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change, et concernant (Co. 110 s.): l'échéance (Co. 129 s.), -l'endossement (Co. 136 s.).— la solidarité, (Co. 140), l'aval (Co. 141, 142), le payement (Co. Le 145 s.. 155, 156 s.o.141,142), payement par intervention, (Co. 158 s.),-le protêt (Co. 16) s.),-les devoirs et droits du porteur, (Co. 173 s.)-Le rechange ou les intérêts (Co. 177 s.), sont applicables aux billets à ordre, sans préjudice des dispositions relatives aux cas prévus par les articles 636, 637 et 638. (Co. prescript., 189; compétence, 634 s. C. 1336.)

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198. Le billet à ordre est daté. — Il énonce - La somme à payer,-Le nom de celui à l'ordre de qui il es' souscrit, L'époque à laquelle le payement doit s'effectuer, La valeur qui a été fournie en espèces, en marchandises, en compte, ou de toute autre manière. (Co. 110,636 s.)

SECTION III. - De la prescription.

189. Toutes actions relatives aux lettres de change, et à ceux des billets à ordre souscrits par des négociants, marchands ou banquiers, ou pour faits de commerce, se prescrivent par cinq ans, à compter du jour du protêt, ou de la dernière poursuite juridique, s'il n'y a eu condamnation, ou si la dette n'a été reconnue par acte séparé. — Néanmoins les prétendus débiteurs seront tenus, s'ils en sont requis, d'affirmer, sous serment, qu'ils ne sont plus redevables; et leurs veuves, héritiers ou ayants-cause, qu'ils estiment de bonne foi qu'il n'est plus rien dú. (Co. 100, 187. C. 1354 s., 1357 s., 2242 ̊s., 2278. Pr. 120 s. P. 366.)

LÈVRES.

Voyez IRRÉGULarité, n. 13.

LIBELLE.

Libelle, mot injurieux et diffamatoire. Voy. DIFFAMATION et MEDISANCE.

LIBÉRALITÉ.

Transport de la propriété à autrui par donation ou dispositions testamentaires. Voyez DONATIONS el RÉCLAMER.

LIBERTÉ, LIBRE ARBITRE.

1. Liberté, Libre arbitre (philosophie et théologie); en latin, Libertas (Cicéron), Liberum arbitrium (Tite-Live), libertas et potestas arbitrii (Tertullien) : c'est la puissance de vouloir et d'agir sans contrainte extérieure, sans nécessité interne. Il n'est point de matière sur laquelle les philosophes et les théologiens aient plus écrit, el cependant on est loin d'avoir tout éclairci. Le dogme de la liberté offre des clartés auxquelles il est impossible de se soustraire entièrement, mais il renferme des profondeurs que nul œil humain ne saurait sonder. Hâtons-nous d'ajouter qu'ici comme en d'autres sujets la Providence, en laissant dans l'ombre ce que nous pouvions ignorer sans péril, nous a révélé par la raison et par la foi tout ce qu'il nous est nécessaire de savoir. Que deviendrait le genre humain s'il pouvait cesser de croire à la liberté morale qui est le principal fondement de toute législation, et sans laquelle il n'y a ni vertu ni vice ? Déchiré par les passions et l'anarchie, il périrait bientôt. Aussi la Providence a mis chaque homme dans l'impuissance de douter constamment du fait même de la liberté; en dépit de ses

raisonnements et de ses efforts, le fataliste lui-même se croit libre. De sa liberté propre, l'homme s'élève à celle de Dieu qu'il conçoit exempte de l'imperfection, des faiblesses inhérentes à la liberté créée. Envisageant la liberté sous un point de vue général, 1 nous expliquerons le sens de certains mots; 2° nous définirons la liberté exempte de nécessité; 3° nous examinerons si l'antiquité chrétienne a admis une liberté exemple de coaction seulement et cependant suffisante pour mériter.

§ 1er. Explication des mots coaction, nécessité, volontaire, spontané, libre.

2. La nécessité, c'est l'impossibilité d'être autrement qu'on n'est, de faire autrement qu'on ne fail. Si cette possibilité dérive de la nature même de l'être, il y a nécessité intérieure ou simplement nécessité; si elle dérive d'une force extérieure qui contrarie la nature, il y a violence, et cette violence se nomme aussi coaction ou contrainte. Un être agit par contrainte quand, sous l'empire irré. sistible d'une force extérieure, il agit contrairement à sa volonté ou à sa disposition naturelle. La contrainte, comme l'observe saint Thomas, n'a aucune prise sur la volonté; on ne veut point malgré soi; ce serait vouloir tout en ne voulant pas : une volonté forcée est une volonté qui n'est point volontaire, ce qui ne renferme aucun sens. Mais la contrainte ou coaction a prise sur toutes les puissances qui exécutent nos volontés. Je veux mouvoir le bras, une paralysie, une force extérieure peut m'en empêcher; je veux éloigner de moi une pensée affligeante, je puis être forcé de la conserver. Mais si la volonté n'est jamais loir; il suffit pour cela qu'elle entre en exercontrainte, elle peut être nécessitée à voucice irrésistiblement, bien que suavement sous l'action de Dieu ou sous l'action du monde extérieur; il suffit qu'elle ne se détermine point elle-même, mais qu'elle soit déterminée par autrui, qu'en dehors d'ellemême se trouve la cause efficiente, unique, même médiate, de ses volitions. Les fatalistes admettent que toutes nos volitions sont le résultat nécessaire de causes indépendantes de nous, et cependant ils confessent que nous voulons sans contrainte, sans violence. Les anciens ont quelquefois distingué la contrainte de la nécessité; mais ils les ont confondues le plus souvent. Aristote, dans sa Rhétorique, reconnaît une nécessité de violence et une nécessité de nature: « des choses qui se font par nécessité (ix vży), les unes se font par violence (Big), les autres par nature (Arist., Rhétor., lib. 1, c. 10). Mais dans son Ethique, Aristote confond la nécessité et la violence, même lorsqu'il établit la liberté humaine. A l'exemple du Stagyrite, saint Jean de Damas, qui confond aussi le volontaire rationnel avec le libre, n'oppose au volontaire que l'ignorance et la contrainte (ix). Toutefois, quand ii réfute les partisans du destin, Damascène emploie, comme Némésius, le mot nécessiter, el non pas le mot forcer, et il prouve que les actions humaines ne

sont point nécessitées. Les Latins manquant du verbe necessitare, le remplacent par le verbe cogere, forcer. Aussi le mot cogere n'implique pas toujours, comme la violence proprement dite, une résistance de la part de l'être qui est dit forcé. « Ces géomètres, dit Cicéron, font profession non pas de persuader, mais de forcer, cogere; leurs raisonnements font violence (vim) Cic. II, Acad., cap. 36. Les pélagiens reconnaissaient la liberté d'indifférence, et cependant Julien définit le libre arbitre « une possibilité de faire ou d'éviter le péché, laquelle est exempte de la nécessité qui force, expers cogentis necessitatis » (Apud August. Op., imperf., contr., Jul. l. 1. p. 121). Donc le mot cogere, forcer, n'implique pas toujours la coaction, c'est-àdire une action irrésistible qui répugne à la volonté ; souvent aussi nécessiter et violenter indiquent seulement une impulsion forte, mais à laquelle on peut résister. Caron prie Mercure de lui montrer le monde; il faut bien y consentir, répond Mercure. Comment faire quand un ami vous force: Biagito (Lucien, Dial., Caron). Le démon en ce temps-là forçait (cogebat) les chrétiens de nier le Christ (August. in Psalm. xxxix). L'homme a été jelé violemment dans la corruption, et il repasse violemment (Biona) dans l'incorruption par un choix plus puissant. Nécessité, en grec et en latin, signifie aussi comme chez nous un simple besoin de l'âme ou du corps, une obligation morale. Si j'évangélise, dit l'Apôtre, ce n'est pas une gloire pour moi, c'est une nécessité (I Cor. 1x). La virginité n'est pas sous la nécessité de la loi (S. Chrys., Hom., LXIII in II Corinth.).

3. Spontané, volontaire el libre. Le spontané est ce qui vient d'un principe intérieur, ou mieux, le spontané est par rapport à un être ce qui a son principe dans l'être même. Tout ce qui agit ou produit par soi, par une force propre, est dit agir ou produire spontanément, ultro, sponie, avtoμάtas. La terre produit spontanément ce qu'elle produit d'elle-même sans culture. Dans le système de Leibnitz, tout être possède en lui-même un principe de mouvements, d'actions internes; car tout être est une force ou un composé de forces; ce qui a fait dire aux philosophes qu'une spontanéité exacte nous est commune avec toutes les substances simples, et que dans la substance intelligente ou libre elle devient empire sur ses actions (Théodicée, n. 291). Le volontaire (izaútov, spontaneum, voluntarium) est, d'après Aristole, ce dont le principe se trouve dans un être agissant avec connaissance. Le libre est ce qui se fait non-seulement avec conbaissance, mais avec choix, sans y être invinciblement déterminé. Ainsi le spontané, plus général que le volontaire, n'impliqué pas la connaissance, et le volontaire, plus général que le libre, ne suppose pas, comme celui-ci, le choix, l'exemption de nécessité. Le volontaire est le spontané accompagné de connaissance. Le libre est le volontaire fruit du choix. Le volontaire et le voulu ne sont pas une même chose. Le volontaire est l'ob

jet de l'appétit même irrationnel, et le voulu se rapporte exclusivement à l'appétit rationnel qui est la volonté (Βούλησις, θέλησις). De la Aristote, Némésius, Damascène et les scolastiques qui suivent Aristote, attribuent le volontaire aux animaux, quoiqu'ils leur refusent la volonté (Voyez Arist. Moral. liv.

; Damasc., 1. 11 de Fide orth., c. 22; S. Thom. Summe. 1a, 2æ, q. 6). Nonobstant ces distinctions, dans le langage commun on nomme simplement volontaires ou spontanées les actions libres de l'homme. Le droit canonique, qui certes reconnaissait la liberté d'indifférence, ne divise point les crimes en volontaires et en libres, mais en volontaires et en involontaires, et s'il distingue le volontaire prémédité de celui qui ne l'est pas, il ne fait point mention d'un volontaire libre et d'un volontaire nécessaire. Notre code, le droit romain et la législation grecque qualifiaient aussi les crimes d'involontaires, de volontaires et de prémédités, et non pas de libres. Ceux-là même qui ont distingué soigneusement le volontaire du libre, oubliant cette distinction, disent à chaque instant: Ceci est imputable, puisque c'est volontaire ; cette action est d'autant plus méritoire ou déméritoire qu'elle est plus volontaire, etc. Voy. VOLONTAIRE.

§ 2. Définition de la liberté exemple de nécessité. 4. Celle sorte de liberté qui est la vraie liberté se nomme aussi liberté d'arbitre ou de choix, libre ou franc arbitre, liberté de contingence et surtout liberté d'indifférence. Les mots arbitre, contingence, indifférence, demandent quelques explications. Arbitre vient du mot latin arbitrium, lequel signifie volonté, fantaisie, décision, puissance. Ainsi le libre ou franc arbitre sera une volonté, une puissance indépendante, décidant, agissant à son gré. La contingence est l'opposé de la nécessité: car on nomme contingent ce qui peut être autrement, et nécessaire ce qui ne peut pas être autrement. La liberté de contingence désigne donc une faculté affranchie de toute nécessité, pouvant s'exercer autrement qu'elle ne fait. Quelques anciens théologiens, plus fidèles que nous au sens naturel du mot, appelaient liberté d'indifférence ce que les modernes nomment liberté d'équilibre, c'est-à-dire l'état de la volonté, qui n'est pas plus inclinée vers un parti que vers un autre, à laquelle les partís préposés sont indifférents ou également chers. Mais avec le commun des théologiens et des philosophes nous entendons par liberté d'indifférence le pouvoir qu'a la volonté de choi sir entre divers partis qui peuvent bien la solliciter inégalement, mais ne peuvent la nécessiter à se déterminer pour l'un plutôt que pour l'autre. Enfin, comme le mot volonté désigne tantôt la faculté de vouloir, tantôt le vouloir même, pareillement le mot liberté est souvent synonyme de puissance libre, indépendante, bien que dans son acception rigoureuse il signifie exemption de servitude, indépendance. Des nombreuses définitions du libre arbitre. laquelle adop

terons-nous? aucune exclusivement. La liberté se définit, 1° le pouvoir d'agir et de n'agir pas; 2° une force élective; 3° le pouvoir maître de ses actes; 4° une faculté à des choses opposées; 5° le pouvoir sci-mouvant. Ces définitions, qui sont les principales, diffèrent dans les mots, mais s'accordent dans le fond. En effet, pouvoir agir et n'agir pas, c'est être maître d'agir et de n'agir pas, être maître de son acte: c'est aussi avoir la faculté de choisir entre agir et n'agir pas, avoir une faculté qui s'étend à des choses opposées. La première définition célèbre chez les scolastiques est ainsi présentée par Almain (Moral, tit. 3, ch. 4): La liberté est une faculté par laquelle, étant posées toutes les choses préalables nécessairement requises pour agir, la puissance a en son pouvoir d'agir et de n'agir pas, ou (a-t-on ajouté) d'agir d'une manière et d'une autre. Le pouvoir d'agir et de n'agir pas, c'est-à-dire le pouvoir de produire un acte et de l'omettre se nomme liberté de contradiction ou d'exercice; le pouvoir d'agir de diverses manières, de produire différents actes, s'appelle liberté de spécification, si les actes diffèrent en espèce, et liberté de contrariété s'ils sont d'espèce contraire, comme le bien est le contraire du mal. Au reste, ces trois sortes de liberté sont comprises dans cette simple définition, la liberté est le pouvoir de produire un acte quelconque et de ne le pas produire. Le libre arbitre, dit saint Thomas, n'est autre chose qu'une force élective. Liberum arbitrium nihil aliud est quam vis electiva (1a pars, q. 83, a. 4). Définir la liberté une puissance maîtresse de son acte, c'est tout à la fois la bien caracté riser et s'attacher au sens littéral des mots grecs et latins qui c rrespondent aux mots français libre arbitre, liberté. Liberum arbitrium, c'est une décision, une domination libre, souveraine. Aureo, libre, signifie chez les Grecs, maître de soi, el aŭtegovalótns, liberté, désigne une puissance maîtresse d'elle-même. La quatrième définition de la liberté, faculté à des choses opposées, est préférée à toutes les autres par Arnauld, et se trouve en ces termes dans le livre des sentences de Pierre Lombard : « Le libre arbitre est une faculté de la raison et de la volonté à l'un comme à l'autre parti (L. 11, Sent. dest. 4). » Clarke aime à appeler la liberté le pouvoir so-mourant. Celui-là est libre, dit Voltaire, qui se détermine soi-même (Elém. de la philos. de Newton, ch. 4). Se mouvoir et se déterminer signifient ici la même chose. Cette cinquième définition ne s'écarte pas si fort des précédentes qu'elle le paraît; car elle convient avec les autres sur le point essentiel, l'exclusion de toute nécessité même intérieure.

5. En effet, être nécessité, ce n'est pas se mouvoir, c'est être irrésistiblement mu, déterminé. Ainsi qui se meut, qui se détermine soi-même n'est point nécessité, agit librement. Dieu lui-même, s'il était nécessité à créer, ne se déterminerait pas, mais serait déterminé; et bien qu'il fût encore le principe efficient, il ne serait point la cause ac

tive de la création, pas plus qu'il ne l'est de sa propre existence. Quant à la créature, si elle est nécessitée à agir, non-seulement elle ne se meut point, elle ne se détermine point elle-même, mais de plus, le principe de ses mouvements, de ses déterminations, est en dehors d'elle-même, car la créature est nécessitée à agir ou par une force extérieure, ou par sa propre nature; or le principe de son action, dans le premier cas, c'est cette force extérieure, et dans le second c'est, non la créature ou sa nature, mais Dieu luimême, auteur de la nature et de tout ce qui en découle nécessairement. L'exemption de nécessité est pareillement impliquée dans les quatre premières définitions de la liberté. Car si je suis nécessité à vouloir, je n'ai pas le pouvoir, je ne suis pas le maître de ne la point vouloir. Être nécessité c'est être dominé; si la grâce divine me nécessite, c'est elle qui domine et non pas moi; donc la liberté, qui consiste dans la domination, exclut la nécessité même intérieure. On n'agit point par choix quand on ne peut faire autrement qu'on ne fait, c'est-à-dire quand on est nécessité. Lorsqu'une seule chose est possible, le choix ne saurait avoir lieu. Mais dès que l'on est nécessité à un parti on ne peut en prendre un autre, celui qu'on prend est le seul possible, ainsi l'on ne saurait choisir.

6. Toutes nos définitions exprimant la li berté exemple de nécessité, nous aideront à la reconnaître. Cependant, pour saisir mieux encore quelle espèce de nécessité est exclue des actes libres, distinguons deux nécessités, l'une logique, métaphysique, absolue, et l'autre relative, conditionnelle ou physique. La nécessité absolue est celle dont le contraire impliquant contradiction, ne saurait avoir lieu même par la puissance divine. L'existence de Dieu et les vérités éternelles, que nulle puissance ne peut anéantir, fût-elle infinie, sont nécessaires d'une nécessité abso lue. La nécessité relative, est celle dont le contraire est impossible pour certains agents ou dans certaines circonstances seulement, La boule qu'un joueur pousse sur un tapis de billard se meut par une nécessité physique, à condition qu'une force extérieure plus puissante n'y mette pas obstacle: les enets qui émanent le plus irrésistiblement des causes naturelles ne sont que relativement necessaires, puisque Dieu peut supprimer ses effets, du moins en anéantissant les causes. L'opposé de la nécessité c'est la contingence, laquelle est donc absolue ou relative. Une chose est contingente absolument quand la non-existence n'implique pas contradiction, peut être effectuée par la puissance divine elle est contingente relativement, quand sa non-existence dépend de certains actes ou de certaines circonstances. La nécessité absolue ne se concilie pas avec la liberté de contingence, puisqu'un acte abso~ lument nécessaire n'est contingent en au cune façon. Mais la contingence absolue suffit-elle pour la liberté? Elle suffit pour la liberté divine, parce que Dieu peut s'empé

cher d'agir si cela est absolument possible; mais elle ne suffit point pour la liberté créée. Les actions de la créature ne sont pas libres par cela seul qu'elles pourraient, absolument parlant, n'exister pas, car alors le mouvement d'une pierre qui tombe serait libre, pouvant être empêchée au moins par Dieu. Pour que la créature agisse librement, il faut qu'elle puisse n'agir pas, les mêmes circonstances étant posées. Mon action n'est pas libre présentement, dès là qu'elle est nécessaire relativement à moi et aux circonstances présentes; vainement il serait possible en soi, si ce n'est pas possible pour moi, et présentement, d'agir autrement que je n'agis, je n'ai pas la liberté du choix, une véritable nécessité pèse sur moi, du moins pour le moment.

7. Cependant ne confondons pas la certitude avec la nécessité, et ne croyons pas qu'une action ne soit point libre, dès là que son opposé ne doit jamais exister. Pour vouloir toujours le bien, il suffit qu'on s'y voie obligé moralement, et qu'on n'en soit point détourné par quelque tentation, par quelque faiblesse. Moi pasteur, j'entends la cloche qui m'appelle à l'office, je sais que le peuple m'attend, je puis très-aisément me rendre à l'église; je n'éprouve aucune tentation de ne m'y rendre pas, j'y vais et je suis pleinement assuré que les mêmes circonstances intérieures et extérieures se représentant, je ne manquerai point d'y aller, je ne resterai point à la maison; et cependant la conscience m'atteste que je vais librement à l'église. Aussi, non-seulement Nicole et Leibnitz, mais tous les thomistes et tous les augustiniens distinguent la nécessité de la certitude et admettent des connexions qui sont infaillibles sans être nécessaires. La prémotion physique des thomistes et la délectation viciorieuse des augustiniens sont liées infailliblement au consentement de la volonté qui peut bien ne pas consentir, et qui cependant consentira toujours, dans tous les cas, sans exception. Certes un être intelligent fait toujours ce que lui prescrit la raison, à moins qu'il n'en soit empêché par la faiblesse, par la passion, ou par l'action d'une force extérieure. Donc pour amener infailliblement la volonté à accomplir le devoir, la perception de l'entendement qui montre le devoir n'a pas besoin d'être cause elficiente et nécessiiante de la volonté, il suffit qu'elle ne rencontre aucun obstacle intérieur ou extérieur, el qu'elle incline sa volonté sans la nécessiter. Ainsi la liberté se concilie avec la certitude, bien qu'elle exclue la nécessité même relative.

8. La liberté est aussi incompatible avec l'inertie, car la liberté est une force qui se détermine elle-même, et l'inertie est l'absence de toute force. Donc tout être libre est doué de force; j'ajoute qu'il doit posséder encore l'intelligence à quelque degré. Conçoit-on qu'une pierre se meuve librement, qu'un arbre étende librement ses rameaux dans un sens plutôt que dans un autre? Toute force absolument inintelligente ou DICTIONN. DE THÉOLOGIE MORALE. II.

aveugle agit nécessairement selon l'impulsion la plus forte qu'elle trouve en ellemême ou qu'elle reçoit du dehors. Pour agir librement il faut agir avec connaissance, personne ne le nie. Mais quelle connaissance est précisément requise? on ne saurait le déterminer d'une manière absolue. La liberté du choix présuppose nécessairement la connaissance de deux objets au moins, c'est-àdire de plusieurs partis, ou d'un seul, sous le double point de vue qu'on peut le prendre ou l'omettre. Suffit-il que cette connaissance soit empirique, seulement comme l'est celle des brutes, ou faut-il qu'elle soit rationnelle, qu'elle émane de la raison proprement dite? C'est sur quoi les philosophes ne sont point d'accord. On demande encore si, avant la décision de la volonté, l'entendement doit prononcer ce triple jugement; il faut faire ceci, ceci est bon, ceci n'a pas une liaison nécessaire avec le souverain bien. Le premier jugement qu'on nomme jugement pratique, dictamen, n'est point nécessaire pour tout exercice de la liberté, car on s'arrête librement à une pensée plutôt qu'à une autre, sans que l'entendement en donne l'ordre, et quelquefois dans le moment même où la rai son commande de résister à la passion, pouvant ne céder pas on cède, parce qu'on trouve la résistance pénible. L'expérience atteste encore que nous voulons une infinité de choses, uniquement parce que nous sommes inclinés à les vouloir, sans que nous les ayons jugées bonnes, c'est-à-dire agréables, utiles ou honnêtes, sans que nous ayons songé s'il est bon ou mauvais de ne les pas vouloir. Tout acte de la volonté ne présuppose pas un jugement sur la bonté de l'action et sur celle de son objet, ni conséquemment sur la liaison de l'un ou de l'autre avec le souverain bien. Moins un objet paraît indispensable au perfectionnement, à la félicité, moins la volonté se sent attirée vers lui; plus à son égard elle est libre de la liberté d'indifférence. Voilà ce qui arrive ordinairement, mais il n'implique pas contradiction que la volonté soit plus inclinée, et même soit nécessitée à ce que l'entendement juge le moins bon. Je vois évidemment que, si je ne veux pas telle chose, je perds irrévocablement un bonheur sans fin, ou je tombe dans un malheur également sans fin suis-je libre de ne pas vouloir cette chose? Je la voudrais certainement si la faiblesse ou la passion n'y met obstacle. Je la voudrais librement si la perception évidente de mon entendement n'est pas cause efficiente de mon vouloir, m'incline et ne me nécessite point à vouloir, ce qui ne paraît aucunement impossible. Comme ici-bas l'homme ne perçoit jamais évidemment qu'en omettant présente ment tel ou tel acte, son bonheur éternel est irrévocablement perdu; nous ne pouvons en appeler à la conscience pour décider si une pareille perception nécessite ou non la volonté, et la raison ne peut former là-dessus que des conjectures.

9. De tout ce que nous venons d'établir résulte une conséquence importante : c'est 5

que la délibération n'est pas nécessaire pour agir librement. Délibérer, c'est hésiter entre divers partis, ou faire la recherche du meilleur. Mais il n'y a point lieu à recherche ni à hésitation là où le meilleur est connu et où rien n'empêche de le prendre combien ne faisons-nous pas de choses qui nous paraissent évidemment licites, et qui nous plaisent, sans hésiter à les faire, sans soumettre leur légitimité à l'examen? Toutefois, vu l'ignorance et la faiblesse humaine, la plupart de nos actions ne sont point libres, si elles ne sont délibérées. La délibération supposant quelque ignorance, quelque faiblesse, ne se trouve point en Dieu. Or le choix, poaipeois, est le spontané qui a été délibéré (Arisi. de Morib., l. III, c. 4.), et toute délibération est une recherche, tois (ib. c. 5). C'est pourquoi saint Jean de Damas observe que le vouloir existe en Dieu, mais non le choix. Car, ajoute-t-il, Dieu ne délibère pas, puisque délibérer est le propre de l'ignorance (de Fide orth., l. 11, c. 22). La signification donnée par Aristote au mot choix (apsuipeous) est trop restreinte car choisir, c'est prendre entre divers partis également possibles l'un quelconque qu'on pouvait laisser; ainsi,le choix suppose plusieurs partis possibles et la liberté de prendre l'un quelconque, mais n'implique pas nécessairement l'ignorance, la délibération, et conséquemment le choix peut se trouver et se trouve surtout en Dieu.

mû selon l'ordre de sa nature. Ainsi la volonté appète librement le bonheur, quoiqu'elle l'appète nécessairement, comme Dieu par sa volonté s'aime librement, quoiqu'il s'aime nécessairement. (S. Thom., . VII, quæst. 10, de Potentia, art. 2.) Le t. » saint docteur a-t-il jamais cru que cette liberté exemple de la seule contrainte fût suffisante pour mériter, dans l'état d'innocence, dans un état différent du nôtre? Nous n'entreprendrons pas de le décider. (Voyez S. Thom., l.III, Contr. gent., c. 138, in III, lib. Sent. dist. 10, a. 2.) Ce qui est certain, c'est que plusieurs théologiens orthodoxes, et, entre autres, Thomassin, s'appuyant sur saint Thomas, saint Bonaventure, etc., ont enseigné formellement que Jésus-Christ a mérité par des actes nécessaires et libres seulement de coaction. L'antiquité chrétienne a-t-elle admis une double liberté de volonté, l'une exempte de toute nécessité, l'autre exempte seulement de coaction et ce pendant suffisante comme la première pour mériter? Je ne le pense pas. Sans doute les saints Pères ont souvent confondu le libre et le volontaire, ont souvent opposé la coaction seule à la liberté; mais c'est qu'ils parlaient le langage ordinaire selon lequel (n. 2 et 3) coaction est synonyme de nécessité, et volontaire l'est de libre. Ne pouvant discuter ni même reproduire l'enseignement des saints Pères sur cette question, attachons-nous à saint Jean de Damas pour les Grecs et à saint Augustin pour les Latins.

§ 3. De la liberté exempte de coaction. 10. La liberté prise dans le sens le plus général est l'exemption de servitude, labsence de tout ce qui s'opposerait au développement naturel d'une force quelconque. L'eau de la montagne qui n'est point contenue descend librement dans la plaine. Si la force aveugle agissant sans entraves est dite agir librement, à plus forte raison peut-on dire que Dieu le Père agit librement en engendrant son Fils, quoiqu'il l'engendre nécessairement car rien ne peut arrêter ou entraver cette génération. Mais cette sorte de liberté est une liberté de nature et non pas une liberté de volonté. Cette dernière seule doit nous occuper. La liberté de volonté est absolument incompatible avec la coaction, puisqu'une volonté forcée ne serait plus une volonté (n. 2). Mais est-elle incompatible avec la nécessité? Dès là que la volonté se détermine avec connaissance et avec plaisir, encore qu'elle le fasse nécessairement, se détermine-t-elle librement? L'essence de la liberté suffisante pour mériter consiste-t-elle seulement à agir sciemment et sans répugnance? Saint Thomas a reconnu une liberté de volonté non affranchie de nécessité. « La nécessité naturelle selon laquelle la volonté est dite vouloir par nécessité quelque chose, comme la félicité, ne répugne point à la liberté de la volonté, comme Augustin l'enseigne au premier livre de la Cité de Dieu. Car la liberte de volonté est opposée à la violence ou coaction. Or il n'y a point violence ou coaction quand quelque chose est

11. L'autorité de saint Jean de Damas est grande, en ce qu'il exprime les croyances catholiques d'après les écrits des Pères grecs. Sur la matière présente, Damascène suit principalement Némésius, lequel reproduit Aristote presque textuellement. Interrogeons d'abord Aristote: le philosophe, dans le troisième livre de son Ethique, traite la question de la liberté sous le point de vue de l'imputabilité. La liberté qu'il exige pour le mérite et le démérite, c'est évidemment la liberté d'indifférence, comme nous allons le montrer. Aristote définit le spontané ou volontaire (x), ce dont le principe est dans un être agissant avec connaissance (de Morib., l. 111, c. 4). Or il dépend de soi de faire et de ne pas faire les choses dont on a le principe en soi (Ibid., c. 1). Ainsi, vis-à-vis des choses dont on a le principe en soi, qu'on fait volontairement, l'on possède, d'après Aristote, la liberté d'indifférence, puisqu'on a en sa puissance de les faire et de ne les pas faire. « La vertu et le vice, dit encore Aristote, dépendent de nous. Lorsqu'il est en nous (è'μ) de faire une chose, il est en nous pareillement de ne la pas faire, et lorsqu'il est en nous de ne pas la faire, il est en nous aussi de la faire. Que s'il est en nous de faire et de ne pas faire soit le bien, soit le mal, c'est-à-dire d'être bons ou méchants, il est donc en nous d'être vertueux ou vicieux. Car dire que personne n'est volontairement méchant ni involontai-rement heureux, c'est, à ce qu'il paraît, dire une chose vraie, et dire une chose fausse, puisque nul n'est heureux malgré soi, et que

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