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vérité " ? A quel caractère les reconnoît-on?N'est-ce pas précisément à cet amour immense, universel, qui, chaque jour, sous nos yeux, inspire tant de nobles dévouements et produit tant de merveilles ? Amour de Dieu, amour du Roi, amour plus inflexible que l'enfer et plus fort que la mort*; amour du prochain toujours prêt à se répandre en bienfaits, en services, en consolations; amour des ennemis même, qui consiste, non dans l'oubli des torts, car l'oubli n'est pas une vertu *, mais dans une disposition constante à les pardonner ; amour de l'ordre, et dès lors aversion de la licence et amour de la liberté, qui n'est qu'une pleine conformité à l'ordre ; amour des lois qui maintiennent cet ordre ; amour des magistrats qui font régner les lois, en un mot, amour dans l'État, dans la famille; amour de tous les hommes, civilisés ou sauvages, jusqu'à mourir pour les sauver ; amour sans réserve et sans bornes, parce que la perfection où l'homme social est appelé n'en a point. Les doctrines philosophiques, toutes négatives, ou, ce qui est la même chose, toutes destructives, ont pour principe général la souveraineté de l'homme. L'homme qui se déclare souverain se constitue, par cela seul, en révolte contre Dieu et contre tout pouvoir établi de Dieu. Or, qui se révolte hait; la haine

* Jean, Iv, 25. * Fortis est ut mors dilectio, dura sicut infernus aemulatio, Cant. vIII, 6. * Among our crimes oblivion may be set. . L'oubli peut être compté parmi nos crimes.

Sur le couronnement de Charles ll. par Dryden.

est donc le sentiment général qu'enfantent les doctrines philosophiques.

Et qui pourrait en douter après notre révolution! Que s'est-il passé depuis trente ans: qu'apercevonsnous encore? Ces passions qui se remuent, ces soulèvements, ces forfaits inouïs, n'est-ce pas la haine dans ce qu'elle a de plus violent et de plus atroce? Haine de Dieu : on voudroit abolir, non-seulement sa Religion, son culte, mais jusqu'à son nom : haine des prêtres, qu'on calomnie, qu'on insulte, qu'on opprime dans l'exercice de leurs fonctions, et que déjà certains hommes proscrivent en espérance; haine des rois, des nobles, des institutions établies; haine de toute autorité, haine de l'ordre, et dès lors amour de la licence, et haine de la liberté qui n'existe que sous le règne des devoirs, lorsque tous les droits, et principalement ceux du souverain Être, sont reconnus et respectés; haine des lois qui conservent la paix en réprimant les passions, haine des magistrats qui défendent ces lois; haine dans l'Etat, dans la famille'; haine universelle qui se manifeste par la rébellion, par le meurtre et par un désir ardent de destruction.

Quelle étoit la doctrine du monstre qui vient de ravir à la France un fils, sa dernière espérance peul

* Les crimes domestiques, les parricides, l'assassinat des femmes par leurs maris, des maris par leurs femmes, les empoisonnements, sont devenus presque aussi communs que le simple vol l'étoit autrefois. El le suicide, ce crime de Y homme seul, cet horrible et dernier effort d'an être qui, après s'être séparé de ses semblables, voudroit se séparer de lui-même, combien ne s'esl-il pus multiplié depuis trente ans?

être ? Cet homme dont le crime étoit toute l'âme, cet homme qui vouloit aller dormir, après avoir versé le · sang innocent, étoit athée". Des sentiments que produisent les deux doctrines · opposées, résultent deux genres de sacrifices : le sacrifice de soi aux autres, ou le sacrifice d'amour ; le sacrifice des autres à soi, ou le sacrifice de haine. Mais la haine a divers degrés; moins terrible là où subsiste la notion de la Divinité,elle est contenue dans certaines bornes, parce qu'on reconnoît certains devoirs.Ainsi, dans les Religions païennes on sacrifioit l'homme individuelà la société; dans la Religion philosophique, on sacrifie la société entière à l'individu. Le sacrifice volontaire de chaque homme à tous les hommes, qui constitue l'ordre parfait, ne se trouve que dans la Religion chrétienne ; et ce sacrifice est celui de tout l'homme : sacrifice de ses opinions ou de ses pensées particulières, sacrifice de ses penchants ou de ses intérêts particuliers, sacrifice de sa vie même, quand le bien général l'exige. Voilà l'unique · fondement d'une société durable, et la société, en Europe, ne renaitra que par la Religion. Aussi le mouvement qui entraîne vers elle est-il bien sensible en tous ceux que des principes de vertu et de nobles

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* Dieu n'est qu'un mot; il n'est jamais venu sur la terre. Cette pal'ole est bien propre, sous plus d'un rapport, à faire naître de profondes réflexions. Dans l'esprit de ce misérable, l'existence de Dieu se lioit à sa venue sur la terre. Il n'étoit pas venu, selon lui, donc il n'existoit pas. Tant il est vrai qu'il faut aux peuples un Dieu réellement présent, un Dieu qui se soit manifesté d'une manière sensible, qui ait vécu parmi les hommes et conversé avec eux. Il n'y a point de déisme pour les nations.

sentiments attachent encore à l'ordre social. Ce mouvement croîtra de telle sorte, que partout il se formera comme deux peuples dans le même peuple, l'un s'enfonçant de plus en plus dans le mal, l'autre s'élevantdanslc bien de plus en plus ; et si les gouvernements persistent à chercher le salut dans les concessions faites à ce qu'on appelle les lumières du siècle, c'est-à-dire aux opinionsetaux passions individuelles; s'ils refusent de s'allier sincèrement à la Religion. de la fondre dans- toutes les institutions de l'Etat, le . monde politique tombera dans une effroyable confusion, et il n'existera plus d'autre société quel'Église, parce qu'il n'existera plus d'autorité et d'obéissance, de vérité, d'amour et d'esprit de sacrifice qu'en elle.

Et, qu'on ne s'y trompe pas, la Religion qui seule peut nous sauver n'est pas cette vague Religion chrétienne que nous vantent quelques rêveurs, mais la Iteligion catholique, hors de laquelle le Christianisme n'est qu'un nom. De quoi s'agit-il? de reconstituer la société politique à l'aide de la société religieuse qui consiste dans l'union des esprits par l'obéissance au même pouvoir. « Les sociétés protestantes, qui ne « reconnoissent point de pouvoir spirituel, d'autorité « vivante ayant droit de commander la foi, de porter « des lois obligatoires, mais qui laissent chacun juge « de ce qu'il doit croire et de ce qu'il doit faire, ne << sont donc pas une société. Elles constituent l'esprit « dans une indépendance absolue; et l'Ecriture, « livrée à l'interprétation de la raison particulière, « variable en chaque homme, ne lie pas plus que la « raison elle-même. (l'est en Religion l'état de nature, «c'est-à-dire l'absence de tout gouvernement, de « toute loi, de tout tribunal, de toute police, et, par « conséquent, la destruction de toute société.

« L'Eglise grecque, si l'on peut donner ce nom « commun à une multitude d'Églises indépendantes, « l'Eglise grecque admet un pouvoir, mais un pou« voir particulier, et même elle confond, surtout en « Russie1, le pouvoir politique et le pouvoir spirituel. « Elle n'est donc, sous le premier rapport, qu'une « société particulière et imparfaite; et, sous le se« cond, elle n'est pas même une société spirituelle: « ce qui est si vrai que la Religion des Russes ne « pourroit devenir celle d'un autre peuple que dans « le cas où ce peuple passerait sous la domination du « même souverain.

« Toutes les communions chrétiennes, grecques « et protestantes, portent donc en elles-mêmes un « principe de division, de désordre et de ruine. La « Religion catholique forme seule une société, puis. « qu'on ne trouve qu'en elle un véritable pouvoir, le « droit de commander, le devoir d'obéir^ société « une, parce que ce pouvoir est un; société géné« raie, parce que ce pouvoir, purement spirituel, « s'étend à tous les temps, à tous les lieux, partout « indépendant du pouvoir politique, indépendant lui« même dans les limites qui le circonscrivent, société « immuable, parce qu'elle n'est soumise ni aux vo« lontés, ni aux pensées de l'homme, et que, dans ses

1 Du Pape, totn. t, pag. 01. On trouve dans cet excellent ouvrage de M. le comte de Maistrc des détails extrêmement curieux sur l'Église russe.

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