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« chacun d'eux possédoit... Le juste ne diffère point du « juste, qu'il soit Grec, ou qu'il ait vécu sous la loi; car « Dieu est le Seigneur non-seulement des Juifs, mais de « tous les hommes, quoiqu'il soit plus près, comme père, « de ceux qui ont connu davantage. Si c'est vivre selon la « loi que de bienvivre, ceux qui, avantlaloi, ontbien vécu, « sont réputés enfants de la foi, et reconnus pour justes*. »

Dans sa seconde apologie, publiée vers le milieu du second siècle, saint Justin tient le même langage. « Sous « prétexte, dit-il, que Jésus-Christ, né sous Quirinus, n'a « commencé que sous Ponce-Pilate à enseigner sa doc« trine, on prétendra peut-être justifier tous les hommes « qui ont vécu dans les temps antérieurs. Mais la Religion « nous apprend que Jésus-Christ est le Fils unique, le pre« mier-né de Dieu, et, comme nous l'avons déjà dit, la sou« veraine raison, dont tout le genre humain participe.Tous « ceux donc qui ont vécu conformément à cette raison, « sont chrétiens, quoiqu'on les accusât d'être athées. Tels « étoient chez les Grecs Socrate, Héraclite * et ceux qui « leur ressembloient; et parmi les Barbares, Abraham, « Ananias, Azarias, Misaël, Élie, et beaucoup d'autres dont « il seroit trop long de rapporter les noms et les actions. « Au contraire, ceux d'entre les anciens qui n'ont pas ré« glé leur vie sur les enseignements du Verbe et de la rai« son éternelle étoient ennemis de Jésus-Christ, et meur« triers de ceux qui vivoient selon la raison. Mais tous les « hommes qui ont vécu ou qui vivent selon la raison sont « véritablement chrétiens, et à l'abri de toute crainte !. » SaintJeanChrysostome, umsigrand docteur, nes'exprime pas avec moins de force. Après avoir parlé de la nécessité de confesser Jésus-Christ : « Quoi donc ! ajoute-t-il, Dieu « est-il injuste envers ceux qui ont vécu avant son avéne« ment? Non sans doute; carils pouvoient être sauvés sans « confesser Jésus-Christ. On n'exigeoit pas d'eux cette con« fession, mais la connoissance du vrai Dieu, et de ne pas « rendre de culte aux idoles; parce qu'il est écrit : Le Sei« gneur ton Dieu est l'unique Seigneur"... Alors donc, « comme je viens de le dire, il suffisoit pour le salut de « connoître seulement Dieu ; maintenant ce n'est pas assez ; « il faut connoître encore Jésus-Christ... Il en est ainsi « pour ce qui regarde la conduite de la vie. Alors le meurtre « perdoit l'homicide; aujourd'hui la colère mème est dé« fendue. Alors l'adultère attiroit le supplice; aujourd'hui « les regards impudiques produisent le même effet. » Enfin, conclut saint Chrysostome, « ceux qui, sans avoir « connu Jésus-Christ avant son incarnation, se sont abste« nus du culte des idoles, ont adoré le seul vrai Dieu, et « mené une vie sainte, jouissent du souverain bien, selon « ce que dit l'Apôtre : Gloire, honneur et paix à tous ceux « qui ont fait le bien, soit Juifs, soit gentils *. »

* Quis sanae mentis, et justorum et peccatorum animas esse existimaverit in unâ condemnatione, injustitiae maculam inurens Providentiae?... Hoc divinum decebat consilium et Providentiam, ut qui in justitiâ majorem habuere dignitatem et merita, et prœ caeteris egregiè vixerunt, et eorum quae peccârunt ducti sunt pœnitentiâ, etiamsi sint in alio loco, cùm extra controversiam sint in eorum numero qui sunt Dei omnipotentis, salvi fierint per propriam unmuscujusque cognitionem... Justus non differt à justo, sive is fuerit ex lege, sive Grœcus : non enim Judaeorum solùm, sed etiam omnium est Deus Dominus, propinquiùs autem pater eorum qui cognoverunt. Si enim honestè vivere, et vitam agere rationi consentaneam, est vivere ex lege, qui autem rectè vixerunt antè legem, in fidem sunt reputati, et justi suntjudicati. Clement. Alexandr., Stromat., lib. VI, p. 657, 658 et 659. Ed. Paris, 1641.

* Saint Justin suppose que ces philosophes n'ont point pris part à l'idolâtrie, et ont observé exactement les lois de la religion primitive, ce qui est au moins douteux. Mais la question générale est indépendante de ce fait particulier, Au reste, il est certain que Socrate enseignoit l'unité de Dieu, et Platon nous apprend sur sa mort des particularités que peut-être n'a-t-on pas assez remarquées. « Ceux, dit-il, « qui avoient dans ce temps-là l'administration de la république commirent beaucoup d'iniquités; ils ordonnèrent à mon ami Socrate, déjà avancé en âge, et je ne crains point de le dire, le plus juste des hommes qni vivoient alors; ils lui ordonnèrent, dis-je, et à quelques autres, de leur amener un citoyen qu'ils vouloient mettre à mort, afin de rendre Socrate, ou volontairement ou malgré lui, complice de leur injustice ; mais il refusa de leur obéir, et il résolut de tout souffrir plutôt que de participer aux crimes de ces impies... Ils l'accusèrent ensuite lui-même d'impiété, de tous les crimes celui dont il étoit le plus éloigné, et ils condamnèrent au dernier supplice l'homme qui, pour ne pas commettre un acte impie, ou s'en rendre complice en aucune manière, n'avoit point voulu leur livrer un de ceux qui étoient alors exilés. » Ep. VII, Oper., t. XI, p. 94 et 95. Ed. Bipont. * Ne qui vero prœter rationem, ad eorum quae nos edocti sumus eversionem dicant, ante annos centum quinquaginta nos asseverare Christum sub Cyrenio natum esse; docuisse autem quae docuit posteriùs sub Pontio Pilato : et proindè noxâ solutos atque insontes esse. per appellationem allegent, qui ante ea tempora extitere mortales ommes : quaestionem eam anticipanter solvemus. Christum primogenitum Dei esse instituti sumus, et rationem atque Verbum esse; cujus universum hominum genus est particeps, anteà ostendimus. Et quicumque cum ratione et Verbo vixere, christiani sunt, quamvis 30eot et nullius numinis cultores habiti sint. Quales inter Graecos fuere Socrates, Heraclitus, atque iis similes : inter barbaros autem Abraham, et Ananias, et Azarias, et Misael, et Elias, et alii complures; quorum facta simul et nomina in praesentiâ recensere, quia longum esse scimus, supersedemus. Perindè atque ex veteribus, qui itidem tempore Christum prœ

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cessêre, et absque ratione ac Verbo aetatem exegêre, inimici Christo fuerunt, eorumque qui secundum rationem et Verbum vixerunt percussores. At qui cum Verbo et ratione vixerunt, atque etiam nunc vivunt, christiani, et extra metum atque perturbationem omnem sunt. S. Justin. Apolog., II, p. 85. Ed. Paris, 1516.

* Deuteron., vI, 4.

* Quid ergo, injustè me agitur cum iis qui ante adventum ejus vixerunt? Nequaquam ; poterant enim nec Christum confessi salutem consequi. Non enim hoc ab illis exigebatur, sed ne idola colerent, et ut verum Deum noscent. Dominus enim, inquit, Deus tuus, Dominus unus est... Tunc enim ad salutem sufficiebat, ut dixi, Deum tantùm cognoscere, nunc vero id satis non est, sed Christum nosse oportet.... Sic et de vitae instituto putandum. Tùm caedes homicidam perdebat; nunc vel

Il n'en est pas moins certain, nous le répétons, que jamais les hommes n'ont pu être sauvés que par la foi, au moins implicite, en Jésus-Christ, comme saint Irénée ledé

irnsci vetitum est. Tune maechari et cmn aliena muliere commisccri supplicium affcrebat, nuncaulem impudicis oculis respicere idem affcrt. Qnod enim ii qui Cbristum non noverunt ante carnalem adventum, et qui ab idololatrià resilientes Deum unum adorârunt, et, probam duxerc vitam, omnia bona cnnsecuturi sint, audi quomodo dieat : Gloria oiitem, honor etpax, omni operanti bonmn, Jutlseo primum et gentili. S. Joan. Chrysoslom., Homil XXXVI. al. XXXVll. inMat.oper., t. VII, p. 411 et 412. Edit. Benedicl. Sixte de Sienne explique très-bien ce passage, qu'on doit entendre, ainsi que les autres que nous avons cités, selon la doctrine commune des Pères et des théologiens. « Je croirois, dit-il, « que saint Chrysostome n'a voulu parler que de cette foi et de cette '< connoissance que les scholastiques appellent explicite, c'est-à-dire, « une connoissance claire et distincte de tous les mystères de Jésus« Christ en particulier, que tous les justes n'ont pas eue avant la vea nue de Jésus-Christ; car il suffisoit aux Juifs simples et moins éclai« rés d'avoir une connoissance générale de la rédemption du genre « humain, et voilée sous les significations des sacrifices et des cérémo« nies : et à l'égard des Gentils, si quelqu'un a obtenu le salut sans la « connoissance du Médiateur, il leur a suffi d'avoir cette foi renfermée « dans la foi en Dieu, c'est-à-dire, de croire que Dieu seroit le sauveur n du genre humain, selon l'ordre secret de la Providence révélé à quel« ques personnes inspirées de Dieu, et aux Sibylles par un privilège « particulier. » Biblioth., sancta, lib VI, annotat.IA, p. 400. Colon ire, 1576. On voit que Sixte de Sienne s'exprime dans les mêmes termes que saint Thomas, dont le sentiment sur ce sujet est entièrement conforme à celui de saint Bernard. « Comme plusieurs chrétiens, dit ce « Père, croient et espèrent la vie éternelle, et la désirent avec ardeur « sans en connoître la manière ni l'état, de même plusieurs, avant la ( venue de Jésus-Christ, croyant Dieu tout-puissant, aimant celui qui « leur avoit promis leur salut, le croyant fidèle dans ses promesses, « espérant qu'il seroit leur rédempteur, ont été sauvés dans cette foi « et dans cette attente quoiqu'ils n'aient pas su quand, ni de quelle mn« nière le. salut qui leur avoit été promis leur arriveroit. » Quanti hoilieque profecto in populo christiano vitx xternst saeculique futuri, quod indubitanter credunt, et sperant, el ardenter desiderant, formant tamen ac statum ne cogitare quidem vel tenuiter nôrunt? Ita ergo multi ante Salvatorix adventum, Deum omnipotentem timentes

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claroit expressément " avec toute l'Église, vers le milieu du deuxième siècle, en ajoutant que « notre foi étoit pré« figurée par les patriarches et les prophètes, qui avoient « répandu par toute la terre la connoissance de l'avéne« ment futur du Fils de Dieu *. » Ce qui n'empêche pas le même Père d'enseigner qu'avant la venue du Sauveur, « il « suffisoit pour le salut d'observer les préceptes naturels « que Dieu avoit donnés dès le commencement au genre « humain, et qui sont contenus dans le Décalogue *. »

et diligentes suæ salutis gratuitum promissorem, credentés in promissione fidelem, sperantes certissimum redemptorem, in hâc fide et exspectatione salvati sunt, licet quando, et qualiter, et quo ordine salus repromissa fieret, ignorarent. Tract. de bapt. qui olim erat. Epist. LXXVII, cap. III. Le vénérable Bède, cité par saint Bernard (eod. loc.), établit la même doctrine, et le Maître des sentences l'enseigne également. « Comme dans l'Église, dit-il, quelques personnes « peu éclairées, ne pouvant distinguer ni expliquer clairement les ar« ticles de foi, croient cependant tout ce qui est contenu dans le sym« bole, ajoutant ainsi foi aux choses même qu'ils ignorent, et ayant une « foi voilée et obscure; de même en ce temps-là, ceux qui étoient le « moins éclairés adhéroient à la révélation qui avoit été faite à leurs « ancêtres (ou aux principaux d'entre eux, comme traduit Arnauld), « et s'en rapportoient à eux pour leurs croyances. » Ità et tunc minùs capaces ex revelatione sibi factâ, majoribus credendo inhaerebant, quibus fidem suam quasi committebant. Magist. sentent., lib. III, distinct. 25. Il résulte de ces divers passages, qu'avant Jésus-Christ comme après sa venue, les degrés de connoissance varient, la foi demeurant toujours la même; et que cette foi suffit au salut, lorsqu'elle renferme une parfaite soumission à l'autorité qu'on doit croire : Majoribus credendo inhaerebant. Credentes... secundum quod aliquibus veritatem cognoscentibus, Spiritus revelâsset. * Sanctus Iren., contr. Haeres...lib. IV, cap. xxII, p.259. Edit. Benedict. * Manifestum est, quia Patriarchae et Prophetae, qui etiam præfiguraverunt nostram fidem, et disseminaverunt in terrâ adventum filii Dei, quis et qualis erit : uti qui posteriores erant futuri homines, habentes timorem Dei, facilè susceperunt adventum Christi, instructi à Prophetis. Id., ibid., cap. xxIII. * Deus primo quidem per naturalia praecepta, quae ab initio infixa

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