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ira demain? Et qu'est-ce d'ailleurs qu'un symbole qui n'obligeroit point l'esprit. qu'on pourrait modifier, admettre ou rejeter à son gré, un symbole dont chaque article ne seroit pas une vérité certaine, une vérité-loi, mais un doute? On renoncera donc à tout symbole, comme un ministre de Genève y invite les protestants1; et, fidèles à leurs principes, les chrétiens raisonnables n'oseront imposera qui que ce soit l'obi igation de prononcer cette parole : Je crois en Dieu!

Voilà où il en faut venir nécessairement quand on ne reconnoit point d'autorité qui ait le droit de commander la foi. En défendant l'autorité, et non-seulement celle de l'Église, mais encore celle du genre humain; en prouvant que la certitude n'a point d'autre base, nous avons donc défendu tout ensemble et la religion et la morale, toutes les lois et tous les devoirs, et la société humaine aussi bien que la société divine.

Au reste, dans un sujet si grave, ce que nous de

* Coup d'oeil sur les Confessions de foi, par J. Heyer, pasteur à Genève, 1818. — Rousseau avait déjà prouvé qu'un symbole était une contradiction dans la Réforme. « L'Église de Genève, disoit-il, n'a donc « et ne doit avoir, comme réformée, aucune profession de foi précise, « articulée, et commune à tous ses membres. Si l'on vouloit en avoir « une, en cela même on blesserait la liberté évangélique, on renon« ceroitau principe de la réformation; on violerait la loi de l'État.Toutes « les Églises protestantes qui ont dressé des formules de profession de « foi, tous les synodes qui ont déterminé des points de doctrine, n'ont « voulu que prescrire aux pas-leurs celle qu'ils devoient enseigner, et « cela étoit bon et convenable. Mais si ces Églises et ces synodes ont ,k prétendu faire plus par ces formules, et prescrire aux fidèles ce « qu'ils devoient croire; alors, par de telles décisions, ces assemblées « n'ont prouvé autre chose, sinon qu'elles ignoraient leur propre Rc■ ligion. » lettres écrites de la Montagne, p. 6i, 65. Paris, 1793.

mandons surtout, c'est de l'attention et de la bonne toi. Certes, il est étrange qu'il soit nécessaire d'engager les hommes à être attentifs, quand il s'agit d'euxmêmes et de leur premier intérêt : et cependant nous ne nous flattons pas de l'obtenir du plus grand nombre. Les préjugés, l'entraînement, les distractions, il n'en faut pas tant à un être d'un jour pour qu'il refuse d'examiner ce qui, après tout, n'est qu'éternel. Espérons pourtant qu'au moins quelques-uns comprendront l'importance d'un pareil examen, et l'entreprendront avec les dispositions du cœur qui peuvent le leur rendre utile. Nous vivons dans un temps où tout porte à la réflexion les esprits sérieux. Tout passe, tout s'en va, la terre fuit sous nos pieds : c'est, ce semble, ou jamais, le moment de s'informer s'il y a pour nous une autre demeure.

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ESSAI

SUR L'INDIFFÉRENCE

EN MATIÈRE DE RELIGION

TROISIÈME PARTIE

MOYEN GÉNÉRAL DONNÉ AUX HOMMES POUR DISCERNER LA VRAIE RELIGION

CHAPITRE PREMIER

Dl! FONDEMENT I>E LA CERTITUDE

Rien ne subsiste que par la vérité, car la vérité est l'être, et hors d'elle il n'y a que le néant. Le désir de connoître, inné dans l'homme, n'est que le désir même d'exister, et comme l'effort naturel de l'intelligence vers la vie. De là cette ardente recherche du vrai, et cette joie vive et pure que nous éprouvons à sa vue. Ce sentiment a des racines si profondes en nous, que rien ne le peut détruire, pas même la passion dépravée de l'erreur. On ne hait la vérité, et l'on n'aime l'erreur, que lorsqu'à force de travail, on est parvenu à se représenter l'erreur comme vraie, et la vérité comme fausse; que lorsqu'on a, pour ainsi dire, recouvert le néant d'un vain simulacre de l'être, comme on entoure un cercueil d'images de la vie, et d'emblèmes d'immortalité.

Cependant, quand nous venons à porter la main sur l'édifice de nos connoissances, à en sonder curieusement la base, nous ne trouvons que des abîmes, et le doute ténébreux sort des fondements de l'édifice ébranlé. L'homme ne peut, par ses seules forces, s'assurer pleinement d'aucune vérité, parce qu'il ne peut, par ses seules forces, se donner ni se conserver l'être. Il ne voit, dit Montaigne, le tout de rien; et voilà pourquoi la philosophie, qui veut tout voir et tout comprendre, la philosophie qui rend la raison de chaque homme seul juge de ce qu'il doit croire, aboutit au scepticisme universel *, ou à la destruction absolue de la vérité et de l'intelligence.

Nul moyen d'éviter cet écueil, dès qu'on cherche en soi la certitude; et c'est ce qu'il faut montrer à l'homme pour humilier sa confiance superbe : il faut le pousser jusqu'au néant, pour l'épouvanter de lui-même; il faut lui faire voir qu'il ne sauroit se prouver sa propre existence, comme il veut qu'on lui prouve celle de Dieu; il faut désespérer toutes ses croyances, même les plus invincibles, et placer sa raison aux abois, dans l'alternative, ou de vivre de foi, ou d'expirer dans le vide.

Mais ôtons d'abord l'équivoque de ce mot de raison, par lequel on désigne deux facultés totalement distinctes,

"C'est ce que nous avons déjà prouvé par le l'ait, en montrant que l'hérétique le déiste et l'athée, partant tous du principe de la souveraineté de la raison individuelle, ou n'admettant comme vrai (toute foi et toute autorité mise à part) que ce qui est clair, évident, démontré à leur raison, sont inévitablement conduits, d'erreurs en erreurs, au doute absolu.

et qu'il est dangereux de confondre : la faculté de connoitre, et la faculté de raisonner. La raison, dans le premier sens, est le fonds même de notre nature intelligente. Être intelligent ou raisonnable, c'est être capable de percevoir la vérité *; et l'homme a plus ou moins de raison, ou sa raison est plus ou moins éclairée, plus ou moins étendue, selon qu'elle renferme plus ou moins de vérité. 11 n'importe comment nous parvenions à la connoitre, pourvu que nous soyons certains de la posséder. La certitude est la base essentielle de la raison : car être incertain si l'on connoit, c'est ne pas connoître ; le doute n'est qu'une ignorance aperçue. D'un autre côté, l'on peut avoir une idée très-nette d'une vérité sans la comprendre: ainsi, comprendre n'est point une condition nécessaire de la raison. En effet, nous connoissons avec certitude certaines vérités que nous ne comprenons nullement, comme l'action de la volonté sur les organes, la transmission du mouvement, et mille autres phénomènes semblables; et quiconque a réfléchi sur l'entendement humain, avouera sans hésiter que nous ne concevons rien parfaitement.

La raison, dans le second sens, est l'opération de l'esprit par laquelle, comparant des vérités connues, nous en découvrons les rapports, et nous en tirons des conséquences. Ainsi, quand nous disons que la raison nous trompe, lorsque nous déplorons sa foiblesse et ses erreurs, cela ne doit pas s'entendre de la faculté de connoître, ou de la raison proprement dite, mais de la faculté deraisonner : facultés si différentes, que la perfection de la raison, ou la connoissance complète de la vérité, exclut le raisonnement; car raisonner, c'est chercher ; et l'on ne

"Tcrtullien ne défmit pas autrement l'homme : Animal rationale. sensùs et scientix capacissimum. De Testim. animso, c. i.

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