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la trouver en soi tombe aussitôt, comme nous l'avons vu, ou dans un scepticisme désespérant, o# dans les pitoyables rêveries d'une science idiote, qui détruit l'entendement afin de le connoître, et cherche dans la mort la raison de la vie. Plongé dans une vaste ignorance, dont il ne sort que par la foi, l'homme a des sensations, des pensées; et , tandis qu'il se renferme en lui-même, il n'est certain ni de ses sensations, ni de ses pensées; l'homme existe, et il n'est pas certain de son être1 : c'est qu'il n'en est pas lui-même la cause, et que chercher la certitude de notre existence, c'est en chercher la raison, qui n'est pas en nous. De l'idée d'un être contingent, on ne déduira jamais son existence actuelle; et tous les êtres finis ensemble ne pourroient, séparés de la première cause, acquérir la certitude rationnelle de leur existence, parce que la vérité est l'être, et que dès lors il n'existe de vérité nécessaire que dans l'être nécessaire. Otez Dieu de l'univers, et l'univers n'est plus qu'une grande illusion, un songe immense, et comme une vague manifestation d'un doute infmi.

Mais Dieu connu, tout change, et l'univers, expliqué par sa volonté et sa toute-puissance, s'attache, pour ainsi dire, à sa cause, et s'affermit sur cette base inébranlable. On aperçoit clairement la raison première de tous les effets et de toutes les existences; et les intelligences créées, remontant à leur source, se rencontrent et

tint lux, et vocarentur dies participatione incommutabilis lucis et diei, quod est Verbum Dei, per quod et ipsi et otnnia facla sunt. Lumen quippe veruiri, quod illuminat omnem hominem in hune mundum venientem, hoc illuminât et omnem angelum mundum, ut sit lux non in seipso, sed in Deo. De civit. Dei, lib. XI, cap. ix,"tom. VTI, cod. 279.

1 Voyez la Défense sur l'Indifférence en matière de religion, chapitres III à IX.

se rcconnoissent dans l'intelligence éternelle d'où elles sont toutes émanées.

C'est là, c'est dans le principe même de la vérité et de la vie, que l'homme découvre la raison de la loi générale de l'autorité, fondement de la vie intellectuelle, et l'unique moyen par lequel elle puisse et commencer et se transmettre.

La vie, c'est la vérité, c'est Dieu; et il n'est pas plus possible de concevoir une intelligence sans vérité qu'une intelligence non pensante, puisqu'on ne pense qu'à ce qui est, ou à ce qui peut être. Pour les créatures intelligentes, vivre, c'est donc participer à l'être de Dieu ou à sa vérité * ; et elles reçoivent ensemble la vérité et l'être, puisque l'être et la vérité ne sùnt qu'une même chose; et si elles pouvoient se donner la vérité, elles se donneroient l'être **. Purement passives lorsque la parole les fé

'Les anciens mêmes le reconnoissoient : lntellectus divinus dat esse animx per intelligere suum essentiale. Ergoesse animx est quoddam intelligere, scilicet Deum, undê dependet. ESSE nostrum, est Deum cognoscere, quia prsecipuum esse animx, est intellectus suus, in quo idem est esse, quod intelligere dicina actu perpetuo. Jamblicb. in Mystcr. cap. I. « Les sens, dit Bossuet, n'apportent pas à l'âme la con« noissance de la vérité, ils l'excitent, ils la réveillent, ils l'avertissent « de certains effets : elle est sollicitée à chercher les causes, mais elle « ne les découvre, elle n'en voit les liaisons, ni les principes qui font « tout mouvoir, que dans une lumière supérieure qui vient de Dieu, « ou qui est Dieu mome. Dieu.donc est la vérité, d'elle-même toujours « présente à tous les esprits, et la vraie source de l'intelligence. C'est a de ce côté qu'elle voit le jour, c'est par là qu'elle respire et qu'elle « vit. » Traité de la connoissance de Dieu et de soi-même, ch. v, n. iiv, page 419.

"Cela est si évident que Voltaire lui-même en convient. « J'ac« quiers, dit-il, une connoissance, mais je n'ai pu me la donner. Mon « intelligence n'a pu en être la cause, car il fuut que la cause contienne « l'effet. Or, ma première connoissance acquise n'étoit pas dans mon « intelligence, n'étoit pas dans moi; puisqu'elle a été la première, elle coude au sein du néant, lorsqu'elle verse en elles leurs premières pensées ou les vérités premières, elles ne peuvent ni les inventer, ni les juger, ni refuser de les recevoir, parce que la vie, à son origine, est indépendante de la volonté, et qu'il ne sauroit même y avoir de- volonté là où il n'y a pas encore de vie.

Il existe donc nécessairement, pour toutes les intelligences, un ordre de vérités ou de connoissances primitivement révélées, c'est-à-dire reçues originairement de Dieu comme les conditions de la vie. ou plutôt comme la vie même *; et ces vérités de foi sont le fond immuable de tous les esprits, le lien de leur société, et la raison de leur existence.

Si nous pouvions changer nos idées essentielles, les perdre entièrement, nous en former d'autres, nous changerions notre nature. Aussi l'homme, qui a le pouvoir de rapprocher, de combiner les idées ou les vérités qu'il a reçues, et d'en découvrir les rapports, est dans une telle impuissance d'inventer une vérité nouvelle, que le genre humain lui-même, depuis son origine, n'en inventa jamais aucune. Elles sont les mêmes chez tous les peuples, et ne varient que par le degré de leur développement. Les uns voient plus, les autres moins, mais tous voient, tous sans exception, et ne voient que ce qui est partout, que ce qui a été et sera vu perpétuellement par tous les hommes. Dissiper l'ignorance, ce n'est pas créer la lu

■ m'a été donnée par celui qui m'a formé, et qui donne tout, quel « qu'il puisse être. » Action de Dieu sur l'homme. QEuvresde Voltaire. tom. XL, p. 389. Edit. de Kehl. '1 ' i

"Nous devons, dit Platon, chercher en tout la cause divine, afin de nous assurer une vie heureuse, autant que notre nature le permet. Kxi iAÏv QsTov (atViov] ev axafft Çï;tîïv /.tïîffîw; Svîxk îuô'atytvo; jSt'ou, xxh' offov ijuSiv ij yùfftî Sï5z^îtzi. Plat. Timx. Oper., tom. IX; p. 385. Edit. Bipont.

mière, mais abaisser le voile qui la cachoit en partie. Que le soleil brille dans un ciel serein, ou que des nuages le couvrent, c'est toujours lui qui nous éclaire; aucune région n'est privée de son heureuse influence; jamais il n'est totalement obscurci. Les ténèbres ne sont que dans l'œil malade, ou qui se ferme volontairement. Dieu a bien fait toutes choses 1, et le mal, comme l'erreur, ne vient que de la volonté corrompue de la créature, de sa rébellion contre les lois par lesquelles seules elle existe.

De même que la vérité est la vie, l'autorité, ou la raison générale manifestée par le témoignage ou par la parole, est le moyen nécessaire pour parvenir à la connoissance de la vérité, ou à la vie de l'intelligence *;

1 Marc- vin, 37.

* Les pères ries premiers siècles insistent beaucoup sur ce point, en combattant les philosophes ennemis du christianisme. Ils font voir,* avec une grande force, l'impuissance de la raison abandonnée à ellemême, et la nécessité d'une révélation qui est le fondement de nos connoissances, et sans laquelle nous n'aurions pas même l'idée de Dieu. Qu'on écoute Origène: « Nous le disons donc; oui, la nature humaine « ne peut, livrée à elle seule, ni chercher Dieu comme il faut, ni le « trouver. Il faut qu'elle soit aidée dans ses recherches par celui même « qui en est l'objet... Comme vous, philosophes, nous reconnoissons « que l'essence de Dieu est ineffable. Comme vous, nous savons qu'il « est difficile aux foibles regards de l'homme de découvrir le Créateur « de ce monde qui nous environne. Mais si nous ne disons pas avec « vous, que l'on peut former dans son esprit l'idée de Dieu, des idées n de tous les autres objets qui sont la matière de nos connoissances, et « s'approcher en quelque sorte du souverain bien, naus adorons le « Verbe de Dieu, qui a dit : Personne ne peut connoître le Père, si ce <i n'est le Fils, et celui à qui le Fils aura voulu le révéler. ( Matt., xi, K 27t}iAînsï Dieu, selon nous, ne peut être connu sans un bienfait spé« cial de Dieu. Sans ce secours surnaturel, nous le disons, et nous le « disons sans restriction, la connoissance de Dieu surpasse infiniment « les forces de notre nature; cl non-seulement nous ne pouvons arriver « à cette connoissance parfaite que nous en donne le Verbe, mais nous « ne pouvons pas même trouver dans nos idées rien qui puisse nous en

et riwmme ne- vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu 1; donc de sa vérité, qu'il lui communique en se rendant réellement présent à son esprit, et le nourrissant de sa substance: don prodigieux, véritable sacrifice d'amour, accompli aussi par la parole, et dans lequel nous découvrons l'origine , la base, l'indispensable condition de toute société; et Dieu en effet n'a pu parler à l'homme sans entrer en société avec lui, sans lui révéler son être, car le langage même n'est que l'expression générale de l'Être, ou de l'Être universel; et l'on ne sauroit parler sans nommer Dieu, puisqu'on ne sauroit parler sans prononcer ou sans concevoir le mot est ; et ce mot merveilleux, le Verbe raison du langage comme le Verbe substantiel est la raison de l'Être infmi, est dans le discours ce que Dieu même est dans l'univers, le fonds dont tout émane*, le lien qui unit tout, la lumière, la vie, et l'expression propre de la certitude, puisqu'il n'y a même pas d'autre affirmation.

Ainsi l'homme n'a pu exister comme être intelligent, n a pu parler sans connoitre Dieu, et ne l'a pu connoitre que par la parole. Dpnc il est impossible que la parole soit une invention de l'homme **. Et si l'on en veut une

« donner la moindre nolion. » Origen. contr. Cels., lib. VI, n. 42 et scqq. Traduct. de l'abbé de Gourcy.

1 Non in solo pane vivit homo, sed in omni verbo quod procedit de ore Dei. Matt., iv, 4.

'Les païens mêmes l'ont remarqué. « Tant que le Verbe ne paroît « pas dans la phrase, l'homme ne parle pas : il bruit. » Plutarque, Questions platoniques, ch. ix, trad. d'Amyot.

"C'est le sentiment de Platon, et il est aisé de voir qu'il l'avoit puisé dans les traditions anciennes, dont généralement il s'écartoit moins que les autres philosophes grecs. « La puissance qui a imposé les

« premiers noius, dit-il, est au-dessus de la puissance humaine Les

H Dieux ont imposé les premiers noms, et c'est ce qui fait qu'ils sont

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