à tour (pp. In-vi) les principaux de ces mémoires, ceux du cardinal de Retz, de Mlle de Montpensier, de Mme de Motteville, de la duchesse de Nemours, de Monglat, et il indique quelques-unes des erreurs que la correspondance de Mazarin y fait découvrir. Il eût été trop long de relever les passages des Mémoires du cardinal de Retz où éclate « l'audace de ses réticences et de ses mensonges », mais voici un certain nombre d'assertions, empruntées à divers autres mémoires, qui sont formellement démenties par les documents d'où M. C. a tiré la trame de son histoire : « Mlle de Montpensier raconte, avec un naïf orgueil, son entrée à Orléans, et ses succès oratoires dans le conseil des principaux habitants de cette ville. Elle n'attribue qu'à son influence et à son action personnelle les résultats qu'elle obtint. Les lettres, écrites par les conseillers qu'on lui avait adjoints, sont conservées dans les papiers de Mazarin, et prouvent que les émissaires du parti de la Fronde avaient gagné le peuple par des distributions d'argent, et préparé les faciles victoires de cette princesse. >> - Mme de Motteville raconte, d'après l'autorité des ennemis secrets du cardinal (le maréchal de Villeroi, le secrétaire d'Etat Brienne, le marquis de Senneterre), « qu'en novembre 1651 la reine s'opposait au retour de Mazarin, au moment même où les lettres du maréchal du Plessis-Praslin, écrites au

1. Le grand prix Gobert (1880 et 1881).

nom d'Anne d'Autriche, rappelaient le cardinal avec les plus vives instances, et où la reine lui envoyait la Cardonnière avec toutes les instructions et recommandations nécessaires pour son retour ». — « Comment s'étonner, lorsque Mme de Motteville se trompe sur les sentiments véritables de la reine, des erreurs d'autres contemporains, qui vivaient loin de la cour? La duchesse de Nemours, dans ses spirituels mémoires, présente le prince Thomas de Savoie-Carignan comme un rival que les ennemis du cardinal avaient voulu lui opposer, et il résulte, au contraire, des lettres de Mazarin, que ce prince lui était sincèrement dévoué, et soutenait, dans le conseil du roi, les avis suggérés par ce ministre. » - Monglat, qui a une réputation incontestée d'exactitude, raconte qu'un certain nombre de courtisans, entre autres le commandeur de Souvré et Roquelaure, affectèrent, lorsque Mazarin rentra en France, en janvier 1662, de lui témoigner de la froideur et du mépris, tandis que les lettres mêmes de Souvré attestent que ce fut le cardinal qui, à son arrivée à Poitiers, montra une hauteur et un dédain, qui ne lui étaient pas habituels, envers ceux dont il connaissait les mauvaises dispositions et la conduite suspecte1. »

Le récit des préparatifs des deux partis pour la troisième guerre civile de la Fronde (septembre-octobre 1651) ouvre le volume, que ferme le tableau de la situation de la France en 1653. Nous ne possédions pas encore une histoire aussi détaillée de cette période de deux années et quatre mois marquée principalement par la campagne de Saintonge, les revers de Condé, le retour de Mazarin en France, la guerre en Guienne et sur la Loire, le progrès du parti monarchique à Paris, les violences et la décadence de la fronde parisienne, le second exil de Mazarin, la perte de Dunkerque, le rappel du roi par la bourgeoisie parisienne, l'entrée de Louis XIV à Paris et le retour définitif de Mazarin. Sur tous ces événements M. C. est aussi abondaamment que sûrement informé3. Bien des

1. M. C. ajoute (p. vi) que ces erreurs des contemporains se retrouvent dans les historiens modernes de la Fronde les plus dignes d'éloges, tels que le comte de Sainte-Aulaire, « dont l'ouvrage est si justement estimé, » M. Bazin, « dont on ne saurait trop louer la science et la sagacité. » On voit jusqu'où va l'exquise politesse de M. C. à l'égard de devanciers qui, jugés sérieusement, laissent tant à désirer, le premier surtout.

2. Cette guerre de Saintonge, dit M. C. (p. 35, note 1), « a été racontée par plusieurs contemporains du parti de Condé (Mémoires de Chouppes, de la Rochefoucauld, de Lenet, de Balthazar, du prince de Tarente). Nous avons comparé à ces mémoires les ouvrages de La Barde, de Priolo, de Monglat et surtout les rapports adressés à Mazarin par ses correspondants. » M. C. attache avec raison beaucoup d'importance aux récits de La Barde, qui reste le meilleur de tous les anciens historiens des premières années du règne de Louis XIV. En revanche, il tient infiniment peu de compte des récits du colonel Balthazar qui, si l'on en croyait ses gasconnades, dit-il (p. 48, note 3), se serait illustré par de continuelles victoires. Voir (p. 151) une note où M. C. se moque encore de Balthazar « emphatique et vaniteux ».

3. Mes observations se réduisent à bien peu de chose. Le petit discours de Condé sur son épée, rapporté p. 4, ne me paraît pas authentique. Il ne nous a été conservé

particularités nouvelles y frappent l'attention. On remarquera l'étude consacrée (pp. 22-25) à une femme peu connue qui, mêlée à toutes les intrigues de la Fronde, fut un des principaux agents des négociations entre Condé et Mazarin et qui exerça autour d'elle une grande influence, Mme de Puisieux. On remarquera plus encore les pages sur la réaction contre la Fronde qui se produisit à Paris en septembre et en octobre 1652, et qui assura le triomphe de la royauté sur le parti des princes, énergique mouvement ou, pour mieux dire, courant irrésistible dont ni SainteAulaire, ni Bazin, ni les historiens postérieurs, n'ont le moins du monde semblé s'apercevoir (p. 312 et suiv.). Outre les rectifications indiquées déjà, signalons la réfutation (pp. 257-265) de ce que M. d'Haussonville, dans l'Histoire de la réunion de la Lorraine à la France, avait avancé au sujet des bandes de pillards allemands qui auraient été appelées en nos provinces et jusqu'aux portes de Paris par Mazarin. M. C. dit, à cette occasion (p. 255, note 1) : « Je m'efforce, dans cette histoire, de rester impartial. Il faut, en effet, rendre hommage à la parfaite impartialité de l'auteur. et déclarer que parmi toutes ses qualités, celle-là brille d'un éclat particulier.

On trouve, à l'Appendice (pp. 405-438) un exposé des questions de politique intérieure qui préoccupaient la reine et Mazarin en janvier 1653 et les lettres d'Anne d'Autriche à Mazarin en janvier 1653, lettres déjà publiées par Victor Cousin, d'après les autographes de la

que par Priolo, qui aime beaucoup les mots à effet, les situations théâtrales, et qui est un brillant improvisateur dont on ne saurait trop se méfier. · M. C. ne sait (p. 21) s'il doit appeler le gouverneur du château de Vayres, pendu aux halles de Libourne « Richon ou Richou. » Richon est la forme donnée par tous les meilleurs documents imprimés ou manuscrits. L'auteur ne sait (ibid.) s'il doit appeler Canol ou Canolles le capitaine de l'armée royale, qui fut pendu par les frondeurs bordelais en représailles de l'exécution de Richon. C'était un membre de la vieille famille périgourdine de Canolle, dont la généalogie figure au tome III de l'Histoire des pairs de France par le chevalier de Courcelles, et dans le tome II du Nobiliaire de Guienne et de Gascogne, par O'Gilvy. Notons, en passant, que Dom Devienne (Histoire de la ville de Bordeaux, p. 402) a donné à cet officier le nom de Canot. L'Histoire de Tancrède de Rohan est trop incontestablement du P. Griffet, pour qu'on puisse se contenter de dire (p. 61, note 3) qu'elle lui est attribuée. - M. C. me semble bien timide quand il insinue (p. 65, note 4) que certaines pièces publiées dans les Lettres, mémoires et négociations de M. le comte d'Estrades, « ont dû être altérées par les auditeurs ». Les altérations sont évidentes, comme je l'ai fait remar quer dans mon édition de la Relation inédite de la défense de Dunkerque par le maréchal d'ESTRAdes (1872). - M. C. exprime le regret (p. 102) de ne pouvoir citer le texte complet des lettres de Gabriel Naudé relatives à la vente de la bibliothèque de Mazarin, conservées aux Archives des affaires étrangères. Qu'il se console en apprenant que ces curieuses lettres ont été publiées in extenso dans le Bulletin de la Société de l'histoire de Paris.- On s'étonne de ne voir citer nulle part par M. C. les Souvenirs du règne de Louis XIV, du comte de Cosnac, où surabondent les renseignements et les documents relatifs à la Fronde. J'ai d'autant plus le droit de reprocher à M. C. ce péché d'omission, que j'ai eu l'occasion de reprocher ailleurs à M. de Cosnac de n'avoir pas cité, de son côté, l'important ouvrage de M. Chéruel.

« PredošláPokračovať »