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toute possession susceptible d'être évincée par un successible antérieur en rang. Pour être conséquent, Justinien aurait dû aller plus loin et proclamer la fusion des deux successions héréditaires, comme il l'avait fait dès 531 à l'égard des deux propriétés; mais il recula devant cette réforme radicale. Non-seulement il maintint la distinction nominale en hereditas et bonorum possessio, tout en confondant fréquemment les termes, mais il laissa subsister une différence matérielle qui, tout en n'étant pas très-importante au point de vue pratique, n'en constitue pas moins une anomalie difficile à justifier. L'interdit Quorum bonorum exige toujours la bonorum possessio, et pour avoir cette possession, il ne suffit pas d'avoir fait acquisition de l'hérédité; il faut de plus avoir fait adgnitio 3. En résumé, le système de Justinien, au moment de la publication du nouveau Code, se présente comme suit : « La succession héréditaire se <«< défère, comme depuis le commencement de l'Empire, dans l'ordre << suivant contra tabulas, secundum tabulas, ab intestat. Toute personne <«< à qui une succession est déférée peut l'acquérir, soit comme héritier «< civil par aditio ou pro herede gestio, soit comme bonorum possessor, en <«< faisant adgnitio 9. De quelque manière que l'acquisition se fasse, les << droits sont identiquement les mêmes et sont protégés par les mêmes << moyens; cependant l'héritier qui veut user de l'interdit Quorum bonorum <«< doit avoir soin de faire adgnitio, ce qui, au reste, n'exige d'autre for<«<malité qu'une simple déclaration à faire en justice dans les délais << prescrits par l'édit 1o. »

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5 Cf. ci-dessus, § 372, note 32. Aussi n'est-il plus question de la bonorum possessio sine re dans aucune partie du Corpus iuris, bien que le Digeste en contienne encore quelques réminiscences. Fr. 11, pr. in f. Fr. 25, § 2 in f. D., de heredit. petit. 5, 3. – Fr. 5, pr. D., de dotis collatione 37, 7, ci-dessus, § 373, note 31. - Fr. 2, pr. D., unde liberi 38, 6, ci-dessus, § 371, note 28.

6 Voy. ci-après, § 410, notes 8-16. 29. 35-42.

7 § 3, I., de interdictis 4, 15. Fr. 1, pr. D., quorum bonorum 43, 2. et ci-après, § 410.

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8 § 7 (12), I., de bonorum possessionibus 3, 9. « Sed bene anteriores principes et huic causæ providerunt ne quis pro petenda bonorum possessione curet, sed quocumque modo, si admittentis eam iudicium intra statuta tempora ostenderit, plenum habeat earum beneficium. » Le commencement de ce texte pourrait faire croire que Justinien avait l'intention d'affranchir l'obtention de la B. P. de toute formalité et qu'une simple pro herede gestio, manifestant l'intention (iudicium) d'avoir la succession, suffirait à cet effet, comme cela avait déjà été antérieurement admis dans le royaume des Visigoths (Interpr. ad L. un. Th. C., de cretione vel bonorum possessione 4, 1, et ad L. 1, Th. C., de legit. heredibus 5, 1). Mais les mots intra statuta tempora, qui ne peuvent s'appliquer ni à l'aditio ni à la pro herede gestio, indiquent que Justinien entend conserver l'adgnitio comme un mode d'acquisition particulier pour la bonorum possessio. Voy. la note 10.

9 La cretio ayant été abolie par Justinien. L. 17, C., de iure deliberandi 6, 30. Cf. ci-dessus, § 371, note 25.

10 Telle avait été, en effet, la portée de la constitution de Constance, L. 9, C., qui admitti 6, 9 (Cf. L. 7, § 3 in f. C., de curatore furiosi 5, 70. « ... cum PETITIO bonorum possessionis Constantiniana lege sublata sit) » qui permet également d'anticiper sur les délais, adgnoscere prope

Après la publication du Code, Justinien alla plus loin. Des réformes importantes furent réalisées par plusieurs novelles, dont nous avons à signaler deux d'une importance majeure. Par la Novelle 115, l'empereur abolit les successions contre le testament, tant celle qui résultait du droit civil que celle qui s'obtenait par la bonorum possessio contra tabulas, de façon qu'après cette Novelle les successions ne se défèrent plus que de deux manières ex testamento ou ab intestat ". La Novelle 118, à son tour, réforma d'une manière radicale la succession ab intestat, en remplaçant par des dispositions nouvelles toutes les règles du droit civil et du droit prétorien, à la seule exception de la partie de l'édit unde vir et uxor 12. Par suite de cette réforme, il n'existe plus, sauf le conjoint survivant, un seul successeur testamentaire 15 ou ab intestat, qui puise son droit dans une disposition de l'édit. La bonorum possessio est donc virtuellement abolie et le système de la succession héréditaire se trouve ramené aux termes sous lesquels il s'était originairement produit d'après la législation des Douze Tables: « Il n'y a qu'une seule hérédité, et elle « se défère, soit ex testamento, soit ab intestat. »

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CHAPITRE PREMIER.

COMMENT L'HÉRÉDITÉ EST DÉFÉRÉE.

§ 375. Notions préliminaires. Delata, acquisita hereditas.

Toute succession héréditaire suppose un patrimoine, devenu vacant par le décès du maître hereditas viventis non datur. Aucun droit de succession héréditaire, même purement éventuel, ne peut exister à

rantius intra alienam vicem, id est, prioris gradus. Nonobstant cette dernière faveur, le législateur maintient la forclusion pour le cas ou l'impétrant aurait laissé expirer le délai qui lui est accordé; mais la L. 8, C., eodem (qui est du même empereur, mais postérieur de quelques semaines), veut que le juge admette facilement des excuses propter rusticitatem vel ignorantiam (facti vel absentiam) vel quamcumque aliam rationem. Cf. ci-dessus, § 372, note 7, et ci-après, § 396.

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11 Voy. ci-dessus, § 369 in fine, et ci-après, §§ 390. 391. Nous faisons abstraction ici de la B. P. contra tabulas du patronus manumissor, laquelle, au reste, a également perdu son caractère prétorien par la L. 4, C., de bonis libertorum 6, 4. Voy. ci-dessus, § 370, notes 51. 60 sqq. 12 Voy. ci-après, § 377.

15 Il n'y a plus, en effet, de forme prétorienne des testaments. Voy. ci-dessus, § 365, notes 48 sqq., et ci-après, § 380.

↑ Fr. 1, pr. D., de hereditate vendita 18, 4. « ... quia in rerum natura non sit. »- Fr. 19. 27, D., de adquirenda hereditate 29, 2.

l'égard du patrimoine d'une personne encore vivante: tout acte ayant pour but de créer un état de choses contraire à ce principe et de soumettre la succession future d'une personne vivante à des règles autres que celles tracées par la loi, est frappé de nullité, que l'acte ait été conclu avec la personne de la succession de laquelle il s'agit, ou entre des personnes étrangères. Pour cette dernière hypothèse cependant, Justinien a dérogé à l'ancienne règle, aussi rationnelle que prudente, par une constitution dont nous avons parlé, en traitant des conventions 3.

Depuis les temps les plus reculés, la succession héréditaire, comme nous l'avons vu dans l'Introduction historique, se faisait soit en vertu de la volonté du défunt, exprimée dans un acte solennel, appelé testamentum, soit d'après un ordre tracé par la loi, ab intestat *. Vers la fin de la république s'introduisit un troisième mode, contra testamentum ou contra tabulas, qui, tout en supposant un testament laissé par le défunt, participait cependant plutôt de la nature de la succession ab intestat 5. Mais ce mode ayant été aboli par la Novelle 115 de l'empereur Justinien, la succession héréditaire se trouve, dans le droit nouveau, ramenée aux termes sous lesquels elle se produisait déjà du temps des Douze Tables: elle se fait soit ex testamento, soit ab intestat. La succession testamentaire prime la succession ab intestat, qui n'a lieu que lorsqu'il n'y a point de testament ou que le testament existant ne peut aucunement sortir ses effets". Les deux modes s'excluent donc mutuellement; jamais ils ne peuvent concourir ensemble dans la même hérédité: Nemo pro parte testatus, pro parte intestatus decedere potest. Nous avons parlé, dans l'Introduction historique, de l'origine probable de cette règle fondamentale du droit romain; nous aurons, dans la suite de notre exposé, plus d'une occasion d'en montrer l'importance pratique . Ici il suffit de dire qu'elle domine encore la législation de Justinien, bien qu'elle ait reçu une atteinte dans la matière de la réserve légitime et qu'elle soit sans application à la succession des soldats 10.

2, 4.

A) Fr. 61, D., de verb. obl. 45, 1. L. 15. 19, C., de pactis 2, 3. L. 34, C., de transact. -L. 34, C., de pactis conventis 5, 14. -L. 4, C., de inutilibus stipul. 7, 39. Cf. ci-après, § 381, no 3, et § 394, B, 1. Les soldats peuvent cependant donner à leurs testaments une forme contractuelle. L. 19, C., de pactis 2, 3, et ci-après, § 381, no 4. — B) Fr. 2, § 3, D., de his quæ ut indignis auferuntur 34, 9. - Fr. 29, § 2. Fr. 30, D., de donationibus 39, 5. renonciation à une succession future est frappée de nullité. Fr. 13. 18, D., de adquir. heredit. 29, 2. Fr. 16, D., de suis et legit. 38, 16. L. 3, C., de collatione 6, 20, et ci-après, § 396.

-

3 L. 30, C., de pactis 2, 3, et t. II, § 199, note 10, et § 209, notes 13 et 14.

Voy. ci-dessus, §§ 359-366.

5 Voy. ci-dessus, §§ 367-369.

6 Voy. ci-dessus, § 374 in fine.

7 Voy. ci-dessus, § 359, note 7, et ci-après, § 376, notes 1-6.

8 Voy. ci-dessus, § 359, notes 11. 12. 13. 37 sqq.

9 Voy. ci-après, § 376, notes 1. 2. 3, et §§ 384. 388. 389. 394. 396. 404.

10 Voy. ci-après, § 581, no 4, et §§ 390. 392.

Même la

De quelque manière que la succession héréditaire ait lieu, nous avons à y distinguer deux phases: la délation et l'acquisition. - On dit qu'une hérédité nous est déférée, quand nous y sommes appelé par un testament ou par la loi, de manière à pouvoir l'acquérir ". La délation nous donne donc la faculté de devenir héritier; mais cette faculté ne constitue qu'un droit éventuel et cette éventualité est attachée à notre individualité. Pour qu'elle devienne une réalité, un droit faisant partie de notre patrimoine, il faut que nous ayons acquis l'hérédité. L'acquisition de l'hérédité exige, sauf en ce qui concerne les héritiers dits nécessaires 12, un acte d'acquisition qui, dans le droit nouveau, se manifeste sous trois formes: adgnitio, aditio, pro herede gestio 13. Tant qu'il n'y a pas eu d'acquisition, la personne à qui une hérédité est déférée n'a donc que la faculté de devenir héritier et de réunir ainsi la succession à son patrimoine si elle vient à mourir ou à devenir incapable avant d'avoir usé de cette faculté, elle ne la transmet point à ses héritiers ". Telle est la règle primitive qui, au reste, est, dans le droit nouveau, soumise à plusieurs exceptions dont nous aurons à nous occuper plus tard 15.

L'acquisition de l'hérédité étant réservée pour les deux chapitres suivants, nous n'avons à nous occuper ici que de la délation.

Nous avons dit que hereditas viventis non datur : pour qu'une succession puisse nous être déférée, il faut donc que nous ayons survécu au défunt. En outre, il va de soi qu'une hérédité ne peut être déférée à quelqu'un qui n'existe pas au moment où la délation s'opère. A cette règle il a cependant été dérogé en ce sens qu'il suffit d'être conçu à ce moment, conformément à l'adage: nasciturus pro iam nato habetur, quando de eius commodo agitur 16. A ces conditions, découlant de la nature. des choses, le droit romain en a ajouté d'autres. L'hérédité, étant essentiellement iuris civilis, n'était accessible qu'aux citoyens romains et aux Latins, ayant le commercium mortis causa (quand il s'agissait d'une succession testamentaire). La latinité ayant disparu sous Justinien, le droit

11 Fr. 151, D., de verb. signif. 50, 16. « Delata est hereditas, quam quis possit adeundo consequi. »>

12 Voy. ci-dessus, § 371, notes 1-8, et ci-après, § 396, notes 1-27.

15 Voy. ci-dessus. § 371, note 9; § 372, notes 5-7; § 374, note 9, et ci-après, § 596.

14 Fr. 81 in f. D., de adquir. heredit. 29, 2. - Fr. 9 in f. D., de suis et legitimis 38, 16. L. 7, C., de iure deliberandi 6, 50. ... Manifestum atque evidens est, antequam pro herede gereret vel bonorum possessionem admitteret, defuncti successionem (sororem tuam) non potuisse ad heredes suos transmittere. »

15 Voy. ci-après, § 398.

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16 § 8, I., de hereditatibus quæ ab intestato deferuntur 3, 1. - Fr. 6, pr. in f. D., de iniusto testamento 28, 3. Fr. 7, pr. Fr. 10, D., de ventre in possessionem mittendo 37, 9. Fr. 1, §8, D., unde cognati 58, 8. - Fr. 3, D., de B. P. secundum tabulas 37, 11. — Fr. 6. 7. 8, pr. D

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de suis et legitimis 38, 16. « ... quia conceptus quodammodo in rerum natura esse existimatur. » Voy. ci-après, § 376, note 5; § 385, notes 14. 15, et t. I, § 10, notes 7 et 8.

nouveau ne reconnaît plus comme successibles que les citoyens ". Il y a cependant, en faveur des esclaves, des exceptions que nous avons suffisamment fait connaître dans l'Introduction historique 18. Parmi les citoyens, sont déclarés incapables: 1° les apostats et certaines catégories d'hérétiques "; 2o les enfants des personnes condamnées pour crime de haute trahison. Outre ces incapacités qui s'appliquent à toute succession," nous aurons à en citer dans la suite d'autres qui sont particulières à l'un ou à l'autre des deux modes de délation 21.

49.

SECTION PREMIÈRE.

DE L'HÉRÉDITÉ DÉFÉRÉE AB INTESTAT.

§ 376. Observations générales.

La succession ab intestat n'a lieu qu'à défaut de la succession testamentaire'. Pour que l'hérédité puisse être déférée ab intestat, il faut donc que le défunt soit mort sans avoir testé ou au moins sans avoir laissé une disposition de dernière volonté pouvant donner lieu à une succession testamentaire 2. Il se peut, en effet, qu'une disposition de dernière volonté se trouve invalide au moment du décès, soit pour des causes de nullité originaire, soit pour des causes survenues du vivant du testateur; il se peut aussi qu'un testament vienne à être privé d'efficacité par des

17 Il s'ensuit, entre autres, que la loi frappe d'incapacité les personnes condamnées à mort, aux mines et à la déportation, par la raison que ces condamnations font perdre la liberté ou le droit de cité. Fr. 3, pr. § 1, D., de his quæ pro non scriptis habentur 34, 8. – Fr. 13, D., de bonor. poss. 37, 1. — L. 1, C., de hered. instit. 6, 24. Cf. ci-dessus, § 335, no 3, et t. I, § 11, note 20. 18 Voy. ci-dessus, § 364, no 4.

19 (L. 4, Th. C., de apostatis) L. 3, I. C., eodem 1, 7.

(L. 65, Th. C., de hæreticis 16, 5)

L. 4, § 2. L. 5, I. C., eodem 1, 5. Cf. Nov. 115, c. 3, § 14; c. 4, § 8.

20 L. 5, C., ad legem Iuliam maiestatis 9, 8. Cette loi permet cependant aux filles de prendre le quart de la succession de leur mère. L'incapacité relative dont la L. 6, C., de incestis nuptiis 5, 5, frappait les enfants nés d'un commerce incestueux n'existe plus dans le droit nouveau. Voy. ci-après, § 376, note 8.

21 Voy. ci-après, § 376, note 8, et § 383.

1 Fr. 39, D., de adquir. heredit. 29, 2. « Quamdiu potest ex testamento adiri hereditas, ab intestato non defertur. » — Fr. 89, D., de regulis iuris 50, 17. -L. 8, C., communia de successionibus 6, 59.

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