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sans cesse? Croyez. Le salut qu'il annonce n'est pas promis aux efforts de la raison, mais à l'obéissance de la volonté ; il appartient à ceux qui croiront1. Estce dans l'enfance que se trouve la perfection du raisonnement? Et néanmoins, si vous ne vous convertissez, et ne devenez comme des petits enfants, vous n'entrerez point dans le royaume des deux*.

Quelle profondeur dans cette parole, également vraie, soit qu'on l'applique à la société éternelle, ou aux sociétés du temps! Voulez-vous soumettre au raisonnement de l'homme individuel les devoirs de la morale, les lois politiques et civiles, les procédés des sciences, des arts et des métiers, l'agriculture, la navigation, les règles de l'hygiène, le choix des aliments, de sorte que chacun ne croie que ce qu'il comprendra clairement, et, sans rien admettre sur le témoignage, sans jamais déférer à l'autorité, n'agisse que sur ce qui sera évident pour son esprit : à l'instant un désordre effroyable commence, la société tombe dans le chaos, la lumière qui l'éclairoit se relire; chacun de ses membres, isolé de tous les autres, cherche en vain, dans les ténèbres de son entendement, les vérités nécessaires à sa conservation, les lois de son existence: dès lors plus d'action possible; le mouvement cesse avec la foi; et, dans un vaste silence, tout s'afloiblit, tout s'éteint : et il n'est pas non plus un législateur de la terre qui ne puisse

1 Qui crediderit, et baptizatus fuerit, salvus crit : qui verô non crediderit, condemnabilur. Marc., xvi, 16.

a Amen dico vobis, nisi conversi fueritis, et efDciamini siciit parvuli, non intrabitis in regnum cœlorum. Matt.. xvm, 3.

et ne doive dire aux hommes, en les rappelant à la vie sociale: Si vous ne devenez comme des petits enfants, qui croient sans comprendre et sans raisonner, ce que l'autorité générale atteste, vous n'entrerez point dans mon royaume.

Se défier de soi, de sa raison, n'est-ce pas le principe de toute sagesse dans les jugements comme dans la conduite? Et admirez l'analogie des vérités diverses qu'enseigne le christianisme, l'accord de ses dogmes avec ses préceptes. Que recommande-t-il davantage que le détachement de soi-même, le renoncement à son propre esprit, pour se pénétrer de l'esprit de Dieu, qui renferme toute vérité? Ainsi, plus la raison se méprise elle-même, plus elle se soumet, plus elle obéit, plus aussi la vérité lui est manifestée, plus Dieu s'approche d'elle et s'unit à elle : et les communications du Créateur avec sa créature, les avertissements célestes, les révélations qui transportent l'àmc dans un ordre de connoissances supérieures à celles de la vie présente, sont toujours accordés à la foi la plus simple ou à la plus grande humilité.

La mort même n'interrompt point cette loi divine, immuable, et nous la retrouverons au delà du tombeau. A qui est réservé, dans le ciel, le plus haut degré de gloire ou la plus parfaite connoissance de Dieu? Est-ce à l'esprit qui a le mieux compris les vérités chrétiennes, qui en a le mieux vu l'enchaînement, le mieux embrassé l'ensemble? Non, mais à l'àmc qui a le plus aimé, parce qu'elle s'est le plus détachée d'elle-même, et qu'elle a cru avec une soumission plus humble : et soit que la vérité se manifeste immédiatement, soit qu'elle se révèle par la voix d'une autorité intermédiaire, toujours elle est le prix de la foi, et proportionnée à la foi dans son étendue, et à l'autorité dans sa certitude.

En vain l'on objecteroit l'existence du paganisme pour montrer que la raison générale peut errer. Nous prouverons, dans un troisième volume, que tout ce qu'il y avoit de général dans le paganisme étoit vrai, que tout ce qu'il y avoit de faux n'était que des superstitions locales ou des erreurs de la raison particulière, et nous ferons voir, déplus, qu'on connoissoit parfaitement le moyen de discerner ces erreurs des vérités primitives, et qu'en tout ce qui concerne les croyances nécessaires et les devoirs de l'homme, l'autorité du genre humain étoit reconnue pour l'unique règle de foi ou de certitude, comme les catholiques i econnoissent l'autorité de l'Église pour l'unique règle de certitude et de foi.

Nous supplions nos frères séparés, à quelque secle qu'ils appartiennent, de méditer sérieusement ces réflexions, et de se demander si leur culte. selon l'expression de l'Apôtre, est raisonnable1, c'est-à-dire, s'il est fondé sur la plus haute raison, sur la raison générale manifestée par le témoignage de l'Église? Que s'il ne repose, au contraire, que sur leur jugement particulier ou sur leur raison individuelle, comment s'assureront-ils qu'il est véritable? Comment feront-ils un acte de foi parfait, un acte de foi divine?

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Le catholique, dont la foi repose sur l'autorité de l'Église, qui n'est que l'autorité de Dieu même, commence son symbole en disant : Je crois en Dieu; mais le protestant, qui n'admet aucune autorité visible, doit nécessairement commencer le sien en disant: Je crois en moi.

11 ne lui sert de rien de prétendre qu'il admet l'autorité de Jésus-Christ et de sa parole contenue dans l'Ecriture; car, comment sait-il avec certitude que l'Ecriture contient réellement la parole de JésusChrist? Comment connoît-il l'existence de JésusChrist lui-même? N'est-il pas l'unique juge de ces questions comme des autres? Avant donc de dire: Je crois en Jésus-Christ, il faut toujours qu'il dise: Je crois en moi; et sa foi, pour être certaine, présuppose son infaillibilité personnelle, c'est-à-dire la plus palpable et la plus monstrueuse absurdité. .

En effet, sur quoi reposent les croyances des protestants? Quelle en est la règle? La raison de chacun. C'est leur principe fondamental, l'unique point sur lequel ils s'accordent entre eux. « Un chrétien raison« nable (ainsi parle un de leurs ministres) doit tout « soumettre à l'examen, et n'admettre que ce qu'il a « reconnu bon et raisonnable1. » C'est-à-dire, qu'un chrétien raisonnable doit, en ce qui concerne la Religion, agir d'après une règle qui, s'il vouloit l'appliquer à la conduite entière de sa vie, seroit le comble de la déraison, puisque l'homme, pour se conserver,

1 Examen de la lettre de M. de Haller à sa famille, concernant son changement rte religion; parle professeurKrng, rte Leipzig, traduit de l'allemand, p. 27. Genève, 1821.

ou pour agir raisonnablement, est à lout instant forcé de croire, sans examiner, au témoignage des autres hommes; et si, par une folie heureusement impossible , chacun d'eux s'obslinoit à tout soumettre à l'examen, et à n'admettre que ce qu'il auroit reconnu bon et raisonnable, la société se dissoudroit, et le genre humain périrait en fort peu de temps.

Mais enfin cette raison, seul juge de tous les devoirs de l'homme, de ce qu'il doit croire, aimer, pratiquer, est-elle infaillible dans ses décisions? Peutelle, ou non, se tromper quand elle affirme que tel dogme ou tel précepte est bon et raisonnable?

Si on la suppose infaillible, comme il n'est rien de plus divers, de plus opposé que ses jugements, que ce qui semble bon et raisonnable à une raison paraît mauvais et déraisonnable à une autre raison qui doit être également infaillible, il s'ensuit qu'en Religion et en morale, tout est vrai et tout est faux, ou, en d'autres termes, qu'il n'existe ni vérité, ni erreur, ni lois, ni devoirs envers Dieu ni envers les hommes.

Si la raison n'est pas infaillible, si elle peut se tromper, jamais elle ne sera certaine qu'elle ne se trompe point. Les croyances dès lors deviennent de pures opinions ; les opinions de simples doutes, la religion et la morale un grand problème éternellement insoluble. Au milieu de ces ténèbres où la foi s'évanouit, quoi deplus absurde que de prescrire aux autres, ou de se prescrire à soi-même une confession de foi invariable, un symbole? Qui peut dire si ce qui lui paroît aujourd'hui bon et raisonnable, le lui paroî

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