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nèbres du moyen âge, et disant : « Que la lumière <«< soit! >> afin que la lumière fût.

La nuit étant enfin venue, et personne ne pouvant plus suivre les traces des gardiens de Luther, ceux-ci prirent une route nouvelle. Il était près de onze heures avant minuit, lorsqu'ils arrivèrent au pied d'une montagne'. Les chevaux la gravirent lentement. Sur la hauteur se trouvait une vieille forteresse, entourée de tous les côtés, sauf celui par lequel on y arrivait, des bois noirs qui recouvrent les montagnes de la Thuringe.

C'est dans ce château élevé et isolé, nommé la Wartbourg, où se cachaient jadis les anciens landgraves, que l'on conduit Luther. Les verrous se tirent, les barres de fer tombent, les portes s'ouvrent; le Réformateur franchit le seuil; les battants se referment sur lui. Il descend de cheval dans une cour. L'un des cavaliers, Burkard de Hund, seigneur d'Altenstein, se retire; un autre, Jean de Berlepsch, prévôt de la Wartbourg, conduit le docteur dans la chambre qui doit être sa prison, et où se trouvent déposés les vêtements d'un chevalier et une épée. Les trois autres cavaliers, qui dépendent du prévôt, lui enlèvent ses habits ecclésiastiques et le revêtent du costume équestre qu'on lui a préparé, en lui enjoignant de laisser croître sa barbe et sa chevelure 2, afin que nul dans le château même ne puisse savoir qui il est. Les

1. Hora ferme undecima ad mansionem noctis perveni in tenebris. (Ibid.)

2. Exutus vestibus meis et equestribus inductus, comam et barbam nutriens... (L. Epp. II, p.

7.)

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gens de la Wartbourg ne doivent connaître le prisonnier que sous le nom du chevalier Georges. Luther, sous le vêtement qu'on lui impose, a peine à se reconnaître lui-même '. Enfin on le laisse seul, et son esprit peut se porter tour à tour sur les choses étonnantes qui viennent de se passer à Worms, sur l'avenir incertain qui l'attend, et sur le lieu de son nouveau et étrange séjour. Des étroites fenêtres de son donjon, il découvre les sombres, solitaires et immenses forêts qui l'environnent. << C'est là, » dit le biographe et l'ami de Luther, Mathesius, « que le docteur demeura, <«< comme saint Paul dans sa prison de Rome. »

Frédéric de Thun, Philippe Feilitsch et Spalatin n'avaient pas caché à Luther, dans un entretien intime qu'ils avaient eu à Worms avec lui, d'après les ordres de l'Électeur, que sa liberté devait être sacrifiée à la colère de Charles et du pape2. Cependant cet enlèvement fut entouré de tant de mystère, que Frédéric lui-même ignora longtemps encore le lieu où Luther était renfermé. Le deuil des amis de la Réformation se prolongea. Le printemps s'écoula, un été, un automne, un hiver lui succédèrent, le soleil accomplit sa course annuelle, et les murs de la Wartbourg renfermaient encore leur prisonnier. La vérité a été frappée d'interdit par la Diète; son défenseur, renfermé dans les murs d'un château fort, a disparu de la scène du monde, sans que personne sache ce qu'il est devenu; Aléandre

1. Cum ipse me jam dudum non noverim. ( Ibid. )
2. Seckend., p. 365.

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triomphe; la Réformation semble perdue... mais Dieu règne, et le coup qui paraissait devoir anéantir la cause de l'Évangile, ne servira qu'à sauver son courageux ministre et à étendre au loin la lumière de la foi.

Laissons Luther captif en Allemagne, sur les hauteurs de la Wartbourg, et voyons ce que Dieu faisait alors dans d'autres pays de la chrétienté.

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MOUVEMENT.

LIVRE VIII.

LES SUISSES.

1484-1522.

m

Au moment où parut le décret de la Diète de Worms, un mouvement toujours croissant commençait à ébranler les tranquilles vallées de la Suisse. Aux voix qui se faisaient entendre dans les plaines de la haute et de la basse Saxe répondaient, du sein des montagnes helvétiques, les voix énergiques de ses prêtres, de ses pâtres ou des bourgeois de ses belliqueuses cités. Les partisans de Rome, saisis d'épouvante, s'écriaient qu'une vaste et terrible conjuration se formait partout dans l'Église contre l'Église. Les amis de l'Évangile, remplis de joie, disaient que, comme au printemps le souffle de la vie se fait sentir, des rives de la mer jusqu'au sommet des monts, ainsi l'Esprit de Dieu fondait maintenant dans toute la chrétienté les glaces d'un long hiver, et recouvrait de verdure et de fleurs depuis les plus basses plaines jusqu'aux rochers les plus arides et les plus escarpés.

Ce ne fut pas l'Allemagne qui communiqua la lumière de la vérité à la Suisse, la Suisse à la

SOURCE DE LA RÉFORMATION.

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la

France, la France à l'Angleterre : tous ces pays reçurent de Dieu, de même que ce n'est pas une partie du monde qui transmet la lumière à l'autre, mais que le même globe éclatant la communique immédiatement à la terre. Infiniment élevé au-dessus des hommes, Christ, « l'Orient d'en haut, » fut à l'époque de la Réformation, comme à celle de l'établissement du Christianisme, le feu divin d'où émana la vie du monde. Une seule et même doctrine s'établit tout à coup au XVIe siècle, dans les foyers et dans les temples des peuples les plus lointains et les plus divers; c'est que le même Esprit fut partout, produisant partout la même foi.

La Réformation de l'Allemagne et celle de la Suisse démontrent cette vérité. Zwingle ne communiqua pas avec Luther. Il y eut sans doute un lien entre ces deux hommes; mais il faut le chercher au-dessus de la terre. Celui qui du ciel donna la vérité à Luther, la donna à Zwingle. Ils communiquèrent par Dieu. « J'ai commencé à prêcher l'Évangile, dit Zwingle, l'an de grâce 1516, c'est« à-dire en un temps où le nom de Luther n'avait << encore jamais été prononcé dans nos contrées. « Ce n'est pas de Luther que j'ai appris la doctrine << de Christ, c'est de la parole de Dieu. Si Luther << prêche Christ, il fait ce que je fais, voilà tout1. » Mais si les diverses réformations tinrent du même

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1516, eo scilicet tempore, quum Lutheri nomen in nostris regionibus inauditum adhuc erat... doctrinam Christi non a Luthero, sed ex verbo Dei didici. (Zwinglii Opera, curant. Schulero et Schulthesio, Turici, 1829, vol. I, p. 273, 276.)

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