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ham; et, formant d'eux un peuple à part, il se déclare leur législateur et leur roi.

Il ne faut pas juger de ces temps anciens par ceux qui précédèrent presque immédiatement la venue de JésusChrist, et beaucoup moins encore par les siècles qui l'ont suivie. Dans cette haute antiquité où les traditions étoient, pour ainsi parler, si vivantes, et inspiroient tant de respect , où l'on n'avoit pas encore réduit le sophisme en art où la philosophie n'étoit que la Religion, les peuples avoient peu à craindre les erreurs spéculatives : l'abus de la raison n'étoit pas alors la grande maladie du genre humain. On ne nioit point la vérité ; rarement la corruption du cœur passoit jusqu'à l'esprit; mais, esclaves des sens, les hommes s'emportoient, avec une sorte de fureur brutale, aux désordres les plus excessifs, et montroient, dans l'aveuglement de leurs passions, autant de hardiesse à violer la loi morale, que de penchant à s'abandonner à tous les faux cultes.

Proportionnant le remède au mal, Dieu promulgua de nouveau la loi qu'on méconnoissoit ; il l'unit intimement et par des liens indissolubles aux lois politiques et civiles qu'il imposa au peuple dont il s'établit le chef immédiat, l'unique souverain. Il prescrivit à ce peuple un culte digne rie sa sainteté: il lança ses anathèmes sur les adorateurs de la créature, il les menaça de ses vengeances : il les condamna même sur la terre au dernier supplice ; il voua des nations entières au glaive pour faire sentir à des hommes grossiers la grandeur des crimes qui avoient mérité une si effrayante punition. Afin de les retenir dans le devoir, il employa et la terreur du châtiment et l'espoir de la répompense ; et il voulut que ces récompenses, aussi durables que la fidélité à qui elles étoient promises, ces châtiments, aussi prompts que l'offense, fussent comme la sanction toujours présente de ses commandements, et servissent à le faire reconnoitre au loin pour ce Dieu de l'univers, seul éternel, seul juste, seul puissant, dont la tradition proclamoit en tous lieux l'existence, et que, presque en tous lieux, on oublioit d'honorer1.

L'objet de la seconde révélation ou de la loi mosaïque n'étoit donc pas de fonder une religion nouvelle -, mais de rappeler et d'affermir celle qui reposoit sur la première révélation, en constituant un peuple chargé spécialement de conserver dans toute leur pureté les traditions anciennes, un peuple modèle dont les croyances, la lo1 morale et le culte fussent une continuelle protestation contre l'idolâtrie et contre les désordres qui l'accompagnoient *.

Dans les desseins de Dieu, ce peuple avoit encore une autre destination. Les promesses lui étoient confiées : c'étoit

* Nunc igitur Dominus Deus noster, salvos nos fae de manu ejas, ut sciant omnia regna terraî, quia tu es Dominus Deus solus. (IV Beg. xix, 19.) — Nous voyons en effet les peuples avec qui les Juifs étoient en relation reconnoître leur Dieu pour le souverain maître du ciel et de la terre, comme l'observe l'abbé Le Batteux. a Quand Salomon monta « sur le trône, le roi de Tyr rendit grâce au Seigneur Dieu, de ce « qu'il avoit donné à David un successeur digne de lui. (III Jl?g., v, 7.) « Cyrus, dans ses édits, reconnoît que ses victoires sont un don du « Dieu du ciel. (I Esdr., i, 2.) Darius veut que les Juifs fassent pour « lui des vœux au Dieu du ciel. (I Esdr., vi, 10.) Artaxerxès parles « peu près de même dans Esdras. Assuérus reconnoît le même Dieu « dans le décret qu'il adresse aux cent vingt-sept provinces de son em« pire, depuis les Indes jusqu'en Éthiopie. {Elh., xvi, 16.) Quel eût « été le sens de ces décrets, si les nations eussent ignoré qu'il y avoit « un Dieu souverain et universel? » Histoire des causes premières, p. 141, 142.

* S. Iren. contr. Hsereses, lib. IV, cap. xv, pag. 245. Paris, 1710.— Tertullian., De cib. Jud., cap. n.— Euseb., Demonstr. Evang., lib. I, cap. îv et vi.—S. Hyeron., Comment- in Ezech., 20. — S. Chrysost., Comment- in Isa., cap. i. — Maimon., More Nev., part. III. cap. xxix.

de lui que devait naître le Désiré des nations1, annoncé toujours avec plus de clarté à mesure qu'approchoit l'époque de son avènement. Figure d'une loi plus parfaite, la loi de Moïse étoit pleine de ce grand Libérateur, montré aux hommes en espérance dès l'origine des siècles. Ainsi, par les prophéties qui se répandoient peu à peu dans les contrées les plus lointaines, par son histoire qui elle-même étoit toute prophétique2, par lescérèmonies figuratives de son culte, le peuple juif remplissoit la haute fonction de préparer le genre humain à reconnoître son Sauveur. Les preuves de sa mission, consignées d'âge en âge dans d'authentiques monuments, jetoient un éclat que rien ne pouvoit obscurcir. Lorsqu'il parut au milieu du monde, tout le passé lui rendoit hommage : renfermé jusque-là dans le sein du temps, on savoit avec certitude quand il en devoit sortir, et l'univers entier entendit sans surprise la voix qui publia son enfantement merveilleux5. Sa doctrine même, si simple à la fois et si élevée, ne frappa point d'abord les esprits comme une chose nouvelle ; on n'y vit qu'un développement de la Religion antique, et il put dire avec une vérité profonde ces paroles qu'il n'étoit donné qu'à lui de prononcer: Je ne suis pas venu détruire la loi, mais l'accomplir *.

Voilà ce qu'étaient les Juifs avant Jésus-Christ, un peuple miraculeux dans son établissement, dans le pouvoir qui le gouvernoit, dans les moyens qu'il employoit pour le gouverner, dans les événements de son histoire, dans

1 Et movebo omnes gentes : et veniet Desideratus cunctis gentibus. Agg., u, 8.

4 Hase autem omnia in figura contingebant illis. Ep. I ad Corinth., x,2.

5 C. Taciti histor., lib. V, n. 13. — Sueton. in Vespas.

* Nolite putare quoniam veni solvere legem, aut prophetas : non veni solvere, sed adimplere. Motlh., Y, 17.

sa grandeur et dans ses humiliations, ennn mot dans toute son existence. Témoin par lui-même et par ses ancêtres de trois révélations, il rejette la dernière, comme ses prophètes l'avoient prédit1, et néanmoins il conserve les titres qui en sont le fondement avec une incorruptible fidélité. Sa Religion sans doute ètoit vraie et visiblement divine; mais ce n'étoit point au fond une Religion différente de celle que Dieu avoit originairement donnée à tous les hommes. Sous-ce rapport les Juifs n'avoient deplus que de simples rites destinés à conserver la pureté du culte, et qui n'obligeoient qu'eux seuls.

Depuis Jésus-Christ, les Juifs ne forment plus un corps de nation: ils n'ont ni territoire, ni autorité publique, ni lois politiques et civiles en vigueur, ni tribunaux. Pour la Religion, leur foi est la même; ce que croyoient leurs pères, ils le croient encore ; mais il y a dix-huit siècles que leur culte est aboli. Temple, autel, sacrifices, tout a cessé, tout est détruit ; et ces grandes ruines ne peuvent jamais être relevées ; la confusion des tribus a mis sur elle le sceau de l'éternité. Où sont aujourd'hui les enfants de Lévi, seuls légitimes pontifes, seuls investis du droit de toucher l'encensoir, d'accomplir en mille circonstances les expiations légales, d'offrir à Dieu le sang des victimes, et de pénétrer dans le saint des saints? Les mams qui présentoient les dons sacrés, ne sauraient être désormais distinguées des mains profanes : la voix qui transmettoit à Jehovah les prières du peuple est muette pour toujours. Et Juda, qu'est-il dévenu? où est-il? Comment le Messie, dont la descendance doit être certaine, se feroit-il reconnoître pour son fds? Aveugles qui l'attendez, il revien

4 Iso., vi, 9 et seq. — Et post hebdomades sexaginta duas occidetur Christus : et non erit ejus populus) qni cmn negaturus est. Daniel, -H, 80,

droit qu'il vous seroit impossible de vous assurer que c'est lui.

Privés du culte prescrit par la loi de Moïse, les Juifs sont donc maintenant, pour ce qui concerne la Religion, dans l'état où le genre humain se trouvoit avant Jésus-Christ. Leur crime est de le rejeter, de refuser de croire à sa doctrine et d'obéir à ses lois, de persister dans leur rébellion contre la suprême autorité qui les proclame. A cet égard, ils ressemblent.singulièrement anx déistes avec lesquels ils £nt encore un autre trait de conformité, le défaut de sacrifice ; et sous ce rapport ils se séparent de tous les anciens peuples.

Pendant qu'ils subsistèrent en corps de nation, leurs croyances et leur culte, à l'exception de certains rits particuliers, reposoient sur les traditions universelles, sur l'autorité du genre humain attestant la révélation primitive, confirmée par une seconde révélation, quileur imposa de plus une loi nationale, devenue aussi pour eux une tradition nationale, et perpétuellement promulguée par une autorité vivante.

Si donc l'on considère ce que le peuple juif avoit de commun avec tous les autres peuples, on reconnoît aussitôt l'antique Religion du genre humain*, la vraie Religiqn, brillante des caractères qui lui appartiennent exclusivement, l'unité, l'universalité, la perpétuité, la sainteté. ,

Si l'on considère ce que le même peuple avoit de propre et de distinctif, on trouve une loi divine sans doute et par conséquent sainte, surtout si l'on se souvient qu'elle étoit figurative1 ; mais cette loi, différente de la loi générale donnée au premier homme et à ses descendants, manquoit dès lors du caractère d'unité essentiel à la Religion;

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