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seule loi du monde sans le rencontrer. L'astronome nous le montre dirigeant tous les astres dans l'espace parla loi de l'attraction; le physicien le trouve dans tous les corps soumis à son analyse; le philosophe le voit dans les rapports des hommes entre eux. Il y a évidemment une tendance à l'unité dans les êtres raisonnables; elle est une nécessité de notre nature. Les hommes sont faits, non pour se haïr, se nuire et vivre en ennemis, inais pour s'aimer, s'aider et vivre en frères; non pour dévaster ou laisser en friche ce globe, leur magnifique domaine, mais pour le féconder, le parer et l'embellir. Ils sont faits pour l'accord et non pour l'hostilité, pour un travail utile et non pour la paresse; pour le bonheur et non pour le malheur. Or pour les hommes la condition de l'accord, de la richesse, du travail utile, du bonheur, c'est l'union, hors de laquelle il ne peut y avoir que faiblesse, impuissance, misère. Aussi, au fond du grand travail d'exploration de tous les siècles, il y a eu une tendance commune vers l'unité, et sous la main de Dieu, l'homme a marché par des voies diverses, avec des haltes plus ou moins longues, vers l'union mystérieuse de toutes les créatures raisonnables. Commencée par les liens du sang, par l'agrégation de la famille, l'union des parents, dans l'origine des temps, pouvait paraître aux hommes une protection suffisante. En se multipliant, le genre humain a compris la nécessité de l'agrandir. De là est venue la formation des empires qui sentant le besoin de se fortifier, ou plutôt poussés par le principe d'unité, ont constamment essayé de s'étendre et de réaliser la monarchie universelle.

2. Du sein de la créature raisonnable il s'élève une opposition à cette unité : chaque individu cherche à former un petit monde dont il serait le centre. De là naissent des causes de répulsion qui se manifestent entre les hommes et entre les sociétés ; c'est la source des dissensions des familles, des guerres entre les empires, des haines et de la discorde entre tous les mortels. Pour remédier à ce mal, l'Auteur de l'univers a établi un lien de rapprochement et d'union entre tous les homines. Dieu a choisi un lien qui puisse résister aux plus grands efforts teutés pour le rompre ce lien est la charité. La charité n'est pas une sympathie d'humeur et de tempérament, c'est un devoir juste, éclairé, raisonnable. La char té ne recherche point ses propres intérêts, mais les intérêts de ce qu'elle aime. Patiente, elle s'accommode à tout et souffre tout pour ce qu'elle aime. Eclairée, elle n'applaudit jamais à l'iniquité; elle n'aime dans les autres que la vérité élernelle. Elle est plus forte que la mort, elle est à l'épreuve de tout, d'un procédé, d'une perte, d'une disgrâce. Tel est le lien destiné par la Providence à former de tous les peuples un seul peuple, et de tous les hommes un seul homme. Le connaître est un des premiers besoins de notre cœur.

Pour satisfaire à ce besoin, Nous essayerons de donner les caractères de l'amour du

prochain; ensuite nous étudierons son immense action sur la société; eufin nous re~ chercherons avec un soin tout particulier quelles sont ses causes de destruction.

1. Des caractères de l'amour du prochain.

3. L'action de la charité sur la vie de l'homme est immense l'égoïsme tend sang cesse à l'amoindrir. Il importe d'en établir le fondement sur un terrain ferme, qui soit en dehors de toutes les discussions; car ce qui repose sur les théories humaines est tellement fragile, que le moindre choc suffit pour le rompre. Pour réaliser mon désir j'ai élevé les yeux vers le ciel, et j'y ai trouvé en Dieu le principe et la règle de la charité pour le prochain.

Tous les hommes étant les enfants d'un même père, participent à la même vie, tendant constamment vers la même fin, sont incessamment attirés vers leur Créateur; ils n'ont ni repos ni stabilité, qu'ils ne soient en rapport central avec Dieu leur centre d'union. De même qu'un astre jeté hors de son orbite ne peut que s'égarer et se perdre, ainsi l'homme, en dehors de l'union avec Dieu, ira se précipiter dans l'abîme. Dieu est donc le lien commun qui tient tous les êtres à la place qu'ils doivent occuper. Sʊn action sur tous les êtres doit nécessairement servir de modèle à l'action réciproque des êtres entre eux : tel est l'ordre voulu par la raison. Sortir de l'action divine ou sculement la gêner, c'est troubler l'ordre. D'après ce principe c'est donc dans l'amour de Dieu pour l'homme que nous devons chercher le fondement et la règle de l'amour de l'homme pour son semblable.

En étudiant un instant l'amour de Dieu pour l'homme, il est impossible de méconnaître une telle intimité entre l'amour de Dieu pour l'homme et la charité de l'homme pour le prochain, que, 1° les deux amours sont inséparables; 2° que notre amour du prochain doit remonter jusqu'à celui de Dieu; 3 enfin, que l'amour de Dieu pour l'homme est la mesure, la règle de notre charité pour le prochain. Nous espérons, en développant ces trois caractères, mettre l'amour du prochain au-dessus des vaines discussions des homines.

4. 1° De l'union intime de l'amour de Dieu et de l'amour du prochain. - Dieu avait comblé l'homme d'honneur et de gloire au sortir de ses mains. Il l'avait couronné en le créant, il l'avait établi le maître et le seigneur de tous ses ouvrages. L'homme succombe; le Verbe de Dieu descend du sein de Dieu pour s'unir à notre nature qu'il adopte solennellement. Ainsi tous les hommes sont entrés dans les droits de la filiation éternelle ils ont reçu le titre glorieux de frères du Christ, qui n'est que leur premier-né: le seigneur étant notre Dieu, il est devenu notre Père. Nous étions l'ouvrage de ses mains, nous sommes devenus ses enfants. Tous les hommes ont donc le même Père, ils ont tous la même fin, ils ne forment qu'une grande famille dont Dieu est le chef qui aime et qui

chérit ses sujets et ses enfants. Comme il veut être uni avec eux, il veut aussi qu'ils soient entièrement unis entre eux. Cette union est tellement chère à son cœur, qu'il la réclame à chaque page de son Evangile. Jésus-Christ veut que tous les hommes soient un comme il est un avec son Père; il met l'amour du prochain pour ainsi dire sur la même ligne que l'amour de Dieu. Si l'amour de Dieu constitue le premier commandement de la loi, l'amour du prochain constitue le second qui est semblable au premier. Si celui qui porte le désordre dans une famille déchire le cœur du père de famille; si celui qui jette le trouble, la division, la révolte dans un Etat, jette la peine, le tourment, dans l'âme du prince qui le gouverne, que fait donc celui qui trouble la société, qui y sème la discorde? Il transporte le champ de bataille dans le sein de Dieu, il déchire les entrailles de sa charité. S'il dit qu'il aime Dieu, il est un menteur. Celui qui aime Dieu aime ses enfants, respecte l'ouvrage de ses mains, honore son image et sa ressemblance. L'amour du prochain découle donc de l'amour de Dieu.

5. 2. L'amour du prochain remonte à Dieu. Concentrer nos affections sur la créature, ne pas leur donner un mouvement d'ascension vers la Divinité, ce serait un vol fait à Dieu; car il n'y a pas une seule de nos actions qui ne lui appartienne. Si cela est vrai de toutes les œuvres en général, cela est bien plus vrai encore de l'amour du prochain. En présentant l'homme à notre amour, Dieu nous présente son ouvrage, son image vivante, l'objet de sa tendre sollicitude, que sa providence couvre sans cesse de ses ailes tutélaires. Il nous montre en un mot des caractères divins, souvent il est vrai obscur cis par les vices; mais ils n'en existent pas moins. Considéré sous ce point de vue, tout homme est digne d'un amour qui prend un caractère tout spécial de grandeur, d'universalité, de nécessité.

Lorsque l'amour du prochain s'appuie sur son véritable motif, et qu'au lieu de s'arrêter aux affections purement terrestres, il voit dans l'homme le représentant de la Divinité, alors il s'élève au-dessus de la nature, il plane au-dessus de l'humanité; il devient céleste et divin. Et ainsi l'amour embrasse tous les hommes sans exception, grands et petits, jeunes et vieux, chrétiens et infidèles, parce que tous les hommes sans exception sont formés à l'image de Dieu, l'ouvrage de ses mains; que tous sont appelés à régner avec lui dans la cité sainte.

Si nous contemplons les caractères de la Divinité dans le prochain, alors tombent tous les sophismes de la haine et de l'en ie. Si nous ne voyions Dieu dans l'homme, souvent nous éprouverions une répugnance invincible à aimer quelques mortels. Comment, en effet, aimer un homme avili, dégradé, la honte du genre humain? Mais lorsque nous nous disons à nous-mêmes: voilà l'image de Dieu, l'ouvrage de ses mains, nous éprouvons à la vue de ses vices un sentiment de peine com

mandé par l'amour. Ainsi lorsque noas voyons le portrait de notre père couvert de poussière et de fange, nous le prenons avec respect, notre cœur est ému, s'il est affligé par les indignes traitements que ce portrait a reçus, nous ne le contemplons pas avec moins d'amour; parce que tout souillé qu'il est, il nous rappelle les traits de l'auteur de nos jours.

6. 3° Dieu est le modèle de notre charité pour le prochain.-Au lieu de se dilater, le cœur est toujours prêt à se rétrécir. Le divin précepte de la charité eût bientôt péri sous les formules restrictives de l'intérêt personnel, si Jésus-Christ par une maxime incontestable n'eût arrêté les interprétations insensées de l'orgueil et des passions. Mais pour mettre des bornes à l'amour de soi, pour fixer la véritable étendue de la charité, il a donné une règle qui détruit tous les prétextes, anéantit tous les sophismes. Voici les paroles du Sauveur : Je vous fais un commandement nouveau, c'est de vous entr'aimer les uns les autres, comme je vous ai aimés. Voilà la mesure de notre charité à l'égard du prochain l'aimer comme Jésus-Christ nous a aimés. Cette mesure paraît bien grande lorsqu'on vient à étudier ce que Jésus-Christ a fait pour les hommes. Aux vives affections d'un cœur brûlant d'amour, il a joint les actes les plus héroïques de la charité; il a donné sa vie pour ses frères. Ainsi il nous a aimés par le cœur et par les œuvres ; c'est donc aussi par le cœur et par les œuvres que nous devons aimer le prochain.

Nous n'essayerons pas de définir l'amour du cœur; nous renverrons à leur propre cœur tous ceux qui le sentent battre dans leur poitrine; il leur fera bien mieux comprendre que nous ce que c'est que cet amour. Il aimait de cœur son prochain, un saint François de Sales, quand, accablé d'in jures par un homme qui lui demandait une faveur, il lui tient ce discours plein de douceur Monsieur, mon indiscrète caution est cause de votre colère, je m'en vais faire toutes les diligences possibles pour vous donner contentement: mais après tout, je veux bien que vous sachiez que quand vous m'auriez crevé un œil, je vous regarderais de l'autre aussi affectueusement que le meilleur ami que j'aie au monde. » Voilà de l'amour du cœur. Mais aiment-ils du cœur ceux qui sont polis, affables, honnêtes, mais dont les sentimen's intérieurs sont froids, indifférents, rebutants. Le langage est affec tueux, mais le cœur n'y a aucune part. Et souvent même ces dehors affectueux cachent l'hostilité. Ce n'est pas là de la charité, ce n'est pas ainsi que Jésus-Christ nous a ai

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daloue, prévenir, servir, faire plaisir selon toute l'étendue de son pouvoir; elle sait assaisonner les services qu'elle rend par des manières encore plus gracieuses que les grâces mêmes qu'elle fait; elle sait compatir aux maux du prochain, les soulager, lui prêter secours et l'aider à propos. Elle sait, par l'esprit de charité qui l'inspire et qui la conduit, parler, se taire, agir, s'arrêter, se gêner, se mortifier, relâcher de ses intérêts, renoncer à de justes prétentions. Elle sait, dis-je, tout cela, parce qu'elle s'affectionne à tout cela, parce qu'elle étudie tout cela, parce qu'intérieurement portée à tout cela, elle y pense incessamment, et ne laisse rien échapper à son attention et à sa vigilance. Mais que, par une règle contraire, la charité vienne à se refroidir, ou même à s'éteindre dans nos cœurs, tout cela disparaît de nos yeux et s'efface de notre souvenir. On n'est bon que pour soi-même, et l'on ne se croit chargé que de soi-même. »

II. Action de la charité sur la société.

8. Le bien, le beau, le grand, l'utile, le parfait, sont les principes de l'amour, ses causes productrices. Le mal, au contraire, est son ennemi radical, la cause de sa destruction. Si l'amour est réel, véritable, bien compris, il travaillera avec ardeur au développement de son principe et à l'anéantissement de ce qui lui est hostile; il aura ainsi une grande influence pour le développement des bonnes dispositions que l'homme à reçues de la nature ; il aura un grand pouvoir de compression sur les inclinations mauvaises et les pernicieuses habitudes. La charité doit donc avoir une action immense sur la société. Pour donner à la charité la direction qu'elle doit avoir, il faut rechercher ce qui dans l'homme doit être encouragé, développé, fortifié, et ce qui doit être combatta, vaincu, détruit. Il faut étudier ensuite les moyens de travailler à la destruction des causes du mal et au développement des causes du bien. I faut rechercher enfin tout ce que la charité commande sur chacun de ces rapports.

9. L'homme est un composé de bien et de mal; être divin par son origine et par sa destination, par ses bonnes pensées et par ses bons désirs, par ses bonnes actions et par ses œuvres saintes, l'homme est digne de vénération, de respect et d'amour. En admirant et en aimant lout le bien qui est en lui, nous aimons, nous admirons Dieu luimême, puisque tout le bien qu'il possède vient de Dieu.

A côté du bien, il y a le mal, les défauts, les vices. Quand on vient à considérer l'homme sous ce malheurenx rapport, je ne sais quelle douloureuse impression notre âme éprouve. Les vices se présentent avec leur hideux cortège, la haine, l'abaissemeat, la ruine, la honte, les maladies, la misère, les meurtres, le carnage. Ce qui ajoute encore à ce triste tableau, c'est que la vertu elle-même a ses vices et ses défauts. Il y a le mal du travail, le mal de l'étude, le Dictionn. de TRÍOL. MORALle. II.

mal de la science, le mal de la piété, en un mot le mal de l'homme. Trop souvent c'est ce mal qui fait nos douceurs et notre gloire.

Si l'homme est un composé de bien el de mal, il ne nous est pas possible de l'aimer Tout entier, ou plutôt il doit faire naitre en nous deux sentiments entièrement opposés, l'amour et la haine : l'amour du bien et la haine du mal. Ces deux sentiments semblent se détruire; cependant ils ne sont point inconciliables; il faut les harmoniser conformément au but pour lequel l'homme a été créé, el c'est dans cette harmonie que consiste la véritable charité. Il importe d'étudier et d'établir les moyens de conciliation.

10. C'est dans le sein de Dieu qu'il faut aller puiser ces moyens de conciliation. Justice et sainteté, Dieu doit haïr le mal qui est dans l'homme, comme il doit aimer le bien qu'il y aperçoit. Les sentiments de la Divinité régleront les nôtres.

Le sentiment dominant dans la Divinité, ou plutôt le sentiment principal, essentiel, inhérent, c'est l'amour de l'homme. Dieu emploie sa puissance à le créer, il empreint son image sur son front. Si l'homme se perd, il le rachète au prix de son sang; il le place sous la garde de sa providence, veille sans cesse sur lui et s'applique constamment à le conserver et à le conduire. « Cet homme qu'il aime tant, il aurait pu le placer sous l'empire de la fatalité où il n'y a ni bien ni mal, ni vice ni vertu, ni récompense ni châtiment, où il ne reste pas plus que du jour qui tombe ou du fleuve qui s'écoule. Mais pour élever l'objet de son affection à un état où la vertu fût po-sible, il l'a formé dans un état de liberté où le bien et le mal peuvent exister. Dieu poursuit le mal moral, il le punit; il le hait, il se venge en Dieu, il réparera sa gloire outragée. Eh bien ! quoique la pensée des châtiments de l'enfer nous fasse trembler, nous ne pouvons nous empêcher d'être frappés de la grandeur des desseins de Dieu et de la magnificence de ses vues. Il laisse le crime s'exercer librement sur la terre, et dans cette tolérance se manifestent l'amour infini du bien et la fidélité à la vertu. Dans l'excès même du mal, je vois la main de Dieu tirer un grand bien, en faire ressortir une solennelle et admirable réparation, en faire jaillir tout l'éclat d'une gloire mille fois plus brillante que si sa majesté n'avait jamais été violée; la bonté et la miséricorde divine se joignent à mes regards et à mon cœur, sous les traits les plus ravissants qui ne transportent, lorsque je vois tous les trésors de grâce prodigués à ceux qui s'en montraient le plus criminellementin dignes. Quand je vois la tendresse de notre Père qui est dans les cieux aller chercher celui qui est dans la fange, la bonté de Dieu éclate à mes yeux. Elle brille d'une splendeur toute céleste, quand, au milieu des combats et des épreuves du juste, je vois le juste couvrir la terre de ses bienfaits, et pratiquer avec ses vertus les manifestations les plus hautes du dévouement et de l'héroïsmie. »

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(Analyse d'une confér. tenue à Not e-Dame de Paris en mars 1847 par le R. P. de Ravigran.)

11. O homme, après un tel tableau, quels doivent être tes sentiments à l'égard de l'homme pécheur? Tu le vois, le sentiment de l'amour domine en Dieu; celui de la haine du mal semble sommeiller. Il répand tous les jours ses bienfaits, il attend pour faire sentir ses rigueurs. Voilà ton modèle. Ton amour, comme celui de Dieu, doit s'étendre à tous les hommes, aux justes et aux pécheurs, aux amis et aux ennemis, aux bienfaiteurs et aux persécuteurs. Le mal doit étre couvert du manteau de la charité. Si nous sommes forcés de le voir, de le rechercher, ce n'est point pour maudire le coupable, c'est pour le plaindre, c'est pour l'aimer. Car le mal lui-même doit animer notre charité. Si, pleins d'amour pour notre frère, nous voulons corriger ses defauts, défruire ses vices, c'est la charité qui doit commander nos efforts, elle doit les diriger. N'est-ce pas aussi l'amour qui guidait les pas du Sauveur dans la recherche du pécheur? Il se représente à nous sous l'image d'un bon pasteur qui laisse là quatre-vingtdix neuf brebis, et court après une seule qui s'est égarée; il se montre encore sous la figure d'une femme qui semble faire peu de cas de neuf pièces d'argent qui lui restent, et cherche la dixième qu'elle a perdue, avec des soins et des inquiétudes que rien ne peut égaler. Il se peint aussi sous le symbole d'un père de fami le: il a perdu le plus jeune de ses fils, qui s'est avili, dégrade; il le voit revenir, il vole à sa rencontre, le presse sur son cœur, et lui donne des marques de tendresse qu'il n'avait point données à celui qui était toujours demeuré fidèle.

Amour admirable, charité parfaite, véri table modèle de l'amour que nous devons à nos frères, sois à jamais gravé dans notre esprit, anime notre âme, consume notre cœur; et, pénétrés de la plus vive affection pour nos semblables, nous serons heureux de leur bonheur, malheureux de leur malheur ! Et si nous sommes forcés de travailler à la guérison de leurs maux, le remède sera toujours appliqué par l'amour!

III. Des vices opposés à la charité.

12. L'union des hommes entre eux, l'accord parfait de leurs volontés, de leurs désirs, de leurs actions, a été le premier dessein de Dieu en formant le père du genre humain. Mais la division existe sur la terre, elle a Commencé avec le monde. A peine Adam était-il sorti de l'Eden, que Caïn portait dans son cœur des sentiments de haine contre Adel. Depuis le jour néfaste où cet ange de douceur périt sous les coups perfides de son frère, la charité a toujours souffert. Les dissensions, la haine, le meurtre, ont couvert toutes les parties du monde. Heureux, mille fois heureux, celui qui, faisant connaitre les maux causés par la discorde, pourrait ramener l'union sur la terre! Nous croirions avoir amassé des trésors, si nous pouvions arrêter

une main prête à frapper, détruire un senti ment de vengeance, faire naître dans quel. ques âmes un peu d'amour de leurs frères. Si les objets agréables excitent notre sympathie, les objets désagréables font naftre en nous un sentiment pénible; nous les repoussons au lieu de les attirer, Ce sentiment de répulsion se nomme antipathie. Elle est de sa nature e-sentiellement opposée à la charité, dont elle détruit les liens.

L'antipathie est produite par une infinité de causes. Les unes sont pur ment physiques: la laideur, la difformité, les plaies, une maladie dangereuse, nous éloignent des personnes qui en sont les sujets. D'autres viennent de l'esprit la divergence dans les jugemenis, dans les vues, dans les pensées, dans le caractère, divisent les hommes et causent leur éloignement mutuel. D'autres ont leur source dans le cœur les extrêmes se touchent; si le cœur est de centre des plus vifs amours, des plus profonds attachements, il est aussi la source des antipathies les plus fortes et les plus redoutables. D'autres, enfin, viennent des intérêts: la fortune, les dignités, l'amour. propre, excitent des rivalités qui rompent les liens de la plus belle des vertus chrétiennes. En un mot, les causes de division sont aussi nombreuses que les maux, les peines, les passions, les intérets, sont multipliés.

Dans l'impossibilité d'étudier chacune de ces causes en particulier, nous nous sommes demandé s'il ne serait point possible de les ramener à quelques classes. Nous avons descendu dans notre cœur ; il nous a paru que nous pouvons les rameuer à trois grandes sources, qui se divisent en une multitude de petits ruisseaux : ce sont l'envie, le ressentiment et le mépris. Nous essayons de les ca ractériser, et nous indiquons les remèdes propres à les guérir aux articles qui les concernent. Voy. ENVIE, RESSENTIMEM, HAINE, MÉPRIS.

PROCURATION.

Voy. MANDAT.

PRODIGALITÉ, prodigue.

La prodigalité est un vice opposé à l'avarice: tandis que l'avare amasse et conserve d'une manière contraire à la raison, le prodigue dissipe et donne d'une manière condamnée par la prudence. Le sage use de ses revenus avec largesse: il en emploie une partie à vivre honorablement, une autre à faire du bien; il sait encore (s'il n'est pas très-riche) en conserver une petite par ie, qui forme une réserve pour les circonstances fâcheuses qui peuvent survenir. Nous ne faisons ici qu'u diquer des idées qui ont été développees au mot AVARICE.

La prodigalité n'est ordinairement qu'un péché véniel. Si cependant elle allait jusqu'a compromettre l'état de ses affaires, jusqua jeter une famille dans le besoin, ou la faire déchoir de son rang, elle serait sûrement un péché mortel (Voy. Liguori; lib. v, n. 68),

Puisque la prodigalité est toujours au mois un péché véniel, on demande ce que l'on dol penser d'une promesse prodigue, Elle est au

moins illicite: est-elle nulle? Quelques casuistes, même de renom, tels que Delugo, Sanchez, de la Croix, regardent cette promesse comme obligatoire en conscience, parce que le prodigue, ayant la libre disposition de ses biens, peut en disposer mème par un péché, et en transmettre la propriété. Celui qui achète du vin pour s'enivrer est certainement tenu de le payer; celui à qui on a fait une promesse acquiert un droit qu'un autre ne peut détruire à sa volonté. Un petit nombre de docteurs regardent la promesse comme entièrement nulle, parce que toute obligation sans cause ou fondée sur une cause illicite est nulle. Or, ici la prodigalité atteint directement la matière du contrat, car la prodigalité concerne l'objet de la promesse. Celte raison nous paraît démonstrative; mais nous pensons, avec beaucoup de docteurs, qu'il faut la renfermer dans ces strictes limites. C'est pourquoi nous croyons que si l'objet de la promesse est divisible, la promesse oblige relativement à la partie qui ne va pas jusqu'à la prodigalité. Et en effet le vice de la prodigalité ne l'atteint pas. Au contraire, la promesse est nulle relativement à la partie dont on n'a pu disposer sans être prodigue, parce que l'objet même de la promesse est atteint par le vice de la prodigalité. Liguori pense qu'on peut et qu'on doit suivre cette règle, quand même on aurait confirmé la promesse par un serment, qui est nul dans ce cas, d'après la règle du droit : Non est obligalorium contra bonos mores præst tum juramentum. (Voy. Liguori, lib. 11, n. 185 el 135; lib. v, n. 68; lib. vi, n. 851, verb. Cum autem.) PROFANATION

son travail et de la récompense qu'il mérite. Mais ont-ils le droit aux distributions quoti. diennes? La coutume en France était d'ac corder aux professeurs en théologie une part aux distributions, comme s'ils avaient été au chœur. La congrégation du concile de Trente ne juge pas ainsi les choses: elle enseigne que les professeurs ont droit aux fruits de leur bénéfice, mais non aux distributions manuelles, à moins que tout ou la plus grande partie des fruits ne consiste dans ces distributions; dans ce cas, le professeur aurait droit aux deux tiers de leur nature, équivalant aux gros fruits. (Voy. Benoit XIV, Instit. eccl., n. 72.) Cette discussion n'a plus d'objet en France, puisque nous n'avons plus de distribution manuelle.

§ 2. Devoirs des professeurs.

3. Chargés de former la jeunesse, les professeurs ont de très-grands devoirs à remplir ils doivent former l'esprit et le cœur des enfants. C'est sur ces deux points que nous allons porter notre attention.

4. I. Nous ne dirons rien ici de la nécessité et de l'importance du développement intellectuel; nous l'avons fait connaître au niol INSTRUCTION. Mais pour enrichir l'esprit des enfants, développer leur raison, fortifier leur mémoire, rendre l'imagination plus brillante, il faut dans le professeur deux qualités posséder lui-même la science et savoir la communiquer.

Il y a encore des hommes qui veulent communiquer ce qu'ils ne connaissent pas. Il est vrai que dans nos universités on exige un diplôme de bachelier, de licencié ou de docteur, suivant l'importance du poste qu'on Outrages fails aux choses saintes. Voy. doit remplir. Mais le diplôme ne donne pas SACRILEGE.

PROFESSEURS.

1. Pour être tout ce qu'il doit être, l'animal n'a besoin que d'instinct; pour devenir lout ce qu'il peut devenir, l'homme a besoin de l'éducation et de l'instruction. (Voy. INSTRUCTION.) C'est aux professeurs surtout que ce soin est confié; aussi c.tte condition a-t-elle toujours été fort honorée dans l'Eglise et dans l'Etat. On lui a accordé des priviléges. Nous ferons connaître ceux qui sont admis par l'Eglise, ensuite nous exposerons les devoirs dés professeurs.

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Ja science; la faveur ou la surprise laisse souvent passer des hommes sans capacité réelle. Et, de plus, l'oubli vient effacer les connaissances qu'on a acquises. Tout maître qui n'est pas instruit ne peut sans péché continuer à gérer son emploi; s'il a la conscience de son incapacité, il peut quelquefois se rendre coupable de péché mortel.

Les maîtres les plus instruits ne sont pas toujours ceux qui communiquent le mieux la science. Il faut, pour bien enseigner, pusséder les bonnes méthodes et avoir l'attention de les bien appliquer. Saus une bonne méthode, les efforts du professeur sont vains; avec une bonne méthode mal appliquée, les succès sont très-faibles. Le professeur ne doit point abandonuer l'élève sans s'être assuré qu'il possède parfaitement ce qui lui a été enseigné.

§ 1. Des priviléges accordés aux professeurs. 2. Il y a peu de pays qui n'aient accordé des priviléges aux maîtres chargés de former la jeunesse. Les lois romaines contenaient une foule de priviléges en faveur des professeurs. En France, ils sont exemptés du service militaire, pourvu qu'ils s'engagent pour dix ans à enseigner dans une école de l'université. L'Eglise, voulant aussi faciliter l'instruction, a exempté les chanoines, professeurs en théoJogie, de l'assistance au chœur. Cette exemption est très-ancienne. C'est que l'Eglise a tou jours reconnu la nécessité de l'étude des sainLes lettres. Et, comme le dit Honorius III, il est trop juste que celui qui travaille pour l'uti-toyen, et l'obéissance la première vertu d'un Jité de l'Eglise ne soit pas privé du salaire de

5. 11. Quintilien croyait que l'école où l'on aurait appris à mieux vivre était de beaucoup préférable à celle où l'on aura t appris à mieux dire. Or, on apprend à mieux vivre en formant le cœur de l'enfant. Pour former un bon cœur, le professeur doit s'ap. pliquer à former la volonté, la conscience et les mœurs de l'enfant.

La soumission est le premier devoir d'un ci

enfant. 11 faut donc que nous apprenions à

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