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« de cacher aux peuples qui les servoient les préceptes de « la morale, n'étoit-il pas convenable qu'ils les en instrui« sissent par un enseignement public? Ne devoient-ils <t pas, par la voix de leurs prêtres, réprimander le vice, « le menacer du châtiment, et promettre à la vertu des « récompenses ? Mais qui jamais entendit rien de sembla« ble dans les temples des dieux1 ? »

Dénué de morale, dénué de dogmes, n'imposant aucuns devoirs ni au cœur ni à l'esprit, le paganisme, nous le répétons, n'étoit donc qu'un culte superstitieux. « Je n'y « vois, dit Lactance, que de simples rites*. » Onpouvoit être idolâtre sans nier aucune vérité; ni l'existence du Dieu suprême, comme le prouve l'exemple des Juifs ; ni sa providence, puisqu'elle s'exerce par le ministère des anges *, et que tous les cultes idolâtïiques étoient fondés

1 Primo ipsos mores ne pessimos haberent, quarè dii eorum curare

noluerunt ?Cultores suos ad benè vivendum quarè nullis legibus

adjuverunt...? Pertinebat ad consultores deos vila3 bons e prascepta non occultare populis cultoribus suis, sed clarâ prsedicatione praebere : per vates etiam convenire et arguere peccantes; palàm minari pœnas malc

agentibus, prsemia rectè viventibus polliceri Quid unqu'im taie in

deorum illorum te m plis promplà et eminenti voce concrepuit? S. Aug. Decivit. Dei, lib. II, ch. iv; Ibid., ch. vi. Vid. et. Grog. Nazian. Oral. 111, advers. Julian, t. I, p. 107. Ed. Billii. — Il en étoit ainsi chez tous les peuples, et sous ce rapport l'histoire parle des Tartares, comme saint Augustin parloit des Romains. « Leur culte religieux, qui ne leur en« seignoit point la morale, n'avoit point poli leurs mœurs grossières, « ni adouci leur caractère âpre et sauvage comme leur climat. » Michaud, Hist. des croisades, IV* part., liv. XIII, t. IV, p. 4.

2 Quaj est enim superslitio illorum deorum...? in quâ nihil aliud video quàm ritum ad solos digitos pertinentem? Lactant. Divin- institut-, lib. V, c. xx.

* Cette doctrine est clairement enseignée dans Platon. « Première« ment, dit-il, vous m'accorderez que les dieux reconnoissent l'homme « juste et l'homme injuste, et que dès lors ils aiment celui-là et haïs« sent celui-ci, comme nous en sommes convenus précédemment. Or principalement sur cette croyance vraie dont on abusoit; ni enfin les préceptes de justice, puisqu'ils ne se sont jamais perdus chez aucune nation. En servant des dieux étrangers, on outrageoit le Dieu véritable, on transgressoit le plus saint et le premier de ses commandements, on mettoit en oubli le Créateur pour transporter à sa créature l'adoration due à lui seul, on violoit l'alliance qu'il avoit daigné contracter avec les hommes ; et l'idolâtrie, fruit des passions ', étoit un crime comme l'adultère, auquel l'Écriture la compare souventa, et, selon la parole de l'apôtre saint Paul, une des œuvres de la chair qui excluent du royaume de Dieu *,

De ces considérations et des faits sur lesquels elles s'appuient, nous pourrions conclure déjà que l'idolâtrie n'avoit aucune autorité réelle. Cependant, pour prévenir jus

« n'avouerons-nous pas aussi que les dieux comblent de biens celui « qu'ils aiment, à moins qu'une faute antérieure n'attire sur lui quel« que mal nécessaire? Ainsi l'on doit penser que, si l'homme juste est « assujetti à la pauvreté, aux maladies ou autres choses semblables t< qui nous paroissent des maux, il en résultera un bien pour lui, soit « de son vivant, soit après sa mort; car les dieux ne négligent jamais « celui qui a la volonté sincère de devenir juste, et qui, par la pratique « de la vertu, s'efforce, autant qu'il est possible à l'homme, de se ren« dre semblable à Dieu. » Up&ro» ftiv Toûto à-KoStiaere... y&p Sri Otto ye ôeûv Tzots à/tsistffOat S; av ^oôu/Aetrat kQèX7i SixXioi yiyvtffôat<,xal inrirriSiuoiv otperriv, ets ôVov Suvxtov ètvBprfnzoi o/Aoïtuffôat 6sw. Plat., De legib., lib. I, t. VII. Oper., p. 519 et 320. Ed. Bipont.

1 Qui... coluerunt et servierunt creaturaî ppliùs quàm creatori

Proptereà tradidit illos-Deus in passiones ignominise. Ep. ad Roman., 1.25 et 26.

2 Jerem , xm, 27. — Ezech., xxm, 45. — Ose, H, 2, et alib.

3 Manifesta sunt autem opera carnis, quae sunt, fornicatio, immunditia, impudicjtia, luxuria, idolorum servilus, veneficia, inimicitiae, contentiones, semulationes, ira, rixse, dissentiones, sectse, invidise, homicidia, ebrietates, comessationes, et bis similia: quse prsedico vobis sicut praedixi, quoniam qui talia agunt regnum Dei non consequentur. Ep. ad Galat.,v. 19-21.

1 qu'au plus léger doute à cet égard, nous allons montrer qu'elle manquoit visiblement d'unité, d'universalité, de perpétuité, de sainteté, c'est-à-dire, de tous les caractères essentiels de la religion véritable, et dont la réunion forme le plus haut degré d'autorité qu'il soit possible de concevoir.

Et d'abord pour bien comprendre jusqu'à quel point l'idolâtrie étoit dépourvue d'unité, il faut se souvenir que chaque peuple, chaque pays1, chaque cité*, chaque famille, et souvent chaque homme avoit ses dieux particuliers 5; comme encore aujourd'hui chaque nègre a son fétiche, qu'il choisit et qu'il honore selon le pur caprice de son imagination. En Egypte on tuoit sans scrupule, dans une ville, l'animal qu'on adoroit dans une autre ville. Varron comptoit trois cents Jupiters*, et il y en avoit probablement un plus grand nombre, car on donnoitee nom à tous les hommes qu'on élevoit au rang des dieux, pour avoir ou fondé des États, ou contribué d'une manière éclatante à leur prospérité. L'âge d'or seul fournit au ciel

1 Les dieux protecteurs de chaque pays étoient les dieux indigètes dont les anciens parlent si souvent. Terre de la patrie, dieux indigètes, et vous, ô toits paternels, recevez-moi sous d'heureux auspices! dit Oreste, dans Sophocle.

'ii îzxrpûx yn, Qiol T v/-/ôipioi,

bJL\Ot?fo 5UrU/0UvrC< rGtîS CE ÔOOtf,

Sut' ot narpôiov 5£ijua. 1

Electr., v. 66-68. Sophocl., t. II, p. 139. Edit. Rrunck.

a Constat omnes urbes in alicujus dei esse tutelà Macrob. Suturn., iib. III, cap. ix, p. 323. — S. Athanas., t. I, p. 22. Ed. Benedict.

3 Vid. Varro apud S.August., De civit. Dei, lib. VIII, cap. xxvi.— Unicuique etiam provinciaî et civitati suus Deus est, ut Syriae Astartes, ut Arabis e Disares, etc. Tertul. Apolog., cap. xxiv.

* Apud Tertul. Apologit.. c. xiv. Suivant Pausanias, ce fut Cécrops qui le premier appela Jupiter le Dieu suprême. '0 jùv yàp Ata rs <ùvd/ian» Onarov Tvpûtos. Paus., lib. VIII, p. 456. Edit. Hanov., 1613.

trente mille dieux, suivant Hésiodel. Ces dieux, inconnus' au reste de la terre, et oubliés en Grèce même où l'on ne voit pas qu'on leur rendît de culte, n'existoient que dans les chants d'un de ses poètes.

Le peuple des dieux, pour employer l'expression do Pline4,n'étoit pas moins nombreux à Rome. « Notre pays, « dit un autre auteur, est tellement plein de divinités « qu'on y trouveroit plus aisément un dieu qu'un homme3. » Que seroit-ce donc si, parcourant le monde entier, nous rappelions, même sommairement, les divinités de tant de nations différentes ? L'Américain sauvage â ses dieux propres, comme l'Indien policé, et comme l'habitant de la Chine. Nulle ressemblance, nul rapport entre ces dieux divers. L'allégorie même, qui explique tout, en dénaturant tout, ne montrera jamais la moindre conformité réelle entre l'Osiris des Égyptiens, l'Adrammelech des' Assyriens, le Dyonisios des Grecs, l'Irminsul des Saxons, et leXacades Thibétains.

Ce n'est pas tout : non-seulement les dieux d'un peuple n'étoient pas ceux d'un autre peuple, mais le même peuple changeoit de dieux avec le temps, comme il arriva aux

1 Ce passage d'Hésiode mérite d'être cité : « Les. dieux immortels « de Jupiter, gardiens des hommes mortels, sont au nombre de trois « myriades sur la terre féconde : répandus dans l'air et sans cesse para courant tous les lieux, ils observent les œuvres justes et injustes. i>

Tpli yàp pupioi 5isiv Ettt %Qovi izouXuQorsCpvi
'A^âvaroi Zvjvôs, q?û>axsç Qvvitûv àvBpùTzuv
Opà. qû/Xff>70Ufftv rî 5txa5 xai a^É-rict zpyx,
Wlpz iffffstjusvoi, 7ràvrrç yoirwvrss lit aTav.

Oper. et dier., lib. I.

2 Major cœlilum populus etiam quàm hominum intelligi potest. Plin., lib. II, cap. vu.

3 Utiquè nostra regio tàm prausentibus plena est num'mibus, ul faciliùs possis deum quàm hominem invenire. Tetron. Satyr.

Romains, qui, à la théologie des Étrusques, substituèrent peu à peu celle des Grecs. L'histoire de chaque dieu et l'idée qu'on s'en formoit changeoient également.. Cette histoire, fondée sur une tradition locale qui, attestant l'origine humaine du dieu, ou le représentant comme un esprit céleste, mais subordonné, ne permettoit pas qu'on le confondit avec la Divinité suprême, étoit successivement modifiée par les poètes, et l'on attachoit si peu de croyance à tous ces récits, qu'on leur donna même le nom de fables ou de mythologie1, et que Cicéron ne craint point de s'en moquer ouvertement, et de les appeler des superstitions de vieille femme*. Platon3, Plutarque *, Denys d'Halicamasse 8, Pline °, Sénèque7, avouent qu'elles sont non-seulement absurdes, mais dangereuses.

De même que chaque nation avoit ses divinités propres, elle avoit son culte particulier, qui lui-même varioit sans cesse. On abandonnoit les anciens rites, on en créoit de

1 MuOoioyt'a, histoire fabuleuse.

s Videtisne igitur, ut à physicis rebus, benè atque utiliter inventis, tracta ratio sit art eommentitios et fictos deos? Quai res genuit falsas opinioncs, erroresque lurbulentos, et superstitiones penè aniles. De nat. Deor., lib. II, cap. xxvii. Cicéron semble avoir emprunté cette dernière expression d'Ératosthènes le Cyrénéen, qui vivoit deux siècles avant Jésus-Christ. Il jouissoit d'une grande réputation parmi les* anciens, qui l'avoient surnommé le second Platon; nevralî/o;, ou le vainqueur aux cinq exercices. Ératosthènes accusoit Homère, Hésiode, et les autres poetes de corrompre les croyances religieuses du peuple, et il appeloit leurs ouvrages des contes de vieilles, ypatiS-n fiuBoioylav. On peut voir les fragments qui nous restent de cet auteur dans VUranologia du P. Petau. Ils ont été réimprimés à Oxford en 1672; et à Amsterdam en 1703.

5 Plat.. De rep., lib. II, Oper., t. VI, p. 247-250.

4 Plutarch., De superstit.

5 Dionys. Halicarn., lib. II, p. 90 et seq.

6 Hist. nat., lib. II, cap. vu.

7 Senec. ap. August. De civit. Dei, lib. VI. cap. x.

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