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acquittât les dettes du défunt; d'où la nécessité de donner aux créanciers des actions utiles contre lui comme s'il était héritier, ficto se herede. Cela étant, il fallait naturellement aussi, par une juste réciprocité, lui accorder, comme s'il était héritier, des actions utiles, à l'effet de poursuivre le payement des créances du défunt 26. De cette façon, le bonorum possessor, exerçant tous les droits patrimoniaux et subissant toutes les obligations du défunt, succédait, aussi bien que l'héritier, dans le patrimoine entier": aussi finit-on par lui accorder une petitio hereditatis, qualifiée de possessoria, pour la distinguer de la pétition d'hérédité originaire 28.

Ainsi, de même que nous avons vu subsister ensemble pendant des siècles le domaine quiritaire et la propriété bonitaire, de même agirent longtemps, l'une à côté de l'autre, la succession héréditaire civile, hereditas proprement dite, et la succession héréditaire prétorienne, sous le nom de bonorum possessio, s'assimilant de plus en plus à mesure que des réformes se réalisent dans la matière. Mais ce travail d'assimilation est loin d'être aussi simple que celui que nous avons observé dans l'histoire de la propriété. Pour bien le saisir, nous devons auparavant connaître en détail les modifications importantes et compliquées que subit le droit primitif, tant par la législation et la jurisprudence que par l'action des préteurs. A cet effet, nous tracerons d'abord le développement historique des trois ordres de succession: succession ab intestat, succession testamentaire, succession contre le testament (§§ 360-370); nous exposerons ensuite comment les personnes appelées dans l'un ou l'autre de ces ordres pouvaient acquérir la succession qui leur était déférée soit par le ius civile, soit par le droit prétorien (§§ 371-373); et, en conduisant cet exposé jusqu'au temps de Justinien, nous constaterons enfin tout naturellement la fusion de l'hérédité et de la bonorum possessio en une seule institution, désignée par le nom primitif: HEREDITAS. Ajoutons qu'en procédant ainsi, nous verrons également que, par suite des diverses réformes de Justinien, la succession contre le testament se trouve virtuellement abolie, de façon que, dans le dernier état de la législation romaine, l'hérédité n'est plus déférée que de deux manières par testament ou ab intestat

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26 GAIUS, IV, 34. «... Vel si in personam agatur proposita simili fictione, intentio ita subiicitur : TUM SI PARET N N Ao Ao SESTERTIUM X MILLIA DARE OPORTERE. » Cf. LE MÊME, III, 81. — ULPIEN, XXVIII, 12.

Aussi les jurisconsultes classiques considèrent-ils déjà le B. Por comme étant heredis loco, heredis vice (GAIUS, III, 32. IV, 111. Cf. Pr. I., de perpetuis et temporal. act. 4, 12. - Fr. 2, D., de bonorum poss. 37, 1. — Fr. 15, pr. D., de B. P. contra tabulas 37, 4. - Fr. 117. Fr. 128, § 1, D., de regulis iuris 50, 17). Et Fr. 138, D., de verb. signif. 50, 16, PAUL déclare que : « Hereditatis appellatione bonorum quoque possessio continetur. » Cf. ULPIEN, Fr. 170, D., eodem, et ci-après, § 372, notes 34 et suivantes.

28 Voy. ci-après, § 372, note 35, et § 408, note 21.

29 Les deux propositions que nous venons d'énoncer, concernant la fusion complète de

OBSERVATION. Dans l'exposé qui précède, nous avons effleuré trois questions historiques qui ont beaucoup occupé les interprètes du droit romain.

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1o D'après une opinion fort répandue, la succession ab intestat aurait, dans le principe, régné sans partage, et la succession testamentaire n'aurait été introduite que dans la suite, probablement par la loi des Douze Tables. A l'appui de cette opinion, on soutient que dans le droit primitif des Quirites, conformément à l'ordre naturel des choses, le patrimoine qui apparaît comme celui du chef de la famille aurait en réalité appartenu à tous les membres; d'où la conséquence qu'à la mort du chef les biens auraient naturellement passé à ces derniers. Cette manière de voir, empruntée aux coutumes et lois germaniques 50, est évidemment contraire à la réalité des faits. Nous aurons l'occasion de montrer ci-après (en) traitant des testaments, de la succession contre le testament et de la querela inofficiosi testamenti) que l'idée d'une propriété collective de la famille est absolument incompatible avec le droit des Quirites 3. Ici il suffit de signaler ce qu'il y a de bizarre et d'illogique à attribuer un droit de copropriété à des individus qui non-seulement sont déclarés incapables de rien avoir à eux, mais qui appartiennent en propre au paterfamilias, à telle enseigne qu'il peut même disposer de leurs personnes, comme il dispose de ses esclaves et de ses bestiaux, les vendre, engager, louer, etc. 2. Il serait d'ailleurs fort difficile, pour ne pas dire impossible, d'expliquer comment le peuple des Quirites aurait pu tolérer et approuver des tentatives législatives privant la famille de la propriété qui lui appartenait et la soumettant au despotisme arbitraire d'un personnage qui jusque-là n'avait été qu'une espèce d'administrateur. Enfin, dans cette hypothèse, la marche historique du droit d'hérédité présenterait une irrégularité et une inconséquence dont on chercherait en vain un autre exemple dans l'économie du droit romain. Nous y trouverions, en effet, dans l'origine la famille toute-puissante et propriétaire de tous les biens détenus par le chef, qui est tenu 33 de les conserver pour les remettre fidèlement, en mourant, à ceux qu'il avait représentés durant sa vie. Tout à coup, cet ordre de choses aurait été violemment renversé et rem

l'hérédité et de la bonorum possessio et l'abolition de la successio contra tabulas, sont loin d'être généralement admises parmi les interprètes du droit romain; mais elles résultent inévitablement du développement conséquent des institutions. Voy. ci-après, §§ 369. 374. 390.

30 Voy. t. I, § 91, note 1, no 3.

31 Voy. ci-après, §§ 363. 564. 367-569. 390.

32 Voy. ci-dessus, §§ 325. 326. 330.

33 Il faudrait ajouter : « au moins par sa conscience »; car, en fait, il pouvait, par des actes entre vifs, rendre complétement illusoires les droits de ses commettants. C'est là encore une imprévoyance difficile à expliquer dans le droit de ces Quirites, si pleins de prévoyance, prudentes, en toute matière.

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§ 359. placé par un régime diamétralement opposé, dans lequel l'ancien régisseur devient le maître absolu du patrimoine commun, au point d'en pouvoir disposer, même après sa mort, comme bon lui semble, en faveur du premier venu et sans être tenu de rien laisser aux siens ". Enfin l'on aurait fait un retour subit sur le système que l'on avait trouvé bon d'abolir il y a quatre siècles, et l'on serait revenu à l'idée de la propriété collective de la famille. Ces procédés par sauts, voire même par sauts en arrière, sont en contradiction flagrante avec la marche sagement et continûment progressive que le droit romain suit avec une conséquence immuable dans le développement de toutes les institutions sociales. Cette opinion aventureuse étant écartée, nous restons en présence de deux autres, dont l'une considère les deux ordres de succession comme ayant dès l'origine existé ensemble, tandis que, d'après l'autre, la succession testamentaire aurait précédé la succession ab intestat. Les deux hypothèses sont également admissibles et il n'existe aucun témoignage précis qui doive nous engager à préférer l'une à l'autre. Nous penchons cependant plutôt vers la dernière par plusieurs motifs, dont voici les principaux. D'abord, les institutions sociales primitives sont toujours simples cela étant, il n'y a dans l'origine place que pour le système qui veut que le continuateur de notre personne soit désigné par nous-même, système qui admet pourtant que, subsidiairement à cet ordre de succession, ait pu se former l'hérédité ab intestat par la seule force des choses 5. C'est encore en suivant cette hypothèse que nous parvenons à expliquer très-naturellement l'ancienne usucapio pro herede 56, ainsi que la prédominance absolue de l'hérédité testamentaire, qui se manifeste dans tant d'applications et surtout d'une manière si frappante dans l'axiome d'après lequel nemo pro parte testatus pro parte intestatus decedere potest.

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2o Nous sommes ainsi amené à nous enquérir de l'origine de cette célèbre règle qui, remontant à la plus haute antiquité, domine encore la législation de Justinien. Les Romains semblent la considérer comme étant fondée sur la nature des choses "7; mais malheureusement ils n'ont accompagné cette affirmation d'aucune argumentation convaincante. Des interprètes modernes ont voulu fonder la nécessité logique de l'axiome de l'unité sur la succession héréditaire, qui est la continuation

34 Voy. ci-après, §§ 367-369. 390.

35 Voy. ci-dessus, notes 5 et 6.

36 Si, dès l'origine, les enfants, les agnats et les gentils avaient eu le droit de succession dans les biens du citoyen mort intestat, on concevrait difficilement que les Romains eussent pu être amenés à considérer les biens délaissés par un père de famille comme étant res nullius. Cf. ci-dessus, note 5.

37 Voy. ci-dessus, note 10, et surtout POMPONIUS, Fr. 7, D., de regulis iuris 50, 17. ... Earumque rerum naturaliter inter se pugna est (testatus et intestatus). »

d'une seule personne; d'autres ont cherché à rattacher la règle au droit sacré qui exigeait la perpétuité des sacrifices de famille, à la forme dans laquelle se faisaient les testaments et à d'autres ordres d'idées. Mais ces tentatives sont plus ingénieuses que concluantes 38. On a encore dit que la règle est le résultat d'une interprétation étroite de la disposition des Douze Tables: UTI LEGASSIT, ITA IUS ESTO. SI INTESTATO MORITUR... SUUS Heres, ADGNATUS PROXIMUS FAMILIAM HABETO. Cette hypothèse nous paraît contenir quelque chose de fondé seulement, il serait plus exact, d'après nous, de dire que c'est la législation des Douze Tables qui a consacré la règle à la suite d'une interprétation rigoureuse, mais originairement exacte, du droit coutumier antérieur. Voici, en effet, comment la chose a pu se passer: Un citoyen avait, dans l'assemblée des Quirites, déclaré qu'il instituait héritiers Titius et Mevius, et le peuple avait garanti aux institués leur qualité d'héritiers. Titius étant venu à défaillir avant le décès du testateur, des sui, des adgnati ou des gentiles réclament la portion qui originairement avait été destinée au défaillant. Mevius s'y oppose. Il faut vider le différend, mais la solution ne saurait être douteuse. Le testateur, ayant déclaré qu'il voulait pour héritiers Titius et Mevius, a par là même implicitement déclaré qu'il n'en voulait pas d'autres, et le peuple, qui a ratifié et sanctionné cette manifestation de volonté, ne saurait permettre qu'on la viole 9. Mevius aura donc l'hérédité entière. Cette solution, fondée sur la même considération que le droit d'accroissement 40, est toute naturelle dans l'hypothèse que nous avons supposée, et dans cette même hypothèse on a pu très-correctement rédiger le principe pratique, qui la domine, dans la forme connue : (Testator) pro parte testatus pro parte intestatus decedere non potest. La règle ainsi conçue et admise, on en fit, dans la suite; une application rigoureuse et générale, même à des hypothèses dans lesquelles elle conduisait à des conséquences qui ne

38 L'unité de l'hérédité, en effet, ne fait aucunement obstacle à ce qu'il y ait plusieurs héritiers, ni à ce que l'hérédité soit déférée à l'un d'eux pour telle cause et aux autres pour une cause différente, pourvu que chacun d'eux représente le défunt pour une quote-part de l'ensemble.Cette considération s'oppose aussi à l'argumentation de ceux qui cherchent dans le droit sacré l'origine de notre axiome. Cic., de legibus II, 21, nous apprend d'ailleurs que l'obligation de continuer les sacra a été imposée aux héritiers et à d'autres personnes, non par la loi, mais par l'autorité des pontifes: « Nam SACRA cum PECUNIA pontificum auctoritate, NULLA LEGE, coniuncta sunt. Au reste, si, par hasard, le concours simultané des deux ordres de succession avait pu préjudicier aux sacrifices, nul doute que les pontifes ne fussent parvenus à faire plier la loi, comme ils le firent dans des hypothèses bien plus compliquées, d'après ce que nous lisons chez le même Cic., ibidem, c. 19-21. — Les auteurs qui rattachent notre règle à la forme du testament per æs et libram sont obligés d'appeler à leur aide l'unité de la familia, qui n'a rien de concluant, comme nous l'avons dit au commencement de la note; il est cependant peut-être permis d'attribuer à la forme primitive du testament (comitiis calatis) une certaine influence sur l'origine de notre regle. Cf. la note suivante.

39 C'est à cela que nous faisions allusion vers la fin de la note précédente. 40 Voy. ci-après, § 404.

découlaient pas aussi naturellement et aussi nécessairement de la nature des choses, particulièrement au cas où le testateur n'avait pas disposé de la totalité de son patrimoine "1.

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3o Il nous reste à dire quelques mots de l'origine de l'hérédité prétorienne, désignée par le nom de bonorum possessio. Gaius donne à entendre et Justinien dit expressément que le Préteur créa cette institution pour corriger l'ancien droit, en accordant les avantages de la succession héréditaire à des personnes que le droit civil n'admettait point à l'hérédité "*. Des auteurs modernes ont contesté cette assertion, en soutenant que l'idée de modifier l'ordre des successions a été étranger à la création de la bonorum possessio, et que ce n'est que plus tard et pour ainsi dire accidentellement que l'institution a servi à réaliser des réformes dans la succession héréditaire. Niebuhr pense que la bonorum possessio avait origi nairement pour but de donner à l'héritier un moyen légal de se saisir des parcelles de l'ager publicus (possessiones) qui pouvaient se trouver dans la succession à laquelle il était appelé 5. Cette explication ne s'appuie sur aucun témoignage historique; elle est d'ailleurs incompatible avec le mot bona, qui signifie toujours un patrimoine entier. Nous ne la mentionnons que pour prémunir contre la réaction défavorable, mais imméritée, que l'inanité évidente de cette supposition a exercée sur la belle hypothèse du même auteur concernant l'origine des interdits possessoires". D'autres auteurs ont été d'avis que le Préteur avait eu originairement en vue de régulariser ou d'amender l'improbe usucapio pro herede; de contraindre indirectement l'héritier appelé à accepter sans retard l'hérédité pour qu'elle ne restât pas trop longtemps vacante; de régler la possession intérimaire des biens délaissés dans la revendication de l'hérédité par la hereditatis petitio, etc. Abstraction faite des objections que soulève chacune de ces hypothèses en particulier 5, elles ont toutes le défaut

41 Voy. ci-dessus, note 9, et ci-après, § 375, notes 8. 10; § 376, notes 2 sq. et §§ 388 404. 42 GAIUS, III, 18-24. 25 « Sed hæ iuris iniquitates edicto Prætoris emendatæ sunt.» Cf. Gaius, III, 34 (§ 1, I., de bonorum possessionibus 3, 9). — Pr. I., eodem. « Ius bonorum possessionis introductum est a Prætore, emendandi veteris iuris gratia..., » et THEOPHILE ad h. l.

43 NIEBUHR, Römische Geschichte, 2e édition, t. II, p. 173 sqq. (t. II, p. 482 sq., de la traduction de GOLBERY, édition de Bruxelles).

44 Voy. t. I, § 80, notes 2-5; § 81, notes 11-13; § 88, notes 8 et suivantes.

45 1o La première de ces hypothèses ne repose sur aucune donnée certaine; nous verrons d'ailleurs que, selon toute probabilité, l'interdit Quorum bonorum a plutôt été créé pour donner une arme efficace contre l'improba usucapio. Voy. ci-après, § 440, notes 2. 3. - 2o La seconde hypothèse a été défendue avec force dans une monographie remarquable que nous aurons à mentionner ci-après, note 48. Il ne nous est pourtant pas possible de l'admettre. « La B. Pio fut créée, » dit-on, en vue de contraindre l'héritier appelé à accepter sans retard et de prévenir que l'hérédité ne reste trop longtemps en état de vacance. Le Préteur obtenait ce résultat par la menace de donner la possession des biens à d'autres personnes. » Faisons d'abord observer que la B. Pio n'est jamais représentée comme une menace, mais toujours comme un beneficium. On comprend d'ailleurs difficilement que le Préteur se soit donné la peine d'inventer un moyen

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